Article additionnel après l'article 54
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2007
Article 56

Article 55

Dans la seconde phrase du deuxième alinéa de l'article L. 524-1 du code de la sécurité sociale, les mots : « de la base mensuelle de calcul visée à l'article L. 551-1, variable selon le nombre d'enfants à charge » sont remplacés par les mots : « du montant du revenu minimum d'insertion mentionné à l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles ».

Mme la présidente. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° II-233 est présenté par Mmes Le Texier et Printz, MM. Michel et Godefroy, Mmes Schillinger, San Vicente - Baudrin, Demontès et Jarraud - Vergnolle, MM. Domeizel, Madec et les membres du groupe socialiste et apparentés.

L'amendement n° II-259 est présenté par MM. Fischer, Autain et Muzeau, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Raymonde Le Texier, pour présenter l'amendement n° II - 233.

Mme Raymonde Le Texier. L'article 55 prévoit un alignement du forfait logement de l'allocation de parent isolé, l'API, sur le RMI. Nous y sommes opposés pour deux raisons.

La première raison est que nous voulons préserver le caractère familial de l'API. Il ne nous semble pas indispensable, sous prétexte que le Gouvernement souhaite faire des économies budgétaires, de s'attaquer prioritairement aux allocataires de l'API et à leurs enfants.

La deuxième raison est que le Gouvernement, une fois de plus, met la charrue avant les boeufs.

Un audit sur la modernisation de l'API a été engagé cette année, au mois de juin, à l'Assemblée nationale. Au Sénat, nous avons pris connaissance, voilà plusieurs mois, des rapports très intéressants - quel que soit l'avis que l'on peut avoir sur leurs conclusions - de nos collègues Michel Mercier et Henri de Raincourt, d'une part, et Valérie Létard, d'autre part. Ces rapports méritent un débat approfondi. Or nous ne l'avons toujours pas eu en séance publique.

Si une réforme de l'architecture des minima sociaux doit intervenir, elle doit se faire dans la clarté. Les publics concernés étant des personnes fragiles, tous les éléments de ce dossier, qu'il s'agisse des aspects sociaux, mais aussi d'accompagnement et d'insertion, doivent être étudiés avec d'autant plus d'attention.

Tel n'est pas le chemin que prennent le Gouvernement et l'actuelle majorité. En effet, ils avancent subrepticement vers la fusion du RMI et de l'API, sans que cela soit dit clairement.

Nous sommes opposés à cette démarche, qui n'est pas conforme aux principes de dialogue mis en avant, par ailleurs, par le Gouvernement.

Mme la présidente. La parole est à M. Guy Fischer, pour présenter l'amendement n° II - 259.

M. Guy Fischer. Madame la présidente, je présenterai en même temps l'amendement n° II - 260, qui vise à supprimer l'article suivant.

Les articles 55 et 56 concernent tous deux les minima sociaux.

Ils me rappellent un appel téléphonique que j'ai reçu du Premier ministre pendant les vacances, alors que j'étais parti en randonnée - c'était le 23 août 2005 -, me demandant de participer le jour même à une réunion à Matignon. (M. Jean-Pierre Godefroy acquiesce.) Il s'agissait de faire évoluer les minima sociaux. Seule Valérie Létard, qui avait déposé un rapport d'information sur le sujet, s'y est rendue. Depuis, Michel Mercier et Henri de Raincourt ont également remis un rapport sur ce thème.

Comme Mme Raymonde Le Texier, j'estime que ces articles 55 et 56 participent d'une volonté gouvernementale de parvenir à une fusion des minima sociaux, notamment le RMI et l'allocation de parent isolé, l'API, qui sont les plus importants, tant par leur volume que par leur montant.

C'est également ce qui me semble ressortir de la proposition de loi déposée par notre collègue Valérie Létard, à la suite des travaux de notre groupe de travail sur les minima sociaux.

Même si notre collègue part d'un constat réel, selon lequel notre système de solidarité est complexe et parfois producteur d'incohérences, je ne puis m'empêcher de penser que les dispositions contenues dans cette proposition de loi serviront à aller vers l'uniformisation des droits connexes et, dans une certaine mesure, des critères d'attribution des minima sociaux. Pour mon groupe, la mise en place d'une allocation unique serait clairement un moyen de réduire à sa portion congrue les interventions sociales de l'État.

C'est précisément cette disposition qu'introduit l'article 55 relatif à la mission que nous examinons. Il n'est pas acceptable d'aligner le montant du forfait logement applicable aux allocataires de l'API sur celui qui est prévu pour les titulaires du RMI, dont le montant est inférieur, ce qui pénalise les familles bénéficiaires de l'API.

Et c'est ainsi que, par le biais de deux articles, le tour est joué !

L'article 56 introduit le principe de subsidiarité pour le calcul des droits de l'API. En effet, d'une part, il modifie substantiellement les conditions d'attribution de l'API ; d'autre part, il institue un transfert de charges entre l'État, financeur de l'API, et la branche famille, qui assume notamment la charge de l'allocation de soutien familial.

C'est pourquoi nous invitons le Sénat à adopter ces amendements tendant à supprimer les articles 55 et 56.

Plus largement, j'estime qu'il serait profondément réducteur de considérer les minima sociaux et leurs droits connexes sous l'angle exclusif du revenu, alors que, jusqu'à présent, ce critère a toujours été complété par la prise en compte du statut, afin de respecter les spécificités de chaque public concerné par les minima sociaux.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Philippe Bas, ministre délégué. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-233 et II-259.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. Guy Fischer. Les pauvres se rappelleront ce mauvais tour !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 55.

M. Guy Fischer. Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.

(L'article 55 est adopté.)

Article 55
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2007
Médias - Compte de concours financiers : Avances à l'audiovisuel public

Article 56

I. - L'article L. 524-4 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :

« Art. L. 524-4. - La personne à laquelle est versée l'allocation de parent isolé est tenue de faire valoir ses droits aux prestations sociales légales, réglementaires et conventionnelles, à l'exception des allocations mensuelles mentionnées à l'article L. 222-3 du code de l'action sociale et des familles et de l'allocation de revenu minimum d'insertion mentionnée à l'article L. 262-1 du même code.

« Elle doit également faire valoir ses droits aux créances d'aliments qui lui sont dues au titre des obligations instituées par les articles 212, 214, 255 et 342 du code civil ainsi qu'à la prestation compensatoire due au titre de l'article 270 du même code.

« L'organisme débiteur assiste l'allocataire dans les démarches rendues nécessaires pour la réalisation des conditions mentionnées aux premier et troisième alinéas.

« Lorsque l'allocataire a fait valoir les droits mentionnés au présent article, l'organisme débiteur de l'allocation est subrogé dans les créances de l'allocataire vis-à-vis des débiteurs de ces droits, dans la limite des montants versés au titre de l'allocation de parent isolé.

« La personne à laquelle est versée l'allocation peut demander à être dispensée de faire valoir les droits mentionnés au deuxième alinéa. L'organisme débiteur des prestations familiales statue sur cette demande en tenant compte de la situation du débiteur défaillant.

« En cas de non-respect des obligations mentionnées aux premier et deuxième alinéas, ou lorsque la demande de dispense est rejetée, le directeur de l'organisme débiteur met en demeure l'intéressé de faire valoir ses droits ou de justifier des raisons pour lesquelles il ne le fait pas. Si, malgré cette mise en demeure, l'intéressé s'abstient de faire valoir ses droits ou si une dispense ne lui est pas accordée au vu des justifications qu'il a présentées, l'allocation est réduite d'un montant au plus égal à celui de l'allocation de soutien familial mentionnée à l'article L. 523-1 due à un parent ayant un seul enfant.

« Les contestations relatives aux refus de dispense et à la réduction du montant de l'allocation sont portées devant la juridiction mentionnée à l'article L. 142-1.

« Un décret détermine le délai dont dispose l'allocataire pour faire valoir ses droits ainsi que les conditions de mise en oeuvre de la réduction de l'allocation. »

II. - Les dispositions du présent article sont applicables aux droits ouverts à l'allocation de parent isolé antérieurement au 1er janvier 2007 à compter du 1er mars 2007.

Mme la présidente. Je suis saisie de cinq amendements pouvant faire l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° II - 234 est présenté par Mmes Le Texier et Printz, MM. Michel et Godefroy, Mmes Schillinger, San Vicente - Baudrin, Demontès et Jarraud - Vergnolle, MM. Domeizel, Madec et les membres du groupe Socialiste et apparentés.

L'amendement n° II - 260 est présenté par MM. Fischer, Autain et Muzeau, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Raymonde Le Texier.

Mme Raymonde Le Texier. Quel que soit le bien-fondé, sur le plan des principes, de ce dispositif visant à mettre le père des enfants devant ses responsabilités et à éviter que des allocations ne soient versées à des personnes vivant en couple, il n'en demeure pas moins que son application risque de se révéler difficile.

Par ailleurs, nous n'avons pas connaissance du contenu des décrets, que ce soit celui qui est relatif au délai accordé à l'allocataire pour justifier de ses démarches à l'égard de son débiteur alimentaire ou celui portant sur les conditions dans lesquelles une dispense pourrait être accordée.

On nous demande donc de voter « à l'aveugle », toujours avec cet objectif de rapprocher l'API du RMI, pour découvrir finalement que les dispositifs sont tellement proches qu'il ne reste plus qu'à les fusionner.

C'est une vision purement administrative et financière, qui ne cadre pas avec la réalité sociologique. Par exemple, les obstacles à l'insertion rencontrés par une jeune mère célibataire devant faire garder ses enfants pour pouvoir travailler ou suivre une formation sont spécifiques et doivent être pris en compte. La réserve de places en crèches est, à cet égard, une mesure insuffisante, vous le savez aussi bien que moi.

Nous souhaitons donc qu'avant l'adoption de telles dispositions un débat de fond ait lieu et qu'une concertation soit menée avec les grandes associations et les mouvements de personnes précarisées.

Voilà pourquoi nous demandons la suppression de l'article 56.

Mme la présidente. L'amendement n° II - 260 a été défendu.

L'amendement n° II - 246, présenté par M. Murat et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Dans le deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 524-4 du code de la sécurité sociale, remplacer les mots :

articles 212, 214, 255 et 342 du code civil

par les mots :

articles 203, 212, 214, 255, 342 et 371-2 du code civil

La parole est à M. Bernard Murat.

M. Bernard Murat. Conformément au premier alinéa de l'article L.524-4 du code de la sécurité sociale, l'allocataire est obligé de faire valoir son droit à l'allocation de soutien familial. En conséquence, lorsque l'allocataire n'effectue pas de demande d'allocation de soutien familial, le directeur de l'organisme met en demeure l'intéressé de faire valoir son droit.

En revanche, si l'intéressé effectue une demande d'ASF, mais n'enclenche aucune démarche auprès du juge pour faire fixer une pension alimentaire, le directeur de l'organisme ne dispose d'aucun moyen juridique pour le mettre en demeure de faire valoir son droit à créance d'aliment due aux enfants, le texte ne visant que les créances alimentaires entre époux.

Le présent amendement vise donc à rendre possible cette mise en demeure lorsque l'allocataire ne fait pas valoir son droit aux créances alimentaires dues au titre des articles 203 et 371-2 du code civil visant les obligations des parents envers leurs enfants.

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° II - 32 est présenté par M. Cazalet, au nom de la commission des finances.

L'amendement n° II - 210 est présenté par M. P. Blanc, au nom de la commission des affaires sociales.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Dans le troisième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 524-4 du code de la sécurité sociale, remplacer le mot :

troisième

par le mot :

deuxième

La parole est à M. le rapporteur spécial, pour défendre l'amendement n° II - 32.

M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial. C'est un amendement rédactionnel.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° II - 210.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis. C'est, en effet, un amendement rédactionnel.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial. La commission émet un avis défavorable sur les amendements identiques nos II - 234 et II - 260 et un avis favorable sur l'amendement n° II - 246.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Philippe Bas, ministre délégué. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements identiques nos II - 234 et II - 260.

En revanche, il émet un avis favorable sur l'amendement n° II - 246, ainsi que sur les amendements identiques nos II - 32 et II - 210.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-234 et II-260.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-246.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-32 et II-210.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 56, modifié.

(L'article 56 est adopté.)

Mme la présidente. Nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Solidarité et intégration ».

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures cinquante-cinq, est reprise à dix-huit heures vingt.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Médias

Compte de concours financiers : Avances à l'audiovisuel public

Article 56
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2007
Article 63

Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits relatifs aux missions : « Médias » et compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public » (et articles 63 à 65).

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Claude Belot, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le ministre, le Sénat était impatient d'en découdre avec vous au sujet de l'audiovisuel.

