sommaire
présidence de M. Philippe Richert
2. Journée de mémoire de la traite négrière, de l'esclavage et de leurs abolitions
MM. le président, Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication.
3. Droit d'auteur et droits voisins dans la société de l'information. - Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi déclaré d'urgence
Article additionnel avant l'article 7 bis
Amendement no 18 de la commission et sous-amendements nos 185, 280 du Gouvernement, 194 de M. Jacques Pelletier, 237 rectifié bis à 242 rectifié bis de M. Roger Karoutchi, 268 à 270 rectifié de Mme Catherine Morin-Desailly, 112 de M. Alain Dufaut, 264 rectifié de M. Pierre Hérisson, sous-amendement identiques nos 74 de M. Michel Charasse et 196 rectifié de M. Jacques Pelletier et sous-amendement no 113 de M. Alain Dufaut. - MM. Michel Thiollière, rapporteur de la commission des affaires culturelles ; Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication ; Jacques Pelletier, Jean-René Lecerf, Mme Catherine Morin-Desailly, MM. Alain Dufaut, Pierre Hérisson, Michel Charasse, Yann Gaillard, Mme Marie-Christine Blandin, MM. David Assouline, Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles ; Bruno Retailleau, Ivan Renar. - Retrait des sous-amendements nos 74 et 238 rectifié bis à 243 rectifié bis ; rejet des sous-amendements nos 268 à 270 rectifié ; adoption des sous-amendements nos 185, 194, 112, 264 rectifié bis, 280, 196 rectifié, 113 et, par scrutin public, de l'amendement no 18 modifié insérant un article additionnel, le sous-amendement no 237 rectifié bis étant devenu sans objet.
M. Bruno Retailleau.
Amendements nos 19 de la commission et 183 de M. Jack Ralite. - MM. le rapporteur, Ivan Renar, le ministre. - Retrait de l'amendement no 19 ; rejet de l'amendement no 183.
MM. Bruno Retailleau, Yann Gaillard, Mme Catherine Morin-Desailly.
Adoption de l'article.
Article additionnel après l'article 7 bis
Amendement n° 173 de M. Jack Ralite. - MM. Ivan Renar, le rapporteur, le ministre, Michel Charasse. - Rejet.
M. Yann Gaillard.
Amendement no 20 rectifié bis de la commission et sous-amendements nos 53 rectifié de M. Jean-Léonce Dupont, 75 de M. Michel Charasse, 248 à 253 de M. Jack Ralite, 54 de Mme Catherine Morin-Desailly et 281 du Gouvernement ; amendements nos 131, 132 de M. David Assouline, 226, 207, 208 de Mme Marie-Christine Blandin et 187 rectifié de M. Bruno Retailleau. - M. le rapporteur, Mme Catherine Morin-Desailly, M. Michel Charasse, Mme Annie David, MM. Ivan Renar, le ministre, Mmes Catherine Tasca, Marie-Christine Blandin, MM. Bruno Retailleau, Serge Lagauche. - Retrait des sous-amendements nos 75, 54 et de l'amendement no 226 ; rejet, par scrutin public, du sous-amendement no 248 ; rejet des sous-amendements nos 249 à 253 ; adoption des sous-amendements nos 53 rectifié, 281 et de l'amendement no 20 rectifié bis modifié rédigeant l'article, les autres amendements devenant sans objet.
Mmes Catherine Tasca, Annie David, Catherine Morin-Desailly.
MM. Bruno Retailleau, le ministre, Michel Charasse, au nom de la commission des finances. - Reprise par le Gouvernement de l'amendement no 21 rectifié de la commission.
Amendements nos 210 de Mme Marie-Christine Blandin, 21 rectifié bis du Gouvernement et sous-amendements nos 254, 255 de M. Jack Ralite, 195 de M. Jacques Pelletier et 76 de M. Michel Charasse ; amendements nos 133 de M. David Assouline et 77 de M. Michel Charasse. - Mme Marie-Christine Blandin, M. le ministre, Mme Annie David, MM. Ivan Renar, David Assouline, Michel Charasse, le rapporteur. - Retrait de l'amendement no 77 ; rejet, par scrutin public, de l'amendement no 210 ; rejet des sous-amendements nos 254 et 255 ; adoption, par scrutin public, de l'amendement no 21 rectifié rédigeant l'article, les sous-amendements nos 195 et 76 étant devenus sans objet et l'amendement no 133 devenant sans objet.
Amendement no 156 de M. Jack Ralite. - MM. Ivan Renar, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Adoption de l'article.
Amendement no 157 de M. Jack Ralite. - Mme Annie David, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Adoption de l'article.
Mme Catherine Morin-Desailly, M. le rapporteur.
Amendement no 158 de M. Jack Ralite. - MM. Ivan Renar, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Adoption de l'article.
Amendements identiques nos 159 de M. Jack Ralite et 212 de Mme Marie-Christine Blandin ; amendement no 22 de la commission ; amendements identiques nos 41 de M. Yann Gaillard, 55 de Mme Catherine Morin-Desailly et 213 de Mme Marie-Christine Blandin ; amendements identiques nos 42 de M. Yann Gaillard et 214 de Mme Marie-Christine Blandin ; amendement no 186 rectifié de M. Bruno Retailleau. - MM. Ivan Renar, David Assouline, le président, Mme Marie-Christine Blandin, MM. le rapporteur, Yann Gaillard, Bruno Retailleau, le ministre. - Retrait des amendements nos 41 et 42 ; rejet des amendements nos 159, 212, 55, 213 et 214 ; adoption de l'amendement no 22, l'amendement no 186 rectifié devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.
Amendement no 178 de M. Jack Ralite. - Mme Annie David, MM. le rapporteur, le ministre, Mme Marie-Christine Blandin. - Rejet.
Amendements nos 215, 216 de Mme Marie-Christine Blandin, 23 de la commission, 160 et 161 de M. Jack Ralite. - Mme Marie-Christine Blandin, MM. le rapporteur, Ivan Renar, le ministre, Bruno Retailleau, Mme Catherine Morin-Desailly. - Rejet des cinq amendements.
Mme Catherine Morin-Desailly.
Adoption de l'article.
Amendement no 179 de M. Jack Ralite. - MM. Ivan Renar, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendements nos 217 de Mme Marie-Christine Blandin, 24 rectifié de la commission, 162, 163 de M. Jack Ralite et 218 de Mme Marie-Christine Blandin. - Mme Marie-Christine Blandin, MM. le rapporteur, le ministre. - Retrait de l'amendement no 24 rectifié ; rejet des amendements nos 217, 162, 218 et 163.
M. Bruno Retailleau, Mme Catherine Morin-Desailly.
Adoption de l'article.
Amendements nos 25 rectifié de la commission, 182 de M. Jack Ralite, 56 de Mme Catherine Morin-Desailly et 101 de M. Gérard Longuet. - M. le rapporteur, Mmes Annie David, Catherine Morin-Desailly, MM. Gérard Longuet, le ministre. - Retrait de l'amendement no 56 ; adoption de l'amendement no 25 rectifié ; rejet des amendements nos 182 et 101.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 14 bis
Amendement no 105 de M. Gérard Longuet. - MM. Gérard Longuet, le rapporteur, le ministre. - Retrait.
Amendement no 102 de M. Gérard Longuet et sous-amendement no 273 rectifié de M. Roger Karoutchi. - MM. Francis Grignon, le rapporteur, le ministre, Gérard Longuet. - Rejet du sous-amendement et de l'amendement.
Suspension et reprise de la séance
Articles additionnels après l'article 14 bis (suite)
Amendement no 103 de M. Alain Dufaut. - MM. Alain Dufaut, le rapporteur, le ministre, David Assouline. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement no 234 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendements identiques nos 134 de M. David Assouline et 164 de M. Jack Ralite ; amendement n° 26 rectifié (priorité) de la commission et sous-amendements nos 263 de M. Jack Ralite, 265 à 267, 44 rectifié, 43 rectifié de M. Yann Gaillard et 287 rectifié de Mme Marie-Christine Blandin. - MM. David Assouline, Ivan Renar, le rapporteur, Mme Annie David, MM. Yann Gaillard, Mme Marie-Christine Blandin, M. le ministre, Mme Catherine Morin-Desailly, M. Philippe Darniche. - Adoption d'une demande de priorité de l'amendement no 26 rectifié ; retrait des sous-amendements nos 265 à 267, 44 rectifié et 43 rectifié ; rejet des sous-amendements nos 263 et 287 rectifié ; adoption, par scrutin public, de l'amendement no 26 rectifié rédigeant l'article, les amendements nos 134 et 164 devenant sans objet.
Article additionnel après l'article 14 quater
Amendement no 104 de M. Alain Dufaut. - MM. Alain Dufaut, le rapporteur, le ministre. - Retrait.
Amendement no 235 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement no 27 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 14 quinquies
Amendements identiques nos 45 de M. Yann Gaillard et 57 de Mme Catherine Morin-Desailly. - MM. Yann Gaillard, André Vallet, le rapporteur, le ministre. - Rejet des deux amendements.
Amendements identiques nos 46 de M. Yann Gaillard et 58 de Mme Catherine Morin-Desailly. - M. Yann Gaillard, le rapporteur, le ministre. - Rejet des deux amendements.
Amendement no 236 de la commission et sous-amendement no 275 du Gouvernement. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption du sous-amendement et de l'amendement modifié.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 15
Amendement no 165 de M. Jack Ralite. - Mme Annie David, MM. le rapporteur, le ministre, Mme Marie-Christine Blandin. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement no 78 rectifié de M. Michel Charasse et sous-amendement no 276 du Gouvernement. - MM. Michel Charasse, le ministre, le rapporteur. - Rejet du sous-amendement no 276 ; adoption de l'amendement no 78 rectifié rédigeant l'article.
Articles additionnels après l'article 15 bis
Amendement no 171 rectifié de M. Jack Ralite. - MM. Jack Ralite, le rapporteur, le ministre, Mme Catherine Morin-Desailly. - Rejet.
Amendement no 172 de M. Jack Ralite. - MM. Jack Ralite, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement no 170 de M. Jack Ralite. - MM. Ivan Renar, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Adoption de l'article.
Amendements nos 219 et 220 de Mme Marie-Christine Blandin. - Mme Marie-Christine Blandin, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet des deux amendements.
Amendements nos 221 et 222 de Mme Marie-Christine Blandin. - Mme Marie-Christine Blandin, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet des deux amendements.
Adoption de l'article.
Amendement no 223 de Mme Marie-Christine Blandin. - Mme Marie-Christine Blandin, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Adoption de l'article.
Articles additionnels avant l'article 19
Amendements nos 79 et 80 de M. Michel Charasse. - MM. Michel Charasse, le rapporteur, le ministre. - Rejet des deux amendements.
Amendement no 81 de M. Michel Charasse. - M. Michel Charasse. - Retrait.
Amendement no 83 de M. Michel Charasse. - MM. Michel Charasse, le rapporteur, le ministre, Mme Marie-Christine Blandin. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 19
Amendement no 84 rectifié de M. Michel Charasse. - MM. Michel Charasse, le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Articles additionnels après l'article 19 ou après l'article 20
Amendements nos 59 de Mme Catherine Morin-Desailly et 85 de M. Michel Charasse. - MM. André Vallet, Michel Charasse, le rapporteur, le ministre. - Rejet des deux amendements.
Article additionnel après l'article 19 (suite)
Amendement no 86 de M. Michel Charasse. - MM. Michel Charasse, le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement no 87 de M. Michel Charasse. - MM. Michel Charasse, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Adoption de l'article.
Article additionnel après l'article 20
Amendement no 88 de M. Michel Charasse. - MM. Michel Charasse, le rapporteur, le ministre. - Retrait.
Amendement no 29 rectifié de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement no 30 de la commission. - Adoption.
Amendement no 31 de la commission. - Adoption.
Amendement no 32 de la commission. - Adoption.
Amendement no 33 de la commission. - Adoption
Amendement no 34 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 20 ter
Amendement no 35 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Michel Charasse. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement no 36 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Articles 25 et 25 bis. - Adoption
Article additionnel après l'article 25 bis
Amendement no 37 rectifié de la commission et sous-amendement no 89 de M. Michel Charasse. - MM. le rapporteur, Michel Charasse, le ministre. - Rejet du sous-amendement ; adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Articles 26, 26 bis et 27. - Adoption
Amendements nos 38 rectifié de la commission et 192 rectifié bis de M. Yann Gaillard. - MM. le rapporteur, Yann Gaillard, le ministre. - Adoption des deux amendements.
Amendement no 107 de M. Alain Dufaut. - MM. Alain Dufaut, le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement no 39 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 30
Amendement no 40 de la commission et sous-amendements nos 258, 274 de M. David Assouline et 256 rectifié de M. Jack Ralite. - MM. le rapporteur, David Assouline, Jack Ralite, le ministre. - Rejet des sous-amendements nos 258 et 274 ; adoption du sous-amendement no 256 rectifié et de l'amendement no 40 modifié insérant un article additionnel.
Amendement no 176 de M. Jack Ralite. - MM. Jack Ralite, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Mme Marie-Christine Blandin, MM. Jack Ralite, David Assouline, Philippe Darniche, Mme Catherine Morin-Desailly, MM. Alain Dufaut, Serge Lagauche, Mme Catherine Tasca.
Adoption, par scrutin public, du projet de loi.
M. le ministre.
4. Dépôt d'une proposition de loi
5. Textes soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution
7. Dépôt de rapports d'information
compte rendu intégral
PRÉSIDENCE DE M. Philippe Richert
vice-président
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
Journée de mémoire de la traite négrière, de l'esclavage et de leurs abolitions
M. le président. Monsieur le ministre, mes chers collègues, aujourd'hui 10 mai a été déclaré par le Président de la République comme journée de « mémoire de la traite négrière, de l'esclavage et de leurs abolitions ». Le Sénat s'associe d'autant plus pleinement à cette première célébration que la date choisie est celle de l'adoption définitive par le Sénat, en 2001, à l'unanimité, de la loi tendant à la reconnaissance de la traite et de l'esclavage en tant que crime contre l'humanité.
Depuis la Révolution française, notre assemblée s'honore d'avoir compté dans ses rangs les principales personnalités ayant oeuvré à l'abolition de l'esclavage : l'abbé Grégoire, le sénateur Victor Schoelcher, le sénateur Auguste Scheurer-Kestner.
Nous nous rappelons que le Sénat, en 1998, a déjà célébré avec une solennité particulière le 150e anniversaire du décret d'abolition en organisant une journée entière de commémoration et une séance exceptionnelle à l'issue de laquelle a été dévoilée une médaille à l'effigie du président Gaston Monnerville, à la place qu'il occupait dans notre hémicycle.
Aujourd'hui même, le Sénat prend toute sa part à cet indispensable travail de mémoire grâce à deux expositions : la première, sur la Forêt des Mânes, dans le jardin du Luxembourg, inaugurée ce matin même par le Président de la République, sensibilisera un large public ; la seconde, dans le Palais du Luxembourg, sur La route des abolitions de l'esclavage, est une exposition itinérante qui passera par l'Alsace, la Lorraine et la Franche-Comté et qui est due à l'initiative de nos collègues élus des départements de ces régions, pionnières de ce combat. Cette dernière exposition sera inaugurée tout à l'heure, à 17 heures, dans le foyer Clemenceau, par notre excellent collègue le questeur René Garrec.
Par-delà leur symbolique, toutes ces actions contribuent à lutter contre l'oubli et à assurer notre devoir de mémoire. Je tiens cependant à dire, mes chers collègues, que, si la mémoire est importante pour comprendre le présent, elle doit être surtout un moyen de regarder vers l'avenir avec confiance et détermination.
M. Michel Charasse. On peut préciser que c'est aussi aujourd'hui, et c'est tout un symbole, l'anniversaire de la naissance de Rouget de Lisle à Lons-le-Saunier, dans le Jura.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le président, je vous remercie des propos que vous avez tenus sur cette célébration nationale. Elle a été un moment très fort de rassemblement et d'affirmation, par le Président de la République, du respect dû aux victimes de la barbarie et du crime contre l'humanité que constitue l'esclavage. Elle est également venue rappeler la nécessité de forger pour l'avenir une détermination nouvelle.
Nous avons entendu un immense artiste, Jacques Martial, déclamer avec foi et fougue des textes magnifiques d'Aimé Césaire, et ce parcours dans l'oeuvre qui a été créée dans le jardin du Luxembourg, parce qu'elle est destinée à construire une identité et une conscience, est tout à fait magnifique.
Le travail ne s'arrête pas aujourd'hui : vous l'avez indiqué, c'est une première étape. Le Président de la République m'a d'ailleurs chargé d'organiser un concours pour créer un lieu de mémoire, afin que personne n'oublie jamais.
M. Michel Charasse. Mais on n'est pas obligé, à l'issue du concours, de sélectionner une horreur, comme c'est généralement le cas ! (Sourires.)
M. le président. Monsieur le ministre, le Sénat tout entier s'associe à ces travaux.
3
Droit d'auteur et droits voisins dans la société de l'information
Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi déclaré d'urgence
M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relatif au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information (nos 269, 308).
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'amendement n° 18 tendant à insérer un article additionnel avant l'article 7 bis.
Article additionnel avant l'article 7 bis
M. le président. L'amendement n° 18, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Avant l'article 7 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 331-4 du code de la propriété intellectuelle, sont insérés deux articles L. 331-5-1 et L. 331-5-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 331-5-1. - L'Autorité de régulation des mesures techniques de protection visées à l'article L. 331-5 veille à ce que la mise en oeuvre des mesures techniques n'ait pas pour conséquence, du fait de leur incompatibilité mutuelle ou de leur incapacité d'interopérer, d'entraîner dans l'utilisation d'une oeuvre des limitations supplémentaires et indépendantes de celles expressément décidées par le titulaire d'un droit d'auteur, d'une oeuvre, autre qu'un logiciel, d'une interprétation, d'un phonogramme, d'un vidéogramme ou d'un programme.
« Art. L. 331-5-2. - Tout éditeur de logiciel, tout fabricant de système technique et tout exploitant de service qui souhaite améliorer l'interopérabilité des systèmes et des services existants peut demander à l'autorité de favoriser ou de susciter une solution de conciliation, dans le respect des droits des parties, pour obtenir du titulaire des droits sur la mesure technique les informations essentielles à l'interopérabilité.
« On entend par informations essentielles à l'interopérabilité, la documentation technique et les interfaces de programmation nécessaires pour obtenir une copie protégée d'une reproduction protégée par une mesure technique et une copie protégée des informations sous forme électronique jointes à cette reproduction.
« Le procès-verbal de conciliation dressé par l'autorité précise le format dans lequel sont délivrées ces informations essentielles, dans des conditions équitables et non discriminatoires et moyennant une rémunération appropriée. Il précise les engagements pris par le bénéficiaire pour garantir la préservation de l'efficacité et de l'intégrité de la mesure technique, ainsi que le respect des conditions d'accès et d'usage du contenu protégé défini par les titulaires de droit.
« Le titulaire des droits sur la mesure technique ne peut imposer au bénéficiaire de renoncer à la publication du code source et de la documentation technique de son logiciel indépendant et interopérant que s'il apporte la preuve que celle-ci aurait pour effet de porter gravement atteinte à la sécurité et à l'efficacité de ladite mesure technique.
« Le procès-verbal de conciliation a force exécutoire ; il fait l'objet d'un dépôt au greffe du tribunal d'instance.
« À défaut de conciliation, l'Autorité de régulation des mesures techniques de protection prend une décision motivée de rejet de la demande, ou émet une injonction prescrivant, au besoin sous astreinte, les conditions dans lesquelles le demandeur peut obtenir l'accès aux informations essentielles à l'interopérabilité, et les engagements qu'il doit respecter pour garantir l'efficacité et l'intégrité de la mesure technique, ainsi que les conditions d'accès et d'usage du contenu protégé. L'astreinte, prononcée par l'autorité, est liquidée par cette dernière.
« Ces décisions, ainsi que le procès-verbal de conciliation, sont rendues publiques dans le respect des secrets protégés par la loi. Elles sont notifiées aux parties, qui peuvent introduire un recours devant la cour d'appel de Paris. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur de la commission des affaires culturelles. Cet amendement a pour objet de regrouper dans un nouvel article additionnel avant l'article 7 bis le dispositif que je vous propose de substituer à celui qu'a retenu l'Assemblée nationale pour garantir l'interopérabilité des mesures techniques.
La mise en place des mesures techniques risque de rendre incompatibles certains systèmes, par exemple une plate-forme de téléchargement et un baladeur. Pour remédier à cela, l'Assemblée nationale a imaginé un système reposant sur l'obligation faite aux fournisseurs de mesures techniques de fournir à autrui les informations essentielles à l'interopérabilité : documents techniques et interfaces de programmation.
L'idée est conservée dans cet amendement, mais vous sont proposées des modalités de mise en oeuvre différentes, plus respectueuses à la fois de la propriété industrielle et des dispositions de la directive européenne de 1996 sur les logiciels.
Nous vous proposons donc, tout d'abord, de définir dans un article L. 331-5-1 ce que nous attendons de l'interopérabilité : elle ne doit pas surajouter aux conditions que les auteurs ont posées pour l'accès à leurs oeuvres des conditions supplémentaires et indépendantes de leur volonté qui tiendraient à la configuration des mesures techniques.
Nous apportons ensuite une nouvelle réponse à la question de savoir qui doit statuer sur la fourniture des informations essentielles.
L'Assemblée nationale avait d'abord confié cette responsabilité cruciale au Conseil de la concurrence, dont ce n'est pas véritablement la vocation et qui n'aurait pu statuer que sous l'angle un peu réducteur des atteintes à la concurrence. En deuxième délibération, les députés en ont chargé le tribunal de grande instance, de façon à permettre à tout intéressé d'obtenir les informations nécessaires à l'interopérabilité. Cette solution nous paraît aller cette fois trop loin dans l'autre sens : la documentation technique et les interfaces de programmation correspondent à des secrets industriels qu'une entreprise ne peut accepter de livrer à tout un chacun sans garantie ni contrepartie.
Notre amendement vise donc à confier cette responsabilité à l'autorité régulatrice que nous instituons et dont la saisine sera limitée aux éditeurs de logiciels, aux fabricants des systèmes techniques, notamment ceux de l'électronique grand public, et aux exploitants de services - les plates-formes de téléchargement légales - qui souhaitent améliorer l'interopérabilité des systèmes existants. En contrepartie, ils se verront imposer de garantir la préservation de l'efficacité de la mesure technique et le respect des conditions d'accès et d'usage du contenu partagé.
Notre amendement institue une procédure en deux temps : d'abord, une procédure de conciliation entre le titulaire des droits sur la mesure technique et ses partenaires qui souhaitent la rendre interopérable avec leurs systèmes, sous l'égide de notre autorité de régulation ; ensuite, en cas d'échec, celle-ci aurait la possibilité de recourir à une décision contraignante, mais susceptible de recours devant la cour d'appel de Paris.
Je me permettrai d'insister sur cet amendement, qui, nous l'indiquions cette nuit, garantit l'interopérabilité tout en lui donnant les moyens de son effectivité.
M. le président. Le sous-amendement n° 185, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. - Dans le texte proposé par cet amendement pour l'article L. 311-5-1 du code de la propriété intellectuelle, remplacer les mots :
Autorité de régulation des mesures techniques de protection
par les mots :
Autorité de régulation des mesures techniques
II. - Procéder à la même substitution dans l'avant-dernier alinéa du texte proposé par cet amendement pour l'article L. 331-5-2 du même code et dans l'ensemble du projet de loi.
La parole est à M. le ministre.
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication. Ce sous-amendement vise à modifier l'appellation de l'autorité créée par l'amendement n° 18 en la désignant par les termes : « autorité de régulation des mesures techniques », et non : « autorité de régulation des mesures techniques de protection ».
Cette nouvelle appellation paraît plus appropriée. En effet, les mesures techniques n'ont pas pour seule fonction de protéger les droits : elles servent également à gérer ces droits pour permettre la mise en ligne de nouveaux modèles au bénéfice du consommateur.
La constitution de cette autorité s'inscrit pleinement dans l'esprit du texte voté par l'Assemblée nationale. Je tiens à rappeler une fois encore combien le travail de la commission des affaires culturelles, de son président Jacques Valade et de son rapporteur a été déterminant pour organiser et renforcer cette autorité de façon qu'elle soit pleinement à la mesure des enjeux : concilier et garantir le droit d'auteur, la copie privée et l'interopérabilité tout en étant en phase avec la rapidité de l'évolution technologique, qui crée chez les internautes des comportements nouveaux s'imposant vite comme des habitudes.
M. le président. Le sous-amendement n° 194, présenté par M. Pelletier et les membres du groupe du Rassemblement démocratique et social européen, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par l'amendement n° 18 pour l'article L. 331-5-1 du code de la propriété intellectuelle :
I. - Remplacer les mots :
la mise en oeuvre des mesures techniques n'ait
par les mots :
les mesures techniques n'aient
II. - Après les mots :
de celles expressément décidées par le titulaire d'un droit d'auteur
rédiger comme suit la fin du texte :
sur une oeuvre autre qu'un logiciel ou par le titulaire d'un droit voisin sur une interprétation, un phonogramme, un vidéogramme ou un programme.
La parole est à M. Jacques Pelletier.
M. Jacques Pelletier. Le présent sous-amendement a pour objet d'apporter deux modifications au texte de l'article L. 331-5-1 du code de la propriété intellectuelle proposé par l'amendement n° 18 de la commission.
La première est d'ordre purement rédactionnel ; la seconde a pour objet de mieux distinguer le rôle respectif des titulaires de droit d'auteur et des titulaires de droits voisins.
M. le président. Le sous-amendement n° 237 rectifié bis, présenté par MM. Karoutchi et Goujon, Mme Gousseau, MM. Houel, Portelli et Longuet, Mme Malovry, MM. Guené, Courtois et Lecerf, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par l'amendement n° 18 pour l'article L. 331-5-1 du code de la propriété intellectuelle :
I. - Remplacer les mots :
la mise en oeuvre des mesures techniques n'ait
par les mots :
les mesures techniques n'aient
II. - Après les mots :
expressément décidées
rédiger comme suit la fin du texte :
et approuvées par le titulaire d'un droit d'auteur sur une oeuvre autre qu'un logiciel, ou d'un droit voisin sur une interprétation, un phonogramme, un vidéogramme ou un programme.