Il s'avère que nous vivons une période un peu surprenante : d'un côté, on assiste à une accélération de l'évolution de la presse et surtout de l'audiovisuel et, de l'autre, tout est calme.

Je suis le rapporteur de ce budget depuis le siècle dernier (Sourires), ce qui me conduit à rencontrer de nombreuses personnes. Chaque année, elles viennent m'expliquer que rien ne va dans le budget. Or, depuis deux ou trois ans, je sens ces voix faiblir. Cette année, je les ai même très peu entendues. Ainsi, lorsque j'ai auditionné les responsables de l'audiovisuel public, je les ai trouvés extrêmement calmes et presque satisfaits. Peut-être M. le ministre est-il un artiste en déminage ou tout va-t-il bien ? Je ne sais pas !

Sur le plan financier, les crédits de la politique publique de communication sont regroupés dans deux missions. Cette présentation est conforme à la loi organique relative aux lois de finances, la LOLF, et aux voeux que le Sénat avait émis l'année dernière.

Les crédits de la mission « Médias » stricto sensu s'élèvent à 504 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement. Quant aux ressources de l'audiovisuel public financées par la redevance, elles atteignent 2,73 milliards d'euros, soit une hausse de 2,6 %.

Subsistent quand même quelques problèmes que je vais évoquer.

Concernant les aides à la presse, l'accord de juillet 2004 entre La Poste et l'État semble ne pas avoir été respecté, puisqu'il manque 4 millions d'euros.

Les aides directes à la presse, quant à elles, baissent de 3,7 %. Je suis allé voir d'un peu plus près ce qui s'était passé. En fait, il s'agit essentiellement d'une diminution de l'aide à la modernisation sociale de la presse quotidienne d'information politique et générale. Cela signifie que les mouvements sociaux que l'on redoutait n'ont pas eu lieu, ce qui est positif.

L'Agence France-presse, l'AFP, est confrontée à un problème récurrent. Elle amorce un retour vers l'équilibre, mais c'est à pas très comptés, et ce depuis longtemps. Il faudra bien un jour aborder ce sujet, mais ce n'est sans doute pas l'heure.

Monsieur le ministre, nous vivons ces temps-ci une grande première : le lancement de la chaîne française d'information internationale. C'est un grand moment de l'histoire de la télévision publique française. Reste qu'il va bien falloir adopter une position claire vis-à-vis de France 24. Cette chaîne pourra-t-elle oui ou non être captée en France, d'autant que ce ne sont pas les possibilités qui manquent avec la télévision numérique terrestre, la TNT, le câble ou le satellite ? Jusqu'à présent, il m'a été répondu que l'on attendait l'autorisation des services du ministère du budget et la fixation des conditions financières en cas de diffusion en France. Dès lors qu'elle perçoit des crédits budgétaires, je crois qu'il serait souhaitable qu'elle puisse être diffusée sur notre territoire.

Cela étant, il faut un peu relativiser les choses. Les crédits mis à sa disposition s'élèvent à 70 millions d'euros, auxquels s'ajouteront 16 millions d'euros de report, ce qui correspond à peu près à 10 % des moyens de BBC World, et ne parlons pas de ceux de CNN. Mais c'est un début, et il faudra que l'opération réussisse.

Il me semblerait souhaitable - cette opinion est partagée par beaucoup d'observateurs du monde audiovisuel - de mettre fin à la dispersion des crédits publics consacrés à l'audiovisuel extérieur. Magnifique mission s'il en est, elle est logiquement remplie par TV5. Mais beaucoup d'acteurs, comme Canal France International, Radio France Internationale ou RMC, interviennent sur le même terrain, et souvent sans se connaître. La synergie des moyens serait certainement profitable à la présence de la France dans ce domaine.

Il faudrait aussi totalement traiter le problème de RFI. Cette superbe entreprise, qui a bien sûr pour mission d'informer, participe également au rayonnement de la France sur tous les continents, notamment dans les parties du monde qui connaissent en ce moment des difficultés, comme l'Afrique et le Moyen-Orient.

Je sais que la gestion des crédits de RFI n'est pas de votre seul ressort, mais aussi de celui du ministère des affaires étrangères. Or ce dernier n'accomplit pas les efforts nécessaires. Il sera sans doute nécessaire un jour de mettre un terme à la double tutelle du ministère des affaires étrangères et du ministère de la culture. Celle-ci ne répond pas en effet à l'intérêt de RFI, et il faudrait impérativement lui donner les moyens de fonctionner.

Par ailleurs, le problème de la nécessaire mise en oeuvre des télévisions locales devra être traité. France 3, hélas pour nous tous, n'est pas une chaîne de proximité. Elle n'arrive pas à trouver sa place entre ses fonctions régionales et nationales. Il faudra bien parvenir à faire émerger ces télévisions locales, ces télévisions de proximité.

Une solution intermédiaire serait de permettre à France 3 de nouer des partenariats avec des collectivités locales. Elle n'a bien sûr pas pour vocation de faire la télévision de tel ou tel, mais cette solution lui permettrait d'obtenir des moyens.

Nous n'échapperons pas à la question qui se pose depuis quelque temps et qui va prendre une dimension nouvelle, je veux parler de l'ouverture le 1er janvier de la publicité télévisée à la grande distribution, qui dispose d'énormes moyens. Or les créneaux publicitaires disponibles, compte tenu de la règle qui a été fixée pour la télévision publique, sont extrêmement étroits et ne permettront pas à la télévision publique de bénéficier de moyens plus importants. Cela ne fera donc qu'augmenter les recettes des télévisions privées, en particulier de TF1 ou de M6.

Tels sont les quelques sujets que je voulais évoquer.

Cela dit, le budget de la télévision publique tient la route et ne devrait pas poser de problèmes d'exécution majeurs. Il y a, ici ou là, des accords entre les différents partenaires, des contrats d'objectifs et de moyens qui fonctionnent. La procédure a donc été excellente.

En conséquence, il est logique de proposer l'adoption du budget de l'audiovisuel public dans sa partie strictement budgétaire.

Pour ce qui est des avances sur la redevance audiovisuelle, le système fonctionne convenablement. Vous avez été obligé cette année, monsieur le ministre, d'ajouter des crédits budgétaires importants puisque le produit de la redevance ne s'est pas « dilaté » autant que vous l'aviez espéré l'année dernière.

Ce constat étant fait, vous avez augmenté la redevance due au titre des exonérations. De la sorte, les avances à l'audiovisuel public enregistreront cette année une hausse de 2,6 %. C'est la raison pour laquelle la commission des finances propose au Sénat de retenir ces propositions tant au titre du budget qu'au titre de la redevance pour l'audiovisuel public.

C'est donc une situation apaisée que nous connaissons actuellement. Elle va nous permettre de traverser une période de transition ardue, à l'heure où la révolution numérique et la mondialisation accélèrent le processus. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'interviendrai brièvement après la brillante intervention de M. le rapporteur spécial et je centrerai mes propos sur deux sujets qui tiennent à coeur à la commission des affaires culturelles, à savoir la situation de la presse et la situation de l'audiovisuel public.

En ce qui concerne la presse, mes chers collègues, je ne souhaite pas vous jouer tous les ans le mauvais film « Madame se meurt, Madame est morte ! ». J'exprimerai néanmoins sur la presse en général et sur la presse d'information générale et politique en particulier un sentiment d'inquiétude qui ne peut se satisfaire de phrases ou de périphrases puisqu'il s'agit d'un rouage essentiel de notre régime démocratique, aux côtés des autres formes d'expression.

Nous avons le sentiment, monsieur le ministre - je parle au nom de la commission des affaires culturelles et, je pense, au nom du Sénat tout entier - que le Gouvernement - vous, en particulier - a beaucoup fait en faveur des entreprises de presse. Pour avoir été rapporteur en ces matières depuis de très nombreuses années, je dirai même que jamais un gouvernement n'a autant fait.

En particulier, je salue le fait que la plupart des aides ont été réformées pour être rendues plus lisibles et plus efficaces ; je l'ai rappelé dans mon rapport.

En outre, de nouvelles aides ont été proposées pour répondre aux attentes de ce média déstabilisé par la désaffection de son lectorat, qui ne rajeunit pas et passe de moins en moins de temps à lire le journal, par le maintien d'un système de distribution inadapté et par la concurrence des parutions gratuites.

Monsieur le ministre, à l'heure où les jeunes générations sont intéressées par le « tout gratuit » pour l'information et la culture - musique, radio, presse -, le modèle économique et social de la presse d'information générale et politique payant doit être revu en urgence. La commission des affaires culturelles vous fera une proposition en ce sens.

Pour le moment, alors que le dispositif d'aide n'a jamais été aussi complet et performant, la presse française se fragilise.

Tous les ans, nous faisons ce tour d'horizon, un peu comme nous ferions le tour d'un cimetière. Il y a un an, il était question des difficultés de France Soir ; l'année précédente, il avait été question des difficultés de l'Humanité ; cette année, il est question des difficultés de Libération. Au passage, mes chers collègues, applaudissons ces capitalistes généreux qui investissent encore dans la presse écrite !

M. Claude Belot, rapporteur spécial. Sans aucune arrière-pensée ! (Sourires.)

M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis. Mes chers collègues, je crois que l'intervention de l'État en matière de presse a malheureusement atteint ses limites - je le dis avec gravité.

Chacun peut se réjouir des allégements fiscaux qui ont été adoptés dans la première partie du projet de loi de finances, car c'est une bonne chose. Je ne perds cependant pas de vue qu'il appartient maintenant aux éditeurs, dans un contexte publicitaire dont Claude Belot a raison de dire qu'il sera encore plus restreint pour la presse, de faire preuve de créativité et d'originalité afin de répondre à l'attente des lecteurs qui, en définitive, sont les seuls juges de la qualité d'une publication. Si vous voulez aider l'Humanité, France Soir ou Libération, mes chers collègues, je vous donne un conseil très simple : abonnez-vous !

Il faut mettre en relation les 200 minutes consacrées par chaque Français à la télévision et les 20 minutes consacrées en moyenne à la lecture de la presse !

La commission des affaires culturelles, sur les recommandations de son président, se penchera sur cette crise de plus en plus grave. Elle créera dès le mois de janvier un groupe de travail spécifiquement consacré à la relance de la presse. Ce n'est même plus un « plan Marshall », c'est un plan de relance !

En ce qui concerne l'audiovisuel public, mon sentiment est plus nuancé que celui de mon collègue de la commission des finances, ce qui fait la richesse de nos débats.

Pour ma part, je me pose des questions et j'éprouve parfois un sentiment d'inquiétude.

En effet, une réforme a été mise en oeuvre et, quelle que soit leur appartenance politique, les membres de la commission des affaires culturelles souhaitent tous que soient pérennisées les ressources de l'audiovisuel public.

Cependant, je suis obligé de constater que les moyens les plus simples que l'on aurait pu mettre en oeuvre - je pense à la réévaluation de la redevance - n'ont pas été retenus et que l'on a prévu chaque fois des recettes en hausse.

En 2005, la réforme a certes permis une hausse des recettes de 47 millions d'euros. Mais nous sommes loin des 200 millions d'euros supplémentaires attendus - la différence est de l'ordre de 153 millions d'euros - et des sommes votées à l'époque par le Parlement.

Vos services, monsieur le ministre, ont d'ailleurs reconnu très pudiquement que « malgré le rendement accru des encaissements de redevance permis par la réforme et la baisse des frais de gestion, les recouvrements nets de frais ont été :

« - inférieurs de plus de 9 millions d'euros aux montants prévus par la loi de finances initiale ;

« - inférieur de près de 30 millions d'euros à ceux prévus par la loi de finances rectificative pour 2005. »

Les prévisions d'encaissement pour 2007, j'en conviens, sont plus prudentes, et je m'en réjouis.

Pour la première fois depuis des années, l'augmentation des ressources publiques - M. Belot ne pourra pas me contredire - n'est pas liée - c'est un point important - à l'augmentation des encaissements de redevance, mais est liée à la réévaluation du remboursement des exonérations. Le dynamisme de l'assiette de la taxe est donc en passe de disparaître.

Cette situation inédite entraîne deux interrogations majeures.

La première interrogation est mathématique. Si les encaissements de redevance ne progressent plus dans les années à venir, comment financera-t-on - c'est un sujet dont nous avons traité à l'occasion de l'examen du projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur - le passage des opérateurs publics à l'ère du numérique ? La double diffusion analogique et numérique, la diffusion en haute définition et en télévision mobile personnelle - il faut s'y préparer -, l'achat de droits sportifs et cinématographiques, la contribution à la création culturelle ont un coût non négligeable. Il faudra bien que ce coût soit pris en charge afin que les chaînes publiques conservent la place éminente qui est la leur.

La seconde interrogation dérive de la première. Elle est relative à la garantie de recettes mise en oeuvre en faveur des organismes de l'audiovisuel public afin de compenser par le budget général tout déficit du compte de la redevance par rapport aux prévisions affichées.

Certains se félicitent - nos collègues de l'Assemblée nationale avaient prévu le mécanisme - du maintien de ce filet de sécurité, qui n'est qu'un filet de sécurité.

On peut toutefois s'interroger sur sa pertinence dans la mesure où sa mise en pratique laisse entrevoir une budgétisation rampante du financement de l'audiovisuel public.

Monsieur le ministre, le Gouvernement, mais aussi le Président de la République, au lendemain du lancement de France 24, peuvent se targuer d'un audiovisuel prospère fort : France 2, France 3, France 4, France 5, France Ô, France 24, Gulli, et j'en oublie,...

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Arte !

M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis.... Arte, en effet, sans parler de l'audiovisuel extérieur.

Il faudra prouver que cet audiovisuel public peut se maintenir dans son format actuel - les téléspectateurs eux-mêmes s'interrogent sur l'ampleur de l'audiovisuel public -, encore faut-il lui en donner les moyens.

Je conclurai cette intervention en rappelant, monsieur le ministre, que vous avez été un ministre heureux dans le domaine de la communication puisque vous avez obtenu du ministère des finances des arbitrages qui ne sont défavorables ni à la presse ni à l'audiovisuel public.

Je ferai simplement une observation sur un point de procédure. Vous êtes attaché, comme nous, monsieur le ministre, aux contrats d'objectifs et de moyens. J'évoquerai celui sur lequel la commission des affaires culturelles s'est prononcée, celui de Radio France.

Nous avons considéré qu'il y avait des faiblesses dans le document initial, qui avait pourtant été accepté tel quel par la tutelle. Je tiens à souligner que, depuis lors, Radio France a répondu avec professionnalisme et célérité aux interrogations que nous avions publiquement formulées. Ce document stratégique indispensable pour l'entreprise servira de modèle aux autres contrats d'objectifs et de moyens.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, toutes ces observations n'ont pas empêché - elles l'ont même engagée - la commission des affaires culturelles à se déclarer favorable à l'adoption des crédits de la mission « Médias ». (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme la présidente. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :

Groupe Union pour un mouvement populaire, 30 minutes ;

Groupe socialiste, 21 minutes ;

Groupe Union centriste-UDF, 10 minutes ;

Groupe communiste républicain et citoyen, 9 minutes.

Je rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d'intervention générale et celui de l'explication de vote.

Je rappelle qu'en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt-cinq minutes pour intervenir.

La parole est à M. Ivan Renar.

M. Ivan Renar. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le succès d'Internet et de l'ADSL, l'essor du numérique, le téléchargement, le podcasting, les blogs, la vidéo à la demande, le développement de la presse gratuite bouleversent profondément l'usage des médias comme les comportements de nos concitoyens.

Les médias occupent une place toujours croissante dans notre vie quotidienne. Par conséquent, les transformations rapides qu'ils subissent agissent en profondeur sur l'évolution même de notre société.

Ces mutations technologiques ont en effet des répercussions énormes sur l'économie des médias et des industries culturelles, mais aussi sur les fondements même de la démocratie. Comment ne pas voir que le pluralisme, l'indépendance, la diversité et l'exception culturelles sont de plus en plus menacés par la prédation d'un marché sans rivage et des processus de concentration sans précédent ?

Certes, il faut vivre avec son temps et ne pas bouder les nouvelles technologies, mais il est aussi essentiel d'anticiper les effets de ces évolutions afin qu'elles servent bien l'intérêt général, les valeurs de notre démocratie, et que l'homme reste bien au centre des préoccupations.

Or le budget qui nous est proposé, monsieur le ministre, est loin d'être à la hauteur des enjeux et des défis auxquels sont pourtant confrontés l'audiovisuel public et la presse écrite.

L'examen du projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur a montré toute l'importance qu'il y avait à garantir la qualité et la diversité des contenus, à renforcer les dispositifs de soutien à la création. Il est nécessaire que le service public soit à la pointe du développement et évolue vers la télévision haute définition et la télévision mobile personnelle.

Or les moyens dévolus au groupe France Télévisions ne lui permettent pas de prendre totalement rendez-vous avec l'avenir.

Le service public, dans un contexte de sous-financement chronique, pour reprendre l'expression de Louis de Broissia, se trouve contraint à la course aux recettes publicitaires et à l'audimat, qui, on le sait, conduit à l'appauvrissement des contenus et à leur formatage.

Face aux moyens imposants des groupes privés, l'État actionnaire doit soutenir encore plus significativement le service public afin qu'il demeure la référence et puisse mener de front, avec succès, les investissements pour le développement de la TNT, l'adaptation à la haute définition - laquelle ne doit pas oublier la filière de production des sites régionaux de France 3 -, l'indispensable montée en puissance de France 4 et France 5, la poursuite du sous-titrage pour les malentendants, l'amplification d'une politique audacieuse de création, l'inflation des coûts de programmes générés en particulier par l'arrivée des puissants opérateurs de télécommunications.

La redevance, l'une des plus faibles d'Europe, est gelée depuis quatre ans et son rendement s'érode de façon inquiétante. Pourtant, sa majoration constituerait un heureux appel d'air pour un service public fragilisé, dans un secteur de compétitivité sans merci. Donnons-lui enfin les moyens de remplir ses objectifs Et souhaitons que le prochain contrat d'objectifs et de moyens, le COM, soit à la hauteur de la belle ambition de M. de Carolis pour le service public, ambition que l'État devrait être le premier à partager.

Quant à la radio publique, elle est aussi soumise à la portion congrue : en dehors des ressources dévolues aux travaux pour la rénovation de la Maison de la radio, le budget stagne également depuis plusieurs années. Or Radio France, dans un univers des plus concurrentiels, doit aussi répondre au défi de la radio numérique comme à l'extension de la diffusion en modulation de fréquence.

Nos concitoyens sont très attachés à la qualité des émissions dédiées à la création, que ce soit sur France Inter, France Culture, France Musique. Et ils ont raison, car décidément, ces radios font vraiment la différence et donnent aux auditeurs l'envie de lire, de débattre, d'aller au cinéma, au concert ou au théâtre.

Cela ne m'empêche pas de noter que Radio France Internationale voit son budget régresser de 3 % ! Pourtant, personne n'ignore l'enjeu du rayonnement international de notre pays, comme en atteste la naissance de France 24. Notre politique audiovisuelle extérieure ne doit pas faire deux poids, deux mesures, en laissant à la traîne RFI et TV 5 Monde.

Je note au passage que les épousailles forcées de France 24 avec TF 1 produisent déjà un premier dégât collatéral, puisque France 24 ne sera pas disponible gratuitement sur la TNT.

J'ajoute que l'échelle internationale a plus que jamais toute son importance, mais la proximité n'en a pas moins. C'est pourquoi je suis préoccupé par la diminution de l'information rédactionnelle des radios locales France Bleu.

De plus, en ce qui concerne les radios associatives, si certaines difficultés liées au versement tardif des subventions sont en passe d'être résolues, je déplore la faiblesse de l'augmentation du fonds de soutien à l'expression radiophonique, le FSER, d'autant que le produit de la taxe sur la publicité des médias commerciaux qui l'alimente est en augmentation.

J'en viens à un sujet qui tient à coeur, je n'en doute pas, à l'ensemble de nos collègues : la promotion des minorités visibles dans les médias.

Je crois que la prise de conscience est réelle et la tendance plutôt positive. On le constate dans la programmation, par exemple. Les sondages montrent également que le public est plus sensibilisé.

Est-ce pour autant suffisant ? Je ne le pense pas. Si nos écrans sont un peu plus colorés, les ressources humaines ne semblent pas encore à la hauteur. La question de la formation est essentielle, et ce dès maintenant, si l'on ne veut pas rater l'émergence d'une élite diversifiée dans les médias des prochaines années.

Dans le bilan que fait le CSA sur la question, on constate que seules huit bourses concernent les étudiants journalistes de Sciences Po Paris, alors qu'avec les fameuses conventions passées avec les établissements scolaires en zone d'éducation prioritaire, ZEP, nous avons une pépinière de nouveaux talents.

Je crois qu'il faut être encore plus volontariste, monsieur le ministre. J'aimerais, sur ce sujet, soulever quelques questions.

Pour l'ensemble des entreprises qui dépendent de votre magistère, quelles sont les mesures prévues pour favoriser l'émergence d'un encadrement supérieur plus diversifié et reflétant davantage la société française ?

Allez-vous trouver cette volonté dans les COM que vous êtes en train de négocier, et comment ?

Dernière question sur cet aspect des choses, qui vaut pour la mission culture qui sera débattue tout à l'heure : comme le fait le CSA sur l'audiovisuel, un travail d'inventaire et d'analyse est-il mené sur l'ensemble des institutions culturelles ?

Avant d'aborder la question brûlante de la presse écrite, soulevée par notre collègue Louis de Broissia, je souhaite rendre hommage aux savoir-faire, faire savoir des journalistes, malheureusement touchés par une précarité croissante, des pressions accrues, voire une censure, qu'on espérait d'un autre âge.

Le flux incessant de l'information, la prime donnée à l'instantané superficiel, le règne de l'approximation et de la facilité sont autant de symptômes qui appellent un traitement de choc pour que subsiste une presse de qualité fiable, professionnelle et déontologique.

Et parce qu'il n'y a pas de société libre sans esprits libres, l'État doit s'emparer résolument de cet enjeu et en faire une véritable priorité politique.

Dans un contexte de poussée des extrémismes et des obscurantismes, la défense du pluralisme, du débat d'idées, de la diversité des points de vue impose une intervention publique résolue et un meilleur accompagnement des mutations en cours.

Parce que la presse dite d'opinion participe en permanence au débat d'idées, parce qu'elle n'est jamais neutre, elle revitalise la liberté de penser et donc le libre arbitre de chacun et contribue ainsi à revivifier la citoyenneté.

Il nous faut retrouver l'esprit et la lucidité du Conseil national de la Résistance et du général de Gaulle, qui, au lendemain de la Libération, dans les conditions difficiles de l'époque, ont placé au coeur du projet démocratique la liberté de la presse et son indépendance.

D'ailleurs, les citoyens sont conscients de ces enjeux et tiennent à l'existence d'une presse libre et pluraliste. Il n'y a qu'à voir avec quel élan nombre d'entre eux, même s'ils n'en sont pas lecteurs, ont volé au secours de Politis, de l'Humanité et témoigné leur solidarité au journal Libération.

À cet égard, vous avez déclaré, monsieur le ministre, que, désormais, « les dons aux journaux d'opinion tant des particuliers que des entreprises pourront se voir appliquer la déduction fiscale autorisée au titre du mécénat culturel. Il s'agit d'une interprétation désormais officielle. »

Les termes « interprétation officielle » sont source d'ambiguïté. Pourquoi ne pas inscrire clairement ces nouvelles dispositions dans la loi ? Autre question : cette mesure sera-t-elle appliquée dès 2007 et est-elle conditionnée par la création d'une fondation de la presse française, que vous appelez de vos voeux ?

Dans une société en panne de repères, plus la « mal-aimé » se développe sous couvert de modernité, plus nous avons besoin de la rigueur d'analyse, de la distance critique, de la pertinence comme de l'impertinence de la presse d'opinion. C'est pourquoi, si l'on veut la sortir de la situation périlleuse où elle se trouve, on ne peut plus la considérer uniquement sous l'angle d'une activité marchande ni s'en remettre au caprice d'actionnaires qui n'ont pour seul credo que la rentabilité financière. Nous voyons bien les limites des mécanismes de soutien existants puisque les titres les plus fondés à en bénéficier sont au bord de la faillite. On le constate avec Libération et le nouveau plan social drastique qui frappe ses salariés.

Il y a urgence à soutenir la presse écrite sur d'autres critères que le tirage, en privilégiant peut-être avant tout les contenus, c'est-à-dire le nombre de pages rédactionnelles, le nombre de journalistes, le nombre d'articles de fond et d'investigations. En d'autres termes, il est temps de repenser le modèle économique de la presse de contenu, qui est bien loin de n'être qu'une activité marchande, et de tendre vers un service d'utilité publique. N'est-ce pas légitime compte tenu du fait que cette activité constitue un pilier majeur non seulement de la démocratie mais aussi de notre civilisation ?

C'est pourquoi je ne saurais me résoudre, monsieur le ministre, à la baisse des crédits en faveur de la presse d'information, sous prétexte que son budget a augmenté ces deux dernières années.