La parole est à M. Jean-René Lecerf.
M. Jean-René Lecerf. Afin de mettre en conformité l'article additionnel proposé par la commission des affaires culturelles avec l'article 6 A, l'amendement proposé vise à rappeler que les ayants droit et titulaires de droits voisins sont seuls autorisés à déterminer les droits octroyés au consommateur, conformément à la loi.
M. le président. Le sous-amendement n° 238 rectifié bis, présenté par MM. Karoutchi et Goujon, Mme Gousseau, MM. Houel, Portelli et Longuet, Mme Malovry, MM. Guené, Courtois et Lecerf, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 18 pour l'article L. 331-5-2 du code de la propriété intellectuelle :
Tout éditeur de logiciel, tout fabricant de système technique et tout exploitant de service qui souhaite accomplir l'interopérabilité des systèmes et des services existants pour permettre aux consommateurs de contenu acquis légalement d'accéder au contenu en conformité avec les droits octroyés par les titulaires de droit et le droit d'auteur peut demander à l'autorité de favoriser ou de susciter une solution de conciliation, dans le respect des droits des parties, pour obtenir du distributeur du contenu utilisant la mesure technique les informations essentielles à l'interopérabilité.
La parole est à M. Jean-René Lecerf.
M. Jean-René Lecerf. L'interopérabilité doit se faire dans le respect des droits associés à l'oeuvre et ne doit en aucun cas devenir un alibi à l'acquisition illégale de musique ou de vidéo.
En effet, si le succès du développement des offres commerciales de téléchargement dépend largement du confort d'utilisation - de l'interopérabilité - qu'elles seront capables d'offrir au consommateur, le second pilier de cette réussite est certainement à trouver dans un autre élément : la sécurité de la diffusion des oeuvres apportée par les mesures techniques de protection.
Afin que cette sécurité de diffusion ne soit pas remise en cause, l'amendement proposé vise à rappeler le cadre légal dans lequel doit s'opérer l'interopérabilité. Ainsi, il est précisé qu'elle ne concerne que les oeuvres acquises légalement et doit s'exercer conformément aux droits octroyés par les titulaires de droit et le droit d'auteur.
Par ailleurs, étant donné que le déploiement des MTP est opéré par les distributeurs de contenu, qui procèdent à leur paramétrage au moyen des informations qui leur sont communiquées par le ou les fournisseurs de MTP qu'ils ont choisis, l'amendement proposé vise à assurer que les solutions de conciliation orchestrées par l'autorité de régulation des MTP rassemblent les bons interlocuteurs, à savoir les éditeurs de logiciels, les fabricants de systèmes techniques et les distributeurs de contenu.
M. le président. Le sous-amendement n° 268, présenté par Mme Morin-Desailly, M. Nogrix et les membres du groupe Union centriste-UDF, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le début du premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 18 pour l'article L. 331-5-2 du code de la propriété intellectuelle :
Tout intéressé peut demander à l'autorité...
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. L'amendement n° 18 vise à donner à l'Autorité de régulation des mesures techniques de protection une nouvelle compétence, à savoir veiller au respect de l'interopérabilité.
A priori, nous ne pouvons que souscrire à l'objectif de clarté poursuivi par la commission en scindant en deux parties distinctes les mesures techniques de protection et le principe de l'interopérabilité. Toutefois, nous avons déjà eu l'occasion de l'exprimer hier soir, nous éprouvons quelques inquiétudes s'agissant de cette scission.
Aussi avons-nous souhaité que des principes et des règles claires soient établis au préalable, notamment pour donner une ligne de partage entre l'utilité des mesures techniques de protection et l'impératif d'interopérabilité afin de garantir le libre usage de l'oeuvre et la liberté de créer des logiciels à code source ouvert, dans le respect du droit d'auteur.
Quelques règles importantes ont été adoptées hier soir, comme celle qui précise que les composantes d'une mesure de protection telles que le cryptage ou les protocoles ne peuvent être considérées comme des mesures en tant que telles. Nous nous en réjouissons, mais il nous semble que nous aurions pu aller plus loin.
Si l'amendement n °18 de la commission était adopté, ces principes rappelés hier permettraient également de guider l'Autorité de régulation dans son rôle de gardien de l'interopérabilité.
S'agissant de l'amendement n° 18 en tant que tel, je voudrais exprimer notre scepticisme. En effet, confier à cette autorité le rôle de gardien de l'interopérabilité nous paraît dangereux. Nous connaissons les enjeux économiques majeurs s'agissant de cette question. C'est pourquoi, sans sous-estimer les compétences certaines des futurs membres de cette autorité, nous craignons qu'ils ne soient sujets à des pressions qui pourraient nuire à son indépendance et à sa neutralité.
Alors que l'interopérabilité devrait être un droit, un principe, avec cette autorité il devient une éventualité. En définitive, on renverse la règle, nous semble-t-il.
Enfin, nous créons une nouvelle fois une autorité administrative indépendante, donc une institution supplémentaire, ce qui ne manquera pas de générer pour l'État des coûts non négligeables.
Le recours à ces autorités sous-tend aussi l'idée que l'État n'est plus à même de remplir ses missions, d'être garant des intérêts de citoyens et d'établir des règles générales dans l'intérêt de tous, se destituant au profit d'experts.
Certes, la rédaction proposée par la commission pour remplacer l'Autorité présente des avancées certaines, notamment dans sa composition ; j'y reviendrai plus tard.
Mais s'agissant de l'interopérabilité, à défaut du refus de cette nouvelle compétence, il nous semble que des améliorations peuvent encore être apportées.
Tout d'abord, ce sous-amendement n° 268 vise à permettre à tout intéressé qui souhaite améliorer l'interopérabilité des systèmes de saisir l'Autorité de régulation pour lui demander de favoriser ou de susciter une solution de conciliation pour obtenir des titulaires des droits sur la mesure technique les informations essentielles à l'interopérabilité.
En effet, limiter la saisine à trois catégories de personnes, à savoir « tout éditeur de logiciel, tout fabricant de système technique et tout exploitant de service » ne nous paraît pas satisfaisant.
Tout d'abord, la nouvelle formulation que nous vous proposons se rapprocherait, dans une mesure partiellement satisfaisante, d'un de nos amendements repoussés hier et qui prévoyait que les fournisseurs de mesures techniques donnent l'accès aux informations essentielles à l'interopérabilité. Il s'agirait ainsi de poser le principe d'une interopérabilité de droit dans la mesure où celle-ci permet, dans le respect du droit des parties, et notamment du droit d'auteur, d'utiliser l'oeuvre dans des conditions normales.
De plus, ce principe justifierait que toute personne qui ne peut utiliser dans des conditions normales une oeuvre soit en droit d'en demander les informations nécessaires à l'interopérabilité comme elle peut le faire pour le bénéfice de l'exception pour copie privée.
En effet, il nous semble important de respecter un certain parallélisme des formes en ce qui concerne les règles de saisine de cette Autorité de régulation.
L'Autorité de régulation peut être saisie par tout intéressé pour veiller à ce que la mise en oeuvre des mesures techniques de protection n'ait pas pour effet de le priver du bénéfice des exceptions pour copie privée.
M. le rapporteur parle des consommateurs. Mais les consommateurs ne sont pas les seuls à avoir intérêt à connaître ces informations : nombre de chercheurs se trouveraient dans l'impasse si on ne leur donnait pas accès à ces sources d'informations essentielles.
Il y a derrière cette question des mesures techniques de protection un enjeu majeur en termes industriel et de recherche. À trop vouloir encadrer ce principe au profit d'une protection quasi-absolue, ne risque-t-on pas de limiter le droit des consommateurs ?
Par ailleurs, la conciliation n'est pas forcément synonyme de diffusion dans le public de ces informations essentielles, puisque l'Autorité peut préciser les conditions dans lesquelles se fera cette conciliation et qui devront privilégier des diffusions restreintes des informations.
Telles sont les raisons pour lesquelles il nous semble important que tout intéressé puisse saisir l'Autorité. À elle ensuite de déterminer l'opportunité de son intérêt à agir et de sa demande.
M. le président. Le sous-amendement n° 112, présenté par M. Dufaut et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par l'amendement n°18 pour l'article L. 331-5-2 du code de la propriété intellectuelle, remplacer le mot :
améliorer
par le mot :
assurer
La parole est à M. Alain Dufaut.
M. Alain Dufaut. Il s'agit d'un sous-amendement rédactionnel : nous proposons de remplacer le mot : « améliorer » par le mot : « assurer », qui est plus précis sur le plan juridique.
M. le président. Le sous-amendement n° 239 rectifié bis, présenté par M. Karoutchi, Mme Gousseau, MM. Goujon, Houel, Portelli et Longuet, Mme Malovry, MM. Guené, Courtois et Lecerf, est ainsi libellé :
Après les mots :
l'interopérabilité,
rédiger comme suit la fin du deuxième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 18 pour l'article L. 331-5-2 du code de la propriété intellectuelle :
l'information requise pour avoir la capacité à lire une oeuvre protégée.
La parole est à M. Jean-René Lecerf.
M. Jean-René Lecerf. L'interopérabilité doit non pas être entendue comme la capacité à copier une oeuvre, mais doit permettre le plus largement possible à l'utilisateur de l'écouter ou de la visionner librement dans le respect des droits qui y sont associés.
Conforme à cet impératif, le sous-amendement proposé vise à assurer les droits des consommateurs tout en améliorant la lisibilité du texte.
M. le président. Le sous-amendement n° 240 rectifié bis, présenté par MM. Karoutchi et Goujon, Mme Gousseau, MM. Houel, Portelli et Longuet, Mme Malovry, MM. Guené, Courtois et Lecerf, est ainsi libellé :
Après le deuxième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 18 pour l'article L. 331-5-2 du code de la propriété intellectuelle, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« On entend par interopérabilité la capacité à lire une oeuvre sur un système conformément à l'état de l'art, dans la limite des droits accordés par les détenteurs des droits et qui maintient la protection de l'oeuvre dans des conditions d'efficacité, de robustesse et de conformité d'exécution équivalentes à celles assurées par le système originel.
La parole est à M. Jean-René Lecerf.
M. Jean-René Lecerf. Ce sous-amendement vise à donner une définition de l'interopérabilité qui garantisse le droit des consommateurs en assurant la sécurité de la diffusion en ligne et la pérennité des offres légales.
M. le président. Le sous-amendement n° 264 rectifié, présenté par M. Hérisson, est ainsi libellé :
Après le deuxième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 18 pour insérer un article L. 331-5-2 dans le code de la propriété intellectuelle, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L'autorité recueille l'avis de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes lorsque le litige peut avoir un impact sur l'interopérabilité des réseaux et des services de communications électroniques relevant de la compétence de cette dernière. L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes rend son avis dans les trente jours.
La parole est à M. Pierre Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Ce sous-amendement vise à encourager la collaboration entre les autorités de régulation, en créant une passerelle entre l'Autorité de régulation des mesures techniques de protection et l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l'ARCEP.
En effet, la compétence existante de l'ARCEP en matière d'interopérabilité peut utilement être mise au service de l'Autorité de régulation des mesures techniques de protection, par le biais du recueil obligatoire de l'avis de l'ARCEP lorsque le litige peut avoir un impact sur l'interopérabilité des réseaux et des services de communications électroniques relevant de sa compétence.
A l'heure de la convergence entre les secteurs des télécommunications, des médias et des technologies de l'information, la commission des affaires économiques et son groupe d'études sur la poste et les télécommunications, que j'ai l'honneur de présider, ne pouvaient se désintéresser de ce texte, et plus particulièrement de cet article additionnel avant l'article 7 bis, qui a des implications tant industrielles que strictement culturelles.
Quelle est notre ambition ? Concilier les formidables potentialités qu'offre la révolution numérique pour la diffusion des oeuvres avec le respect de la propriété intellectuelle.
Les mesures techniques de protection, en permettant aux auteurs de contrôler l'utilisation de leurs oeuvres, sont un outil au service de cette ambition. Et leur consécration juridique dans ce texte est conforme à nos obligations communautaires.
Mais l'interopérabilité, qui permet de lire sur n'importe quel support la reproduction numérique d'une oeuvre légalement acquise, est elle aussi un outil au service de cette même ambition. La directive que nous transposons l'encourage explicitement. Et la neutralité technologique est un principe que le législateur ne doit jamais perdre de vue. En effet, il est entièrement légitime de protéger le droit de l'auteur, comme il est entièrement légitime de favoriser la liberté du consommateur.
Comment résoudre cette tension entre les intérêts commerciaux de grands groupes en oligopoles, qui tendent à sacraliser les mesures techniques de protection au nom d'une légitime protection de la propriété intellectuelle, et les exigences croissantes et tout aussi respectables des consommateurs pour une plus grande fluidité entre les produits du marché et une concurrence plus ouverte ?
La commission des affaires culturelles propose de confier à une autorité de régulation le soin de résoudre cette tension au cas par cas et de déterminer quelles sont les informations essentielles à l'interopérabilité. Je considère qu'il s'agit d'une proposition judicieuse.
Il serait illusoire de se reposer sur le tribunal de grande instance pour résoudre des litiges comme celui qui oppose depuis de longues années Microsoft à l'Union européenne et qui lui a déjà valu une amende approchant les 500 millions d'euros.
De même, comment s'en remettre au Conseil de la concurrence qui, dans sa décision de novembre dernier relative à Apple, n'a pas fait droit à l'exigence d'interopérabilité au motif qu'il ne devait tenir compte de l'intérêt du consommateur qu'en cas de pratique anticoncurrentielle avérée ?
Il s'agit pourtant d'une mission capitale : sans interopérabilité, les petits éditeurs de logiciels propriétaires et les auteurs de logiciels libres se trouvent exclus de pans entiers du marché de l'accès aux oeuvres culturelles. Or le logiciel libre est en pleine croissance dans notre pays et représente assurément une opportunité pour déverrouiller le marché très concentré de l'édition de logiciels. L'interopérabilité est d'ailleurs la pierre angulaire du réseau Internet, qui s'appuie sur un protocole permettant des échanges d'informations entre des systèmes différents.
C'est pourquoi il est opportun de recourir à l'arbitrage d'une autorité de régulation. L'expertise et l'indépendance d'une telle autorité doivent permettre, en effet, de mettre en oeuvre une interopérabilité raisonnée.
Je m'interroge néanmoins sur la multiplication des autorités de régulation dans le domaine de la communication. C'est pourquoi je propose de sous-amender l'amendement n° 18 de la commission des affaires culturelles, afin, je le répète, d'encourager la collaboration entre les autorités de régulation, en créant une passerelle entre l'Autorité de régulation des mesures techniques de protection et l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes.
En effet, l'ARCEP est déjà compétente en matière d'interopérabilité, notion que l'on retrouve dans le code des postes et des communications électroniques, par exemple aux articles L. 32, 12°, L. 33-1 et D. 98-10.
M. le président. Veuillez conclure, monsieur Hérisson !
M. Pierre Hérisson. Je termine, monsieur le président !
Cette compétence peut utilement être mise au service de l'Autorité de régulation des mesures techniques de protection, par le biais du recueil obligatoire de l'avis de l'ARCEP lorsque le litige peut avoir un impact sur l'interopérabilité.
En proposant d'intégrer l'ARCEP dans le dispositif, j'ouvre un débat qui me paraît important sur le nombre et le champ de compétence des autorités de régulation. C'est un débat ancien, mais qui est rendu plus vif avec le développement d'Internet, qui brouille les domaines juridiques de compétence et qui fait émerger de nouvelles questions.
La réponse n'est pas évidente : elle se situe sans doute entre l'autorégulation et la corégulation.
M. le président. Le sous-amendement n° 269, présenté par Mme Morin-Desailly, M. Nogrix et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Après la première phrase du troisième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 18 pour l'article L. 331-5-2 du code de la propriété intellectuelle, insérer une phrase ainsi rédigée :
On entend par rémunération appropriée les frais de logistique engagés pour la mise à disposition des informations essentielles à l'interopérabilité.
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. Ce sous-amendement a le même objet que l'un de nos amendements présentés hier : il vise à encadrer la rémunération qui peut être demandée à la personne qui bénéficie de la transmission d'informations essentielles à l'interopérabilité.
Aussi, afin de garantir l'accès aux informations essentielles à l'interopérabilité à tout développeur, il convient d'indiquer que le prix de ces informations ne peut excéder le coût logistique de leur mise à disposition.
Toute autre modalité de calcul du prix des informations nécessaires reviendrait à créer une nouvelle forme de propriété intellectuelle aux effets inconnus.
Sans précision du législateur, les auteurs de logiciels interopérant avec des mesures techniques pourraient se voir imposer des conditions de prix que seuls quelques grands éditeurs pourraient acquitter.
Ce serait désastreux, notamment pour les auteurs indépendants, les bénévoles, les associations et les petites entreprises françaises créant des logiciels libres. Il faut savoir que 58 % des 28 500 entreprises du secteur comptent deux employés au maximum.
M. le président. Le sous-amendement n° 241 rectifié bis, présenté par MM. Karoutchi et Goujon, Mme Gousseau, MM. Houel, Portelli et Longuet, Mme Malovry, MM. Guené, Courtois et Lecerf, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le quatrième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 18 pour l'article L. 331-52 du code de la propriété intellectuelle :
« Le bénéficiaire de l'interopérabilité ne peut publier le code source et la documentation technique de son logiciel indépendant et interopérant que s'il apporte la preuve avec certitude que celle-ci n'aurait pas pour effet de porter atteinte à l'intégrité du contenu, et à la sécurité et à l'efficacité de ladite mesure technique.
La parole est à M. Jean-René Lecerf.
M. Jean-René Lecerf. Tout développeur est libre de publier ou non le code source de ses logiciels. Cependant, si le développeur est libre de diffuser le code du logiciel de lecture indépendant qu'il a développé, il ne saurait en faire de même du code source du logiciel de protection qui a été développé par un tiers.
En fait, en matière de MTP, la diffusion du code à proprement parler ne paraît pas envisageable. Alors que les MTP sont, par essence, destinées à offrir une protection aux oeuvres, la diffusion du code en tant que tel permettrait en pratique à chacun de contourner cette protection. Dès lors, la diffusion sécurisée des oeuvres en ligne ne serait pas assurée et le développement des offres commerciales de téléchargement fortement compromis.
Pour éviter une telle issue et assurer la pérennité des offres légales, le bénéficiaire de l'interopérabilité doit être empêché de toute diffusion de codes source qui porterait atteinte à l'efficacité et à la sécurité des MTP.
À cette fin, le sous-amendement proposé vise à conditionner la diffusion du code à la preuve de certaines garanties par le bénéficiaire de l'interopérabilité.
M. le président. Le sous-amendement n° 270 rectifié, présenté par Mme Morin-Desailly, M. Nogrix et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le quatrième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 18 pour l'article L. 331-5-2 du code de la propriété intellectuelle :
« La publication du code source et de la documentation technique d'un logiciel indépendant interopérant avec une mesure technique de protection de l'oeuvre ne peut être interdite.
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. Ce sous-amendement est également une reprise d'un amendement présenté hier.
Il est pour nous fondamental parce qu'il fixe un principe en matière de publication de code source, à savoir que l'on ne peut pas interdire la publication du code source et de la documentation technique d'un logiciel indépendant interopérant avec une mesure technique de protection de l'oeuvre.
La formulation présentée par la commission nous semble trop restrictive et trop contraignante. C'est pourquoi il vous est proposé d'opter pour la rédaction que nous proposons. Hier, monsieur le rapporteur, vous nous avez répondu que notre amendement était satisfait par celui de la commission. Malheureusement, nous n'en sommes pas complètement convaincus.
Si nous partageons le même souci, alors, je vous suggère d'adopter ce sous-amendement, qui a l'avantage de poser le principe d'un droit à la publication du code source d'un logiciel interopérant avec une mesure technique.
Ce que nous voulons, c'est affirmer avec force le principe d'une interopérabilité obligatoire et non pas facultative.
S'agissant des logiciels libres, le principe, je le rappelle, est de publier les codes sources. Sans cette liberté, c'est l'existence même du logiciel libre qui est remise en cause. Ce à quoi nous devons réfléchir, c'est le champ de la liberté que nous allons accorder ou refuser à ce secteur de l'économie française.
L'Autorité de régulation serait alors garante du respect de ce principe. Je doute toutefois de la capacité de cette Autorité à appréhender avec justesse l'enjeu industriel majeur que représente cette question.
Par ailleurs, comme je le soulignais hier soir, interdire la publication de ces codes reviendrait à porter atteinte à la liberté des auteurs des logiciels protégés par le droit d'auteur de disposer de leurs oeuvres.
En effet, comme le dispose l'article L. 121-2, qui fonde le droit moral de divulgation, l'auteur a seul le droit de divulguer son oeuvre. Il détermine le procédé de divulgation et fixe les conditions de celle-ci. Sans cette précision, il reviendrait à l'Autorité de régulation des mesures techniques de protection le pouvoir de revenir sur la liberté de publication d'un code source par des auteurs de logiciels à code source ouvert.
M. le président. Le sous-amendement n° 243 rectifié bis, présenté par MM. Karoutchi et Goujon, Mme Gousseau, MM. Houel, Portelli et Longuet, Mme Malovry, MM. Guené, Courtois et Lecerf, est ainsi libellé :
Dans le cinquième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 18 pour l'article L. 331-5-2 du code de la propriété intellectuelle, après les mots :
Le procès-verbal de conciliation
insérer les mots :
tel qu'approuvé entre le distributeur de contenu et le bénéficiaire
La parole est à M. Jean-René Lecerf.
M. Jean-René Lecerf. Ce sous-amendement vise à assurer que les solutions de conciliation orchestrées par l'Autorité de régulation des mesures techniques de protection rassemblent les bons interlocuteurs, à savoir les éditeurs de logiciel, les fabricants de systèmes techniques et les distributeurs de contenu.
M. le président. Le sous-amendement n° 280, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Au début de l'avant-dernier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 18 pour l'article L. 331-5-2 du code de la propriété intellectuelle, après les mots :
mesures techniques de protection
insérer les mots :
, après avoir mis les intéressés à même de présenter leurs observations,
La parole est à M. le ministre.
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. La commission a souhaité parfaire la création du collège de médiateurs voulu par le Gouvernement pour suivre l'état d'application de la loi. Pour en faire une véritable autorité indépendante, elle a élargi son champ de compétence à la question essentielle de l'interopérabilité, dont chacun dans cet hémicycle affirme la validité et non le caractère optionnel.
Pour être efficace, cette autorité doit, comme c'est le cas d'un premier niveau de juridiction, être en mesure d'agir vite et disposer de pouvoirs étendus, notamment de la possibilité de prononcer une injonction sous astreinte. Or le prononcé d'une telle injonction doit être précédé d'une procédure contradictoire permettant de recueillir les observations des parties. Une telle garantie doit figurer dans la loi. Tel est l'objet du présent sous-amendement.
J'ajoute qu'un sous-amendement identique viendra préciser la procédure pour garantir la copie privée.
M. le président. Le sous-amendement n° 242 rectifié bis, présenté par MM. Karoutchi et Goujon, Mme Gousseau, MM. Houel, Portelli et Longuet, Mme Malovry, MM. Guené, Courtois et Lecerf, est ainsi libellé :
Dans le dernier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 18 pour l'article L. 331-5-2 du code de la propriété intellectuelle :
I - À la fin de la première phrase, supprimer les mots :
dans le respect des secrets protégés par la loi
II - Dans la seconde phrase, après le mot :
recours
insérer le mot :
suspensif
La parole est à M. Jean-René Lecerf.
M. Jean-René Lecerf. Le Conseil constitutionnel, dans une décision du 23 janvier 1987, a eu l'occasion d'affirmer que l'existence d'une voie de recours suspensive à l'égard des décisions d'organes de nature non juridictionnelle constitue une garantie essentielle des droits de la défense.
L'étendue des injonctions de l'Autorité de régulation des mesures techniques de protection et leur portée sur l'activité économique des acteurs concernés rendent de surcroît indispensable le caractère suspensif du recours qui pourra être introduit devant la cour d'appel de Paris.
M. le président. Je suis maintenant saisi de deux sous-amendements identiques.
Le sous-amendement n° 74 est présenté par M. Charasse.
Le sous-amendement n° 196 rectifié est présenté par M. Pelletier et les membres du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
Ces deux sous-amendements sont ainsi libellés :
Compléter le dernier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 18 pour L. 331-5-2 du code de la propriété intellectuelle par une phrase ainsi rédigée :
Le recours a un effet suspensif.
La parole est à M. Michel Charasse, pour présenter le sous-amendement n° 74.
M. Michel Charasse. Ce sous-amendement vise à apporter une précision technique.
Il n'est pas indiqué dans l'amendement n° 18, et je pense qu'il s'agit d'une omission, que le recours a naturellement un effet suspensif. Je propose donc de compléter le dernier alinéa de l'amendement de la commission par cette précision. Cela rejoint d'ailleurs une des deux parties du sous-amendement qui vient d'être présenté à l'instant.
Monsieur le rapporteur, bien que votre dispositif ne le prévoie pas expressément, je pense que le délai de recours est identique à celui qui s'applique pour une juridiction de première instance par rapport à la cour d'appel.
Cela me semble aller de soit dans la mesure où votre amendement nous fait passer du système retenu par l'Assemblée nationale, c'est-à-dire le tribunal de grande instance, dont les délais de recours sont connus, à un système avec une autorité administrative indépendante. Je pense donc que, logiquement, le délai de recours est identique. C'est la raison pour laquelle je n'ai pas déposé de sous-amendement sur ce point. Toutefois, si le rapporteur voulait bien préciser ce point dans le débat, ce serait sans doute plus clair.