La représentation nationale a le devoir civique et moral de donner un véritable avenir à l'indépendance, financière et éditoriale, de la presse quotidienne d'information à caractère politique et général ainsi qu'à son pluralisme, dont l'État est le garant.

Comme le réclament de nombreux directeurs de presse, n'est-il pas urgent d'organiser des états généraux ou une conférence nationale, rassemblant les pouvoirs publics, les différents acteurs concernés, de l'impression à la diffusion, sans oublier l'AFP, les syndicats, pour apporter, ensemble, les solutions au plein exercice du pluralisme de la presse ? Pourquoi ne pas y associer l'éducation nationale, dont le rôle est déterminant pour le renouvellement du lectorat, en matière tant de formation des enseignants que de sensibilisation des élèves ?

Les journaux sont de formidables réserves de matière première pour l'enseignement du français, de l'histoire, de la philosophie, de l'économie et, naturellement, de la citoyenneté.

En attendant, monsieur le ministre, comme ce projet de budget ne permet pas de répondre aux ultimatums des mutations radicales en cours, mon groupe ne pourra pas l'adopter. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Serge Lagauche.

M. Serge Lagauche. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la légère augmentation attendue du budget prévisionnel des organismes de l'audiovisuel public, cette année encore, ne contribuera en rien à favoriser l'indépendance de notre télévision publique. En effet, cette croissance est fondée principalement sur l'augmentation des ressources propres des organismes, à hauteur de 5,3 %, celle des ressources publiques étant quasi nulle du fait même de l'inflation. La part des ressources publiques dans le budget de l'audiovisuel public sera donc à nouveau en baisse en 2006.

Vous avez choisi d'adosser le prélèvement de la redevance audiovisuelle à la taxe d'habitation. Résultat : elle induit une confusion pour les contribuables avec les impôts locaux et n'apporte même pas un encaissement de redevance pour l'audiovisuel public conforme à vos prévisions.

C'est ce que relève notre collègue Claude Belot dans son rapport : « La prévision des encaissements de redevance audiovisuelle pour 2007 prend en compte un moindre niveau d'encaissements par rapport aux prévisions, à hauteur de 29,6 millions d'euros en 2005, dernière année pour laquelle des données définitives sont disponibles. »

Si le rapporteur de la commission des affaires culturelles parle, lui, de cette réforme en termes de « demi-échec », du fait de l'économie réalisée sur les frais de gestion, nous considérons, pour notre part, que c'est un échec plein et entier. Je rappelle tout de même que le Gouvernement en attendait une hausse de 200 millions d'euros ; on en est très loin.

Par ailleurs, vous avez raté l'occasion ainsi offerte de donner au secteur de l'audiovisuel public un souffle budgétaire salutaire et nécessaire, au moment même où l'offre télévisuelle gratuite s'élargissait avec le lancement de la TNT. Nous estimons qu'il s'agit là d'une erreur stratégique majeure pour l'avenir de notre audiovisuel public.

La réforme aurait pu davantage porter ses fruits si l'assujettissement à la redevance avait été réalisé par appareil et non par foyer fiscal, ce qui exonère, de fait, les résidences secondaires, et constitue une perte de recettes estimée à 58 millions d'euros. Mais ce n'est pas tout, puisque vous avez, en plus, abaissé le tarif de la redevance au demi-euro inférieur en 2005, après une stagnation pendant trois exercices, générant ainsi une perte supplémentaire de 22 millions d'euros.

À cela, s'est ajouté le plafonnement du remboursement par l'État des exonérations, à hauteur de 440 millions d'euros seulement, et ce en dépit de l'extension desdites exonérations.

Pour 2007, le plafonnement de remboursement des exonérations a été fixé à 509 millions d'euros, ce qui diminue, quelque peu, le manque à gagner pour l'audiovisuel public. Cependant, cette somme ne couvrira pas la totalité des dégrèvements. La perte de ressources pour les sociétés publiques peut être ainsi évaluée, selon le rapport de M. de Broissia, à près de 590 millions d'euros.

Or je vous rappelle, monsieur le ministre, que le principe même du plafonnement des remboursements d'exonérations est contraire aux termes de l'article 53, paragraphe V, de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, qui dispose que « les exonérations de redevance audiovisuelle décidées pour des motifs sociaux donnent lieu à remboursement intégral du budget général de l'État. »

Cette situation n'inquiète pas seulement l'opposition, comme le montre la lecture des rapports de MM. Claude Belot et Louis de Broissia, qui restent, tout comme nous, attachés au principe de la compensation intégrale, principe qui implique de porter le montant des remboursements à 600 millions d'euros.

Je rappelle, en outre, que ce remboursement non intégral des dégrèvements est en totale rupture avec la décision prise en 2000, par le gouvernement Jospin, de rembourser intégralement les exonérations de redevance, afin de compenser le manque à gagner induit par la baisse du volume horaire de publicité sur les chaînes publiques. Nous avions alors réussi à réduire significativement la dépendance de la télévision publique vis-à-vis de la ressource publicitaire, mouvement qui s'est durablement inversé dès 2003.

Or ce mouvement n'est pas sans lien avec le développement d'un discours ambivalent, ici ou là, autour des objectifs de la télévision publique. Certains disent vouloir qu'elle fasse de la télévision différemment du privé, tout en la comparant à celui-ci pour ce qui est de l'audience et des ressources publicitaires. Cette ambiguïté est particulièrement sensible à l'égard de France 2, qui ne cesse d'être jugée à l'aune de TF1.

Revendiquer une véritable identité fondée sur une exigence de qualité toujours plus grande du service public implique de garantir l'indépendance du secteur audiovisuel public, prioritairement au regard du marché publicitaire. Sans cela, la télévision publique présentera de moins en moins d'oeuvres aux téléspectateurs et de plus en plus de produits. Or la quantité des contenants sans la qualité des contenus ne peut faire la diversité culturelle.

Les spectateurs qui refusent d'être réduits à du cerveau disponible pour la publicité risqueraient peu à peu de ne plus avoir d'espace public où se retrouver, alors même que, dans un monde de plus en plus complexe, l'audiovisuel, surtout public, a un rôle essentiel à jouer - tout comme la presse - de décryptage et de compréhension de notre société.

C'est dans ce contexte de fragilisation de ses ressources, que France Télévisions doit faire face à des impératifs nouveaux, nécessitant de fortes capacités d'investissement.

Le premier impératif réside dans la multiplication des supports, avec la poursuite de la diffusion en TNT et l'extension de sa couverture, que le Sénat vient de porter à 95 % du territoire dans le projet de loi relatif à la télévision du futur, au lieu des 85 % initialement prévus. Le groupe doit également se lancer dans la haute définition notamment pour les chaînes en simulcast, sans parler de la télévision mobile.

Le second impératif comprend la poursuite du plan de sous-titrage en direction des sourds et malentendants, prévu par la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, dont le coût global est estimé à 105 millions d'euros.

J'aborderai maintenant la situation particulière de France 3, dont la récente réorientation stratégique pose question.

Avec la restructuration des programmes régionaux et la réduction de sa filière de production en région, c'est la spécificité régionale, pourtant au coeur de la mission de la chaîne, qui se voit mise en cause. Quid du positionnement de France 3 comme chaîne de proximité ? Ce bouleversement d'orientation stratégique intervient à une période charnière, liée à l'arrivée de la publicité du secteur de la grande distribution dans l'audiovisuel. Ne risque-t-on pas alors de voir les télévisions locales adossées aux grands groupes de communication fragiliser davantage France 3 ?

Arte, pour sa part, qui bénéficie maintenant avec la TNT d'un canal complet, doit répondre à un élargissement important de sa grille de programmes. Elle a ainsi initié en 2006 une diffusion vingt-quatre heures sur vingt-quatre, mais, faute de moyens, la programmation comporte de nombreuses multidiffusions.

Le contrat d'objectifs et de moyens d'Arte, qui - il convient de le rappeler - n'engrange pas de recettes publicitaires, prévoyait une progression financière de 4,9 % en 2003 et de 4 % en 2004 et 2005. Force est de le constater, le Gouvernement n'a pas tenu ses engagements, puisque la hausse n'a été que de 3 % en 2003, de 2,34 % en 2004 et de 2,45 % en 2005. Je ne parle même pas de l'année 2006, où l'évolution était inférieure à l'inflation. Mais, en l'occurrence, il n'y avait plus d'engagement de l'État, puisque le contrat d'objectifs et de moyens pour la période 2006-2010 n'a toujours pas été signé.

Or, pour faire face à ses obligations légales, comme la diffusion de certains programmes en haute définition, la chaîne devra mettre son fonds de roulement à contribution.

Il serait très regrettable de fragiliser financièrement la chaîne franco-allemande, alors qu'elle fait preuve d'une forte capacité d'adaptation et d'innovation face aux mutations technologiques - je pense notamment au projet « Arte Global » - et qu'elle développe de nouveaux partenariats avec d'autres chaînes européennes. Ainsi, Arte Belgique a été lancée au mois de septembre dernier en collaboration avec la RTBF. De même, un projet de chaîne culturelle avec la RTVE est en cours d'élaboration en Espagne.

S'agissant de l'expression radiophonique, les radios, notamment associatives, ont vu leurs contraintes budgétaires augmenter sensiblement depuis 2002. En effet, les différents taux de la taxe sur les publicités sont demeurés inchangés depuis quatre ans, ce qui correspond à une perte de valeur de 11 %. Alors que les ressources publicitaires des médias audiovisuels augmentaient de plus de 8 % par an, la taxe sur la publicité des télévisions et radios commerciales, qui est la principale source de financement du fonds de soutien à l'expression radiophonique, n'a pas suivi. Les contributeurs ne sont ni contrôlés ni sensibilisés au paiement de cette taxe. Dans ces conditions, monsieur le ministre, quelles mesures envisagez-vous pour améliorer les modalités de perception de cette taxe ?

Par ailleurs, lors de l'adoption de la loi de finances pour 2006, la prévision de recettes de la taxe votée a été sous-évaluée. Elle a été estimée à 23,75 millions d'euros, alors que les recettes perçues in fine se sont élevées à 25,01 millions d'euros. Cela a entraîné des difficultés techniques de gestion pour ces radios. En effet, une fois la somme votée dépassée, aucun paiement n'est possible sans un décret du ministre des finances, même si les fonds sont disponibles.

Il faut donner aux radios associatives les moyens de remplir leurs missions, notamment celles fixées par l'accord-cadre signé avec le Gouvernement en novembre 2005, à la suite de la crise des banlieues, selon lequel « les opérateurs locaux de radiodiffusion de catégorie A participent à une plus grande cohésion sociale, à l'information et à l'éducation des jeunes et des personnes en phase d'insertion et de réinsertion professionnelle ».

C'est pourquoi, lors de l'examen des crédits du compte d'affectation spéciale « Cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale », nous vous proposerons un amendement tendant à majorer la taxe sur les publicités, qui constituera en 2007 l'unique recette de ce compte d'affectation spéciale alimentant le fonds de soutien à l'expression radiophonique.

Pour sa part, Radio France, qui est financée à près de 90 % par la redevance et confrontée à un important plan de réhabilitation de la Maison de la radio, verra ses ressources publiques n'augmenter que très faiblement, au risque de compromettre sa capacité à assumer ses missions prioritaires telles que le déploiement de la radio numérique, l'extension de la couverture FM ou le développement de nouveaux services.

Radio France Internationale, ou RFI, est également dans une situation complexe. En effet, son contrat d'objectifs et de moyens, qui devait être signé cette année, ne l'a toujours pas été. Cela démontre combien l'État peine à définir la place qui doit être laissée à cette société après le démarrage de la chaîne de télévision internationale, France 24.

Le maintien de RFI dans son actuel périmètre, qui était déjà compromis avec la disparition de certaines rédactions étrangères au profit d'internet, risque d'être davantage remis en cause, compte tenu du double emploi de fait avec la nouvelle chaîne investie d'une mission de diffusion en langues étrangères d'informations à destination d'un public international. Maintenant que nous avons trois chaînes internationales avec le lancement de France 24 voilà deux jours, il convient de donner à chacune d'elles les moyens de travailler correctement. La création de France 24 ne doit pas s'effectuer au détriment de TV5 et RFI.

Face à la dépendance accrue du secteur public de l'audiovisuel à l'égard de la publicité, qui n'est pas une manne infinie, et au risque d'émiettement du marché publicitaire lié à la multiplicité des supports techniques de diffusion, il est plus que temps d'inverser la tendance et de garantir notre indépendance culturelle en assurant à l'audiovisuel public un financement sur fonds publics plus large, ce qui est totalement à l'opposé des choix budgétaires et de la politique audiovisuelle du Gouvernement. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Mme Catherine Morin-Desailly. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, voilà quelques jours, le Sénat adoptait le projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur, par lequel nous fixions un cadre juridique pour le basculement à la diffusion numérique et l'avènement de la télévision mobile personnelle.

À cette occasion, nous avons abordé les perspectives d'évolution et d'adaptation du secteur audiovisuel aux nouvelles technologies. Nous avons tous évoqué la révolution numérique et les bouleversements qu'elle entraîne pour la télévision et les usages que nous en avons. Le développement de l'internet haut débit, la télévision numérique terrestre, qui a multiplié par trois le nombre de chaînes gratuites, et l'arrivée imminente de la télévision mobile personnelle et de la haute définition transforment radicalement le paysage audiovisuel français. Il faut prendre acte de ces évolutions et réfléchir à leurs conséquences sur la place de la télévision publique dans un paysage audiovisuel en pleine recomposition.

Dans ce contexte, le service public de l'audiovisuel doit s'adapter à de telles mutations technologiques en trouvant les moyens d'investir dans ces nouveaux programmes. Si l'on veut que l'audiovisuel public remplisse ses obligations de service public tout en diversifiant l'offre de programmes, un effort financier est nécessaire. En effet, on ne peut pas en permanence exiger, notamment dans les contrats d'objectifs et de moyens, que les chaînes publiques diffusent des programmes et des émissions de qualité en se différenciant des chaînes privées si on ne leur donne pas les moyens d'assurer ces missions.

En effet, notre audiovisuel public se caractérise par un sous-financement chronique. Si le budget de la mission « Médias » pour 2007 permettra au service public de l'audiovisuel de faire face à ses obligations les plus urgentes, c'est grâce à deux éléments conjoncturels. D'une part, le taux de remboursement des exonérations sociales a augmenté, passant à 509 millions d'euros cette année contre 440 millions d'euros en 2005 et en 2006. D'autre part, la publicité sera ouverte au secteur de la grande distribution à partir du 1er janvier 2007, ce qui augmentera de 2,5 % les ressources de France Télévisions, mais non celles d'Arte.

Cette progression des ressources publiques, à hauteur de 2,6 %, et des ressources propres ne vaut que pour 2007. Il faut donc envisager l'avenir.

L'audiovisuel public devra non seulement financer les obligations imposées par le législateur, mais également affronter une concurrence de plus en plus vive en raison de la poursuite du déploiement sur la TNT, du développement des programmes en haute définition, du renforcement des grilles, du sous-titrage des programmes pour les sourds et malentendants, de l'inflation du coût des programmes et de l'arrivée des opérateurs de télécommunications sur le marché, qui feront augmenter le coût des programmes et des droits.

Face à cela, de quelles ressources l'audiovisuel public dispose-t-il pour être à la hauteur de ses concurrents du privé ? La redevance ? Nous savons tous qu'elle est peu dynamique et vieillissante. En outre, il faut le reconnaître, la réforme de 2004 est un échec. On nous avait annoncé un meilleur taux de recouvrement et moins de fraudes, donc de meilleures rentrées, et c'est l'inverse qui se produit : les encaissements sont inférieurs de 30 millions d'euros aux prévisions. Ce nouveau mode de perception de la redevance audiovisuelle n'est pas satisfaisant. Son adossement à la taxe d'habitation est une source de confusion pour les contribuables téléspectateurs, qui ne voient pas le lien entre cette taxe et l'audiovisuel public. Il aurait mieux valu profiter de cette réforme pour revaloriser son taux, comme nous l'avions proposé à l'époque. C'était opportun au moment où l'offre télévisée gratuite était élargie avec le lancement de la TNT, et nos concitoyens auraient pu le comprendre.

Monsieur le ministre, vous souhaitez engager une véritable réflexion sur le financement du secteur public. Nous la souhaitons vivement également. Je vous propose dès aujourd'hui plusieurs pistes de réflexion et quelques mesures simples. Il faut tout d'abord garantir la dynamique des ressources publiques de l'audiovisuel. Tout le monde le sait, le montant de notre redevance, qui est de 116 euros, est plus faible que dans les autres pays européens, où la moyenne se situe aux alentours de 200 euros. Mais, conformément à la loi du 1er août 2000 modifiant la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, il faut également obliger l'État à rembourser intégralement les exonérations sociales de redevance qu'il consent par ailleurs. Ce n'est pas à l'audiovisuel public de financer les exonérations décidées par le Gouvernement.

Afin de rendre cette ressource plus dynamique, il faut prévoir une actualisation annuelle de son taux, par exemple en fonction du taux d'inflation. Je le rappelle, la redevance s'élève à 116 euros pour la cinquième année consécutive. Enfin, nous devons envisager la possibilité, qui est conforme au principe de neutralité technologique, de percevoir la redevance sur des récepteurs autres que les téléviseurs ; je pense notamment aux ordinateurs. À l'heure de la convergence des médias et des nouveaux modes de consommation, il apparaît nécessaire de réfléchir à cette possibilité.

Après avoir évoqué l'évolution de l'audiovisuel public interne, je m'intéresserai aux perspectives de notre audiovisuel extérieur.

L'action audiovisuelle extérieure est assurée par plusieurs structures, comme TV5 Monde, Radio France Internationale, Canal France International et désormais France 24, qui ont tendance à s'empiler avec les années. Elles dépendent de tutelles différentes et les financements sont assurés par des ressources variables, par exemple des dotations du ministère des affaires étrangères, des parts de redevance ou des ressources propres.

Monsieur le ministre, selon votre prédécesseur, la création de la chaîne française d'information internationale, désormais dénommée France 24, devait « être une chance », dans la mesure où elle devait permettre de « rationaliser un paysage audiovisuel extérieur désorganisé et centrifuge ». À la lecture des documents budgétaires, ce n'est pas vraiment le sentiment que l'on a. L'audiovisuel extérieur se caractérise par son éclatement institutionnel, la dispersion des moyens et l'absence totale de pilotage de ses structures.

Cela dit, à l'occasion des débats qui ont eu lieu à l'Assemblée nationale, nous avons été heureux d'apprendre l'existence d'un Conseil de l'audiovisuel extérieur de la France, structure de coordination chargée d'assurer le pilotage stratégique des différents opérateurs. Grâce à vous, monsieur le ministre, nous savons également que cette instance se réunira, dans les prochaines semaines, pour la première fois depuis dix ans. Cette réunion e : st pour le moins bienvenue.

Plus simplement, ne fallait-il pas profiter de la création de la chaîne française d'information internationale, ou CFII, pour rationaliser l'action audiovisuelle française à l'étranger et mutualiser les moyens actuellement dispersés ? D'ailleurs, le succès rapide de France 24 ne pourra se faire que si cette chaîne s'appuie sur le savoir-faire de RFI, de l'AFP et d'Euronews en matière éditoriale et sur l'expérience de TV5 et de Canal France International en matière de distribution. Nous notons avec satisfaction que des démarches sont entreprises dans ce sens. Les opérateurs existants y trouveraient également leur compte. Une large réflexion sur la situation de l'audiovisuel extérieur aurait permis d'affirmer le rôle et l'identité de chacun et d'en confirmer ainsi la légitimité. Dans cette perspective, pourquoi ne pas réfléchir à la création d'une holding regroupant l'ensemble des acteurs, afin de définir une stratégie commune et une meilleure gestion des intérêts de l'État dans ce domaine ?

En outre, si nous nous félicitons du lancement avant-hier soir de France 24, dont nous souhaitons la réussite pour assurer une présence et une vision françaises dans le monde, il faut néanmoins veiller à ce que l'effort budgétaire consenti par l'État, c'est-à-dire 86 millions d'euros cette année, ce qui reste tout de même dix fois inférieur aux budgets des chaînes internationales comme BBC World ou CNN International, ne s'effectue pas au détriment des autres acteurs de l'audiovisuel extérieur.

En effet, alors que France 24 a signé avec l'État une convention lui garantissant jusqu'au 31 décembre 2010 le versement d'une subvention annuelle de 80 millions d'euros en valeur 2005, les autres opérateurs, en particulier RFI et TV5 Monde, voient leurs moyens stagner depuis plusieurs années. Pourquoi ne pourraient-ils pas bénéficier d'un engagement financier similaire de la part du Gouvernement pour s'adapter dans un contexte mondial plus concurrentiel ? Ce serait nécessaire pour maintenir les moyens de TV5, qui est un vecteur essentiel - nous le savons - de la francophonie dans le monde, avec une audience mondiale qui a doublé en quatre ans, pour atteindre 73,5 millions en 2005.

Je souhaiterais conclure en évoquant la situation de RFI, qui est particulièrement préoccupante cette année. Voilà quelques mois, son P-DG, M. Antoine Schwarz, est venu devant la commission des affaires culturelles pour nous faire part de ses craintes quant à l'avenir de la station. Tous les sénateurs présents avaient été sensibles à cette situation. Malheureusement, le budget pour 2007 vient confirmer la réduction par le ministère des affaires étrangères de la dotation budgétaire de 3,2 %. C'est la traduction du désintérêt de l'État pour cet organisme, qui est pourtant l'un des acteurs les plus importants du rayonnement extérieur de la France. La mise à l'écart de RFI lors de la conception de la chaîne française d'information internationale et le gel des plans de développement à l'international étaient les signes annonciateurs de ce désengagement préjudiciable. Je m'associe donc au rapporteur spécial, qui a jugé inacceptable cette diminution injustifiée des ressources publiques de RFI.

En espérant que ces différentes remarques pourront faire l'objet de réflexions plus approfondies dans les prochains mois sur les missions de notre audiovisuel public tant en interne qu'en externe, le groupe de l'UC-UDF votera les crédits de la mission « Médias », avec les réserves que je viens d'exprimer.

Mme la présidente. La parole est à M. Roger Karoutchi.

M. Roger Karoutchi. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la progression sensible des crédits budgétaires consacrés aux médias dans le projet de loi de finances pour 2007 témoigne de la volonté sans faille du gouvernement d'accompagner les mutations de ce secteur.

Je n'entreprendrai pas de traiter toutes les questions soulevées par le sujet dans le temps limité qui m'est imparti. Je centrerai mon intervention sur la presse écrite, le lancement de la chaîne France 24 et la TNT.

En ce qui concerne la presse écrite, je suis heureux de voir, monsieur le ministre, que, malgré les contraintes budgétaires actuelles, vous aidez un secteur qui connaît une situation de plus en plus difficile avec la concurrence des formats gratuits et surtout le développement exponentiel de l'information en ligne via Internet.

Ainsi, le projet de budget, d'un montant de 274 millions d'euros, représente, à périmètre constant, un montant de crédits supérieur de plus de 22 % aux moyens consacrés à la presse écrite il y a encore seulement deux ans.

Pour mémoire, je rappellerai qu'au lendemain de la Guerre, en 1946, il existait 28 quotidiens nationaux, qui se vendaient chaque jour à plus de 6 millions d'exemplaires. Aujourd'hui, il n'en reste que 11, dont seulement 7 généralistes, qui ne diffusent plus que 2 millions d'exemplaires, c'est-à-dire trois fois moins, alors que la population a dans le même temps considérablement augmenté.

La crise de la presse quotidienne nationale est ancienne, mais elle n'en est pas pour autant acceptable. Le phénomène est d'ailleurs loin d'être circonscrit à la France. À l'échelle mondiale, la diffusion payante des journaux est en chute en moyenne, chaque année, de 2 %.

L'une des causes de cette crise est la montée en puissance de la presse écrite gratuite. Je rappellerai pour exemple que le quotidien gratuit Métro compte désormais 57 éditions à travers le monde. Plus de 11 % de la diffusion de la presse quotidienne d'information en France relève du modèle gratuit. Le quotidien 20 Minutes diffuse plus de 600 000 exemplaires par jour en France, ce qui en fait évidemment un concurrent sérieux pour la presse payante. Ainsi, il attire autant de publicité que le quotidien de référence, le journal Le Monde.

L'autre cause de la crise de la presse écrite est le développement des nouvelles technologies, dont l'impact est de plus en plus fort. Certains en viennent même à se demander si la presse écrite ne serait pas une activité du passé, voire dépassée, un média de l'ère industrielle en voie d'extinction. La formidable expansion des outils d'information sur Internet bouleverse en effet les repères traditionnels : nombreux sont ceux qui, dans le monde entier et en France en particulier, délaissent la lecture de la presse pour l'écran de leur ordinateur.

De même, de plus en plus de personnes s'informent sur leur téléphone portable car il est possible de recevoir des informations sous la forme de SMS et de MMS.