M. le président. La parole est à M. Jacques Pelletier, pour présenter le sous-amendement n° 196 rectifié.
M. Jacques Pelletier. Je partage totalement l'argumentaire de M. Charasse.
M. le président. Le sous-amendement n° 113, présenté par M. Dufaut et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par l'amendement n° 18 pour l'article L. 331-5-2 du code de la propriété intellectuelle par un alinéa ainsi rédigé :
« Le président de l'Autorité de régulation des mesures techniques saisit le Conseil de la concurrence des abus de position dominante et des pratiques entravant le libre exercice de la concurrence dont il pourrait avoir connaissance dans le secteur des mesures techniques. Cette saisine peut être introduite dans le cadre d'une procédure d'urgence, auquel cas le Conseil de la concurrence est appelé à se prononcer dans les trente jours ouvrables suivant la date de la saisine. Il peut également le saisir pour avis de toute autre question relevant de sa compétence. Le Conseil de la concurrence communique à l'autorité toute saisine entrant dans le champ de compétence de celle-ci et recueille son avis sur les pratiques dont il est saisi dans le secteur des mesures techniques.
La parole est à M. Alain Dufaut.
M. Alain Dufaut. Monsieur le ministre, si je vous ai bien compris, ce sous-amendement, que vous avez déjà évoqué par deux fois cette nuit, recueille votre approbation.
Les mesures proposées visent à articuler les missions de l'Autorité de régulation des mesures techniques de protection avec celles du Conseil de la concurrence, comme c'est le cas pour d'autres autorités de régulation.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'ensemble de ces sous-amendements?
M. Michel Thiollière, rapporteur. La commission est favorable au sous-amendement n° 185 du Gouvernement.
La commission est également favorable au sous-amendement n° 194, qui apporte une précision utile et améliore la rédaction de l'amendement n° 18.
En revanche, la commission est défavorable au sous-amendement n° 237 rectifié bis. Finalement, celui-ci est proche du sous-amendement n° 194 et on peut estimer qu'il est satisfait.
Le sous-amendement n° 238 rectifié bis vise à apporter deux modifications au dispositif prévu dans l'amendement n° 18.
La première est dictée par le souci de garantir que l'interopérabilité permettra au consommateur d'accéder au contenu de l'oeuvre protégée en conformité avec les droits octroyés par les titulaires de droit et le droit d'auteur.
La commission s'est efforcée de prendre en compte cette préoccupation en précisant, dans le texte proposé pour le troisième alinéa de l'article L.331-5-2, que le procès-verbal de conciliation dressé par l'Autorité de régulation devait préciser les engagements pris par le bénéficiaire pour garantir le respect des conditions d'accès et d'usage du contenu défini par les titulaires de droit.
La commission estime donc qu'il n'est pas nécessaire d'en affirmer le principe dès le premier alinéa de l'article L.331-5-2.
Je m'interroge davantage sur la seconde modification qui met l'obligation de fournir les informations essentielles à la charge du distributeur du contenu utilisant la mesure technique. Le fait que celui-ci procède, le cas échéant, au paramétrage de la mesure technique ne lui donne pas pour autant le droit de céder à des tiers certains de ses éléments constitutifs. Il semble donc que seul l'utilisateur des droits sur les mesures techniques est habilité, comme le prévoit l'amendement de la commission, à fournir ces informations essentielles.
La commission n'a pas examiné ce sous-amendement mais, sous réserve des précisions que pourrait apporter M. le ministre, j'émets un avis défavorable.
Concernant le sous-amendement n° 268, la commission a souhaité prévoir une saisine très large de l'Autorité de régulation en matière de différends portant sur le bénéfice effectif des exceptions en l'ouvrant à tout bénéficiaire desdites exceptions.
Elle a, en revanche, souhaité réserver la possibilité de saisir l'Autorité de régulation en matière d'interopérabilité aux trois catégories de personnes physiques ou morales qui ont les capacités, notamment techniques, d'assurer une interopérabilité, à savoir les éditeurs de logiciels, les fabricants de systèmes techniques et les exploitants de services.
La saisine de l'Autorité en matière d'interopérabilité a vocation à déboucher sur la fourniture d'informations essentielles qui présentent deux caractéristiques principales. Il s'agit d'abord d'une forte technicité, qui les rendrait sans doute peu utilisables pour la très grande majorité des consommateurs. Il s'agit ensuite d'un caractère sensible qui explique que le propriétaire de la mesure technique ne peut les livrer sans obtenir en contrepartie un minimum de garanties quant à l'usage qui en sera fait, ne serait-ce que pour assurer le maintien de l'efficacité de la mesure.
Le dispositif proposé par la commission n'a pas pour objet de permettre à tout consommateur de demander aux fabricants industriels de mesures techniques leurs secrets de fabrication. Il vise plutôt à permettre à des professionnels, y compris les jeunes éditeurs de logiciels libres, d'obtenir des informations qui leur serviront à mettre au point des interfaces permettant au grand public de jouir de l'interopérabilité.
C'est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur ce sous-amendement.
En revanche, la commission est favorable au sous-amendement de précision n° 112.
Quant au sous-amendement n° 239 rectifié bis, la commission n'a pas eu l'occasion de l'examiner. Il tend à prévoir une autre définition des informations essentielles à l'interopérabilité en la limitant à l'information requise pour avoir la capacité de lire une oeuvre protégée.
Dans la logique des positions qui ont été précédemment prises par la commission, je ne puis qu'émettre un avis défavorable sur ce sous-amendement.
Je comprends la préoccupation des auteurs du sous-amendement n° 240 rectifié bis, qui souhaitent inscrire dans le projet de loi de nouvelles garanties pour que l'interopérabilité ne menace ni l'efficacité ni la robustesse des mesures techniques de protection. C'est un souci auquel nous nous sommes efforcés de répondre dans notre rédaction - notamment à l'article L.331-5-2 - qui paraît équilibrée.
Il ne me paraît pas opportun de multiplier les précautions. C'est la raison pour laquelle la commission est défavorable à ce sous-amendement.
Concernant le sous-amendement n° 264 rectifié, personne ne doute de l'intérêt des avis que l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes pourra donner à l'Autorité de régulation des mesures techniques de protection. En revanche, nous ne sommes pas persuadés de l'utilité d'inscrire dans la loi le recueil obligatoire des avis de l'ARCEP, car cela risquerait de contribuer à un alourdissement et à un allongement des procédures ainsi qu'à une dilution des responsabilités.
Dans l'attente de l'avis du Gouvernement, j'émets un avis de sagesse sur ce sous-amendement.
La commission est défavorable au sous-amendement n° 269 pour des raisons identiques à celles que nous avons évoquées lors de la discussion du sous-amendement n 261.
Le sous-amendement n° 241 rectifié bis, que la commission n'a pas examiné, témoigne d'une volonté de surprotéger les fournisseurs de mesures techniques de protection au détriment de leurs partenaires qui tenteraient de réaliser des logiciels ou des dispositifs interopérants.
Dans la mesure où l'amendement n° 18 est un amendement d'équilibre, la commission émet un avis défavorable sur ce sous-amendement.
La commission est également défavorable au sous-amendement n° 270 pour les raisons qui ont été évoquées hier soir, lors de l'examen du sous-amendement n° 272 rectifié.
La commission est défavorable au sous-amendement n° 243 rectifié bis. Il est en effet contraire à l'amendement de la commission qui prévoit que c'est au titulaire des droits sur les mesures techniques de fournir des informations essentielles et non pas au distributeur de contenu.
La commission est favorable au sous-amendement n°280, qui apporte une précision utile pour garantir le caractère contradictoire des procédures conduites devant l'Autorité de régulation.
La commission est défavorable au sous-amendement n° 242 rectifié bis, car il nous paraît satisfait par les sous-amendements identiques nos 74 de M. Charasse et 196 rectifié de M. Pelletier, auxquels nous avons donné un avis favorable.
Enfin, la commission est favorable au sous-amendement n° 113, qui permettra une utile complémentarité entre l'action du Conseil de la concurrence et celle de l'Autorité de régulation.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 18 et au sous-amendement n° 194.
En revanche, le Gouvernement est défavorable au sous-amendement n° 237 rectifié bis.
Si la première partie du sous-amendement est identique au sous-amendement n° 194, auquel le Gouvernement est favorable, la seconde partie laisse entendre que les outils de lecture doivent avoir été approuvés par contrat avec les titulaires de droits. Or une telle disposition peut vider de son sens le principe de l'interopérabilité. Il appartiendra donc à l'Autorité de régulation de s'assurer que l'interopérabilité respecte les intérêts légitimes des titulaires de droit. Cela me paraît de nature à répondre à votre légitime préoccupation, monsieur Lecerf, ainsi qu'à celle qu'a exprimée M. Retailleau.
Le Gouvernement est défavorable au sous-amendement n° 238 rectifié bis qui vise à réaliser l'interopérabilité des systèmes et services existants, ce qui paraît trop restrictif puisque l'interopérabilité doit aussi permettre de créer de nouveaux systèmes.
Le Gouvernement est également défavorable au sous-amendement n° 268.
En revanche, le Gouvernement est favorable au sous-amendement n° 112.
Le Gouvernement est défavorable au sous-amendement n° 239 rectifié bis qui tend à limiter la portée de l'interopérabilité à la seule lecture des oeuvres, ce qui paraît insuffisant dans la mesure où nous nous attachons à garantir également la copie privée.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur le sous-amendement n° 240 rectifié bis.
Si je partage le souci de garantir l'interopérabilité au profit des consommateurs, je pense qu'il serait imprudent de figer les critères de cette notion et qu'il est préférable de laisser à l'Autorité de régulation des mesures techniques de protection le soin de la préciser et d'en adapter le contenu en fonction notamment des évolutions technologiques.
J'en viens au sous-amendement n° 264 rectifié. Les mesures techniques sont appliquées à des oeuvres et sont indépendantes des réseaux de communication électroniques. Toutefois, la saisine de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes est toujours possible. C'est pourquoi j'émets un avis de sagesse sur ce sous-amendement.
J'ajoute que ce sous-amendement étant satisfait, il pourrait être retiré, mais je n'ai pas à formuler d'avis en ce sens.
S'agissant du sous-amendement n° 269, il est clair que les conditions de fourniture et d'accès aux informations essentielles doivent répondre à des conditions équitables et non discriminatoires. Néanmoins, ce sous-amendement va trop loin quant au calibrage du prix adéquat. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement y est défavorable.
Le Gouvernement est également défavorable au sous-amendement n° 241 rectifié bis. Si je comprends le souci d'assurer une diffusion sécurisée des oeuvres en ligne grâce à des mesures techniques efficaces, je considère néanmoins que l'amendement n° 18 de la commission préserve mieux le nécessaire équilibre entre la diffusion du logiciel libre et la préservation de l'efficacité et de l'intégrité des mesures techniques.
Par ailleurs, la rédaction proposée par la commission, telle qu'elle sera modifiée, correspond, me semble-t-il, à la préoccupation exprimée dans le sous-amendement n° 270 rectifié. Le Gouvernement y est donc défavorable.
S'agissant du sous-amendement n° 243 rectifié bis, le procès-verbal fera l'objet d'une approbation par l'instance elle-même. La conciliation suppose, par définition, l'accord des parties ; l'ajout proposé n'est donc pas nécessaire. Le Gouvernement a émis un avis défavorable sur ce sous-amendement.
Le Gouvernement est également défavorable au sous-amendement n° 242 rectifié bis. En effet, le respect des secrets doit être garanti de façon spécifique, afin de clarifier la portée des pouvoirs de l'Autorité de régulation.
Pour ce qui est du caractère suspensif du recours, le sous-amendement n° 196 rectifié de M. Pelletier, auquel le Gouvernement est favorable, répond à cette préoccupation.
Sur le fond, je suis favorable au sous-amendement n° 74, qui vise à préciser que le recours devant l'Autorité de régulation des mesures techniques de protection a un effet suspensif. Mais il est satisfait par le sous-amendement n° 196 rectifié de M. Pelletier. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur le sous-amendement n° 74.
En revanche, le Gouvernement est favorable au sous-amendement nos 113.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. Afin de faciliter le déroulement de la séance et compte tenu de l'intervention de M. le ministre, je ne maintiens pas le sous-amendement n° 74, qui est identique à celui de mon vieil ami M. Pelletier.
Le fait que le Gouvernement préfère son amendement au mien, bien que le sien ait été déposé après le mien, ne pose aucun problème entre nous. Tout cela n'est pas très grave !
Par ailleurs, monsieur Hérisson, accepteriez-vous de modifier le sous-amendement n° 264 rectifié, dont je comprends très bien l'intérêt et à propos duquel le Gouvernement s'en est remis à la sagesse du Sénat, dans le sens suivant : « L'autorité peut recueillir l'avis de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes » ? De cette manière, une telle démarche ne serait plus une obligation.
Puisque vous avez indiqué, monsieur le ministre, que l'autorité pourra toujours recueillir cet avis, on peut donc prévoir cette faculté dans la loi.
Si M. Hérisson acceptait de modifier son sous-amendement dans ce sens, l'avis de sagesse du Gouvernement pourrait peut-être, monsieur le ministre, évoluer vers un avis favorable.
M. le président. Le sous-amendement n° 74 est retiré.
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 185.
Mme Catherine Morin-Desailly. Nous sommes favorables au sous-amendement du Gouvernement, qui permet d'élargir le rôle de l'autorité.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Je ne peux passer à côté de l'occasion de saluer une telle unanimité. Je suis donc favorable à la proposition de M. Charasse relative au sous-amendement n° 264 rectifié de M. Hérisson.
En effet, une possibilité n'est pas une obligation. Une telle faculté était d'ores et déjà prévue, mais le fait de le rappeler a une vertu pédagogique. N'est-ce pas l'objet de la loi ?
M. le président. Monsieur le ministre, pour l'instant, nous en sommes au sous-amendement n° 185.
Je le mets aux voix.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, le sous-amendement n° 237 rectifié bis n'a plus d'objet.
La parole est à M. Jean-René Lecerf, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 238 rectifié bis.
M. Jean-René Lecerf. Les différents sous-amendements que j'ai présentés exprimaient une musique un peu différente de celle de la commission.
Après les réponses qui ont été apportées, je retire les sous-amendements nos 238 rectifié bis, 239 rectifié bis, 240 rectifié bis, 241 rectifié bis, 243 rectifié bis et 242 rectifié bis.
M. le président. Les sous-amendements nos 238 rectifié bis, 239 rectifié bis, 240 rectifié bis, 241 rectifié bis, 243 rectifié bis et 242 rectifié bis sont retirés.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 268.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 112.
M. le président. Monsieur Hérisson, souhaitez-vous modifier le sous-amendement n° 264 rectifié dans le sens proposé par M. Charasse ?
M. Pierre Hérisson. Je remercie non seulement M. Charasse de sa proposition de rectification, mais aussi M. le ministre de l'avis de sagesse qu'il a émis, lequel était cependant assorti d'un souhait de retrait.
Je pense, monsieur le ministre, que vous comprendrez l'intérêt de ce sous-amendement modifié, qui constitue le premier pas d'un long chemin : une réflexion - un jour, une décision sera probablement prise - devra être menée concernant le rapprochement des autorités de régulation dans le domaine des communications électroniques.
Sur ce point, j'agis en complicité avec le président de la commission des affaires culturelles.
Je vous remercie, monsieur le ministre, de bien vouloir émettre un avis favorable sur ce sous-amendement modifié.
M. le président. Dois-je comprendre, monsieur Hérisson, que vous acceptez la rectification proposée par M. Charasse ?
M. Pierre Hérisson. Absolument !
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 264 rectifié bis ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 18 pour insérer un article L. 331-5-2 dans le code de la propriété intellectuelle, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L'autorité peut recueillir l'avis de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes lorsque le litige peut avoir un impact sur l'interopérabilité des réseaux et des services de communications électroniques relevant de la compétence de cette dernière. L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes rend son avis dans les trente jours.
Selon le dicton chinois, « tout grand voyage commence par un premier pas » ! (Exclamations amusées.)
La parole est à M. le ministre.
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Comme le dit Samuel Butler, « il faut savoir changer d'avis avec aisance et grâce pour l'amour de son prochain. » (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à M. Yann Gaillard, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 264 rectifié bis.
M. Yann Gaillard. Monsieur le président, je ne suis pas opposé à ce sous-amendement, surtout au moment où il reçoit la bénédiction ministérielle.
Simplement, je considère que l'on s'engage dans un processus d'une complexité extraordinaire, puisque nous sommes en train de réguler la régulation des autorités de régulation. Il faudra bientôt créer un secrétariat d'État chargé des relations entre les autorités de régulation. (Rires et applaudissements sur les travées de l'UMP. - M. Bruno Retailleau applaudit également.)
M. Ivan Renar. Un grand régulateur !
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.
Mme Catherine Morin-Desailly. Mon intervention concerne également le sous-amendement n° 113, dans lequel notre collègue Alain Dufaut propose que le Conseil de la concurrence soit également saisi.
Finalement, nous nous interrogeons sur le fonctionnement de cette future Autorité de régulation et sur sa capacité, en dépit des membres éminents qu'elle comprendra, à exercer ses missions. On peut concevoir qu'elle prenne conseil auprès d'autres instances, comme celles qui ont été évoquées. Mais, dès lors, pourquoi ne pas proposer que la CNIL elle-même puisse être saisie pour avis ?
Sachant que l'Autorité de régulation aura toujours la possibilité de consulter ces instances, nous nous abstiendrons lors du vote des sous-amendements nos 264 rectifié bis et 113.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. Les choses sont simples : toute instance a toujours le droit d'entendre ou de consulter qui elle veut.
Notre collègue Catherine Morin-Desailly a donc parfaitement raison quand elle affirme qu'il n'est pas besoin d'apporter une telle précision dans la loi.
Pourquoi, dès lors, serait-il nécessaire de prévoir la consultation de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes ?
Comme l'ont dit à la fois M. Hérisson et M. le président de la commission en aparté, ces deux autorités sont sans doute destinées à fusionner un jour.
Par ailleurs, Mme Morin-Desailly le comprendra, le Sénat n'attache sans doute pas le même intérêt à ces autorités, même si toutes deux sont importantes. En effet, le Sénat a beaucoup travaillé sur l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes. Cette instance doit beaucoup à son apport, et notamment à celui de notre collègue Pierre Hérisson.
Pour toutes ces raisons, il me semble que l'on peut « faire une fleur » à notre collègue Pierre Hérisson, d'autant que la mesure proposée est facultative, sans pour autant ignorer que l'autorité peut consulter qui elle veut et que n'importe quelle instance qui se juge qualifiée peut toujours envoyer spontanément un avis à l'autorité compétente.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 264 rectifié bis.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 269.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote sur l'amendement n° 270 rectifié.
Mme Marie-Christine Blandin. L'interopérabilité ne se quémande pas ; c'est un droit que l'on aurait dû imposer aux constructeurs et qui doit, à défaut, rester accessible par des interventions encadrées. Ni l'arbitrage de ce qui doit être fait ni la justice ne peuvent s'exporter. La démocratie ne peut s'accommoder de la multiplication d'autorités, dont le travail, nous le savons tous, sera fonction de ses membres, de leur équilibre et/ou de leur impartialité. Or qui les nommera ?
Leur travail sera également fonction de leurs moyens de fonctionnement. Or l'on sait combien la fluctuation de ceux-ci peut minorer l'efficacité. Souvenons-nous des restrictions dont fut victime l'année dernière la Commission nationale de déontologie de la sécurité !
Si certains sous-amendements sont sympathiques - je pense notamment à la saisine de l'Autorité par un citoyen - ou souhaitables - la publication des codes sources, par exemple -, la rédaction d'un certain nombre d'entre eux révèle, par les termes employés, la faiblesse de l'outil.
Je citerai le sous-amendement n° 238 rectifié bis, qui a été retiré : « Tout éditeur de logiciel [...] peut demander à l'autorité de favoriser ou de susciter une solution de conciliation ». On aurait dû écrire : « Si votre Grâce le permet » !
Par conséquent, je m'abstiens sur l'ensemble des sous-amendements et je voterai contre l'amendement de la commission, modifié.
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. À l'instar de Mme Blandin, je profite de cette explication de vote pour exposer la position générale du groupe socialiste sur cet article additionnel.
Dans la suite des débats, nous présenterons une alternative à la proposition de l'Assemblée nationale concernant le collège des médiateurs.
Nous sommes résolument contre la proposition de M. le rapporteur visant à créer dans notre pays une autorité administrative, véritable usine à gaz, puisque nous sommes incapables de faire l'inventaire de tout ce qu'elle devra réguler, notamment dans le domaine technique. Nous voterons donc contre l'amendement qui a été déposé à ce sujet à l'article 9.
Par conséquent, nous ne participerons pas au vote des dispositions - amendement ou sous-amendement - se rapportant à une instance que nous combattons et contre laquelle nous allons voter.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Je souhaite lever toute ambiguïté : nous ne créons pas une nouvelle autorité indépendante et de référence pour le plaisir de créer !
Le texte adopté par l'Assemblée nationale procède à la création d'un collège de médiateurs constitué de juges dont la mission est limitée aux problèmes que l'on pourrait confier à une instance de ce type.
La loi qui s'appliquera sera celle que nous allons voter. Or les technologies vont évoluer au fil du temps et notre préoccupation est de prendre en compte ces modifications que nous ne pouvons pas prévoir aujourd'hui.
Nous sommes donc favorables à la création d'une instance de référence, mais celle-ci ne peut pas, à notre sens, être seulement un collège ayant un rôle de médiation. C'est la raison pour laquelle nous suggérons la création, que M. le ministre a bien voulu accepter, d'une autorité indépendante dont la mission sera, mieux que ne peut le faire le législateur, de suivre davantage et au quotidien les évolutions susceptibles d'intervenir.
Il ne s'agit ni d'une réduction du rôle de législateur, donc du pouvoir législatif, ni d'un transfert de l'autorité de l'État, donc du pouvoir exécutif, vers une autorité indépendante. Nous voulons seulement que soit assuré un suivi permanent des évolutions qui ne manqueront pas de se produire dans un domaine qui est éminemment et heureusement mobile.
Par conséquent, ne nous faites pas de procès d'intention par rapport aux autorités indépendantes : le Conseil de la concurrence, par exemple, existe toujours et on pourra le saisir. Naturellement, la justice sera également saisie, si tant est qu'il faille le faire. Mais, avec l'Autorité de régulation, nous disposerons d'une instance dotée de compétences juridiques, mais aussi techniques, et c'est la raison pour laquelle nous insistons sur sa création.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 270 rectifié.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 196 rectifié.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote sur l'amendement n° 18.
Mme Catherine Morin-Desailly. Je serai brève. Comme je l'ai largement expliqué dans la discussion sur l'article, par cohérence avec ce que nous avons voté hier, nous ne voterons pas cet article additionnel.
M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.
M. Bruno Retailleau. Je ferai deux remarques générales et une brève démonstration.
Première remarque générale, pour la clarté de nos débats, il aurait été plus utile de commencer par l'examen de l'amendement n° 21 rectifié de M. le rapporteur relatif au principe même de création et de composition de l'Autorité de régulation. Malheureusement, nous ne l'avons pas fait : nous avons d'abord abordé les missions de cette autorité.
Je n'ai aucune phobie contre les autorités administratives indépendantes. Toutefois, comme je l'avais souligné lors de la discussion générale, si le travers du xxe siècle a été la création de commissions, celui du xxie siècle est bien parti pour que ce soit la création d'autorités administratives indépendantes. Ce travers nous vient du monde anglo-saxon : une autorité administrative indépendante est nécessairement plus indépendante que l'administration en raison du spoil system, qui n'existe pas dans notre tradition française.
Comme mon excellent collègue Yann Gaillard, j'observe que l'Autorité de régulation, ce « machin » supplémentaire, devra à l'évidence s'appuyer sur deux béquilles, les deux autres autorités indépendantes que sont l'ARCEP et le Conseil de la concurrence. En matière d'action publique, on aurait pu procéder d'une autre façon !
Ma seconde remarque générale porte sur le principe même d'interopérabilité.
Je vous remercie de la patience dont vous avez fait preuve pour tenter de me convaincre, monsieur le ministre, mais vous n'y êtes pas parvenu. L'amendement n° 18 constitue vraiment, selon moi, un recul. Pour reprendre la métaphore chinoise que vous avez utilisée, je dirai que, loin d'être un premier pas en avant, c'est plutôt un pas en arrière.
Face à la conception du droit latin, fondée sur l'affirmation du principe d'opérabilité, il y a la conception du common law, qui repose sur la conciliation, la négociation. Cela m'amène à la rapide démonstration que je voudrais faire.
Le texte proposé pour l'article L. 331-5-1 par l'amendement n° 18 ne mentionne pas l'interopérabilité. Il fait seulement allusion à l'incapacité d'interopérer. Cette définition par une antiphrase, en quelque sorte, est très révélatrice de ce passage d'une interopérabilité de droit et à une interopérabilité véritablement amoindrie.
Elle l'est encore dans le paragraphe suivant, l'article L. 331-5-2, où il est précisé qu'il peut être demandé à l'Autorité de régulation de favoriser ou de susciter une solution de conciliation. La conciliation tournera à l'avantage du « plus gros », celui qui disposera de budgets énormes permettant de faire durer la conciliation, la négociation.
Pierre Hérisson a cité tout à l'heure l'amende de près de 500 millions d'euros concernant Microsoft. Je vous signale que le budget de cette même entreprise pour le lobbying en Europe est aussi de 500 millions d'euros. Cela vous donne une idée des sommes qui sont en jeu ! Et lorsque l'Autorité de régulation devra favoriser ou susciter une solution de conciliation, le poids ne sera pas égal dans la balance selon les budgets de l'un ou de l'autre !
Vous auriez pu accepter le sous-amendement que nous avons présenté hier soir sur le droit d'entrée, repris dans le sous-amendement n° 269 proposé par ma collègue Mme Morin-Desailly. Pourquoi, en effet, ne pas concevoir une interopérabilité gratuite, uniquement facturée selon les frais de logistique, au lieu de laisser à l'Autorité de régulation le soin de prévoir un ticket d'entrée sur le marché ? C'était peu de chose, mais vous l'avez refusé. Cela en dit long !
L'interopérabilité est amoindrie, car l'Autorité de régulation pourra, à défaut de conciliation, prendre une décision motivée de rejet de la demande, comme le mentionne l'avant-dernier alinéa de l'amendement.
Enfin, il n'y aura pas de décompilation et c'est la vraie menace dans les cas qui seront extrêmement compliqués à juger et où les sommes en jeu seront énormes. Si ce principe n'est pas clairement affirmé, les autorités du monde entier ne pourront pas faire respecter une interopérabilité effective et de droit.
Monsieur le ministre, j'ai un grand respect pour le combat que vous avez mené à l'Assemblée nationale, avec beaucoup d'élégance et de ténacité, afin de concilier le principe personnaliste du droit d'auteur, par rapport au copyright, avec la liberté des internautes. Il ne faudrait pas gâcher ce que vous avez obtenu par vos efforts à l'Assemblée nationale en diminuant au Sénat l'interopérabilité, qui est l'emblème même de la conception que vous vous faites de la liberté en la matière.
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. J'ai indiqué tout à l'heure les raisons pour lesquelles nous allons voter contre amendement n° 18.
Le président de la commission nous a expliqué que cette Autorité de régulation n'était pas créée pour le plaisir de créer : dans un monde qui évolue en permanence et où des technologies nouvelles vont faire leur apparition, elle sera finalement un observatoire qui ne se substituera ni au législateur ni à l'administration. J'en doute ! Il fallait alors mettre en place un observatoire pour éclairer le monde politique, en particulier les parlementaires qui ont de grandes lacunes sur le plan technique et qui, dans cette affaire, ont des difficultés à assumer leur rôle en toute connaissance de cause.
L'Autorité de régulation va devoir arbitrer l'interopérabilité, alors que le Gouvernement devait lui donner - nous l'avions demandé hier en pointant les insuffisances par rapport aux engagements - un caractère contraignant, afin de ne pas laisser en héritage une somme considérable de contentieux à cette instance, qui devra arbitrer tout et n'importe quoi ! L'interopérabilité devrait être un droit, le juge ne se prononçant qu'en cas de problème en s'appuyant sur la loi. Or tel n'est pas le cas !
Soyons clairs : heureusement que l'article 40 n'est pas évoqué ici, car il faudra dégager des moyens considérables pour rendre cette autorité efficace. Je sais que vous ne les avez pas débloqués. Vous tentez de rendre un peu plus crédible un projet fait de bric et de broc. Mais les évolutions techniques nécessiteront de toute façon non pas une Autorité, mais une nouvelle loi !
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. Je n'ai pas entendu la commission répondre à la question que j'avais posée tout à l'heure, mais c'est probablement un oubli de sa part : le délai de recours est-il bien celui qui existe dans le droit commun entre le tribunal de première instance et la cour d'appel ? (M. le rapporteur fait un signe d'assentiment.)
Vous ne l'avez pas précisé dans votre texte, monsieur le rapporteur, mais je pense que cela va de soi et je vous remercie de votre accord. Il vaut mieux que cela figure dans les travaux préparatoires de la loi.
M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, pour explication de vote.
M. Ivan Renar. Monsieur le président, je n'avais pas l'intention de prendre la parole pour explication de vote, mais M. Bruno Retailleau m'a, en quelque sorte, alerté.
Nous voterons contre l'amendement n° 18. Mais il faudra bien qu'à un moment donné nous ayons une réflexion sur les pouvoirs qui sont les nôtres : les parlementaires ne s'acquittent pas suffisamment, me semble-t-il, de la mission de contrôle du Gouvernement qui leur est confiée dans le cadre de la Ve République : les questions, les commissions d'enquêtes, les missions d'information.
Il est un autre moyen que nous avons mis en pratique sur les questions de recherche scientifique : l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.
Il s'agit, en quelque sorte, d'une commission d'enquête permanente formée à parité de députés et de sénateurs et qui s'est adjoint la compétence d'une trentaine de scientifiques renommés tels que des prix Nobel français et des directeurs de laboratoire. En fait, cet office s'est donné les moyens scientifiques et techniques de fonctionner, car les parlementaires n'ont pas la prétention d'être des techniciens de haut vol ou des chercheurs scientifiques.
À l'avenir, si le Parlement veut encore avoir un certain poids s'agissant de ses activités de contrôle, il devra non plus créer des comités Théodule, mais s'orienter vers de telles structures. Ces instances existent d'ores et déjà dans les domaines de l'énergie ou du traitement des déchets nucléaires. J'avais d'ailleurs déjà fait cette remarque lors de la création du Conseil supérieur de l'audiovisuel.
Nous devons nous donner les moyens politiques et techniques d'accomplir nous-mêmes ces missions, ce qui éviterait de vaines discussions.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Avant que cet amendement ne soit mis aux voix, je souhaite vous apporter quelques précisions, mesdames, messieurs les sénateurs, afin que vous vous prononciez en toute connaissance de cause.
Il s'agit de garantir concrètement l'interopérabilité. Les mesures techniques de protection ne peuvent s'opposer au libre usage de l'oeuvre ou de l'objet protégé dans les limites des droits accordés par les détenteurs de droits. Ce principe est clairement défini et affirmé par la loi.
Deux voies seront possibles pour mettre en oeuvre l'interopérabilité.
D'une part, il faudra autoriser les développeurs de logiciels à accéder aux informations essentielles à l'interopérabilité en décompilant les mesures techniques. Cette solution est gratuite et n'est pas négociable. L'unanimité de la Haute Assemblée en la matière témoigne de sa volonté d'avancer sur ce point.
D'autre part, l'autorité indépendante devra engager une conciliation - c'est très important - et, à défaut, ordonnera sous astreinte l'accès aux informations essentielles à l'interopérabilité aux éditeurs qui en feront la demande.
La mission de cette instance est donc d'ouvrir des portes, d'appliquer les dispositions de la loi que vous allez adopter, mesdames, messieurs les sénateurs, afin de rendre ce principe opérationnel.
Ainsi, le transfert de propriété intellectuelle d'un éditeur à un autre exige que, dans certains cas, une rémunération appropriée soit réclamée dans des conditions équitables et non discriminatoires.
En inscrivant l'interopérabilité dans le texte, l'Assemblée nationale a d'abord adopté un principe. Aujourd'hui, nous sommes tous, me semble-t-il, acquis à ce principe et, comme vous, je suis le premier à le défendre.
Une question se posait eu égard à la rédaction du texte : comment faire en sorte que ce principe puisse être effectif, afin que l'interopérabilité ne reste pas une abstraction ? Si l'interopérabilité n'est pleine et entière que sur le papier parce que nous serons incapables de la mettre en oeuvre, alors elle ne sera pas seulement diminuée, elle demeurera un rêve. Si, comme moi, vous êtes convaincus de sa nécessité, vous devriez avoir à coeur de donner des pouvoirs à une instance qui respectera les principes que vous aurez fixés en tant que législateurs.
Ma priorité - et je sais que cet objectif est partagé par la commission des affaires culturelles - est de rendre l'interopérabilité effective, et c'est l'Autorité de régulation des mesures techniques de protection qui le garantira. Nous faisons le choix d'une interopérabilité qui sera rendue possible, d'abord par des conciliations, sinon des injonctions, au besoin sous astreinte. Tel est l'enjeu !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 18, modifié.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 188 :
Nombre de votants | 328 |
Nombre de suffrages exprimés | 323 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 162 |
Pour l'adoption | 164 |
Contre | 159 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 7 bis.
M. Ivan Renar. Le coup est passé très près !
Article 7 bis
L'importation, le transfert depuis un État membre de la Communauté européenne, la fourniture ou l'édition de logiciels susceptibles de traiter des oeuvres protégées et intégrant des mesures techniques permettant le contrôle à distance direct ou indirect d'une ou plusieurs fonctionnalités ou l'accès à des données personnelles sont soumis à une déclaration préalable auprès du service de l'État chargé de la sécurité des systèmes d'information. Le fournisseur, l'éditeur ou la personne procédant à l'importation ou au transfert depuis un État membre de la Communauté européenne est tenu de transmettre à ce service les spécifications et le code source des logiciels concernés, le code source des bibliothèques utilisées lorsque celui-ci est disponible, ainsi que l'ensemble des outils et méthodes permettant l'obtention de ces logiciels à partir des codes source fournis. Le service de l'État chargé de la sécurité des systèmes d'information peut, si ces logiciels s'appuient sur des bibliothèques et composants logiciels créés, importés ou conçus par une tierce partie, demander à celle-ci la fourniture des mêmes éléments. Un décret en Conseil d'État fixe les conditions dans lesquelles sont souscrites ces déclarations et transmises les informations techniques visées ci-dessus.
Les logiciels visés au premier alinéa ne peuvent être utilisés dans des systèmes de traitement automatisé de données dont la mise en oeuvre est nécessaire à la sauvegarde des droits afférents aux oeuvres protégées que lorsqu'ils sont opérés dans le respect des dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés et dans des conditions ne portant notamment pas atteinte aux secrets protégés par la loi, ni à l'ordre public.
L'État est autorisé à déterminer les conditions dans lesquelles les logiciels visés au premier alinéa peuvent être utilisés dans les systèmes de traitement automatisé de données des administrations de l'État, des collectivités territoriales et des opérateurs publics ou privés gérant des installations d'importance vitale au sens des articles L. 1332-1 à L. 1332-7 du code de la défense.
Un décret en Conseil d'État fixe les conditions d'application du présent article ainsi que la nature des systèmes de traitement automatisé de données auxquelles elles s'appliquent.
M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, sur l'article.
M. Bruno Retailleau. Peut-être aurions-nous pu retrouver un instant d'unanimité sur l'article 7 bis relatif aux logiciels espions, c'est-à-dire aux mesures techniques de protection permettant de contrôler à distance, directement ou indirectement, la fonctionnalité des matériels ou même d'entraver un certain nombre de fonctions de logiciels. Mais le rapporteur nous proposera tout à l'heure de supprimer cet article.
L'Assemblée nationale avait introduit cet article pour répondre à deux enjeux : la liberté personnelle et la sécurité de nos systèmes d'information. À cet égard, je prendrai un exemple.
En juillet dernier, Sony a mis sur le marché un CD équipé d'une MTP qui intègre un système anti-copie. Ce logiciel furtif ne permet pas de copier le CD. Toutefois, tout en prenant la main sur l'ordinateur pour empêcher la réalisation de la copie, celui-ci se connecte, à l'insu de l'usager, à un site distant et, ce faisant, ouvre une brèche. Des centaines d'usagers ont ainsi vu des hackers pénétrer leur système informatique. Nous devons donc nous demander jusqu'où une MTP peut aller.
Si nous supprimions l'article 7 bis, notre position ne serait pas conforme avec le simple principe de précaution. Considérant les dangers que représentent les MTP intégrant des logiciels espions, les députés ont assorti cet article de trois sécurités : d'abord, une déclaration préalable ; ensuite, le respect de la loi de 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés - cette liberté fondamentale est garantie dans le bloc de constitutionnalité ; enfin, l'État doit fixer des règles d'utilisation de ces logiciels pour ses propres administrations, pour les administrations des collectivités territoriales, ou encore pour les opérateurs publics ou privés gérant des installations d'importance vitale au sens des articles L. 1332-1 à L. 1332-7 du code de la défense ; rien que cela !
On pourrait estimer que tout cela ne sert à rien parce que l'on n'a pas les moyens d'assurer la sécurité de nos systèmes d'information. Mais, en France, au sein du secrétariat général de la défense nationale, il se trouve que la direction centrale de la sécurité et des systèmes d'information est un service très compétent, susceptible de gérer ce genre de problème.
M. le rapporteur a invoqué plusieurs arguments en faveur de la suppression de cet article.
Tout d'abord, la sécurité des systèmes d'information serait hors sujet. Je pense au contraire que nous sommes au coeur du sujet, puisque ce texte traite des mesures techniques de protection.
Ensuite, cet article irait à l'encontre du principe de libre administration des collectivités. Mais nous devons également respecter d'autres principes constitutionnels de portée générale ; je pense notamment à la sécurité nationale.
Enfin, ce dispositif serait inapplicable, l'Assemblée nationale ayant prévu que chaque personne privée doit déclarer l'importation, la fourniture ou l'édition de logiciels intégrant ces spywares.
Toutefois, même si la rédaction de cet article n'est pas parfaite, il ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain. Considérant l'enjeu que cela représente en matière de sécurité des systèmes d'information, nous pourrions utilement nous retrouver afin de faire en sorte que soit appliqué ce principe de protection. La France est vulnérable dans ce domaine, parce qu'elle ne maîtrise pas - et de loin - l'industrie du logiciel, qui est mondiale.
Donc, ne touchons pas à l'article 7 bis et ne votons pas sa suppression.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 19, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur. Notre collègue Bruno Retailleau a plaidé avec beaucoup de talent pour le maintien de l'article 7 bis. Néanmoins, après avoir examiné attentivement cette question, la commission estime que les logiciels espions, qui constituent certes un réel problème, ne relèvent pas du projet de loi que nous examinons, qui a plutôt trait au droit d'auteur.
C'est la raison pour laquelle la commission propose de supprimer cet article, de manière à nous concentrer sur l'objet même de la loi.
M. le président. L'amendement n° 183, présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Les dispositifs matériels ou logiciels permettant le contrôle à distance direct ou indirect d'une ou plusieurs fonctionnalités ou l'accès à des données personnelles ne sont pas protégés au titre du présent chapitre.
La parole est à M. Ivan Renar.
M. Ivan Renar. Cet amendement vise à préciser la définition des mesures techniques de protection pour éviter des dérives d'ordre technologique comme d'ordre répressif.
Les débats au Parlement ou dans les médias ont mis en évidence la possibilité de traiter les internautes, qu'ils soient jeunes, adultes ou âgés, comme des coupables potentiels, alors même que notre droit s'appuie sur la présomption d'innocence.
Comme nous l'avons souligné hier soir, la contrefaçon est un délit reconnu. Il suffit de consulter le site des douanes françaises pour en connaître la définition, les domaines d'activité et les peines encourues.
Toutefois, les majors nous imposent la présomption de culpabilité, et nous leur laissons donc la possibilité de répondre à leurs inquiétudes en appliquant des technologies de contrôle. Or nous souhaitons que ces mesures dictées par les majors ne soient pas protégées par la législation. Nous voulons au contraire que la CNIL soit soutenue dans son travail par toutes les législations.
Le droit de lire, d'écouter de la musique, de regarder des oeuvres visuelles nous est trop précieux pour le voir circonscrit à un système de jeton payant pour utilisation de l'oeuvre, sans possibilité de relire le livre, de réécouter l'oeuvre musicale choisie ni de revoir le tableau ou la photographie considérés. Pouvons-nous limiter le temps passé dans un musée devant une oeuvre ? Devons-nous racheter un roman pour le relire ? Ces questions sont d'importance. C'est pourquoi nous vous demandons de voter le présent amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. Les préoccupations de sécurité et de protection qui sous-tendent le présent amendement doivent être distinguées de celles qui inspirent les mesures techniques de protection. Faire dépendre la validité du statut des mesures techniques de protection de certaines de leurs caractéristiques, qui ne sont pas nécessairement manifestes pour les utilisateurs, risque d'être une source d'insécurité juridique.
C'est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. S'agissant de l'amendement n° 19, je m'en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
Pour ce qui est de l'amendement n° 183, je comprends le souci de M. Renar de préserver la confidentialité des données personnelles. Mais l'article 7, que vous venez d'adopter, ne saurait enfreindre la loi « informatique et libertés ». J'émets donc un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur. Après avoir entendu notre collègue Bruno Retailleau et l'avis du Gouvernement, je retire l'amendement de la commission.
M. le président. L'amendement n° 19 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 183.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote sur l'article.
M. Bruno Retailleau. Je souhaite simplement remercier M. le rapporteur et M. le ministre d'avoir entendu nos arguments, car le sujet est d'importance.
M. le président. La parole est à M. Yann Gaillard, pour explication de vote.
M. Yann Gaillard. La proposition de la commission était pour moi un mystère. Le Gouvernement, dans sa sagesse, a probablement réfléchi, et je félicite le ministre de sa réactivité.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.
Mme Catherine Morin-Desailly. À l'instar des deux collègues qui viennent d'intervenir, nous sommes satisfaits de l'issue de ce débat, car cet article a toute son importance.
M. le président. Je mets aux voix l'article 7 bis.
(L'article 7 bis est adopté.)
Article additionnel après l'article 7 bis
M. le président. L'amendement n° 173, présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 7 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le traitement des données à caractère personnel par les logiciels susceptibles de traiter des oeuvres protégées et intégrant des mesures techniques permettant le contrôle à distance direct ou indirect d'une ou plusieurs fonctionnalités ou l'accès à des données personnelles est soumis à l'autorisation préalable de la Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés.
La parole est à M. Ivan Renar.
M. Ivan Renar. Comme nous le disions lors de la présentation du précédent amendement, la CNIL doit être soutenue dans son travail par la législation. Il s'agit de renforcer ses pouvoirs dans des situations nouvelles, et non pas de les diminuer.
Les possibilités d'intrusion dans la sphère de la vie privée des personnes que donnent les technologies du numérique et de l'électronique intégrées aux systèmes informatiques sont de plus en plus subtiles et incontrôlables. Les citoyens ne sont plus ni des usagers, ni des utilisateurs, ni même des consommateurs éclairés par une volonté intime et un désir profond : ils sont traités en batteries, comme les poulets, pour devenir des individus aux achats compulsifs, des « veaux », pour reprendre une expression célèbre, rackettés par le système du « payer pour voir ».
La résistance est difficile. La CNIL est l'outil de surveillance et d'alerte de notre démocratie républicaine.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. Cet amendement évoque un problème important, à savoir la protection de la vie privée. Le traitement des données à caractère personnel devrait être plutôt envisagé dans le cadre des dispositions de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, qui a été récemment modifiée par la loi du 6 août 2004.
Donc, malgré l'intérêt du sujet, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement, estimant que ce problème sera mieux traité par d'autres dispositions.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. La protection des données personnelles est un sujet de préoccupation majeur, mais cet amendement n'est pas nécessaire, car la loi « informatique et libertés » trouve bien sûr pleinement son application, notamment dans les cas où les mesures techniques seraient abusivement employées. Vous avez donc pleinement satisfaction, monsieur Renar.
Par conséquent, j'émets un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. Je souscris à ce qu'a dit M. le ministre. À partir du moment où il existe un fichier personnel, la consultation de la CNIL est de droit et rien ne peut donc lui échapper. Il n'est pas nécessaire de le répéter dans chaque texte de loi, même si M. Renar a eu naturellement tout à fait raison d'appeler l'attention sur ce point, les débats permettant d'apporter la précision qu'il souhaitait.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 173.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 8
Dans le code de la propriété intellectuelle, il est inséré un article L. 331-6 ainsi rédigé :
« Art. L. 331-6. - Le droit au bénéfice de l'exception pour copie privée est garanti par les dispositions du présent article et des articles L. 331-7 à L. 331-9.
« Les titulaires de droits mentionnés à l'article L. 331-5 prennent, dans un délai raisonnable, le cas échéant après accord avec les autres parties intéressées, les mesures qui permettent le bénéfice effectif des exceptions définies aux 2° et 7° de l'article L. 122-5 et aux 2° et 6° de l'article L. 211-3 dès lors que les personnes bénéficiaires d'une exception ont un accès licite à une oeuvre ou à un phonogramme, vidéogramme ou programme, que l'exception ne porte pas atteinte à l'exploitation normale de l'oeuvre ou d'un autre objet protégé et qu'il n'est pas causé un préjudice injustifié aux intérêts légitimes du titulaire de droits sur cette oeuvre ou cet objet protégé.
« Les titulaires de droits ont la faculté de prendre des mesures permettant de limiter le nombre de copies.
« Les mesures techniques mises en place par les éditeurs et distributeurs de services de télévision ne doivent pas avoir pour effet d'empêcher le public de bénéficier de l'exception pour copie privée telle que définie au 2° de l'article L. 122-5.
« Le Conseil supérieur de l'audiovisuel veille au respect du précédent alinéa en application de l'article 42 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée.
« Les titulaires de droits ne sont pas tenus de prendre les mesures prévues au premier alinéa lorsque l'oeuvre ou un autre objet protégé par un droit voisin sont mis à la disposition du public selon les stipulations contractuelles convenues entre les parties, de manière que chacun puisse y avoir accès de l'endroit et au moment qu'il choisit.
« Les modalités d'exercice de la copie privée sont fixées par le collège des médiateurs mentionné à l'article L. 331-7, en fonction, notamment, du type d'oeuvre ou d'objet protégé, du support et des techniques de protection disponibles.
« Toute limitation de la lecture d'une oeuvre, d'un vidéogramme ou d'un phonogramme, ou du bénéfice de l'exception prévue au 2° de l'article L. 122-5 et au 2° de l'article L. 211-3, résultant de mesures techniques mentionnées à l'article L. 331-5, fait l'objet d'une information de l'utilisateur. Les modalités de cette information sont fixées par décret en Conseil d'État. »
M. le président. La parole est à M. Yann Gaillard, sur l'article.
M. Yann Gaillard. Afin de ne pas lasser la patience de mes collègues, je ne répéterai pas les arguments que j'ai développés hier. Finalement, le principe de la copie privée, qui est très important, est moins menacé par ce texte que ne l'a été précédemment celui de l'interopérabilité.
M. le président. Je suis saisi de sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 20 rectifié, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Dans le code de la propriété intellectuelle, sont insérés neuf articles L. 331-6 à L. 331-6-8 ainsi rédigés :
« Art. L. 331-6. - Le bénéfice de l'exception pour copie privée et des exceptions mentionnées au présent article est garanti conformément aux dispositions suivantes :
« L'Autorité de régulation des mesures techniques de protection visée à l'article L. 331-7 veille à ce que la mise en oeuvre des mesures techniques de protection n'ait pas pour effet de priver les bénéficiaires des exceptions définies au 2°, au 7° et au 8° de l'article L. 122-5 ainsi qu'au 2°, au 6° et au 7° de l'article L. 211-3 de leur exercice effectif.
« Elle peut déterminer, par ses recommandations, certaines des modalités d'exercice des exceptions précitées, et fixer notamment le nombre minimal de copies autorisées dans le cadre de l'exception pour copie privée, en fonction du type d'oeuvre ou d'objet protégé, des divers modes de communication au public, et des possibilités offertes par les techniques de protection disponibles.
« Art. L. 331-6-1. - Les titulaires de droits, qui recourent aux mesures techniques de protection définies à l'article L. 331-5, peuvent leur assigner pour objectif de limiter le nombre de copies. Ils prennent cependant les dispositions utiles pour que leur mise en oeuvre ne prive pas les bénéficiaires des exceptions visées à l'article L. 331-5 de leur exercice effectif. Ils s'efforcent de définir ces mesures en accord avec les autres parties intéressées, et notamment les associations agréées de consommateurs.
« Ces dispositions peuvent, dans la mesure où la technique le permet, subordonner le bénéfice effectif de ces exceptions, à un accès licite à une oeuvre, ou à un phonogramme, un vidéogramme, ou à un programme, et veiller à ce qu'elles n'aient pas pour effet de causer un préjudice injustifié aux intérêts légitimes du titulaire de droits sur l'oeuvre ou l'objet protégé, ni de porter atteinte à son exploitation normale.
« Art. L. 331-6-2. - Les titulaires de droit ne sont cependant pas tenus de prendre ces dispositions lorsque l'oeuvre ou un autre objet protégé par un droit voisin sont mis à disposition du public selon des dispositions contractuelles convenues entre les parties, de manière que chacun puisse y avoir accès de l'endroit et au moment qu'il choisit.
« Art. L. 331-6-3. - Les éditeurs et les distributeurs de services de télévision ne peuvent recourir à des mesures techniques qui auraient pour effet de priver le public du bénéfice de l'exception pour copie privée, y compris sur un support et dans un format numérique, dans les conditions mentionnées au 2° de l'article L. 122-5 et au 2° de l'article L. 211-3.
« Le Conseil supérieur de l'audiovisuel veille au respect de ces obligations dans les conditions définies par l'article 42 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.
« Art. L. 331-6-4. - Les conditions d'accès à la lecture d'une oeuvre, d'un vidéogramme, ou d'un phonogramme, et les limitations susceptibles d'être apportées au bénéfice de l'exception de copie privée mentionnée au 2° de l'article L. 122-5 et au 2° de l'article L. 211-3, par la mise en oeuvre d'une mesure technique de protection, doivent être portées à la connaissance de l'utilisateur.
« Les modalités de cette information sont fixées par décret en conseil d'État.
« Art. L. 331-6-5. - Toute personne bénéficiaire des exceptions désignées au 2° et au 8° de l'article L. 122-5 ainsi qu'aux 2° et 7° de l'article L. 211-3, ou toute personne morale agréée qui la représente peut saisir l'Autorité de régulation des mesures techniques de tout différend portant sur les restrictions que les mesures techniques de protection définies à l'article L. 331-5 apportent au bénéfice desdites exceptions.
« Art. L. 331-6-6. - Les personnes morales et les établissements chargés, en application du 7° de l'article L. 122-5, de réaliser des reproductions ou des représentations d'une oeuvre ou d'un objet protégé adaptées aux personnes handicapées peuvent saisir l'autorité de tout différend portant sur la transmission des textes imprimés sous la forme d'un fichier numérique.
« Art. L. 331-6-7. - Dans le respect des droits des parties, l'Autorité de régulation des mesures techniques de protection favorise ou suscite une solution de conciliation. Lorsqu'elle dresse un procès-verbal de conciliation, celui-ci a force exécutoire ; il fait l'objet d'un dépôt au greffe du tribunal d'instance.
« À défaut de conciliation, l'Autorité de régulation des mesures techniques de protection prend une décision motivée de rejet de la demande ou émet une injonction prescrivant, au besoin sous astreinte, les mesures propres à assurer le bénéfice effectif de l'exception. L'astreinte prononcée par l'autorité est liquidée par cette dernière.
« Ces décisions ainsi que le procès-verbal de conciliation sont rendues publiques dans le respect des secrets protégés par la loi. Elles sont notifiées aux parties qui peuvent introduire un recours devant la Cour d'appel de Paris. Le recours a un effet suspensif.
« Art. L. 331-6-8. - Un décret en Conseil d'État précise les conditions d'application des articles L. 331-6 à L. 331-6-7. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur. Cet amendement vise à proposer une nouvelle rédaction de l'article 8, dont l'objet est d'éviter que la mise en oeuvre des mesures techniques de protection ne prive de leur gain effectif les bénéficiaires d'un certain nombre d'exceptions. Au nombre de ces exceptions figurent, outre la copie privée, les mesures en faveur des handicapés et des bibliothèques publiques.
Le dispositif proposé par le présent amendement confie un rôle important à l'Autorité de régulation des mesures techniques de protection.