M. Robert Del Picchia. Eh oui ! C'est vrai.

M. Roger Karoutchi. Ainsi, tous les secteurs traditionnels de l'information sont susceptibles de perdre de l'audience. Le développement des blogs, mêlant informations et opinions, conduit encore davantage un certain public à se détourner de la presse écrite traditionnelle. On voit ainsi que les consommateurs, surtout les jeunes, ne ressentent pas le besoin de consulter, de lire et d'analyser la presse.

Bien évidemment, il nous faut donner aux jeunes l'envie de découvrir ou de redécouvrir la presse écrite. C'est pourquoi, monsieur le ministre, le projet de loi de finances répond à cet objectif en maintenant l'enveloppe créée en 2005 pour accroître la diffusion de la presse auprès des jeunes lecteurs.

L'intervention de l'État est, à cet effet, essentielle. Elle doit accompagner les mutations profondes que connaît la presse écrite. Pour la troisième année consécutive, le budget met l'accent sur le soutien aux initiatives structurantes ou innovantes du secteur. L'objectif est de créer ou de conforter, sur le long terme, les conditions du développement de la presse écrite et de son indépendance économique. Cette indépendance est essentielle pour préserver la liberté et la diversité des contenus.

Nos entreprises de presse ne disposent malheureusement pas de fonds propres suffisants, ce qui compromet leur capacité d'investissement. Aussi faut-il saluer la décision du Gouvernement de proroger le dispositif spécifique de provision pour investissements jusqu'en 2010. Le présent budget traduit donc le souci de simplifier les procédures, de privilégier les aides aux projets.

Je me réjouis d'ailleurs de l'adoption par l'Assemblée nationale de deux mesures spécifiques. La première fait bénéficier tous les quotidiens de la réduction d'impôt sur les sociétés de 25 %, et non la seule presse d'information politique et générale. La seconde étend le périmètre des investissements éligibles à la prise de participation dans d'autres entreprises de presse ou dans des entreprises intervenant dans la chaîne de fabrication ou de distribution de la presse.

J'insiste sur le fait que, de la capacité de notre presse quotidienne nationale à affronter la crise, dépendent l'indépendance et le pluralisme de la presse, ce qui justifie l'engagement de l'État.

Je voudrais dire à notre excellent rapporteur Louis de Broissia que son appel à s'abonner à tous les quotidiens me va droit au coeur, mais que je ne m'abonnerai peut-être pas à tous !

M. Robert Del Picchia. Mais il faut les sauver !

M. Roger Karoutchi. C'est vrai qu'il faut les sauver, mais tout de même...

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Allons, pas de sectarisme, monsieur Karoutchi ! (Sourires.)

Mme Annie David. Vous devriez prendre un abonnement à l'Humanité, monsieur Karoutchi !

M. Roger Karoutchi. Monsieur le ministre, ce n'est pas une question de sectarisme mais de moyens financiers ! (Nouveaux sourires.) Hélas, comme vous l'avez dit, la presse écrite n'étant pas gratuite et le prix des abonnements étant ce qu'il est... Mais je m'empresse de vous rassurer : le groupe politique que je préside à la région Île-de-France est abonné à tous les quotidiens, y compris à ceux qui défendent des opinions qui ne sont pas franchement les miennes. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et sur certaines travées de l'UC-UDF.)

Je terminerai sur ce sujet en rappelant que nous évoluons dans un environnement européen. J'espère donc, monsieur le ministre, que vous pourrez faire entendre votre voix pour que le taux réduit de TVA appliqué à la presse papier puisse également bénéficier à la presse en ligne, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.

En matière audiovisuelle, nous nous félicitons de la naissance de France 24, chaîne française d'information internationale. Les crises afghanes puis irakienne ont montré la nécessité pour la France de disposer d'une chaîne d'information internationale, à l'instar de CNN, BBC World ou Al-Jazira. CNN International a été créée il y a 21 ans, en 1985. Depuis, la multiplication de ce type de chaînes traduit le besoin des pays de présenter l'information internationale d'une manière qui leur soit adaptée, autrement dit qui intègre un point de vue correspondant davantage à leurs traditions sociales et culturelles.

Puisque cette nouvelle chaîne participera au rayonnement international de la France, l'État a décidé de contribuer à son financement. Son budget sera de 86 millions d'euros, dont 70 millions au titre de l'année 2007.

Je me réjouis que, désormais, un regard français soit porté sur l'actualité internationale. Le public visé par cette chaîne est d'abord un public étranger qui peut soit partager d'ores et déjà la vision française du monde, soit découvrir celle-ci grâce à ce nouvel instrument. Puisqu'il s'agit de toucher un maximum de personnes dans le monde, il faudra utiliser d'autres langues que la langue française, mais France 24 devra être - et sera - également un outil de promotion de la langue française. Elle connaîtra donc certainement une forte audience auprès de la communauté francophone dans le monde entier.

M. Roger Karoutchi. Élargissant mon propos, je rappellerai que la radio reste, pour une très large part de la population mondiale, le média moderne privilégié, en particulier grâce à son principal atout : la mobilité. Le problème de RFI a été largement abordé et j'y reviendrai d'autant moins que Louis Duvernois le fera juste après moi.

Vous l'avez dit à plusieurs reprises, monsieur le ministre, ainsi que les rapporteurs, les crédits de cette année serviront en priorité à la révolution numérique.

Nous allons en effet passer de l'ère analogique à l'ère numérique. Nous allons découvrir la haute définition et assister au développement de la télévision mobile personnelle. Notre paysage audiovisuel va donc se trouver bouleversé comme il ne l'a jamais été.

Avec le projet de loi sur la télévision du futur, vous avez décidé, monsieur le ministre, d'anticiper et d'accompagner les changements à venir. Ces changements seront particulièrement significatifs en matière de diffusion et de consommation audiovisuelle. Nous respecterons ainsi l'objectif fixé par la Commission européenne à l'ensemble des États membres de l'Union.

Nous ne pouvons que nous réjouir du lancement réussi des dix-huit chaînes gratuites de la TNT. Alors qu'il existait une forte attente de la part des Français, la plupart des foyers ne recevaient jusqu'alors que cinq ou six chaînes gratuites en mode analogique. Peu nombreux étaient en outre les Français qui bénéficiaient de chaînes d'informations en continu et de chaînes thématiques. J'ajouterai qu'aucune nouvelle chaîne gratuite n'avait été lancée en France depuis 1987.

Heureusement, malgré les discussions et les retards, le projet a survécu. Grâce à la conviction de quelques-uns, dont vous êtes, monsieur le ministre, la révolution numérique hertzienne est désormais en marche !

Le rythme d'équipement des ménages a dépassé les prévisions. Alors que la proportion de la population couverte au lancement était la plus faible sur le marché européen - exception faite de l'Allemagne -, la France a connu le démarrage le plus rapide avec 500 000 adaptateurs vendus en seulement quatre mois, ce qui est considérable. Fin mars 2006, un an après le lancement de la TNT, le nombre de boîtiers vendus ou loués a atteint les 2,5 millions, avec en perspective le doublement de ce chiffre pour 2007, ce qui témoigne indéniablement du succès de la TNT.

Par le lancement des chaînes de la TNT, le Gouvernement a résolument installé le public français dans l'ère du numérique. Lors de nos débats, nous avons évoqué les problèmes de couverture du territoire et nous avons voté le principe d'une couverture à 95 % par les chaînes gratuites aujourd'hui diffusées en mode analogique. Une offre satellitaire sera mise en place dans les trois mois suivant la promulgation de la loi, ce qui permettra de desservir immédiatement les zones d'ombre et d'étendre la couverture par la TNT.

Il reste maintenant, monsieur le ministre, à informer nos concitoyens, de manière claire et complète, de l'ensemble du dispositif. Nous vous faisons toute confiance en la matière.

Donner des moyens à la presse écrite, à la radio, au service public de la télévision, c'est préserver pour l'avenir l'indépendance et le pluralisme de ces médias. C'est aussi assurer leur survie et leur développement dans un environnement mouvant. Pour toutes ces raisons, le groupe UMP votera les crédits de la mission « Médias ». (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Louis Duvernois.

M. Louis Duvernois. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, c'est au nom de ce que j'appellerai un certain parallélisme des formes que j'aimerais vous livrer, de façon très synthétique, quelques réflexions sur un aspect particulier de l'audiovisuel extérieur français.

En effet, alors que le nouveau-né du paysage audiovisuel français, France 24, bénéficie de toutes les attentions de la part de la puissance publique, il m'apparaît important de mettre l'accent sur la différence de traitement réservée dans ce budget à d'autres opérateurs qui n'ont pourtant pas failli à leur mission.

Les objectifs de France 24 sont d'offrir aux décideurs, aux médias et aux téléspectateurs un point de vue français sur l'actualité mondiale. Or, n'est-ce pas exactement la définition de la mission poursuivie par RFI, qui, avec ses 44 millions d'auditeurs dans le monde, participe activement au rayonnement extérieur de la France ?

Aussi, permettez-moi de m'interroger sur ce que l'on peut appeler le désengagement de l'État vis-à-vis de RFI. En effet, le total des ressources publiques qu'il est prévu d'allouer à RFI pour 2007 s'élève à 126 millions d'euros contre 128 millions pour l'exercice 2006, soit une diminution de 1,6 %.

Ce montant se décompose de la façon suivante : d'une part, une hausse de la redevance, qui passe de 55,86 millions à 56,53 millions d'euros, soit une augmentation de 1,2 %, et d'autre part, une baisse de 3,5 % de la subvention du ministère des affaires étrangères, qui passe de 72,13 millions à 69,63 millions d'euros.

Cette évolution contraste avec celle des autres sociétés du secteur public, dont le budget augmente en moyenne de 2,57 %. D'une manière générale, ce budget ne fait que confirmer une tendance amorcée il y a une dizaine d'années. En effet, entre 1997 et 2006, les dotations publiques de RFI ont augmenté de seulement 15 %, contre 25 % pour RFO, 33 % pour Radio France, 69 % pour France Télévisions et 149 % pour TV5 Monde.

En ma qualité d'administrateur de RFI au titre du Sénat, je déplore que cette radio n'ait pas été dès le départ associée au lancement de France 24. Cette mise à l'écart a d'ailleurs été particulièrement mal ressentie par cet opérateur qui, après avoir longtemps porté les ambitions de la politique française en matière d'audiovisuel extérieur, se trouve désormais relégué, en quelque sorte, au second plan. Il eût été beaucoup plus judicieux de créer une synergie entre France 24 et RFI, et ce à plusieurs titres.

Tout d'abord, en ce qui concerne les personnels, il est pour le moins étonnant que l'appel à candidatures pour 170 postes de journalistes à France 24 n'ait pas tenu compte de l'existence des 450 journalistes de RFI, pour la plupart spécialisés dans le traitement de l'actualité internationale et qui auraient constitué un relais bien rodé et de grande qualité.

Ensuite, RFI, forte de sa position dominante, notamment en Afrique, est la mieux placée pour aider France 24 à asseoir sa position dans le monde face à ses concurrents télévisuels. En effet, les auditeurs de RFI ne sont-ils pas ce que l'on appelle, dans le langage de la communication, les cibles que souhaite atteindre France 24, RFI devenant ainsi son meilleur support publicitaire. La synergie ainsi créée permettrait d'optimiser l'investissement important réalisé par l'État dans la chaîne France 24, à laquelle, par ailleurs, je souhaite le plus grand succès.

Quand comprendra-t-on cependant que la nouvelle chaîne d'information télévisuelle ne concurrence pas la radio, bien au contraire ! En décembre 2005 déjà, dans le cadre de l'adoption du projet de loi de finances pour 2006, j'avais insisté sur la nécessaire recherche de synergie entre tous les opérateurs publics de l'audiovisuel extérieur et d'autres partenaires. La question se pose toujours et plus que jamais. Il devient impératif d'élaborer les paramètres d'action d'une nouvelle organisation de l'audiovisuel extérieur. Il nous faut définir, entre ces différents vecteurs de promotion de notre langue, de notre culture et de notre économie, une stratégie efficace et cohérente appuyée sur l'optimisation des moyens financiers publics investis pour renforcer le rayonnement extérieur de la France.

Nous aimerions ainsi, monsieur le ministre, connaître votre appréciation globale de cette situation ainsi que votre vision de la remise en ordre attendue des dispositifs audiovisuels existants et éparpillés au sein de cette importante mission publique. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, le budget que je vous présente est un bon budget. En matière de communication et de culture, ce projet de budget, comme les précédents, est d'abord l'expression d'une politique.

La politique que je mène, dans l'ensemble des domaines dont j'ai la charge, en faveur de la diversité culturelle, de la création, de l'emploi, de la multiplication des offres de programmes et de la défense du pluralisme, se traduit également dans le budget des médias.