L'article L. 331-6 l'autorise à déterminer par ses recommandations certaines des modalités d'exercice des exceptions et à préciser, par exemple, le nombre de copies autorisées en matière de copie privée, en fonction du type d'oeuvre, des modes de communication au public et de l'état des techniques.
L'article L. 331-6-5 autorise les bénéficiaires des exceptions à la saisir de tout différend portant sur les restrictions que les mesures techniques apporteraient à leur exercice effectif.
L'Autorité, sur le fondement de l'article L. 331-6-7, recherche d'abord une solution de conciliation, puis, en cas d'échec, peut prendre une décision contraignante assortie d'une astreinte.
Conformément à la directive, l'article L. 331-6-1 laisse aux titulaires de droits l'initiative des dispositions conciliant mesures techniques et bénéfice des exceptions, tout en les invitant à agir en accord avec les autres parties intéressées, et notamment les associations de consommateurs agréées. Il intègre deux dispositions ajoutées par l'Assemblée nationale pour garantir la copie privée à partir de la source télévisuelle, ainsi que la bonne information des utilisateurs sur les conditions d'accès à l'oeuvre et les limitations de copies.
M. le président. Le sous-amendement n° 53, présenté par M. J.L. Dupont, Mme Morin-Desailly, M. Nogrix et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
I. - Dans le deuxième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 20 pour l'article L. 331-6 du code de la propriété intellectuelle, après les mots :
définies au 2°,
insérer les mots :
au e) du 3,
II. - Dans le texte proposé par l'amendement n° 20 pour l'article L. 331-6-5 du code de la propriété intellectuelle, après les mots :
ainsi qu'aux 2°
insérer les mots :
, e) du 3°
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. Ce sous-amendement, qui vise à réparer un oubli, a pour objet de conférer aux étudiants, aux enseignants et aux chercheurs la même possibilité que celle qui est offerte aux bénéficiaires de l'exception pour copie privée et de l'exception en faveur des bibliothèques et des handicapés, à savoir saisir l'autorité de régulation de tout différend portant sur les restrictions au bénéfice de ces exceptions.
M. le président. Le sous-amendement n° 75, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le dernier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 20 pour l'article L. 331-6 du code de la propriété intellectuelle :
« Elle peut formuler à cette fin des recommandations.
La parole est à M. Michel Charasse.
M. Michel Charasse. J'espère que notre rapporteur ne prendra pas mal ce que je vais dire, d'autant plus qu'il faut reconnaître que, avec la commission, il a fait un travail méritoire de réécriture d'un texte qui, tel qu'il nous a été transmis par l'Assemblée nationale, était quand même très mal écrit.
Il n'empêche que je m'interroge sur la formulation suivante contenue dans son amendement : l'Autorité de régulation « peut déterminer, par ses recommandations ». Ou bien elle détermine des règles, ou bien elle émet des recommandations ! L'article 34 de la Constitution, par exemple, est très clair à ce sujet : la loi « fixe les règles » ou « détermine les principes fondamentaux ».
Mon sous-amendement vise à remplacer les mots : « Elle peut déterminer, par ses recommandations » - ce qui, monsieur le rapporteur, n'est pas juridiquement très convenable - par les mots : « Elle peut formuler à cette fin des recommandations ».
Mais si, en réalité, vous voulez qu'il s'agisse de « décisions », alors vous pouvez très bien écrire : « Elle peut fixer certaines des modalités d'exercice des exceptions précitées ». Je n'ai pas de vanité d'auteur de ce point de vue.
Je souhaite simplement, avec ce sous-amendement, appeler l'attention sur ce problème de rédaction. Ou bien il s'agit de recommandations, et l'Autorité les formule, ou bien ce sont des règles, et elle les fixe.
Je serais reconnaissant à notre estimé rapporteur de bien vouloir nous dire quelle est sa pensée dans ce domaine pour que le texte soit à cet égard impeccable.
M. le président. Le sous-amendement n° 248, présenté, MM. Ralite, Renar, Voguet, Mme David et les membres du Groupe Communiste Républicain et Citoyen est ainsi libellé :
Dans le dernier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 20 rectifié pour l'article L. 331?6 du code de la propriété intellectuelle, remplacer les mots :
de l'exception pour
par les mots :
du droit de
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Ce sous-amendement vise à préciser que, loin d'être une simple tolérance, l'exception pour copie privée est un droit inscrit dans notre législation aussi bien que dans la législation internationale, comme en fait état la directive européenne.
Il n'est pas question, à l'occasion de ce texte, de favoriser l'émergence d'une filière prospère de distribution légale sur Internet, au détriment de l'exercice du droit normal à la copie privée.
Le principe est tentant : non seulement limiter le nombre de copies possibles à partir d'un fichier - ce que les éditeurs de musique ont réussi à imposer à l'ensemble des distributeurs de musique en ligne -, mais également, et surtout, limiter aux seuls logiciels fournis par l'industriel la possibilité d'effectuer les copies.
La copie par un autre moyen ou la mise à disposition de moyens dans ce but, fût-ce dans le cadre normal de l'usage familial, ne saurait être assimilée par le texte à un acte de contrefaçon passible d'une peine de prison pouvant aller jusqu'à trois ans et de 300 000 euros d'amende.
Les utilisateurs se sont mobilisés au sein des associations de consommateurs, parce qu'ils peuvent se prévaloir en justice de ce droit à la copie privée.
M. le président. Le sous-amendement n° 249, présenté, MM. Ralite, Renar, Voguet, Mme David et les membres du Groupe Communiste Républicain et Citoyen est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 20 rectifié pour l'article L. 331-6-1 du code de la propriété intellectuelle par une phrase ainsi rédigée :
Il appartient aux titulaires de droits mentionnés à l'article L. 331-5 de permettre la désactivation des mesures techniques de protection lorsque l'oeuvre n'est plus protégée par le droit d'auteur ou les droits voisins.
La parole est à M. Ivan Renar.
M. Ivan Renar. En prenant la responsabilité de s'engager dans la voie de la généralisation de l'utilisation des mesures techniques de protection, c'est-à-dire de systèmes de gestion de droits numériques, sans en définir précisément le champ d'exercice, le législateur prend le risque d'empêcher l'appropriation par les usagers des oeuvres auxquelles ils auraient légitimement accès.
Ainsi, notre amendement vise à garantir la suppression de toute mesure de protection pour les oeuvres versées dans le domaine public au terme de la période pendant laquelle celles-ci sont protégées par le droit d'auteur et les droits voisins.
Cette disposition permettra de clarifier les modalités d'accès aux oeuvres qui, comme La grande illusion de Renoir et le roman de Malraux, L'espoir, tomberont prochainement dans le domaine public.
On pourrait d'ailleurs légitimement s'interroger sur cette négligence intellectuelle qui consiste à considérer qu'une oeuvre « tombe » dans le domaine public, qu'elle s'y engloutit en quelque sorte, dès lors qu'elle ne fait plus l'objet d'une exploitation commerciale. C'est au contraire une nouvelle vie qui s'ouvre à elle, dont le législateur doit légitimement se préoccuper afin qu'elle puisse, à cette occasion, diversifier et élargir ses modes de diffusion et d'appropriation.
Nous devons donc non seulement éviter de perpétuer tout monopole d'exploitation de fait par les ayants droit au-delà des durées prévues par le code de la propriété intellectuelle, mais également garantir l'exercice du droit d'accès au domaine public pour les usagers.
En effet, il serait pour le moins curieux, vous en conviendrez, que le législateur, en ne prévoyant pas cette désactivation obligatoire, sinon automatique, contraigne les utilisateurs à employer des outils techniques de contournement pour faire valoir leurs droits d'accès.
En définitive, l'adoption de ce sous-amendement permettrait de confirmer que le domaine public ne saurait être un terrain vague, une zone de non-droit. Il s'agit au contraire de prévoir et d'organiser une transition claire dans le destin des oeuvres.
M. le président. Le sous-amendement n° 250, présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 20 rectifié pour l'article L. 331-6-1 du code de la propriété intellectuelle par une phrase ainsi rédigée :
Les mesures techniques prises par les titulaires de droits doivent toujours permettre à l'utilisateur d'effectuer au moins une copie de l'oeuvre concernée.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Nous ne pouvons que regretter que le principe - le droit, devrais-je dire - de copie privée soit appréhendé sous l'angle du régime d'exception au droit d'auteur et non reconnu comme un véritable droit subjectif des usagers.
Pour affaiblir un peu plus ce qui n'est donc plus qu'un principe, le projet de loi qui nous est proposé va plus loin en refusant d'en dessiner les contours.
Nous attirons l'attention de notre assemblée sur la dangereuse imprécision consistant à abandonner au régime contractuel la qualification et la définition des mesures techniques de protection qui détermineront les modalités d'exercice de la copie privée. Que conclure en effet de l'invitation qui leur est faite de « s'efforcer » de trouver un « accord » avec les « autres parties concernées » ?
Comment ne pas voir que ce flou prémédité débouchera inévitablement sur une insécurité d'usage et une insécurité juridique supplémentaire pour les usagers ?
Comment ne pas en conclure que la copie privée deviendra dans les faits impraticable et qu'elle est ainsi vouée à disparaître ?
De bien meilleures garanties doivent être accordées aux usagers pour qu'ils puissent librement copier les oeuvres dont ils ont acquis les droits, afin d'en jouir sur les différents terminaux de consultation dont ils peuvent le cas échéant disposer, soit simultanément soit dans la durée.
En effet, alors que le rythme de renouvellement des matériels, parfois obsolescents au bout de deux ou trois ans, ne faiblit pas, il est indispensable de permettre aux usagers de pouvoir assurer le transfert des oeuvres qu'ils ont acquises entre chaque génération de matériel, sauf à vouloir les contraindre à s'acquitter de nouveaux droits.
Notre sous-amendement vise à tenir compte de la réalité de ces pratiques, par ailleurs encouragées par les campagnes publicitaires des grands fabricants de matériels informatique ou audiovisuel.
Afin d'assurer la permanence dans les faits du principe de copie privée, nous proposons que l'utilisateur puisse réaliser au minimum une copie de cette oeuvre, de sorte que cette copie ne soit nullement assujettie à des contraintes spécifiques telles que le choix des matériels et des logiciels de stockage et d'exécution des oeuvres.
M. le président. Le sous-amendement n° 252, présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par l'amendement n° 20 rectifié pour l'article L. 331-6-2 du code de la propriété intellectuelle par une phrase ainsi rédigée :
Le présent alinéa ne s'applique pas lorsque l'oeuvre a été transférée intégralement et de manière non temporaire sur le matériel de l'utilisateur.
La parole est à M. Ivan Renar.
M. Ivan Renar. Le présent sous-amendement tend à réduire la portée de l'alinéa considéré, qui dispense les titulaires de droits de prendre des mesures préservant le bénéfice des exceptions dans le cas des services à la demande.
Les mesures proposées ont pour objet de préserver le bénéfice de l'exception pour copie privée en établissant une distinction claire entre la location en ligne et la vente en ligne ; elles complètent la transposition de la directive dans ce domaine.
M. le président. Le sous-amendement n° 251, présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 20 rectifié pour l'article L. 331-6-3 du code de la propriété intellectuelle :
« Les éditeurs et distributeurs de services de télévision doivent s'assurer et garantir au public que leurs programmes ne contiennent pas de mesures techniques privant le public du bénéfice de l'exception pour copie privée, y compris sur un support et dans un format numérique, dans les conditions mentionnées au 2° de l'article L. 122-5 et au 2° de l'article L. 211-3.
La parole est à M. Ivan Renar.
M. Ivan Renar. Ce sous-amendement vise à spécifier la formulation proposée par M. le rapporteur afin d'en extraire toute imprécision. La rédaction nous semble en effet insuffisante et limitative, puisqu'elle consiste seulement à interdire aux éditeurs et diffuseurs d'avoir recours par eux-mêmes à des mesures attentatoires à l'exception pour copie privée.
Il nous apparaît à ce titre utile de nous assurer dans les faits que les éditeurs et diffuseurs de services de télévision ne soient pas conduits, directement ou indirectement, à diffuser des programmes qui contiendraient des mesures techniques de protection abusives.
Le contexte de diversification des supports et des canaux de diffusion de ces programmes et la multiplication des acteurs intervenant dans ce processus ouvrent en effet la porte à de possibles contournements de l'exception pour copie privée, sans que la responsabilité des éditeurs et des diffuseurs puisse être explicitement engagée. Le législateur est donc fondé à exiger qu'ils s'assurent de facto que leurs programmes ne contiennent pas de tels dispositifs.
En spécifiant plus directement cette responsabilité, le présent sous-amendement constitue une garantie plus solide pour que l'exception pour copie privée soit réellement respectée, sans préjudice pour les ayants droit.
M. le président. Le sous-amendement n° 54, présenté par Mme Morin-Desailly, M. Nogrix et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Après le premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 20 pour l'article L. 331-6-4 du code de la propriété intellectuelle, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le nombre de copies permises d'une oeuvre vendue sur un support physique est limité, une estimation de la durée de vie du support dans des conditions normales d'usage doit être fournie aux consommateurs.
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. La technologie actuelle permet de contrôler la durée de vie des supports physiques, qui peut même être réduite à quelques heures.
Si le nombre de copies possibles est limité, il importe que le consommateur ait une idée de la durée de vie du support, l'oeuvre ne pouvant être sauvegardée par une copie que de façon limitée et les copies ayant, dans les technologies actuelles, des durées de vie relativement courtes.
Je prendrai un exemple. Dans ma commune, à Rouen, une initiative intéressante a été prise : la bibliothèque a mis en place un service de location de musique basée sur un système informatique canadien « chrono-dégradage ». Ainsi, la personne qui fait appel à ce service recevra par voie numérique une musique qui aura une durée de vie limitée. Passée cette échéance, l'internaute ne pourra plus avoir accès à l'oeuvre.
Cet exemple illustre combien, à côté de l'indication de la limitation du nombre de copies, il est important également d'apporter une estimation de la durée de vie du support.
M. le président. Le sous-amendement n° 281, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 20 rectifié pour l'article L. 331-6-7 du code de la propriété intellectuelle, après les mots :
mesures techniques de protection
insérer les mots :
, après avoir mis les intéressés à même de présenter leurs observations,
La parole est à M. le ministre.
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Ce sous-amendement vise, comme pour l'interopérabilité, à introduire le principe du contradictoire en cas d'injonction sous astreinte. Il s'agit en effet d'une instance dont les pouvoirs seront effectifs, car elle pourra rendre concrète la copie privée, comme l'interopérabilité.
M. le président. Le sous-amendement n° 253, présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans la deuxième phrase du dernier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 20 rectifié pour l'article L. 331-6-7 du code de la propriété intellectuelle, remplacer les mots :
la Cour d'appel de Paris
par les mots :
le Tribunal de grande instance.
La parole est à M. Ivan Renar.
M. Ivan Renar. Il s'agit, par ce sous-amendement, d'offrir un recours supplémentaire aux justiciables en leur permettant de contester les décisions de l'Autorité de régulation en deux occasions si cela s'avère nécessaire.
Avec le texte proposé par la commission, les justiciables auraient comme unique recours celui de la Cour d'appel de Paris. Nous proposons au contraire que les décisions de l'Autorité de régulation puissent être contestées d'abord devant le tribunal de grande instance. Elles ne seraient examinées par la Cour d'appel de Paris que dans un second temps.
Cette disposition va dans le sens d'un renforcement des droits des justiciables qui, comme le rappelle la Convention européenne des droits de l'homme dans son article 6, ont droit à un procès équitable.
La possibilité d'exercer un recours d'abord devant le tribunal de grande instance, puis en appel, va, selon nous, dans le sens d'une plus grande garantie pour les justiciables de bénéficier d'un procès équitable.
C'est pourquoi nous ne doutons pas que vous voterez cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 131, présenté par M. Assouline, Mme Blandin, M. Lagauche, Mme Tasca, MM. Yung, Bockel, Lise, Vidal et les membres du groupe Socialiste apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L.331-6 du code de la propriété intellectuelle, supprimer les mots :
droit au
La parole est à Mme Catherine Tasca.
Mme Catherine Tasca. Il s'agit, par cet amendement, de réparer une erreur rédactionnelle, qui a son importance dans le climat assez confus qui règne depuis des mois dans les débats relatifs à la copie privée, trop souvent appelée « droit à la copie privée ».
Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale parle d'un « droit au bénéfice de l'exception pour copie privée ». Or il s'agit non pas à proprement parler d'un droit, mais, en vertu du 2° de l'article L. 122-5 et du 2° de l'article L. 211-3 du code de la propriété intellectuelle, d'une exception aux droits exclusifs moraux et patrimoniaux des ayants droit.
L'état d'esprit actuel des « utilisateurs » d'oeuvres est suffisamment confus sur la nature de cette exception pour que nous veillions à clarifier cette question.
Cette particularité de notre droit doit continuer à être strictement encadrée et, conformément à sa nature, la copie privée limitée à quelques exemplaires, comme la jurisprudence l'a d'ailleurs toujours réaffirmé, se référant, pour ce faire, à la vérification par le test en trois étapes, qui est entériné par la directive et le projet de loi.
M. le président. L'amendement n° 226, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :
Supprimer le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 331-6 du code de la propriété intellectuelle.
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. Il s'agit d'un amendement de cohérence avec l'amendement n° 201, qui n'a pas été adopté. Par conséquent, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 226 est retiré.
L'amendement n° 187 rectifié, présenté par MM. Retailleau et Darniche, est ainsi libellé :
Compléter le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 331-6 du code de la propriété intellectuelle par une phrase ainsi rédigée :
Lorsque ces mesures permettent de contrôler le nombre de copies, ce nombre doit au moins être égal à un si l'oeuvre, le phonogramme, le vidéogramme ou le programme a été licitement acquis.
La parole est à M. Bruno Retailleau.
M. Bruno Retailleau. L'exception pour copie privée est garantie par une loi du 3 juillet 1985. Cette exception présente un double avantage : elle offre la possibilité d'une patrimonialisation, en permettant à l'acquéreur légal d'une oeuvre de passer d'un support à un autre ; en même temps, elle permet de financer des opérations de création. L'an dernier, les droits concernant l'exception pour copie privée ont rapporté environ 150 millions d'euros ; le quart de cette somme est destiné au financement d'opérations collectives.
Le problème vient du fait que la jurisprudence n'est pas constante. La Convention internationale de Berne a effectivement recadré les choses avec le test un peu compliqué en trois étapes. La jurisprudence européenne a suivi les décisions prises à l'échelon international. La Cour de cassation, quant à elle, a indiqué le 28 février dernier qu'une copie privée, notamment d'un DVD, ne constituait pas une exploitation normale d'une oeuvre.
Monsieur le ministre, il conviendrait de lever cette incertitude en décidant de sanctuariser l'existence minimale de la copie privée pour une oeuvre licitement acquise.
Il reviendrait à cette Autorité de dire, en fonction du support, combien de copies privées sont autorisées. Mais le Parlement doit affirmer clairement qu'il peut y avoir au moins une copie par type de support.
Peut-être disposez-vous d'un certain nombre de réponses susceptibles de lever ces incertitudes. Mais si tel n'est pas le cas, cet amendement pourrait être utile.
M. le président. L'amendement n° 207, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :
Compléter le troisième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 331-6 du code de la propriété intellectuelle par une phrase ainsi rédigée :
Ce nombre ne peut être inférieur à un.
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. Cet amendement tend à apporter une précision. Pour que le marché ne soit pas un marché de dupes, il faut que l'exception pour copie privée existe, c'est-à-dire qu'il y ait au minimum une copie.
L'intervention du législateur pour donner une règle de base concernant les modalités d'exercice de cette exception pour copie privée témoigne de notre volonté de prendre des responsabilités et de ne pas nous défausser sur le collège des médiateurs, qui seraient à la fois régulateurs, arbitres des litiges et tueurs potentiels de la copie privée s'ils ne fixaient pas ce seuil.
Cet amendement vise à préciser le nombre minimum de copie privée, car aujourd'hui, si nous nous contentons du texte, cette copie privée est un rêve abstrait, un fantasme ; certains disent même qu'elle est virtuelle.
La loi de 1985 évoquait l'usage du cercle familial, ce qui est précis. Dans plusieurs pays européens, comme le Royaume-Uni, on a précisé que la copie privée recouvre tout ce qui n'est pas à usage commercial.
Nous sommes dans un grand flou. Que serait l'exception de copie privée si le nombre de copies pouvait être égal à zéro ? Nous devons être prudents en la matière et ne pas tenir un langage trop vague.
M. le président. L'amendement n° 132, présenté par M. Assouline, Mme Blandin, M. Lagauche, Mme Tasca, MM. Yung, Bockel, Lise, Vidal et les membres du groupe Socialiste apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le septième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 331-6 du code de la propriété intellectuelle par une phrase ainsi rédigée :
Le collège des médiateurs veille au respect des règles de chronologie des médias dans l'application de l'exception pour copie privée aux oeuvres cinématographiques.
La parole est à M. Serge Lagauche.
M. Serge Lagauche. Le projet de loi donne comme principale mission au nouveau collège des médiateurs celle de fixer, support par support et objet par objet, au vu des évolutions technologiques, les modalités d'exercice de la copie privée.
Notre amendement tend à apporter une précision quant aux modalités de mise en oeuvre, par le collège des médiateurs, de l'exception pour copie privée s'agissant des oeuvres cinématographiques.
Actuellement, comme précédemment dans le cas de la cassette VHS, l'économie du DVD repose sur un nombre de copies égal à zéro.
Cette dérogation de fait dans l'exercice de l'exception pour copie privée se justifie par la réglementation très précise et contraignante s'appliquant à la diffusion successive des oeuvres cinématographiques par d'autres supports : télévision, édition en vidéo du film après un certain délai suivant la sortie en salle du film.
Je rappelle que la Cour de justice des communautés européennes a admis, dès 1985 - arrêt « Cinéthèque contre Fédération nationale des cinémas français » -, la compatibilité de la réglementation française de chronologie des médias avec le principe communautaire de la libre circulation des marchandises, car celle-ci s'applique indistinctement aux vidéos fabriquées sur le territoire national et à celles qui sont importées d'un pays membre.
En outre, elle a estimé que, s'il y avait entrave à ce principe pour les échanges intracommunautaires, celle-ci n'excédait pas ce qui est nécessaire à la réalisation de l'objectif d'intérêt général que constitue l'encouragement à la création cinématographique.
Allant plus loin, la jurisprudence récente de la Cour de cassation, dans l'arrêt Mulholland Drive du 28 février dernier, a entériné la pratique existant dans les faits de ne pas prévoir de possibilité de copie privée pour le cas du DVD, puisque ce support se développe dans le contexte particulier de l'environnement numérique permettant la multiplicité des copies et pouvant mettre en danger l'économie de ce secteur.
Nous souhaitons donc, par notre amendement, rappeler au collège des médiateurs qu'il doit prendre ses décisions concernant l'exercice de l'exception pour copie privée sur les oeuvres cinématographiques en respectant la réglementation de chronologie des médias.
M. le président. L'amendement n° 208, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par cet article pour l'article L. 331-6 du code de la propriété intellectuelle par un alinéa ainsi rédigé :
« Le bénéfice de l'exception de copie privée s'entend quel que soit le support utilisé. »
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. La copie privée répond à un besoin, ne serait-ce que pour la sauvegarde.
C'est un droit d'usage exceptionnel inscrit dans la loi : il permet l'archivage, la protection, la conservation à domicile de la pochette à l'iconographie précieuse, alors que le baladeur malmène le CD, ou encore le partage entre familiers.
La copie privée constitue aussi une ressource potentielle, qui représente plus de la moitié des moyens pour les droits voisins des artistes interprètes. J'indique au passage que le quart de ces sommes alimente la création artistique et que ces financements sur le terrain sont appréciés des décentralisateurs que nous sommes.
La copie privée est reconnue par l'Europe. Aujourd'hui, la mutation des supports se poursuit : les cassettes lorgnent sur le musée, les vinyles sont promus sous le terme vintage, les CD sont écoutés, mais aussi gravés. Nous voici au MP3, aux clés numériques, aux disques durs.
Le temps est donc venu de préciser que le bénéfice de l'exception de copie privée s'entend « sur tous supports », car c'est non pas la technique qui fait la loi, mais la loi qui met de l'ordre dans l'usage de la technique.
L'amendement n° 132 précédent, que je soutiens, évite l'altération du fragile équilibre du financement du cinéma.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. La commission émet un avis favorable sur le sous-amendement n° 53, qui paraît tout à fait judicieux.
S'agissant du sous-amendement n° 75, afin de tenir compte des explications fournies par M. Charasse, la commission modifie son amendement n° 20 rectifié en rédigeant ainsi le début du troisième alinéa du texte proposé pour l'article L. 331-6 : « Elle détermine les modalités d'exercice des exceptions précitées, et fixe notamment le nombre minimal ».
M. Michel Charasse. Dans ce cas, je retire mon sous-amendement n° 75, monsieur le président !
M. le président. Le sous-amendement n° 75 est retiré.
Je suis saisi d'un amendement n° 20 rectifié bis, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission, et ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Dans le code de la propriété intellectuelle, sont insérés neuf articles L. 331-6 à L. 331-6-8 ainsi rédigés :
« Art. L. 331-6. - Le bénéfice de l'exception pour copie privée et des exceptions mentionnées au présent article est garanti conformément aux dispositions suivantes :
« L'Autorité de régulation des mesures techniques de protection visée à l'article L. 331-7 veille à ce que la mise en oeuvre des mesures techniques de protection n'ait pas pour effet de priver les bénéficiaires des exceptions définies au 2°, au 7° et au 8° de l'article L. 122-5 ainsi qu'au 2°, au 6° et au 7° de l'article L. 211-3 de leur exercice effectif.
« Elle détermine les modalités d'exercice des exceptions précitées, et fixe notamment le nombre minimal de copies autorisées dans le cadre de l'exception pour copie privée, en fonction du type d'oeuvre ou d'objet protégé, des divers modes de communication au public, et des possibilités offertes par les techniques de protection disponibles.
« Art. L. 331-6-1. - Les titulaires de droits, qui recourent aux mesures techniques de protection définies à l'article L. 331-5, peuvent leur assigner pour objectif de limiter le nombre de copies. Ils prennent cependant les dispositions utiles pour que leur mise en oeuvre ne prive pas les bénéficiaires des exceptions visées à l'article L. 331-5 de leur exercice effectif. Ils s'efforcent de définir ces mesures en accord avec les autres parties intéressées, et notamment les associations agréées de consommateurs.
« Ces dispositions peuvent, dans la mesure où la technique le permet, subordonner le bénéfice effectif de ces exceptions, à un accès licite à une oeuvre, ou à un phonogramme, un vidéogramme, ou à un programme, et veiller à ce qu'elles n'aient pas pour effet de causer un préjudice injustifié aux intérêts légitimes du titulaire de droits sur l'oeuvre ou l'objet protégé, ni de porter atteinte à son exploitation normale.
« Art. L. 331-6-2. - Les titulaires de droit ne sont cependant pas tenus de prendre ces dispositions lorsque l'oeuvre ou un autre objet protégé par un droit voisin sont mis à disposition du public selon des dispositions contractuelles convenues entre les parties, de manière que chacun puisse y avoir accès de l'endroit et au moment qu'il choisit.
« Art. L. 331-6-3. - Les éditeurs et les distributeurs de services de télévision ne peuvent recourir à des mesures techniques qui auraient pour effet de priver le public du bénéfice de l'exception pour copie privée, y compris sur un support et dans un format numérique, dans les conditions mentionnées au 2° de l'article L. 122-5 et au 2° de l'article L. 211-3.
« Le Conseil supérieur de l'audiovisuel veille au respect de ces obligations dans les conditions définies par l'article 42 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.
« Art. L. 331-6-4. - Les conditions d'accès à la lecture d'une oeuvre, d'un vidéogramme, ou d'un phonogramme, et les limitations susceptibles d'être apportées au bénéfice de l'exception de copie privée mentionnée au 2° de l'article L. 122-5 et au 2° de l'article L. 211-3, par la mise en oeuvre d'une mesure technique de protection, doivent être portées à la connaissance de l'utilisateur.
« Les modalités de cette information sont fixées par décret en conseil d'Etat.
« Art. L. 331-6-5. - Toute personne bénéficiaire des exceptions désignées au 2° et au 8° de l'article L. 122-5 ainsi qu'aux 2° et 7° de l'article L. 211-3, ou toute personne morale agréée qui la représente peut saisir l'Autorité de régulation des mesures techniques de tout différend portant sur les restrictions que les mesures techniques de protection définies à l'article L. 331-5 apportent au bénéfice desdites exceptions.
« Art. L. 331-6-6. - Les personnes morales et les établissements chargés, en application du 7° de l'article L. 122-5, de réaliser des reproductions ou des représentations d'une oeuvre ou d'un objet protégé adaptées aux personnes handicapées peuvent saisir l'autorité de tout différend portant sur la transmission des textes imprimés sous la forme d'un fichier numérique.
« Art. L. 331-6-7. - Dans le respect des droits des parties, l'Autorité de régulation des mesures techniques de protection favorise ou suscite une solution de conciliation. Lorsqu'elle dresse un procès-verbal de conciliation, celui-ci a force exécutoire ; il fait l'objet d'un dépôt au greffe du tribunal d'instance.
« À défaut de conciliation, l'Autorité de régulation des mesures techniques de protection prend une décision motivée de rejet de la demande ou émet une injonction prescrivant, au besoin sous astreinte, les mesures propres à assurer le bénéfice effectif de l'exception. L'astreinte prononcée par l'autorité est liquidée par cette dernière.
« Ces décisions ainsi que le procès-verbal de conciliation sont rendues publiques dans le respect des secrets protégés par la loi. Elles sont notifiées aux parties qui peuvent introduire un recours devant la Cour d'appel de Paris. Le recours a un effet suspensif.
« Art. L. 331-6-8. - Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'application des articles L. 331-6 à L. 331-6-7. »
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur. S'agissant du sous-amendement n° 248, la commission souhaite apporter des garanties au bénéfice effectif des exceptions, notamment de l'exception pour copie privée, et elle n'entend pas l'ériger en un droit susceptible de rivaliser avec les droits reconnus aux auteurs et aux titulaires de droits voisins, qui doivent, conformément aux traditions du droit d'auteur français, conserver leur suprématie.
La commission émet un avis défavorable sur ce sous-amendement, qu'elle n'a pas examiné, mais qui est contraire à la position qu'elle défend par ailleurs.
Le sous-amendement n° 249 soulève la question pertinente des mesures techniques de protection lorsque l'oeuvre ou l'objet concernés ne sont plus protégés par un droit d'auteur ou un droit voisin. Avant de se prononcer, la commission souhaite recueillir l'avis du Gouvernement sur ce point.
Quant au sous-amendement n° 250, la commission ne l'a pas non plus examiné, mais il est également contraire à la position qu'elle défend par ailleurs et qui consiste à confier à l'Autorité de régulation le soin de fixer le nombre de copies en fonction du type d'oeuvre et de support, plutôt que de définir une règle unique et définitive. Chacun sait combien cette mesure est importante, voire essentielle, pour la fabrication des oeuvres dans le domaine de l'industrie culturelle, notamment cinématographique. La commission émet donc un avis défavorable.
Sur le sous-amendement n° 252, la commission souhaite entendre l'avis du Gouvernement.
En ce qui concerne le sous-amendement n° 251, le dispositif proposé par la commission, qui interdit le recours à des mesures techniques ayant pour effet de priver le public du bénéfice de l'exception pour copie privée et qui charge le Conseil supérieur de l'audiovisuel de veiller au respect de cette règle, paraît apporter des garanties suffisantes et de nature à satisfaire les auteurs du sous-amendement. La commission émet donc un avis défavorable.
Pour ce qui est du sous-amendement n° 54, il va de soi qu'une limitation volontaire apportée à la durée de vie d'un support devrait être portée à la connaissance du consommateur. Ce point relève de l'obligation à l'information que la commission a prévue, par son amendement tendant à rédiger l'article 8, d'inscrire dans un nouvel article du code de la propriété intellectuelle. Ce sous-amendement me paraît donc satisfait.
En revanche, la commission émet un avis favorable sur le sous-amendement n° 281, qui vise à garantir le caractère contradictoire des procédures de l'autorité de régulation.
Sur le sous-amendement n° 253, la procédure devant la Cour d'appel de Paris devant permettre une meilleure modification de la jurisprudence, la commission émet un avis défavorable.
L'amendement n° 131 est satisfait par l'amendement n° 20 rectifié bis de la commission. S'il est maintenu par ses auteurs, la commission émettra un avis défavorable.
La commission émet également un avis défavorable sur l'amendement n° 187 rectifié, dans la mesure où elle privilégie la voie d'une solution souple et évolutive en confiant à l'Autorité de régulation le soin de fixer le nombre minimum de copies.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 207, pour les mêmes raisons, ainsi que sur l'amendement n° 132, car elle a profondément remanié le dispositif.
Enfin, l'amendement n° 208 me semble satisfait par celui de la commission, qui propose une nouvelle rédaction globale de l'article 8 visant à garantir le bénéfice de l'exception pour copie privée, quel que soit le support utilisé.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. J'émets un avis favorable sur l'amendement n° 20 rectifié bis.
En revanche, je m'interroge sur l'utilité du sous- amendement n° 53. En effet, la directive impose, comme pour les autres exceptions, de garantir le bénéfice de l'exception pédagogique, donc la compétence de l'autorité de régulation.
Toutefois, madame la sénatrice, je ne m'oppose pas à votre sous-amendement si vous y ajoutez la référence au 1er janvier 2009, puisque, comme vous l'avez souhaité, c'est à cette date que prendra effet l'exception pédagogique. Dans le cas contraire, l'avis sera défavorable.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur les sous-amendements nos 248, 249, 250, 252 et 251.
S'agissant du sous-amendement n° 54, je partage bien sûr votre souci, madame la sénatrice, d'informer au mieux les consommateurs sur les mesures techniques. C'est la raison pour laquelle je suis favorable à l'amendement n° 20 rectifié bis de la commission, qui fait obligation aux distributeurs d'informer les consommateurs des limitations d'utilisation des oeuvres.
Néanmoins, la disposition complémentaire que vous proposez paraît difficilement applicable. En effet, il est impossible d'estimer la durée de vie d'un support physique, car celle-ci dépend de nombreuses conditions extérieures.
Il va cependant de soi que l'obligation d'information auprès des consommateurs, telle que proposée par la commission, comprend d'éventuelles limitations volontaires de la durée d'utilisation du support.
Cette disposition doit satisfaire votre préoccupation. La diversité des offres permettra de mettre en oeuvre des stratégies à géométrie variable.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ce sous-amendement.
Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur le sous-amendement n° 253, ainsi que sur les amendements nos 131, 226, 187 rectifié et 207.
En ce qui concerne l'amendement n° 132, le Gouvernement a émis précédemment un avis défavorable à l'encontre des amendements visant à consacrer la possibilité de réaliser au moins une copie privée dans toutes les situations, précisément pour la raison que vous évoquez dans votre amendement, monsieur le sénateur.
Il importe en effet de tenir compte de la diversité des offres qui sont présentées, des offres de location qui sont déjà implicitement exclues du dispositif proposé, mais aussi des nouvelles offres, telles les DVD à la séance, ou d'autres offres d'achat de support à durée de vie limitée, offres qui apparaissent depuis quelques mois et pour lesquelles la copie ne devrait pas être obligatoire.
Il convient également de tenir compte, dans le domaine audiovisuel, du mécanisme de la chronologie des médias, qui articule les différents modes d'exploitation - la salle, la vidéo, la télévision à péage, puis gratuite - dans un souci d'organiser une tarification décroissante avec le temps.
Tout apôtre de la diversité culturelle doit se préoccuper des équilibres financiers fragiles d'un certain nombre de secteurs de création, d'où l'importance de la chronologie des médias.
Cette dernière, qui fait l'objet de sanctions pénales en cas de manquement, n'est aucunement remise en cause par le projet de loi. Il ne m'apparaît donc pas nécessaire de prévoir une saisine particulière du collège des médiateurs à ce sujet.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Enfin, le Gouvernement émet également un avis défavorable sur l'amendement n° 208.
M. le président. Madame Morin-Desailly, acceptez-vous de rectifier votre sous-amendement n° 53 dans le sens proposé par M. le ministre ?
Mme Catherine Morin-Desailly. Oui, monsieur le président, d'autant que cette disposition avait déjà été proposée avant que nous abordions l'examen du texte.
M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 53 rectifié, présenté par M. J.L. Dupont, Mme Morin-Desailly, M. Nogrix et les membres du groupe Union centriste - UDF, et ainsi libellé :
I. - Dans le deuxième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 20 pour l'article L. 331-6 du code de la propriété intellectuelle, après les mots :
définies au 2°,
insérer les mots :
à compter du 1er janvier 2009, au e) du 3,
II. - Dans le texte proposé par l'amendement n° 20 pour l'article L. 331-6-5 du code de la propriété intellectuelle, après les mots :
ainsi qu'aux 2°
insérer les mots :
, à compter du 1er janvier 2009, au e) du 3°
Je le mets aux voix.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 248.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 189 :
Nombre de votants | 328 |
Nombre de suffrages exprimés | 228 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 115 |
Pour l'adoption | 27 |
Contre | 201 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Après avoir entendu l'avis du Gouvernement, quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 249 ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. Défavorable.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 249.
M. Michel Charasse. Je n'ai pas très bien compris, ils voudront bien me le pardonner, ce qu'ont indiqué le rapporteur et le ministre sur ce sous-amendement n° 249.
La question qui se pose est de savoir si on peut être poursuivi si on « déverrouille » une oeuvre qui n'est plus protégée. Le texte ne s'applique qu'aux oeuvres protégées, donc « déverrouiller » une oeuvre qui n'est plus protégée ne peut pas donner lieu à sanction. Il faudrait le préciser dans les débats parlementaires, afin que cela soit plus clair.
M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, pour explication de vote.
M. Ivan Renar. Nous souhaitons demander une précision. La commission, dans sa sagesse, a demandé l'avis du Gouvernement, lequel a simplement répondu : « défavorable ». Notre collègue Michel Charasse, avec son sens de la synthèse, a très bien résumé la question qui se pose. Il serait intéressant que le Gouvernement réponde de manière précise sur ce point, car les conséquences sont importantes.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Mes précisions seront limpides : seules sont concernées les mesures techniques portant sur une oeuvre protégée. La mise en place de mesures techniques ne saurait donc entraver l'utilisation des oeuvres du domaine public.
M. Michel Charasse. Dans ce cas, la précision est inutile !
M. le président. Madame Morin-Desailly, le sous-amendement n° 54 est-il maintenu ?
Mme Catherine Morin-Desailly. Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président. Le sous-amendement n° 54 est retiré.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 281.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote sur l'amendement n° 20 rectifié bis.
Mme Catherine Morin-Desailly. Nous voterons cet amendement, car la rédaction proposée nous paraît meilleure que celle qui est issue des travaux de l'Assemblée nationale : elle garantit le bénéfice de l'exception pour copie privée, ce qui est important à nos yeux.
Par ailleurs, notre sous-amendement n° 53 rectifié y afférent a été adopté.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 20 rectifié bis, modifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 8 est ainsi rédigé et les amendements nos 131, 187 rectifié, 207, 132 et 208 n'ont plus d'objet.
Mme Annie David. Je demande la parole pour explication de vote sur l'article 8, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 20 rectifié bis de la commission étant rédactionnel, l'article 8 a été adopté. Vous ne pouvez donc plus vous exprimer pour explication de vote sur cet article, madame David. Mais vous pourrez, le cas échéant, intervenir sur l'article suivant.
Article 9
Dans le même code, sont insérés trois articles L. 331-7 à L. 331-9 ainsi rédigés :
« Art. L. 331-7. - Il est créé un collège des médiateurs, chargé de réguler les mesures techniques de protection pour garantir le bénéfice de l'exception pour copie privée, ainsi que de l'exception en faveur des personnes affectées par un handicap.
« Tout différend portant sur le bénéfice des exceptions définies aux 2° et 7° de l'article L. 122-5 et aux 2° et 6° de l'article L. 211-3, qui implique une mesure technique mentionnée à l'article L. 331-5, est soumis à ce collège des médiateurs qui comprend trois personnalités qualifiées nommées par décret. Deux médiateurs sont choisis parmi des magistrats ou fonctionnaires appartenant, ou ayant appartenu, à un corps dont le statut garantit l'indépendance. Le troisième médiateur est proposé à la nomination par les deux premiers. Chacun des trois mandats est d'une durée de six ans non renouvelable.
« Aucun des médiateurs ne peut délibérer dans une affaire impliquant une entreprise ou une société contrôlée, au sens de l'article L. 233-16 du code de commerce, par une entreprise dans laquelle lui-même, ou le cas échéant, une personne morale au sein de laquelle il a, au cours des trois années précédant la délibération, exercé des fonctions ou détenu un mandat.
« Le collège est saisi par toute personne bénéficiaire des exceptions mentionnées au premier alinéa ou par une personne morale agréée qui la représente.
« II peut également émettre des recommandations soit d'office, soit sur saisine des personnes physiques ou morales visées à l'alinéa précédent.
« À compter de sa saisine, le collège des médiateurs dispose d'un délai de deux mois pour se prononcer. Le collège peut proroger ce délai dans la limite d'une durée de deux mois, s'il l'estime nécessaire.
« Art. L. 331-8. - Dans le respect des droits des parties, le collège des médiateurs favorise ou suscite une solution de conciliation. Lorsqu'il dresse un procès-verbal de conciliation, celui-ci a force exécutoire ; il fait l'objet d'un dépôt au greffe du tribunal d'instance.
« À défaut de conciliation, le collège des médiateurs prend une décision motivée de rejet de la demande ou émet une injonction prescrivant, au besoin sous astreinte, les mesures propres à assurer le bénéfice effectif de l'exception. L'astreinte prononcée par le collège est liquidée par ce dernier.
« Ces décisions, ainsi que le procès-verbal de conciliation, sont rendues publiques dans le respect des secrets protégés par la loi. Elles sont notifiées aux parties qui peuvent introduire un recours devant la cour d'appel de Paris. Le recours a un effet suspensif.
« Art. L. 331-9. - Un décret en Conseil d'État précise les conditions d'application des articles L. 331-7 et L. 331-8. »
M. le président. La parole est à Mme Catherine Tasca, sur l'article.
Mme Catherine Tasca. L'article 9, tel qu'il a été adopté par l'Assemblée nationale, a pour objet de confier à un collège de médiateurs la responsabilité de réguler les mesures techniques de protection pour garantir le bénéfice de l'exception pour copie privée et le bénéfice de l'exception en faveur des personnes handicapées.
Avec mes collègues du groupe socialiste, nous avons rappelé, lors de la discussion générale, un point essentiel à nos yeux : il faut tirer la leçon de la méthode désastreuse qui a conduit à l'élaboration de ce texte dans sa première étape, et assurer une véritable concertation à chaque stade de l'évolution des technologies. En effet, nous le voyons bien, aucune solution n'est satisfaisante et ne peut être largement acceptée s'il n'y a pas eu, au préalable, une écoute des différents points de vue et un effort de tous pour dégager l'intérêt général.
Nous avons répété que notre soutien au droit d'auteur doit être sans faille. Les exceptions à ce droit d'auteur ne peuvent être fondées que sur un intérêt général bien identifié, comme c'est le cas pour l'éducation, la recherche, l'accès des personnes handicapées à la culture. Cette dernière exception est à l'évidence un acquis de cette loi, en particulier pour les personnes aveugles ou malvoyantes.
Mais la conciliation du droit d'auteur et des droits voisins avec ces attentes spécifiques du public exigera une vigilance constante et un véritable dialogue entre toutes les parties concernées. Tout ce qui va dans le sens de la médiation, de la collégialité, va donc dans le bon sens. Ce sont d'ailleurs les professionnels qui sont à l'origine de cette idée d'un collège de médiateurs.
Cette collégialité, si elle assure équitablement la représentation des auteurs, des interprètes, des éditeurs et du public, sera le meilleur instrument pour résoudre les conflits éventuels et défendre l'intérêt général.
Par l'amendement n° 133, nous vous proposerons d'améliorer cette représentativité du collège des médiateurs en l'appuyant sur les instances déjà existantes : le conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique, la commission de la copie privée et la commission chargée du contrôle des comptes des sociétés d'auteur. Ces instances ont fait la preuve de leur sagesse et de leur efficacité. Il serait absurde de ne pas utiliser leurs compétences et leur expérience et de créer ex nihilo un nouvel organisme.
La question de la nature et des pouvoirs de cette instance est également fondamentale. Nous sommes fermement opposés à l'idée, proposée par le rapporteur, de créer une énième autorité indépendante aux pouvoirs étendus. Outre le fait que nous ne sommes pas favorables à la multiplication de ces instances dites « indépendantes », cette énième autorité ne ferait que rendre encore plus complexes les arbitrages nécessaires. Avec elle, nous nous éloignerions des idées de la médiation et de la collégialité, nettement plus novatrices et donc plus adaptées à un domaine, le développement du numérique et le droit d'auteur, en constante mutation.
Nous vous proposerons donc de revenir à l'idée initiale du collège débattue à l'Assemblée nationale, en y apportant des améliorations.
Cet article a un rôle particulier dans le projet de loi : il doit permettre de mettre de l'huile dans les rouages et de résoudre les conflits par la conciliation, plutôt que de les exacerber.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, sur l'article.
M. le président. La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Mon propos vaudra explication de vote sur l'article 8 : j'en suis désolée pour la lisibilité de nos travaux, mes chers collègues, mais les procédures subtiles de notre Assemblée m'ont échappé.
M. le président. Madame David, dès lors qu'un amendement vise à rédiger intégralement un article, s'il est adopté, l'article l'est aussi. Ce n'est pas subtil : c'est une conséquence tout à fait légitime !
Mme Annie David. Je n'ai peut-être pas été suffisamment attentive, mais il serait préférable de préciser que les explications de vote concernent à la fois l'amendement et l'article.
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Cela va de soi !
Mme Annie David. En tout état de cause, monsieur le président, je vous remercie de me permettre d'intervenir pour expliquer notre vote sur l'article 8.
Par nos amendements, nous voulions clairement affirmer notre attachement au principe de copie privée, garanti par la loi, qui ne saurait se trouver entamé ou réduit.
Régulièrement définie comme une exception au droit d'auteur, la « copie privée » n'aura jamais été présentée comme un droit reconnu des usagers, et nous le regrettons. Ce régime d'exception a d'ailleurs conduit à la remise en cause régulière de ce qui est, à juste titre, considéré dans les faits comme un droit par l'ensemble des usagers.
Votre projet de loi lui-même ne fait pas exception à cette logique étroite, puisqu'il prépare d'inadmissibles reculs sur ce point. Nous considérons qu'il s'agit d'une occasion manquée pour l'établissement d'une nouvelle concorde entre le droit d'auteur et celui du public.
En effet, la copie privée ne peut se concevoir comme une simple concession au droit d'auteur. Il devrait s'agir, dans les deux cas, de droits pleins et entiers que l'on ne saurait opposer.
Le législateur se doit de trouver les voies de leur conjugaison, comme ce fut le cas avec la mise en oeuvre de la rémunération pour copie privée bénéficiant aux artistes, condamnée de facto à dépérir par les dispositions prévues dans ce projet de loi.
Les droits ne se soustraient pas, ils se complètent. En réaffirmant ainsi un véritable « droit » de copie privée, nous adosserions notre législation à un plus solide et plus sérieux levier, seul capable de nous prémunir contre toute utilisation abusive des DRM par les ayants droit et leurs représentants.
Ce serait un signe fort, en direction tant des utilisateurs, qu'il convient de protéger, que des artistes, qui bénéficient, aujourd'hui encore, de rémunérations et d'aides à la création et au spectacle vivant collectées au titre de la copie privée - nous l'avons évoqué la nuit dernière, mes chers collègues.
C'est cette harmonie, ce juste équilibre, qui fait selon nous défaut au projet de loi, que nous vous proposions d'introduire à l'article 8.
En ne retenant pas nos amendements, vous assumez le fait de laisser délibérément les usagers sans recours efficient face aux majors, dont l'inventivité en matière de contrôle et de surveillance n'est plus à démontrer, et, quoi que vous en disiez, monsieur le ministre, vous affaiblissez les ressources en faveur de la création artistique. C'est la raison pour laquelle nous avons voté contre l'article 8.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, sur l'article 9.
Mme Catherine Morin-Desailly. L'article 9 traite de l'instance administrative qui sera chargée de régler les différends qui ne manqueront pas d'apparaître avec la mise en oeuvre des mesures techniques de protection. Cette instance devra aussi déterminer les modalités d'exercice des exceptions au droit exclusif des auteurs et celles concernant l'exception pour copie privée aux utilisateurs. Enfin, la commission des affaires culturelles a décidé de lui confier les questions d'interopérabilité.
Dans un premier temps, cette structure était un collège des médiateurs, composé de trois personnes dont la qualité pouvait être sujette à discussion. La commission des affaires culturelles nous propose d'y substituer une autorité de régulation des mesures techniques de protection, composée de sept membres.
Nous saluons cette amélioration de la composition de l'autorité administrative indépendante par rapport au collège des médiateurs. Il est en effet pertinent de prévoir des spécialistes de la propriété intellectuelle, littéraire et artistique ainsi que des technologies de l'information à côté de magistrats.
De même, le fait de préciser que le président de la commission pour copie privée est membre de droit de l'autorité de régulation nous semble aller dans le bon sens ; celui-ci assurera le lien entre deux entités aux missions complémentaires. Nous pouvons espérer ainsi que l'autorité de régulation trouvera les voies et les moyens de garantir à tous l'exception pour copie privée qui peut être menacée par les DRM dans l'univers numérique.
Nous devons aussi reconnaître que l'idée de faire appel à une instance capable d'expertise et de conseil, dans un secteur soumis à de constantes évolutions technologiques comme le numérique et les mesures techniques de protection, est intéressante.
En cela, nous sommes d'accord avec M. le rapporteur pour dire que le législateur, dans ce secteur d'activité, ne peut pas codifier une fois pour toutes les règles régissant la copie privée et les conditions d'accès à une oeuvre. Hier, nous avons été nombreux à être désarçonnés par le caractère technique et complexe du sujet. Il ne nous semble donc pas inutile de prévoir une instance de « conseil » - j'insiste sur le terme - auprès des parlementaires et des utilisateurs, afin de les aider à faire évoluer le cadre législatif en fonction des modifications technologiques.
Il n'en demeure pas moins que nous restons assez sceptiques sur plusieurs aspects du texte.
Tout d'abord, les missions de cette autorité de régulation - conseil, médiation, injonction - nous semblent excessives, notamment en termes d'injonction.
Ensuite, nous sommes toujours prudents dès qu'il s'agit de créer une instance administrative. Nous craignons qu'il ne s'agisse d'une énième autorité dont les missions sont déjà assumées, pour certaines d'entre elles en tout cas, par d'autres autorités administratives indépendantes. Notre pays connaît bien ce phénomène d'empilement des structures, source de dépenses et parfois d'inefficacité de l'action publique.
Cette remarque m'amène à interroger notre rapporteur sur le coût estimé de cette nouvelle structure aux missions élargies : la nécessité d'un secrétariat général, la rémunération des personnels et des membres, les locaux ont-il, par exemple, fait l'objet d'une estimation ?
Enfin, nous nous interrogeons sur la gestion de l'interopérabilité par l'autorité de régulation. Comme nous l'avons dit en défendant nos amendements hier soir, nous regrettons que la commission des affaires culturelles ait choisi de confier la fixation des règles d'interopérabilité à l'autorité. Nous pensons que c'est au législateur de fixer les règles générales dans ce domaine.
Nous attendons donc des précisions avant d'arrêter notre position.
M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, sur l'article.
M. Bruno Retailleau. L'article 9 sera vraisemblablement entièrement récrit par l'amendement n° 21 rectifié de la commission des affaires culturelles, qui institue la fameuse « autorité de régulation des mesures techniques de protection ».
Ce matin, la commission des affaires économiques et la commission des finances auditionnaient M. Pébereau, qui a élaboré un excellent rapport sur la situation de la dette de notre pays. Il a dressé un constat accablant et a attribué pour partie la dérive des dépenses publiques et de la dette à la multiplication des structures.