Le domaine des médias dans son ensemble est en plein bouleversement : vous avez, les uns et les autres, développé des analyses très judicieuses à cet égard. Il connaît des mutations rapides, accélérées, brutales parfois, liées aux extraordinaires progrès technologiques qui multiplient, diversifient, transforment les usages, et qu'il nous faut non seulement comprendre, observer, analyser, mais surtout anticiper et accompagner.

Ces mutations impliquent d'agir, de réformer et de moderniser. À l'appui de mon propos, je prendrai deux exemples.

Le premier concerne l'Internet, désormais présent dans la vie quotidienne, professionnelle et personnelle des Français, dans plus d'un foyer sur deux, et majoritairement en haut débit. Ceux d'entre vous qui ont voté la loi relative au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information peuvent être fiers d'avoir adapté notre législation pour protéger et garantir les droits des créateurs en permettant le développement d'une offre légale nouvelle, marquant l'avènement de l'ère numérique, qui concerne désormais chaque média et chaque Français. Les décrets d'application de ce texte sont tous en cours de rédaction.

S'agissant de la rémunération pour copie privée, qui vous préoccupe comme moi et qui fait l'objet d'un projet de recommandation au niveau européen tendant à sa disparition, le Premier ministre vient de saisir le président de la Commission, M. José Manuel Barroso. Le principe de la copie privée et son corollaire, sa rémunération, doivent être préservés. C'est essentiel pour les auteurs, les artistes-interprètes et le spectacle vivant.

Le deuxième exemple d'adaptation qui vient immédiatement à l'esprit est, bien sûr, celui de la télévision. Jamais, depuis vingt ans, le paysage audiovisuel français n'avait été autant bouleversé. Le lancement réussi de la télévision numérique terrestre a multiplié le nombre de chaînes gratuites par trois, le faisant passer de six à dix-huit. Ce lancement n'est pas le fruit d'une génération spontanée ni du seul progrès technique, mais avant tout d'une volonté politique forte, de choix politiques et techniques politiquement assumés par ce gouvernement et la majorité parlementaire.

M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis. C'est vrai !

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. J'insiste sur ce point : jamais une majorité n'avait permis la création d'autant de chaînes. Cela se traduit positivement pour le téléspectateur, qui bénéficie d'une offre élargie, mais également pour le monde de la création et les entreprises de production, qui représentent un riche vivier d'emplois et s'intègrent dans une stratégie globale d'attractivité de notre économie.

Vos travaux et les débats d'une grande richesse que nous avons eus ici même, lors de la discussion du projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur, il y quelques semaines, participent de cette démarche. Je suis d'ailleurs heureux de vous annoncer - c'est une information que je vous donne en primeur - que la Commission européenne vient d'approuver la création du fonds d'aide à l'équipement des foyers démunis prévu par le projet de loi.

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Ce fonds est essentiel pour garantir l'égalité entre les territoires et entre chacun de nos concitoyens.

Ces résultats, si positifs soient-ils, n'ont pas pour corollaire une explosion sans contrôle des crédits affectés à l'audiovisuel public.

Il ne s'agit pas pour moi d'affirmer devant la Haute Assemblée que mon budget est bon parce qu'il augmente. Il s'agit d'affirmer que toute augmentation des ressources soumise à votre vote et à votre contrôle correspond à une volonté politique et à des actions claires et déterminées et que - c'est cela la sincérité des comptes - si les dotations de certaines lignes diminuent, c'est parce que nous avons constaté que l'intégralité des crédits n'avaient pas été consommés l'année précédente : il est inutile d'afficher pour afficher.

L'extension du recours à la contractualisation entre l'État et les entreprises de l'audiovisuel public participe de cette démarche. Je sais que vous y tenez beaucoup. Moi aussi.

Les décisions politiques du Gouvernement, sous l'impulsion du Président de la République, et les choix budgétaires approuvés par la majorité parlementaire ont aussi permis la création de la chaîne française d'information internationale, France 24, qui a commencé à émettre avant-hier, le 6 décembre, et d'abord sur Internet, à destination du monde entier, afin d'offrir un regard et un point de vue français sur une actualité internationale de plus en plus suivie par nos concitoyens, conscients des enjeux de la mondialisation.

Cette chaîne n'est pas un étage de plus dans l'audiovisuel extérieur français. Elle apporte, non pas la voix de la France, mais un souffle et un esprit nouveaux, de nature à faire partager le plus largement possible un regard panoramique et pluriel, expression d'une diversité qui considère toutes les régions de la planète avec le même intérêt et le même soin. France 24 utilise l'ensemble des synergies de l'audiovisuel extérieur français : RFI, Canal France International, l'AFP et l'Agence internationale de la télévision, l'AITV, en particulier.

Monsieur Duvernois, je peux vous indiquer que les discussions sont en cours entre France 24 et RFI, à l'instar de celles qui se sont déroulées avec l'AFP. Cette chaîne va donc utiliser ce potentiel exceptionnel de journalistes présents partout dans le monde pour multiplier le plus possible ses correspondants.

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. J'ai eu la fierté de rencontrer aujourd'hui le président de la République arabe d'Égypte, qui a été le premier invité étranger de France 24 pendant un quart d'heure. Il était intéressant de voir à quel point cette expression de la liberté française est attendue partout dans le monde.

J'aime faire cette comparaison : un arc-en-ciel est un assemblage de toutes sortes de couleurs ; la couleur de la France manquait à l'arc-en-ciel de la diversité de l'information, cette lacune est aujourd'hui comblée. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Je souhaite à toutes les équipes de France 24 une grande réussite car elles ont relevé un défi tout à fait extraordinaire en se constituant dans un délai aussi bref ; les journalistes de cette chaîne, au nombre de cent soixante-dix, appartiennent à plus de vingt-cinq nationalités. Ils font preuve d'un état d'esprit tout à fait remarquable, et la Haute Assemblée comme l'ensemble de nos concitoyens peuvent être fiers, dans ce monde de fureur, de contribuer, par l'information et la liberté, au développement du respect. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Cette législature a aussi vu la réforme de la redevance audiovisuelle, qui a permis de rationaliser et de moderniser le mode de recouvrement de cette ressource essentielle au service public et qui s'inscrit plus globalement dans la réforme de l'État conduite par le Gouvernement. Un bilan est en cours au sein du ministère de l'économie et des finances.

La réforme a permis également d'exonérer un plus grand nombre de contribuables en alignant la redevance sur la taxe d'habitation et en maintenant les droits acquis, de diminuer le taux de la redevance - 116 euros en 2005 contre 116,5 euros en 2004 - et de limiter la taxe à une seule redevance audiovisuelle par foyer, les résidences secondaires se trouvant ainsi exonérées. Grâce à la diminution des frais d'assiette, de recouvrement et de trésorerie, les recettes nettes ont augmenté.

Certes, la progression des recettes nettes de redevance observée en 2005, à la suite de la réforme, s'est stabilisée et les prévisions d'encaissement net pour 2006 et 2007 s'élèvent à 2 280 millions d'euros. Mais ce qui importe, c'est que les ressources publiques allouées aux sociétés du secteur audiovisuel connaîtront une progression de 2,6 %, sans hausse du barème de la redevance et qu'elles seront garanties, en application d'une décision du Gouvernement et du Parlement, décision capitale pour toutes les sociétés de l'audiovisuel public.

Cette rationalisation des moyens de l'État mérite d'autant plus d'être soulignée qu'elle permet d'accroître la ressource effectivement versée à l'audiovisuel public.

Grâce à la progression de leurs ressources, les organismes de l'audiovisuel public ont les moyens de participer pleinement aux mutations technologiques en cours, tout en renforçant la spécificité et la richesse de leurs programmes. Ainsi, les priorités fixées au secteur audiovisuel public pour 2007 visent à en renforcer la spécificité, en développant une offre de qualité en télévision numérique terrestre ainsi qu'en haute définition et en favorisant notamment la sauvegarde du patrimoine.

La progression de la dotation publique de France Télévisions permettra au groupe de poursuivre quatre priorités.

Tout d'abord, parce que le succès de la télévision numérique repose sur les programmes qui sont offerts aux téléspectateurs, France Télévisions doit renforcer la grille des chaînes de la télévision numérique terrestre, France 4, France 5, et France Ô, dont le Président de la République a annoncé la diffusion sur la TNT en Île-de-France. J'ai donc demandé au Conseil supérieur de l'audiovisuel en début d'année de permettre la diffusion de France Ô sur la TNT en Île-de-France, sur le multiplexe public. Ce dernier pourra alors également diffuser en province les chaînes locales analogiques et certains décrochages de France 3 qui sont aujourd'hui mal diffusés sur la TNT. Il est grand temps que ce transfert se réalise.

Nous devons ensuite poursuivre et accélérer le déploiement de la TNT sur tout le territoire. France Télévisions doit en effet se montrer exemplaire quant au respect du calendrier de déploiement de la TNT défini par le CSA, qui prévoit une couverture de 85 % de la population à partir de 110 sites pour la fin de 2007 ; le groupe doit également poursuivre son déploiement au-delà de ces 110 sites afin de compléter sa couverture jusqu'à 95 % du territoire, comme votre assemblée l'a à juste titre souhaité avant d'adopter le projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur, et dans la perspective de l'extinction de la diffusion analogique prévue à la fin de 2011.

Le développement des programmes en haute définition est une troisième priorité. France Télévisions, qui a d'ores et déjà diffusé des programmes en haute définition, grâce à la préemption de l'État dans le cadre des expérimentations, continuera à diffuser la proportion la plus importante possible de programmes en haute définition dans ce cadre expérimental, puis dans le cadre des autres préemptions que le Gouvernement effectuera pour les chaînes de service public. Le service public ne sera donc pas le laissé-pour-compte des évolutions technologiques.

Enfin, en ce qui concerne le sous-titrage des programmes pour les personnes sourdes et malentendantes, la loi historique du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées pose le principe général d'adaptation de la totalité des programmes télévisés, à l'exception des messages publicitaires, dans un délai maximum de cinq ans suivant la publication de la loi, pour toutes les chaînes publiques. L'enjeu est important et ambitieux pour le groupe France Télévisions compte tenu du nombre de chaînes nationales concernées.

L'ensemble de ces éléments stratégiques, qui fondent la télévision publique de l'avenir, sont les éléments clés du contrat d'objectifs et de moyens de France Télévisions en cours de discussion et que je souhaite signer, tout comme pour Arte France, dans un délai compatible avec sa nécessaire transmission à vos commissions.

L'augmentation des dotations d'Arte France permettra à la société de jouer un rôle pionnier en faveur des nouvelles technologies de diffusion, tout en poursuivant ses efforts en faveur de la création.

Je dirai également un mot de la représentation des minorités visibles à l'antenne des chaînes de télévisions publiques, certains d'entre vous ayant exprimé leur préoccupation à cet égard.

Sur la base de l'avis du Haut conseil à l'intégration et des recommandations du CSA, le cahier des charges de l'ensemble des chaînes et radios publiques, soit France 2, France 3, France 4, France 5, RFO, Radio France et Radio France Internationale, a été modifié à nouveau par le décret n° 2006-645 du 1er juin 2006, qui leur assigne, notamment, l'obligation « de prendre en compte, dans la représentation à l'antenne, la diversité des origines et des cultures de la communauté nationale » et de veiller « à ce que les programmes donnent une image la plus réaliste possible de la société française dans toute sa diversité ». Ces dispositions s'ajoutent au plan d'action de France Télévisions, qui a été renforcé et porte ses fruits. Elles font partie des objectifs que je suis en train de négocier avec France Télévisions parce qu'elles représentent un enjeu tout à fait essentiel.

S'agissant de Radio France, l'année 2007 doit lui permettre de concrétiser les orientations du contrat d'objectifs et de moyens, qui a été approuvé par le conseil d'administration du 12 juillet dernier. Les remarques très pertinentes formulées par la commission des affaires culturelles du Sénat sont en train d'être prises en compte. Je tiens à saluer cette procédure, qui vous associe davantage à l'élaboration des contrats d'objectifs et de moyens, mesdames, messieurs les sénateurs. Elle est un facteur d'amélioration de ces contrats et, j'en suis convaincu, un gage de leur efficacité.

Votre vote permettra de donner à Radio France les moyens de réaliser de nouveaux développements - extension de la diffusion FM, déploiement de la radio numérique, développement de chaînes thématiques dérivées et de nouveaux services - et d'engager le chantier de réhabilitation de la Maison de la radio, tout en confortant ses sept chaînes et ses formations musicales dans leurs missions de service public.