Or l'amendement n° 21 rectifié, ma collègue vient de l'évoquer à l'instant, fait clairement état des dépenses consécutives à la création de l'autorité de régulation. Des services seront en effet placés sous l'autorité de son secrétaire général et les crédits nécessaires à l'accomplissement de ses missions figureront dans la loi de finances.
Bref, cet amendement crée une charge supplémentaire, trop complaisamment compensée par les fameux articles 575 et 575 A du code général des impôts. C'est la raison pour laquelle, monsieur le président, le moment venu, j'invoquerai l'irrecevabilité au titre de l'article 40 de la Constitution.
M. le président. La parole à M. le ministre.
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Je reprends, au nom du Gouvernement, l'amendement n° 21 rectifié, ainsi que les sous-amendements nos 195 et 76.
Lors du débat à l'Assemblée nationale, le collège des médiateurs obéissait à la même logique que l'instance de régulation, dont l'autorité se trouve renforcée, proposée par la commission des affaires culturelles du Sénat. L'article 40 n'ayant pas été invoqué à l'Assemblée nationale, je souhaite qu'il en soit de même au Sénat.
M. Michel Charasse, au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. L'article 40 est effectivement opposable à l'amendement n° 21 rectifié, mais celui-ci n'existe plus ! Repris par le Gouvernement, il renaît de ses cendres et, à titre personnel, j'espère que la scorie du paragraphe II sur les recettes sera supprimée.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 210, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. Je vais plaider pour la suppression d'une entité nommée « collège » dont ni la commission ni le Gouvernement ne veulent plus. Mais, comme je m'étais simultanément émue de l'autorité de régulation, ce que je dirai vaudra également pour celle-ci.
Collège ou autorité, je considère que nous portons atteinte aux compétences du législateur et qu'il n'est pas bon de conférer à cette entité le pouvoir de décider des conditions d'exercice du droit à la copie privée et, par conséquent, du droit d'usage des oeuvres. Cette « autorité-collège », permettez-moi de l'appeler ainsi, apparaît à la fois comme un régulateur et comme un arbitre des litiges, sans les garanties offertes par la justice.
En matière de propriété intellectuelle, littéraire et artistique, compte tenu du climat passionnel et des conflits d'intérêts qui prévalent dans ce secteur, les lobbys jouent pleinement leur rôle, comme nous avons pu le vérifier à l'occasion de la préparation de ce projet de loi.
Oui, une médiation est nécessaire quand l'enjeu est aussi important. La copie privée, élément majeur de la démocratisation culturelle, c'est l'accès du plus grand nombre au savoir !
Oui, le développement des technologies, la nécessité de procéder à des expertises, la diversité des intérêts en présence peuvent inciter à créer une instance qui ait un rôle de conciliation, de proposition, d'avis en direction du Gouvernement et du Parlement ! Pourquoi pas ? Mais nous ne pouvons accepter que cette instance édicte la norme et, en même temps, l'applique.
Quelles seront donc les compétences techniques des membres de cette autorité ou collège ? C'est un immense point d'interrogation ! On ne voit pas très bien comment quelques membres ou deux magistrats deviendraient opérationnels rapidement sur un sujet aussi complexe. En revanche, une composition pluraliste amènera la compétence.
Mais là, nous avons connu le choc de ces égoïsmes et de ces compétences. Depuis des mois, nous sommes cernés. Souvenez-vous de ce qui est arrivé aux députés : l'Assemblée nationale a été entourée de zélés démonstrateurs équipés de systèmes numériques !
Devons-nous, monsieur le ministre, vous montrer nos boîtes aux lettres, courriel et papier, ou vous faire écouter les répondeurs de nos téléphones ? Je pense que ce n'est pas utile, les vôtres ont dû subir le même sort !
Pour ces personnes qui auront à arbitrer, les zélés pédagogues seront ceux-là mêmes qui sont mus par tel ou tel intérêt.
Dans ce texte, au coeur tout de même non de l'intérêt public - que nous essayons tous de promouvoir -, mais du choc des égoïsmes, je ne crois pas que le législateur puisse prendre le risque de livrer à tous les lobbies, à toutes les pressions, une petite entité qui n'ait pas la force du Parlement.
M. le président. L'amendement n° 21 rectifié, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission, était ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Dans le même code, sont insérés cinq articles L. 331-7 à L. 331-7-4 ainsi rédigés :
« Art. L. 331-7. - L'Autorité de régulation des mesures techniques de protection assure une mission générale de veille dans les domaines des mesures techniques de protection et d'identification des oeuvres et des objets protégés par le droit d'auteur ou par les droits voisins.
« Elle rend compte chaque année, dans un rapport remis au Gouvernement et au Parlement, des évolutions les plus marquantes qu'elle a constatées dans ce domaine, et de leur impact prévisible sur la diffusion des contenus culturels. Elle peut être consultée par les commissions parlementaires sur les adaptations de l'encadrement législatif que ces évolutions rendraient nécessaires.
« Elle rend compte également des orientations qu'elle a fixées sur le fondement de l'article L. 331-6 en matière de périmètre de la copie privée, ainsi que des décisions qu'elle a rendues sur le fondement des articles L. 331-5-1 et L. 331-5-2.
« Art. L. 331-7-1. - L'Autorité de régulation des mesures techniques de protection est composée de sept membres nommés par décret :
« Outre le président de la commission mentionnée à l'article L. 311-5 qui participe aux travaux de la commission avec voix consultative, ses membres sont :
« 1) un conseiller d'Etat désigné par le vice-président du Conseil d'Etat ;
« 2) un magistrat de l'ordre judiciaire désigné ;
« 3) un conseiller maître à la Cour des Comptes désigné par le premier président de la Cour des Comptes ;
« 4) un membre désigné en raison de ses compétences en matière de technologies de l'information ;
« 5) un membre désigné en raison de ses compétences en matière de propriété industrielle ;
« 6) un membre désigné en raison de ses compétences en matière de propriété littéraire et artistique.
« La durée du mandat des membres du collège est de six ans. Il n'est ni renouvelable, ni révocable.
« Le collège est renouvelé par moitié tous les trois ans, selon des modalités définies par décret en Conseil d'État.
« En cas de vacance d'un siège de membre du collège, il est procédé à son remplacement pour la durée du mandat restant à courir.
« Le Président est élu par les membres parmi les personnes mentionnées au 1°, au 2° et au 3°.
«Art.L.331-7-2- Aucun membre de l'autorité ne peut participer à une délibération concernant une entreprise ou une société contrôlée au sens de l'article L. 233-16 du code de commerce, par une entreprise dans laquelle il a, au cours des trois années précédant la délibération, exercé des fonctions ou détenu un mandat.
« Art. L. 331-7-3. - L'Autorité de régulation des mesures techniques de protection dispose de services qui sont placés sous l'autorité de son secrétaire général. Elle peut faire appel à des experts.
« L'autorité propose, lors de l'élaboration du projet de loi de finances de l'année, les crédits nécessaires à l'accomplissement de ses missions. Ceux-ci sont inscrits au budget général de l'État.
« Le président de l'autorité est ordonnateur des dépenses. Il présente les comptes du conseil à la Cour des Comptes.
« Art. L. 331-7-4. - Les décisions de l'autorité sont prises à la majorité des voix. En cas de partage égal des voix, la voix du président est prépondérante.
« Un décret en Conseil d'État fixe les règles applicables à la procédure. »
II.- Les pertes de recettes résultant de l'application des dispositions du présent article sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement a été repris par le Gouvernement, qui l'a modifié en y incorporant, notamment, les sous-amendements n°s 195 et 76.
Dès lors, l'amendement n° 21 rectifié bis est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Dans le même code, sont insérés cinq articles L. 331-7 à L. 331-7-4 ainsi rédigés :
« Art. L. 331-7. - L'Autorité de régulation des mesures techniques de protection assure une mission générale de veille dans les domaines des mesures techniques de protection et d'identification des oeuvres et des objets protégés par le droit d'auteur ou par les droits voisins.
« Elle rend compte chaque année, dans un rapport remis au Gouvernement et au Parlement, des évolutions les plus marquantes qu'elle a constatées dans ce domaine, et de leur impact prévisible sur la diffusion des contenus culturels. Elle peut être consultée par les commissions parlementaires sur les adaptations de l'encadrement législatif que ces évolutions rendraient nécessaires.
« Elle rend compte également des orientations qu'elle a fixées sur le fondement de l'article L. 331-6 en matière de périmètre de la copie privée, ainsi que des décisions qu'elle a rendues sur le fondement des articles L. 331-5-1 et L. 331-5-2.
« Art. L. 331-7-1. - L'Autorité de régulation des mesures techniques de protection est composée de cinq membres nommés par décret :
« Outre le président de la commission mentionnée à l'article L. 311-5 qui participe aux travaux de la commission avec voix consultative, ses membres sont :
« 1) un conseiller d'État désigné par le vice-président du Conseil d'État ;
« 2) un magistrat de l'ordre judiciaire désigné par le premier président de la Cour de cassation ;
« 3) un conseiller maître à la Cour des comptes désigné par le premier président de la Cour des comptes ;
« 4) un membre désigné en raison de ses compétences en matière de technologies de l'information.
« La durée du mandat des membres du collège est de six ans. Il n'est ni renouvelable, ni révocable.
« Le collège est renouvelé par moitié tous les trois ans, selon des modalités définies par décret en Conseil d'État.
« En cas de vacance d'un siège de membre du collège, il est procédé à son remplacement pour la durée du mandat restant à courir.
« Le Président est élu par les membres parmi les personnes mentionnées au 1°, au 2° et au 3°.
« Art. L. 331-7-2. - Les fonctions de membre de l'autorité sont incompatibles avec celles de dirigeant ou de salarié ou d'ancien dirigeant ou d'ancien salarié d'une société régie par le titre II du livre III ou de toute entreprise exerçant une activité de production de phonogrammes ou de vidéogrammes ou offrant des services de téléchargement d'oeuvres protégées.
Les membres de l'autorité ne peuvent, directement ou indirectement, détenir d'intérêts dans une entreprise exerçant une des activités mentionnées au premier alinéa.
Aucun membre de l'autorité ne peut participer à une délibération concernant une entreprise ou une société contrôlée au sens de l'article L. 233-16 du code de commerce, par une entreprise dans laquelle il a, au cours des trois années précédant la délibération, exercé des fonctions ou détenu un mandat.
« Art. L. 331-7-3. - L'Autorité de régulation des mesures techniques de protection dispose de services qui sont placés sous l'autorité de son secrétaire général. Elle peut faire appel à des experts.
« L'autorité propose, lors de l'élaboration du projet de loi de finances de l'année, les crédits nécessaires à l'accomplissement de ses missions. Ceux-ci sont inscrits au budget général de l'État.
« Le président de l'autorité est ordonnateur des dépenses. Il présente les comptes de l'autorité à la Cour des comptes.
« Art. L. 331-7-4. - Les décisions de l'autorité sont prises à la majorité des voix. En cas de partage égal des voix, la voix du président est prépondérante.
« Un décret en Conseil d'État fixe les règles applicables à la procédure. »
La parole est à M. le ministre.
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Le présent amendement vise à substituer au collège des médiateurs une autorité de régulation des mesures techniques de protection, afin d'appliquer concrètement les principes définis par le législateur - copie privée et interopérabilité.
L'Assemblée nationale avait commencé de compléter les attributions du collège des médiateurs en lui confiant, outre son rôle de conciliation initiale, une compétence d'ordre quasi réglementaire en matière de copie privée.
Nous avons conforté ces compétences par la proposition qui est formulée et nous les avons complétées en lui donnant un rôle supplémentaire de gardien effectif de l'interopérabilité.
Il vous est donc proposé de tirer toutes les conclusions, d'étoffer la composition de cette autorité et de préciser les modalités de son fonctionnement.
Aux termes de l'amendement repris et rectifié par le Gouvernement, outre le président de la commission mentionnée à l'article L. 311-5 qui participe aux travaux de la commission avec voix consultative - c'est-à-dire le président de la commission pour copie privée -, ses membres sont un conseiller d'État désigné par le vice-président du Conseil d'État, un magistrat de l'ordre judiciaire désigné - cela doit être précisé - par le premier président de la Cour de cassation, un conseiller maître à la Cour des comptes désigné par le premier président de la Cour des comptes, un membre désigné en raison de ses compétences en matière de technologies de l'information.
Par ailleurs, cet amendement corrige une erreur matérielle contenue dans l'amendement initial. Certes le président de l'autorité est ordonnateur des dépenses. Néanmoins, il présente les comptes de l'autorité, et non du conseil, à la Cour des comptes.
De plus, cette nouvelle rédaction apporte un ajout par rapport à la version initiale que vous aviez entre les mains.
En effet, elle définit, c'est important, les incompatibilités et vise notamment à préciser que « Les fonctions de membre de l'autorité sont incompatibles avec celles de dirigeant ou de salarié ou d'ancien dirigeant ou d'ancien salarié d'une société régie par le titre II du livre III ou de toute entreprise exerçant une activité de production de phonogrammes ou de vidéogrammes ou offrant des services de téléchargement d'oeuvres protégées.
« Les membres de l'autorité ne peuvent, directement ou indirectement, détenir d'intérêts dans une entreprise exerçant une des activités mentionnées au premier alinéa.»
Cette partie de l'amendement a valeur de clarification afin de lever les inquiétudes exprimées par les uns ou par les autres. Il est évident que cette autorité doit avoir toutes les garanties pour agir de manière indépendante.
J'insiste également sur un point très important : l'autorité ne se substitue pas au législateur, mais elle mettra en pratique les dispositions que vous aurez adoptées.
Sont prévues, également, des dispositions relatives à la prévention des conflits d'intérêts ; un sous-amendement de M. Charasse a permis d'enrichir utilement le texte sur ce point.
L'amendement tend dont à assigner à l'autorité de régulation une mission générale de veille dans le domaine des mesures techniques de protection et d'identification des oeuvres et des objets protégés par un droit de propriété littéraire et artistique.
Cette autorité remettra chaque année au Gouvernement et au Parlement un rapport. Elle pourra être consultée par les commissions parlementaires au sujet des adaptations de la législation que les évolutions techniques rendraient nécessaires.
Bref, au travers de cet amendement, nous faisons oeuvre utile. Le législateur définit les principes ; cette autorité a la charge de les appliquer et de veiller à ce qu'ils soient conformes à l'évolution des technologies. (M. le président de la commission des affaires culturelles opine.)
Si les principes sont éternels, ils devront néanmoins être adaptés en fonction de l'évolution de la technologie. L'autorité ne se substituera pas au pouvoir du législateur, mais elle aura parfois pour mission de forcer des barrages.
La copie privée et l'interopérabilité sont des principes que vous aurez adoptés, mesdames, messieurs les sénateurs. Cette autorité devra simplement les rendre effectifs et concrets.
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Bravo !
M. le président. Le sous-amendement n° 254, présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par l'amendement n° 21 rectifié bis pour l'article L. 331-7-1 du code de la propriété intellectuelle :
« Art. L. 331-7-1. - L'Autorité de régulation des mesures techniques de protection est composée de 15 membres nommés par décret. Sa composition est la suivante :
« - trois représentants des sociétés d'auteurs ;
« - trois représentants des organisations professionnelles ;
« - trois représentants d'internautes ;
« - trois magistrats ;
« - trois représentants des pouvoirs publics.
« Son président est élu parmi l'un des magistrats. Il se porte garant de l'indépendance de l'autorité ainsi constituée. Le mandat des membres de l'autorité et de leur président est d'une durée de trois ans renouvelable une fois.
« En cas de vacance d'un siège de membre du collège, il est procédé à son remplacement pour la durée du mandat restant à courir.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Nous ne sommes pas favorables à la création de ce collège des médiateurs ou « autorité de régulation des mesures techniques de protection ». Nous voterons donc en faveur de l'amendement de suppression de l'article défendu par Mme Blandin
Néanmoins, pour le cas où l'article 9 serait maintenu, et eu égard à l'importance des missions que le Sénat se propose d'octroyer à l'autorité de régulation - interopérabilité, exercice des exceptions, au premier rang desquelles, évidemment, le droit de copie privée, contrôle des mesures techniques de protection, mission générale de veille et de prospective -, nous considérons que sa composition doit être repensée, et ce malgré les différentes modifications apportées par M. le ministre.
Vous proposez, en effet, d'y installer un conseiller d'État, un magistrat, un conseiller maître à la Cour des Comptes et trois membres désignés à raison de leurs compétences, l'un en matière de technologies de l'information, l'autre en matière de propriété industrielle et le troisième en matière de propriété littéraire et artistique - soit un informaticien et deux juristes spécialisés dans la propriété intellectuelle.
Nous ne mettons évidemment pas en cause la compétence de ce type de personnalités. Cependant, nous souhaitons rééquilibrer le collège en y intégrant, outre des magistrats et des représentants des pouvoirs publics, des représentants des catégories concernées par les questions dont traitera l'autorité de régulation.
Ainsi, nous proposons que soient représentés les sociétés d'auteurs, les organisations professionnelles - notamment les syndicats d'artistes interprètes et musiciens - et les internautes. Ces derniers doivent naturellement pouvoir témoigner des utilisations qu'ils font des outils technologiques.
Nous considérons, en effet, que si autorité de régulation il doit y avoir, celle-ci ne doit pas pour autant se couper de la réalité pour assumer ses multiples et complexes missions.
Plus fondamentalement, par la composition que nous proposons, nous souhaitons changer la nature de l'autorité de régulation.
Telle que vous la concevez, cette autorité imposerait des décisions venues d'en haut sans permettre véritablement la rencontre, car sa composition est quasi juridictionnelle.
L'autorité que nous vous proposons est, en revanche, plus représentative : plutôt qu'un tribunal de l'internet, nous souhaitons voir émerger une véritable démocratie de l'internet. La composition que nous envisageons permettrait de créer une chambre représentative des acteurs des technologies de l'information et de la diffusion culturelle et artistique.
Ainsi, les points de vue des experts et ceux des experts du quotidien pourraient se mêler.
M. le président. Le sous-amendement n° 195, présenté par M. Pelletier et les membres du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, était ainsi libellé :
Modifier ainsi le texte proposé par l'amendement n°21 pour l'article L. 331-7-1 du code de la propriété intellectuelle :
I. Dans le premier alinéa, remplacer le chiffre :
7
par le chiffre :
5
II. Supprimer en conséquence les septième (5°) et huitième (6°) alinéas
Ce sous-amendement a été intégré dans l'amendement n° 21 rectifié bis. Il n'a donc plus d'objet.
Le sous-amendement n° 255, présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par l'amendement n° 21 rectifié pour l'article L. 331-7-2 du code de la propriété intellectuelle :
« Art. L. 331-7-2 - Aucun membre de l'Autorité ne peut participer à une délibération dans une affaire impliquant une entreprise ou une société dans laquelle lui-même, son conjoint, un ascendant ou un descendant, exercent des fonctions ou détiennent un mandat, ou contrôlée, au sens de l'article L. 233-16 du code du commerce, par une entreprise dans laquelle lui-même, son conjoint, un ascendant ou un descendant, ou, le cas échéant, une personne morale au sein de laquelle il a, au cours des trois années précédant la délibération, exercé des fonctions ou détenu un mandat.
La parole est à M. Ivan Renar.
M. Ivan Renar. Ce sous-amendement vise à renforcer la crédibilité de l'autorité de régulation - pour le cas où cette dernière serait créée. Nous proposons, en effet, d'élargir le cercle des interdictions auxquelles seront soumis les membres du collège.
Ils ne pourront plus juger des affaires dans lesquelles non seulement eux-mêmes, mais aussi, - c'est là l'objet du présent sous-amendement - leur conjoint, ascendant ou descendant sont impliqués, que ce soit parce qu'ils détiennent un mandat ou parce qu'ils exercent des fonctions liées à l'affaire considérée.
Ainsi, il ne sera plus possible de leur faire le reproche d'être à la fois juge et partie.
Nous pensons que si l'autorité de régulation a une chance d'être véritablement effective, notre sous-amendement contribuera à la faire émerger.
Pour que l'autorité joue son rôle, elle doit être séparée du monde des affaires par un cordon de sécurité, qui sera renforcé par ce sous-amendement.
M. le président. Le sous-amendement n° 76, présenté par M. Charasse, était ainsi libellé :
Avant le premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 21 pour l'article L. 331-7-2 du code de la propriété intellectuelle, ajouter deux alinéas ainsi rédigés :
« Les fonctions de membre de l'autorité sont incompatibles avec celles de dirigeant ou de salarié ou d'ancien dirigeant ou d'ancien salarié d'une société régie par le titre II du livre III ou de toute entreprise exerçant une activité de production de phonogrammes ou de vidéogrammes ou offrant des services de téléchargement d'oeuvres protégées.
« Les membres de l'autorité ne peuvent, directement ou indirectement, détenir d'intérêts dans une entreprise exerçant une des activités mentionnées à l'alinéa précédent.
Ce sous-amendement a également été intégré dans l'amendement n° 21 rectifié bis. Il n'a donc plus d'objet.
L'amendement n° 133, présenté par MM. Assouline et Lagauche, Mme Tasca, MM. Yung, Bockel, Lise, Vidal et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Dans le code de la propriété intellectuelle, sont insérés trois articles L. 331-7 à L. 331-9 ainsi rédigés :
« Art. L. 331-7. - Il est créé un collège des médiateurs, chargé de réguler les mesures techniques de protection pour garantir le bénéfice de l'exception pour copie privée, ainsi que de l'exception en faveur des personnes affectées par un handicap.
« Tout différend portant sur le bénéfice des exceptions définies aux 2° et 7° de l'article L. 122-5 et aux 2° et 6° de l'article L. 211-3, qui implique une mesure technique mentionnée à l'article L. 331-5, est soumis au collège des médiateurs.
« Le collège des médiateurs comprend huit membres :
« 1° Le président du Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique ;
« 2° Le vice-président du Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique ;
« 3° Le président de la commission prévue à l'article L. 321-13 ;
« 4° Une personnalité qualifiée désignée parmi les huit personnalités qualifiées membres du Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique ;
« 5° Deux représentants des titulaires de droits désignés parmi les membres de la commission prévue à l'article L. 311-5 ;
« 6° Deux représentants des consommateurs désigné parmi les membres de la commission prévue à l'article L. 311-5.
« Les membres du collège siègent pour la durée de leur mandat de membre des instances au titre desquelles ils sont désignés.
« Le président est élu par les membres du collège parmi ses membres.
« Aucun des membres du collège des médiateurs ne peut délibérer dans une affaire impliquant une entreprise ou une société contrôlée, au sens de l'article L. 233-16 du code de commerce, par une entreprise dans laquelle lui-même, ou le cas échéant, une personne morale au sein de laquelle il a, au cours des trois années précédant la délibération, exercé des fonctions ou détenu un mandat.
« Le collège des médiateurs est saisi par toute personne bénéficiaire des exceptions mentionnées au premier alinéa ou par une personne morale agréée qui la représente.
Il peut également émettre des recommandations soit d'office, soit sur saisine des personnes physiques ou morales visées à l'alinéa précédent.
« À compter de sa saisine, le collège des médiateurs dispose d'un délai de deux mois pour se prononcer. Le collège peut proroger ce délai dans la limite d'une durée de deux mois, s'il l'estime nécessaire.
« Le collège ne peut délibérer que si cinq au moins de ses membres sont présents. Le président a voix prépondérante en cas de partage égal des voix.
« Art. L. 331-8. - Dans le respect des droits des parties, le collège des médiateurs favorise ou suscite une solution de conciliation. Lorsqu'il dresse un procès-verbal de conciliation, celui-ci à force exécutoire ; il fait l'objet d'un dépôt au greffe du tribunal d'instance.
« À défaut de conciliation, le collège des médiateurs prend une décision motivée de rejet de la demande ou émet une injonction prescrivant, au besoin sous astreinte, les mesures propres à assurer le bénéfice effectif de l'exception. L'astreinte prononcée par le collège est liquidée par ce dernier.
« Ces décisions, ainsi que le procès-verbal de conciliation, sont rendues publiques dans le respect des secrets protégés par la loi. Elles sont notifiées aux parties qui peuvent introduire un recours devant la cour d'appel de Paris. Le recours a un effet suspensif.
« Art. L. 331-9. - Un décret en Conseil d'État précise les conditions d'application des articles L. 331-7 et L. 331-8. »
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Pour que nous nous comprenions bien, je tiens à préciser que nous sommes opposés à la nouvelle « mouture » de cette autorité administrative.
Initialement, cet amendement venait se caler sur la proposition de l'Assemblée nationale, à savoir, je le rappelle, un collège des médiateurs composé de trois personnes. À cet égard, je partage les arguments développés par Mme Blandin : avec les pressions que subira ce collège, il n'était pas très judicieux de prévoir un effectif aussi réduit !
Nous voterons donc contre la proposition du Gouvernement, c'est-à-dire contre celle du rapporteur à laquelle s'est rallié le Gouvernement.
J'en viens à l'amendement n° 133.
L'article 9 a pour objet de conférer à un collège des médiateurs la responsabilité de réguler les mesures techniques de protection afin de garantir le bénéfice de l'exception pour copie privée et pour les personnes affectées par un handicap.
Sans remettre en cause le besoin qu'une instance de régulation veille à ce que la généralisation des mesures techniques de protection des droits n'interdise pas toute possibilité de copie privée des oeuvres, il est important que l'instance ainsi créée soit une structure légère, dont la composition et la mission sont clairement identifiées et cohérentes avec l'édifice institutionnel existant en matière de propriété littéraire et artistique.
La limitation des pouvoirs de cette instance est très importante à nos yeux, compte tenu du secteur extrêmement sensible à réguler et des pressions considérables dont les membres de l'instance ne manqueront pas de faire l'objet.
Il s'agit non pas de constituer une énième « haute » autorité - à l'instar de ce que propose M. le rapporteur, maintenant rejoint par M. le ministre - que nous ne pouvons cautionner, participant au maquis administratif, mais de réunir des compétences existant au sein des divers organismes fonctionnant déjà.