L'action en faveur du patrimoine - j'aurai l'occasion d'y revenir devant vous lors de l'examen du projet de budget de la culture - est une priorité de la politique culturelle du Gouvernement. Dans la nouvelle ère numérique, cette priorité vaut aussi, bien sûr, pour l'audiovisuel, et les budgets que vous avez votés, comme le projet que je vous soumets aujourd'hui, permettent de renforcer encore l'effort de sauvegarde et de mise en valeur de notre patrimoine audiovisuel accompli par l'Institut national de l'audiovisuel.

J'ai d'ailleurs inscrit dans le contrat d'objectifs et de moyens de l'INA, signé à la fin de 2005, ma volonté de poursuivre et d'accélérer la mise en oeuvre du plan de sauvegarde et de numérisation, afin de permettre la numérisation, à l'horizon de 2015, de l'intégralité des fonds audiovisuels. C'est l'une des priorités du projet de budget de l'audiovisuel public pour 2007.

En ce qui concerne RFI, je tiens tout d'abord à saluer cette grande entreprise, dont la présence partout dans le monde est un gage de pluralisme et de renforcement de la démocratie informative. Je travaille, avec mon collègue le ministre des affaires étrangères, au contrat d'objectifs et de moyens de cette société, qui est, vous avez raison de le dire, monsieur le rapporteur, une grande et belle maison. RFI doit poursuivre ses efforts de modernisation et a d'ailleurs commencé cette tâche en renégociant le contrat qui la lie à TDF.

RFI doit aussi développer davantage encore son offre sur Internet : c'est non pas la brider, mais faire en sorte qu'elle soit diffusée et reçue partout. L'objet de ce contrat sera de déterminer, en concertation avec les équipes de RFI, la stratégie éditoriale la plus adaptée au monde moderne, ainsi que les moyens financiers appropriés pour lui permettre d'accomplir ses missions. Pour 2007, la part de financement de RFI issue de la redevance progresse.

La politique de l'audiovisuel que je conduis au nom du Gouvernement et grâce aux budgets que vous avez votés, mesdames, messieurs les sénateurs, est aussi une politique en faveur de l'emploi.

Dans le secteur dynamique et créateur d'emplois de la production et de la création cinématographiques et audiovisuelles, la politique de relocalisation des tournages, d'incitation et d'encouragement à l'emploi porte ses fruits, grâce notamment aux mesures de crédit d'impôt, élargies à l'audiovisuel, mais aussi à l'addition des énergies, aux partenariats qui complètent l'action de l'État.

Ainsi, j'ai intensifié le partenariat entre l'État et les régions, en renouvelant les conventions État-région et en mettant en oeuvre le dispositif « 1 euro de l'État pour 2 euros des régions ».

L'ensemble de ces mesures a permis une très forte progression et une réelle relocalisation des tournages en France. Là encore, il s'agit d'évaluer avec vous la bonne utilisation des deniers de l'État. La meilleure réponse aux interrogations légitimes de la commission des finances sur la dépense fiscale consiste à constater que les résultats sont là.

En effet, depuis l'introduction du crédit d'impôt, le nombre de semaines de tournage en France a augmenté de 20 %. L'efficacité de la mesure de crédit d'impôt que vous avez votée a permis de faire passer le nombre de semaines de tournage en France des films français de 880 en 2003 à un millier cette année. Nous pouvons être fiers de la bonne santé non seulement de l'audiovisuel, mais aussi du cinéma français, qui, pour la première fois de son histoire, rassemble plus de spectateurs dans les autres pays du monde qu'en France.

C'est dire combien la promotion de la diversité culturelle est une réponse aux risques d'uniformisation et combien la culture est un atout de taille pour notre pays. La qualité et la visibilité internationale de la création française sont unanimement reconnues, au moment même où la diversité culturelle entre dans le droit international et où, ce dont je ne suis pas peu fier, l'Union européenne a validé notre système d'aide au cinéma, marquant avant tout la reconnaissance des talents et du travail des créateurs, des artistes et des techniciens français.

C'est dans cette perspective que doit s'apprécier la progression de 2 % des crédits destinés au cinéma et à l'audiovisuel au sein du projet de budget du Centre national de la cinématographie pour 2007.

S'agissant plus particulièrement du financement du cinéma, je souhaite appeler votre attention sur quelques points.

En ce qui concerne tout d'abord les SOFICA, dont vous aurez à débattre dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances rectificative pour 2006, je suis heureux de l'adoption, hier soir, à l'Assemblée nationale, du dispositif proposé par le Gouvernement.

La réforme que j'ai mise en place, voilà un an, pour orienter le financement drainé par les SOFICA vers les sociétés de production indépendantes a encore accru ce rôle : en obligeant les SOFICA à réaliser au moins 35 % de leurs investissements dans la production indépendante, la réglementation encourage fortement la création et la diversité culturelle.

Le financement de la production cinématographique et audiovisuelle est en effet indispensable à la diversité culturelle et à l'emploi. Il faut aujourd'hui, et de manière durable, refonder les bases de son avenir, afin de moderniser et donc d'adapter à l'ère numérique l'assiette de la taxe assise sur les ressources publicitaires et les abonnements des chaînes de télévision.

Cette modernisation devra être neutre sur le plan technologique, je l'ai dit ici pendant la discussion du projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur. Elle doit aussi être équitable. J'ai demandé une accélération de la concertation, déjà très engagée, avec les professionnels. J'en attends le résultat d'ici à la fin de l'année. Les ressources susceptibles d'être engendrées par cette réforme permettront de soutenir la production de programmes en haute définition et pour la télévision mobile. Elles devront aussi contribuer, dans un univers régulé, à l'avènement progressif du cinéma numérique.

La diversité culturelle, c'est aussi la représentation des minorités visibles dans la production des oeuvres audiovisuelles. C'est la raison pour laquelle, conformément au souhait et à la volonté du Président de la République, un fonds pour la diversité culturelle a été créé au Centre national de la cinématographie, afin d'aider plus particulièrement les productions traitant des sujets liés à l'intégration ou à la cohésion sociale. Ce fonds aidera les projets qui lui seront soumis à hauteur de 5 millions d'euros au total en 2007. Les dossiers seront instruits par une commission présidée par M. Alexandre Michelin.

La diversité, le pluralisme, ce sont également les valeurs clés de ce secteur essentiel, auquel est consacrée une part importante du budget des médias : la presse écrite.

Dans ce domaine, pilier de notre démocratie, les budgets que vous avez votés et le projet que je vous soumets aujourd'hui permettent de soutenir le développement de la diffusion de la presse écrite, de conforter les conditions de son pluralisme et de son indépendance, de favoriser sa modernisation et donc de garantir sa liberté.

Les lois de finances de 2005 et de 2006 avaient consacré à la presse des moyens exceptionnels par leur ampleur. Avec un budget total de 274 millions d'euros, le projet de loi de finances pour 2007 présente, à périmètre constant, un montant de crédits supérieur de plus de 22 % aux moyens consacrés à la presse écrite il y a encore deux ans.

Cette année, grâce à l'engagement et à l'arbitrage du Premier ministre, le Gouvernement a arrêté des mesures fiscales structurantes et totalement novatrices en faveur de la presse.

Nous le savons, l'une des difficultés chroniques des entreprises de presse dans notre pays réside dans la faiblesse de leurs fonds propres, qui obère leur capacité d'investissement. Il est donc important de rappeler les mesures fiscales que vous venez d'adopter.

Dans le cadre du présent projet de loi de finances, le dispositif spécifique de provision pour investissements des entreprises de presse, dit « du 39 bis », qui venait à échéance à la fin de l'année, est prorogé jusqu'en 2010 et adapté pour mieux répondre aux besoins des entreprises.

La prorogation de ce mécanisme jusqu'en 2010 est en effet accompagnée d'un aménagement significatif : l'extension du périmètre des investissements éligibles à la prise de participation dans d'autres entreprises de presse ou dans des entreprises intervenant dans la chaîne de fabrication ou de distribution de la presse. Vous avez souhaité que ce mécanisme efficace demeure applicable à l'ensemble des familles de la presse écrite ; j'en prends acte.

Par ailleurs, un nouveau mécanisme de réduction de l'impôt sur les sociétés, pour les entreprises entrant dans le capital des entreprises de presse éditant des publications d'information politique et générale, est mis en place. Il est très important de le faire savoir, afin que cela profite véritablement au pluralisme de la presse. Vous le savez, j'ai souhaité, compte tenu de la situation de la presse écrite d'information politique et générale, que vous décrivez dans votre rapport, monsieur de Broissia, et de son importance pour le pluralisme et la démocratie, que cette mesure soit d'application immédiate. La réduction d'impôt sera égale à 25 % du montant des sommes versées au titre des souscriptions en numéraire au capital de ces sociétés.

Ces mesures visent à rendre attrayants les investissements dans ce secteur, et plus particulièrement en faveur de la presse quotidienne d'information politique et générale. Elles peuvent et doivent être une chance pour les titres, qu'ils traversent des difficultés, et je pense bien sûr à Libération, ou qu'ils souhaitent renforcer leur capital.

À Strasbourg, le 23 novembre dernier, j'ai par ailleurs appelé à la création, par la presse elle-même, d'une fondation pouvant collecter les dons de particuliers et d'entreprises à des journaux d'opinion, dons susceptibles de donner lieu aux déductions liées au mécénat culturel. De telles fondations peuvent être aussi créées titre par titre. J'ai réuni un certain nombre de responsables du secteur de la presse pour les mobiliser dans cette perspective. Je respecte leur liberté : il leur revient de choisir s'ils s'engagent à créer des fondations titre par titre ou si, à l'instar de la Fondation du patrimoine, même si la comparaison n'est pas entièrement valable, sera mise en place une fondation pour le pluralisme de la presse politique, qui se chargera ensuite de procéder aux répartitions nécessaires.

M. Ivan Renar. Très bien !

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. L'engagement constant de ce gouvernement en faveur de la presse écrite implique d'accompagner aussi l'entrée de celle-ci dans l'univers numérique. C'est la raison pour laquelle j'ai décidé de confier à Marc Tessier une mission prospective sur ce sujet. Les conclusions de ce travail me seront rendues en janvier prochain, et je réunirai à cette occasion l'ensemble des représentants de la presse écrite. Le Parlement ne manquera pas d'être associé à la concertation, car c'est une bonne manière de progresser.

Ce défi du numérique est un enjeu majeur pour l'avenir de la presse. Il faut qu'il soit une chance, et non un facteur de déséquilibre.

Le Gouvernement s'attache en outre à convaincre la Commission européenne et nos partenaires européens de l'importance d'appliquer à la presse en ligne le taux réduit de TVA dont bénéficie la presse « papier ». Ce sujet a été évoqué au dernier conseil Ecofin. La réflexion avance, grâce à la mobilisation du Gouvernement français. La Commission européenne a demandé une étude sur l'ensemble des taux de TVA applicables aux services en ligne et ne statuera définitivement qu'après avoir pris acte de ses conclusions en juin 2007.

L'engagement traditionnel de l'État en faveur du pluralisme est bien sûr maintenu. Les aides traditionnelles jouent un rôle fondamental. Comme en 2005 et en 2006, j'ai voulu que les crédits dédiés à la presse écrite appuient prioritairement les efforts engagés par le secteur pour conforter durablement les conditions de son indépendance économique et de son développement futur, qu'il s'agisse de la modernisation des entreprises, d'actions innovantes ou de la recherche d'une plus grande autonomie financière : 60 millions d'euros seront donc consacrés à ces objectifs en 2007, afin d'assurer le maintien du pluralisme de l'information et la vitalité du débat démocratique, tandis que 22,5 millions d'euros seront mobilisés pour continuer d'accompagner la modernisation sociale de la fabrication de la presse quotidienne, qu'elle soit nationale, régionale ou départementale.

Ainsi, cette législature est marquée par une puissante progression du montant des aides à la presse, par un important effort de rationalisation et de rénovation des dispositifs existants, ainsi que par la création de nouveaux dispositifs, principalement dédiés à la modernisation du secteur et donc au renforcement des fonds propres des entreprises de presse.

Parler de ces réalités économiques et financières n'est en aucune manière tourner le dos à l'essentiel, c'est-à-dire la passion des journalistes, des techniciens, de celles et ceux qui travaillent dans les entreprises de presse. C'est leur ardeur, leur volonté d'être à l'écoute de tout ce qui se passe dans notre pays et dans le monde qui sont, au fond, les garants de la vitalité et du pluralisme du secteur.

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, ce projet de budget, comme les précédents, est l'expression concrète de l'engagement fort de l'État pour préparer l'avenir, dans ce secteur des médias où notre pays dispose d'une grande créativité, d'une diversité d'atouts et de talents qui le placent en bonne voie pour réussir. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

Mme la présidente. Je n'ai été saisie d'aucune demande d'explication de vote sur les deux missions en discussion avant l'expiration du délai limite.