Le présent amendement a donc pour objet de revoir la composition du collège des médiateurs prévu à l'article 9 du projet de loi, en constituant cette instance de magistrats des trois ordres de juridiction et de représentants des différentes familles d'intérêt concernées siégeant déjà au sein : du Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique, chargé de conseiller le ministre de la culture et de la communication en matière de propriété littéraire et artistique, et de faire des propositions et des recommandations en ce domaine, en se fondant notamment sur sa fonction d'observatoire de l'exercice et du respect des droits d'auteur et des droits voisins ; de la commission prévue à l'article L. 321-3 du code de la propriété intellectuelle, chargée d'assurer le contrôle des comptes des sociétés de perception et de répartition des droits ; de la commission prévue à l'article L. 311-5 du code de la propriété intellectuelle, chargée de déterminer pour les supports d'enregistrement concernés les taux et les modalités de versement de la rémunération pour copie privée.
Ainsi constitué, ce collège devrait pouvoir exercer son rôle de régulateur de l'utilisation des mesures techniques de protection des droits de manière indépendante et sans méconnaître les différents intérêts concernés. À cet effet, je le rappelle, nous proposons d'associer, ce qui n'a été prévu par aucune des propositions, deux représentants des consommateurs désignés parmi les membres de la commission prévue à l'article L. 311-5.
Par ailleurs, j'interviendrai tout à l'heure en explication de vote sur l'amendement qui nous est maintenant présenté par le Gouvernement.
M. le président. L'amendement n° 77, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
Après le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 331-7 du code de la propriété intellectuelle, insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« La fonction de médiateur est incompatible avec celles de dirigeant ou de salarié ou d'ancien dirigeant ou d'ancien salarié d'une société régie par le titre II du livre III ou de toute entreprise exerçant une activité de production de phonogrammes ou de vidéogrammes, ou offrant des services de téléchargement d'oeuvres protégées.
« Les médiateurs ne peuvent, directement ou indirectement, détenir d'intérêts dans une entreprise exerçant une des activités mentionnées à l'alinéa précédent.
La parole est à M. Michel Charasse.
M. Michel Charasse. Pour ne pas compliquer les choses, je retire cet amendement, qui procède du même esprit que le sous-amendement n° 76, et je me rallie à l'amendement n° 133 qui a été déposé par mon groupe.
Je profite du fait que j'ai la parole pour remercier M. le ministre d'avoir bien voulu reprendre mon sous-amendement n° 76, qui vise à établir des règles déontologiques d'incompatibilité, d'indépendance et de non-ingérence des membres de la nouvelle autorité indépendante.
Cela étant, je ne peux résister à la nécessité de m'élever une fois de plus contre la multiplication de ces autorités indépendantes qui édictent des réglementations. Que ce soit lors de la création de la Commission nationale de l'informatique et des libertés en 1978 ou de la Haute Autorité de la communication audiovisuelle en 1982, le Conseil constitutionnel n'a jamais rien trouvé à redire à ce démembrement du pouvoir réglementaire au profit de personnalités non élues qui ne rendent jamais compte aux citoyens, qui expriment la souveraineté nationale.
Gauche et droite ont allégrement mis la main à la pâte pour démembrer peu à peu le pouvoir exécutif, pourtant responsable devant les représentants de la souveraineté populaire, et pour satisfaire les élucubrations à la mode des salons parisiens, qui inventent chaque matin avec la presse spécialisée, plutôt parisienne d'ailleurs - laquelle se dit démocrate et quelquefois même de gauche -, de nouvelles autorités indépendantes. Car cette espèce d'opinion fluctuante et parisienne déteste tellement le principe de l'élection sur lequel est fondée la République qu'elle préfère de plus en plus s'en remettre à ces autorités composées de personnalités non élues par les citoyens et ne rendant compte à personne. Il est vrai que, par rapport à nous, pauvres parlementaires « primitifs » directement issus du peuple, elles détiennent la compétence et la connaissance... Elles sont ainsi investies d'un privilège digne de l'Ancien Régime.
Jamais je n'approuverai le principe de ces institutions. Lorsque j'étais conseiller du Président de la République François Mitterrand, il m'est d'ailleurs très souvent arrivé de le lui dire. Lui-même était d'ailleurs un peu sceptique vis-à-vis de ce mode de fonctionnement, mais il n'a pas empêché la création de la Haute Autorité de la communication audiovisuelle.
Monsieur le ministre, je ne cherche pas à jeter une pierre dans votre jardin ni à vous reprocher d'avoir repris l'amendement de la commission. Je souhaite simplement que le Conseil constitutionnel se ressaisisse un jour et fasse machine arrière, même si je n'y crois pas tellement. Aujourd'hui, le nombre de ces autorités a tellement augmenté, que le fait de revenir brutalement en arrière entraînerait le démantèlement d'une grande partie de notre organisation administrative.
Il n'empêche que, comme vieux républicain d'une nature rugueuse comme il se doit, je ne pouvais pas ne pas relever une fois de plus que ce comité Théodule n'est pas conforme à l'idée que je me fais de la République.
M. Bruno Retailleau. Très bien !
M. Michel Thiollière, rapporteur. L'amendement n° 210 contredisant l'amendement n° 21 rectifié bis, la commission émet un avis défavorable.
Pour ce qui concerne l'amendement n° 21 rectifié bis, je tiens à remercier le Gouvernement d'avoir repris à son compte l'instauration d'une autorité administrative. À cet égard, j'ai écouté avec beaucoup de bonheur, comme l'ensemble de nos collègues, je l'imagine, les propos de Michel Charasse.
M. Michel Charasse. On est tous embarqué là-dedans !
M. Michel Thiollière, rapporteur. Néanmoins, ces dispositions répondent à une logique.
À l'origine, le projet de loi créait un collège des médiateurs chargé de missions de conciliation. L'Assemblée nationale lui a confié de nouvelles prérogatives. Pour sa part, le Sénat, pas plus tard qu'hier soir, a décidé du principe de l'interopérabilité.
Il faut bien qu'à ces principes voulus par le Parlement correspondent des mesures pratiques et techniques permettant leur application. Il convenait donc, non pour augmenter le nombre d'autorités administratives indépendantes, non pour satisfaire à une mode, d'élargir le pouvoir du collège des médiateurs et de le transformer en autorité administrative à la fois indépendante et transparente.
Ce n'est pas cet organisme qui fixera le cadre, c'est nous ! Son rôle consistera à mettre en oeuvre les mesures que nous aurons édictées et qui seront inscrites dans la loi.
Pour toutes ces raisons, la commission est favorable à l'amendement n° 21 rectifié bis.
S'agissant du sous-amendement n° 254, la composition de l'autorité de régulation proposée par l'amendement n° 21 rectifié bis offre déjà des garanties d'impartialité et de compétence juridique suffisantes.
Par ailleurs, une forte augmentation du nombre de membres est susceptible de multiplier les risques de blocage. En passant de trois à cinq membres, l'autorité de régulation sera susceptible de remplir ses missions nouvelles, sans pour autant être pléthorique, contrairement à ce qui a été dit tout à l'heure.
La commission a donc émis un avis défavorable.
Le sous-amendement n° 255 est déjà satisfait par le nouvel article L. 331-7-2, tel qu'il est introduit par l'amendement n° 21 rectifié bis. La commission demande donc à ses auteurs de bien vouloir le retirer. À défaut, elle émettrait un avis défavorable.
L'amendement n° 133 vise à recomposer le collège des médiateurs. Son objet est incompatible avec l'amendement n° 21 rectifié bis, qui crée l'autorité administrative. La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Je suis comme M. Charasse : je crois à la nécessité du suffrage universel, à l'articulation des responsabilités entre l'exécutif et le législatif, à la séparation des pouvoirs et, en règle générale, à toutes les précautions qu'il convient de prendre pour respecter les principes du droit.
M. Michel Charasse. Vous devez donc avoir beaucoup d'ennemis ! (Sourires.)
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Avoir le souci de l'effectivité des décisions prises par le législateur sur l'initiative du Gouvernement ou du Parlement n'est pas faire preuve d'irresponsabilité. Déléguer, c'est avoir la volonté de faire entrer en vigueur concrètement les dispositions que le Parlement a adoptées. Dans le même esprit, le Parlement a raison de se montrer exigeant vis-à-vis du Gouvernement afin que les décrets d'application suivent le plus rapidement possible l'adoption d'une loi.
Il s'agit non pas de se défausser, mais d'être opérationnel. Ce n'est pas la même chose ! Par ailleurs, il faut le reconnaître parce que c'est la réalité, la technologie avance au galop. Les valeurs que nous défendons sont, je le crois, éternelles, mais il faut adapter un certain nombre d'éléments en raison même de cette évolution technologique. Je le répète, nous ne sommes pas en train de nous défausser, nous faisons en sorte d'exercer nos responsabilités.
M. Michel Charasse. Rassurez-vous, vous n'avez rien inventé : en matière d'autorité indépendante, on porte tous notre croix !
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Pour moi, ce n'est pas une croix. Ces décisions cherchent à rendre effectives les dispositions qui sont attendues par nos concitoyens. Cette effectivité a besoin d'être garantie surtout à un moment où la technologie peut créer des verrous. Pour notre part, nous décidons que les portes puissent s'ouvrir, tout en étant respectueux du droit des créateurs.
J'en viens à l'avis du Gouvernement sur les amendements.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° 210 et sur le sous-amendement n° 254.
Le sous-amendement n° 255, qui vise à éviter tout conflit d'intérêt lors des délibérations, est en fait satisfait par l'amendement n° 21 rectifié bis, compte tenu de l'intégration du sous-amendement n° 76. Le Gouvernement invite donc ses auteurs à le retirer dans la mesure où ces deux sous-amendements sont quasiment identiques.
Enfin, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° 133, tout en constatant que les perspectives défendues par M. Assouline sont très proches des siennes. Cet amendement vise en effet à modifier substantiellement la composition du collège. Or cette disposition ne procurera pas davantage d'indépendance à cette instance, notamment par rapport aux parties intéressées aux décisions. Celles-ci seraient intégrées dans le collège, ou plutôt au sein de l'autorité de régulation, alors que le Gouvernement cherche à rendre cet organisme strictement indépendant.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote sur l'amendement n° 210.
Mme Marie-Christine Blandin. Monsieur le ministre, vous nous dîtes que l'autorité de régulation ne se substituera pas au législateur, mais qu'elle appliquera ses choix. Pourtant, vous avez repoussé les amendements nos 187 rectifié et 207, qui visaient à prévoir un arbitrage législatif en indiquant que le nombre de copies privées ne pouvait être inférieur à un.
En renvoyant à l'autorité de régulation la question de la copie privée avec la possibilité de ne pas l'autoriser, vous lui accordez le pouvoir de nier dans certains cas l'effectivité de ce que le législateur a écrit dans l'article 8 : « Les titulaires de droits [...] prennent [...] les mesures qui permettent le bénéfice effectif des exceptions ».
Quant aux DVD, je rappelle que le respect de règles de chronologie des médias prévu par l'amendement n° 132 aurait écarté ce risque.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 210.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 190 :
Nombre de votants | 322 |
Nombre de suffrages exprimés | 281 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 141 |
Pour l'adoption | 120 |
Contre | 161 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 254.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote sur l'amendement n° 21 rectifié bis.
M. David Assouline. Fruit, entre autres, de l'improvisation certaine du Gouvernement dans l'élaboration et la maturation de ce texte - j'ai déjà eu l'occasion de le souligner -, le dispositif prévu par l'article 9 ne figurait pas dans la rédaction initiale du projet de loi.
Il a été introduit par le M. le ministre en cours de discussion à l'Assemblée nationale. L'objectif est de conférer à un « collège des médiateurs » une mission de médiation en matière de différends portant sur le bénéfice de l'exception de copie privée. Ce qui nous était proposé initialement se limitait à cela.
Mais pourquoi donc créer un nouveau « machin » administratif dessaisissant l'autorité politique d'une part de sa responsabilité, avec un champ de compétences aussi flou, alors que, dans le domaine qui nous intéresse, il existe déjà au moins une instance du même type - je pense à la commission dite de la « copie privée » -, dont la composition est de surcroît paritaire ?
J'ajoute que l'Assemblée nationale a étendu de manière significative la mission du collège, sans réellement la préciser, et en en faisant l'autorité de régulation des mesures techniques de protection.
Il est vrai que, à partir d'une telle extension du champ, nous nous dirigions tout droit vers la création de cette autorité administrative indépendante. À vos yeux, cette solution se justifiait de plus en plus, d'autant que l'interopérabilité n'était pas suffisamment précisée dans les débats pour éviter qu'il n'y ait différentes interprétations possibles et pour garantir qu'il s'agit bien d'un droit effectif dans la loi. Bien entendu, en cas de contentieux, il appartient au juge de trancher.
Mais, comme Mme Blandin le rappelait, outre la question de l'interopérabilité, qui n'est pas suffisamment précisée et contrainte dans la loi - nous en avons discuté hier -, même le bénéfice de l'exception pour copie privée, tel qu'il existait auparavant, à savoir la possibilité d'au moins une copie, est renvoyé à cette autorité administrative indépendante. Cela confère à cette dernière un pouvoir de nature quasi législative, puisqu'elle peut dire que l'exception n'existe plus. Ce point a été bien développé, me semble-t-il, par plusieurs orateurs, en particulier par Mme Blandin.
Pour notre part, nous récusons la nécessité d'introduire dans notre droit de la propriété intellectuelle une institution qui deviendrait, selon les propres termes de M. le rapporteur, la « gardienne de l'interopérabilité ». Selon nous, la gardienne de l'interopérabilité, c'est la loi.
Quelle serait donc la légitimité d'une nouvelle autorité administrative indépendante pour décider ainsi des frontières de l'interopérabilité et pour s'en faire le garde ? Comment une telle structure pourrait-elle mener à bien sa mission sans être dotée de moyens assez considérables, notamment en termes de compétences techniques ?
Notre rapporteur se garde d'ailleurs bien d'évaluer le coût de fonctionnement d'une telle autorité de régulation, coût que M. le ministre pourrait à l'occasion tenter de chiffrer. Là encore, nous n'avons pas obtenu de réponses à ces questions.
C'est pourquoi nous rejetons l'amendement de M. le rapporteur, qui a été repris par le Gouvernement. Nous regrettons de ne pas avoir convaincu notre assemblée de l'opportunité d'installer un collège des médiateurs émanant des instances déjà existantes en matière de régulation du droit d'auteur, comprenant des représentants des consommateurs, et uniquement chargé d'aider par la médiation les utilisateurs et les titulaires de droits à régler les litiges les opposant. D'ailleurs, la directive du 22 mai 2001 sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information encourage une telle solution.
En réalité, dans la logique de ce que nous avons expliqué depuis le début de ce débat, notamment lors de la discussion générale, nous souhaitons nous en tenir à la transposition de la directive et ne pas aller plus loin. Une nouvelle fois, le Gouvernement aurait été bien inspiré de se limiter à transposer le texte communautaire en droit interne.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 21 rectifié bis.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 191 :
Nombre de votants | 326 |
Nombre de suffrages exprimés | 289 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 145 |
Pour l'adoption | 167 |
Contre | 122 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, l'article 9 est ainsi rédigé et l'amendement n° 133 n'a plus d'objet.
Article 10
Dans le même code, il est inséré un article L. 331-10 ainsi rédigé :
« Art. L. 331-10. - Les informations sous forme électronique concernant le régime des droits afférents à une oeuvre, autre qu'un logiciel, une interprétation, un phonogramme, un vidéogramme ou un programme, sont protégées dans les conditions prévues au présent titre, lorsque l'un des éléments d'information, numéros ou codes est joint à la reproduction ou apparaît en relation avec la communication au public de l'oeuvre, de l'interprétation, du phonogramme, du vidéogramme ou du programme qu'il concerne.
« On entend par information sous forme électronique toute information fournie par un titulaire de droits qui permet d'identifier une oeuvre, une interprétation, un phonogramme, un vidéogramme, un programme ou un titulaire de droit, toute information sur les conditions et modalités d'utilisation d'une oeuvre, d'une interprétation, d'un phonogramme, d'un vidéogramme ou d'un programme, ainsi que tout numéro ou code représentant tout ou partie de ces informations. »
M. le président. L'amendement n° 156, présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 331-10 du code de la propriété intellectuelle par une phrase ainsi rédigée :
Ces informations doivent être disponibles dans un format ouvert et public.
La parole est à M. Ivan Renar.
M. Ivan Renar. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les informations sous forme électronique concernant le régime des droits afférents à une oeuvre doivent être disponibles et ouvertes à tous, sans occasionner de paiement ni être soumises à conditions.
En effet, ces informations revêtent la plus grande importance pour identifier les auteurs, les artistes et les producteurs des oeuvres diffusées sur Internet. Dans le domaine littéraire, de telles informations sont équivalentes au nom de l'auteur, de l'éditeur et de l'imprimeur d'un livre ; il apparaîtrait inconcevable que l'on demande à quiconque de payer un supplément pour connaître les noms de ces diverses personnes.
Le même raisonnement doit s'appliquer dans l'univers numérique, à plus forte raison compte tenu de l'extrême facilité de diffusion des oeuvres sur Internet. Cette liberté d'accès est fondamentale à deux égards.
Elle l'est d'abord pour les titulaires de droits eux-mêmes. Leur « signature » doit apparaître sur les oeuvres et interprétations auxquelles ils ont participé. Pour les auteurs, c'est un élément de leur droit moral ; pour les autres, c'est la reconnaissance de leur travail.
Elle l'est ensuite pour le public, qui doit pouvoir identifier les ayants droit immédiatement sans que l'accès à cette information capitale soit limité par un intérêt commercial.
En outre, nous sommes d'autant plus attachés à cette liberté d'accès aux informations sur les oeuvres que celles-ci permettent la rémunération des titulaires de droits. En effet, le nouveau système de diffusion et de rémunération des oeuvres, que nous proposerons plus avant dans le débat en présentant l'amendement n° 172, tendant à insérer un article additionnel après l'article 15 bis, est en grande partie fondé sur les mesures techniques d'information.
Vous le comprendrez aisément, nous considérons que de telles informations, si stratégiques pour le statut des auteurs et des artistes dans la société, ne doivent ni être privatisées ni faire l'objet d'une exploitation commerciale.
Selon nous, notre amendement n'est pas satisfait par le dispositif que l'amendement n° 26 rectifié de la commission portant sur l'article 14 quater tend à instituer. En effet, cet amendement a certes pour objet de rendre ces informations librement accessibles, mais il vise également à reprendre l'amendement n° 267 rectifié, présenté à l'Assemblée nationale par le député Thierry Mariani, mettant en cause les fabricants de logiciels libres.
C'est pourquoi nous préférons affirmer le principe de la liberté d'accès aux informations sous forme électronique dans l'article relatif à ces dernières. Cela nous semble plus logique et moins incertain.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. La commission partage la préoccupation légitime de M. Renar. Son amendement sera satisfait par l'amendement n° 26 rectifié de la commission, ...
M. Ivan Renar. Mais non, justement !
M. Michel Thiollière, rapporteur. ... qui tend à prévoir une nouvelle rédaction de l'article 14 quater.
Cet article porte en effet sur la création d'un registre public et gratuit dans lequel les titulaires des droits seront appelés à communiquer les informations d'identification et celles qui sont relatives aux droits et aux conditions d'utilisation des oeuvres et des objets protégés.
Dans ces conditions, je vous prie, monsieur Renar, de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, la commission s'en remettrait à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Les mesures d'information reposent en général sur des techniques dites de « tatouage », qui sont insérées dans le contenu même de l'oeuvre, de façon invisible.
Or ces techniques de tatouage ne relèvent pas d'un standard ouvert. Il est en effet très important que les informations qu'elles protègent ne puissent être modifiées ou supprimées. Ces mesures d'identification des oeuvres sont une protection pour les auteurs, puisque ce sont eux qui déterminent le régime de diffusion de leurs propres créations.
En outre, contrairement aux mesures techniques de protection, les mesures d'information ne posent pas de problèmes d'interopérabilité.
Telles sont les raisons pour lesquelles j'émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 156.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 10.
(L'article 10 est adopté.)
Article 11
L'article L. 332-1 du même code est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est complété par les mots : « ou tout exemplaire, produit, appareil, dispositif, composant ou moyen portant atteinte aux mesures techniques et aux informations mentionnées respectivement aux articles L. 331-5 et L. 331-10 » ;
2° Le 1° est complété par les mots : « ou à la réalisation d'une atteinte aux mesures techniques et aux informations mentionnées respectivement aux articles L. 331-5 et L. 331-10 » ;
3° Dans le 2°, après les mots : « illicite de l'oeuvre, déjà fabriqués ou en cours de fabrication, », sont insérés les mots : « ou des exemplaires, produits, appareils, dispositifs, composants ou moyens, fabriqués ou en cours de fabrication, portant atteinte aux mesures techniques et aux informations mentionnées respectivement aux articles L. 331-5 et L. 331-10, » ;
4° Le 3° est complété par les mots : « ou provenant d'une atteinte aux mesures techniques et aux informations mentionnées respectivement aux articles L. 331-5 et L. 331-10 ».
M. le président. L'amendement n° 157, présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. L'article 11 aborde la question de la chasse aux internautes contrefacteurs sur les réseaux pair à pair, via la collecte d'adresses IP.
Les systèmes de gestion de droits protégeant les morceaux en vente sur les sites légaux suscitent des interrogations, dans la mesure où sont prévus l'identification des individus consultant sur Internet, ainsi que le traçage des informations légales.
Les mesures répressives prévues dans ce projet de loi constituent plus qu'un contrôle et qu'un code de conduite, auxquels, du reste, nous ne sommes pas opposés. Mais elles nous choquent parce qu'elles présument que l'internaute est coupable et qu'elles extrapolent les possibilités offertes par la technologie d'enfreindre la loi. En outre, elles constituent un système intrusif de surveillance de la vie privée des citoyens que nous sommes.
Mme Annie David. Si, d'un côté, l'internaute s'identifie et que, de l'autre, les fichiers qu'il télécharge sont marqués, il devient alors possible, par exemple, de croiser les données. Il s'agit là non plus de contrôle de la légalité de l'utilisation du fichier téléchargé, mais de marketing. Le marquage est, en effet, souvent utilisé pour établir un profil des utilisateurs, qui servira ensuite à cibler les publicités qui leur sont adressées.
Le groupe de travail européen rassemblant les CNIL des États membres a pointé les dérives possibles en matière d'utilisation de données personnelles des clients par les boutiques en ligne.
Une fenêtre s'ouvre sur votre ordinateur. Il vous est alors demandé soit de vous inscrire, si vous êtes un nouveau client, soit de saisir vos identifiants et vos mots de passe. C'est ce passage quasi obligé par l'identification qui fait « tiquer » le groupe de travail « Article 29 », organisme consultatif auprès de la commission européenne, composée de l'ensemble des CNIL des États membres.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous avons déposé cet amendement, que nous vous proposons d'adopter.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. L'amendement présenté par Mme David vise à supprimer l'extension de la procédure de saisie-contrefaçon.
Ce dispositif portant atteinte aux mesures techniques, la commission y est défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Les sanctions prévues dans le projet de loi visent prioritairement ceux qui fournissent des moyens de contournement et font des profits sur le droit d'auteur.
L'esprit du projet de loi étant la différenciation des responsabilités, je suis donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'article 11.
(L'article 11 est adopté.)
Article 12
L'article L. 335-1 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 335-1. - Les officiers de police judiciaire compétents peuvent procéder, dès la constatation des infractions prévues aux articles L. 335-4 à L. 335-4-2, à la saisie des phonogrammes et vidéogrammes reproduits illicitement, des exemplaires et objets fabriqués ou importés illicitement, de tout exemplaire, produit, appareil, dispositif, composant ou moyen portant atteinte aux mesures techniques et aux informations mentionnées respectivement aux articles L. 331-5 et L. 331-10 ainsi qu'à la saisie des matériels spécialement installés en vue de tels agissements. »
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, sur l'article.
Mme Catherine Morin-Desailly. Les articles 11 à 15 instaurent un régime de sanctions visant les internautes qui téléchargent illégalement, mais aussi ceux qui contournent les mesures techniques de protection et, enfin, les éditeurs de logiciels, très inquiets par les mesures pénales et civiles prévues par les articles 12 bis et 14 quater.
Sur ce sujet, le Gouvernement a beaucoup évolué : il est passé d'un dispositif extrêmement répressif assimilant tout acte de téléchargement au délit de contrefaçon, donc punissable de trois ans d'emprisonnement et de 300 000 euros d'amende, à une amende de 38 euros aujourd'hui !
Entre-temps, un système de réponse graduée a été proposé au mois de décembre dernier, puis abandonné en cours de route par l'Assemblée nationale. Si nous pouvons nous féliciter d'avoir gagné entre ces différents projets une graduation des sanctions, je m'interroge tout de même sur le message envoyé à nos concitoyens.
Que vont-ils retenir de ces différentes annonces de sanctions ? Je ne sais pas si tout cela est très clair ! Encore aujourd'hui, nous ne savons toujours pas si la contravention de 38 euros se comprend par acte de téléchargement ou par titre téléchargé.
La directive nous invite à adopter des sanctions proportionnées, dissuasives et efficaces. Les sanctions seront-elles applicables ? Seront-elles dissuasives ? Nous en doutons, car nous savons bien qu'il ne sera pas possible de poursuivre l'ensemble des internautes adeptes du peer to peer, faute de moyens. Le dispositif mis en place ne revient-il pas à « vider la mer avec une petite cuillère » ?
L'exemple des pays européens qui se sont déjà dotés d'un système de sanctions pour poursuivre les internautes téléchargeant illégalement est instructif : malgré des sanctions souvent plus lourdes que celles qui sont prévues par le présent projet de loi, ils ne voient pas le nombre de téléchargements diminuer. Au contraire, il augmente.
Comme je l'ai rappelé lors de la discussion générale, si nous avons des doutes sur le caractère efficace et dissuasif des sanctions, nous ne sommes pas opposés au principe des sanctions en tant que tel, que nous pensons utiles pour fixer un cadre. Mais il est vrai que nous aurions aimé que, en plus de la répression, des mesures de prévention et de pédagogie soient envisagées.
Je redis ici mon regret que soient abandonnés le dispositif préventif du système de la réponse graduée et les messages d'avertissement personnalisés aux internautes, qui pouvaient avoir un effet dissuasif.
J'en profite pour répondre à M. le ministre, qui, lors de la discussion générale, a assimilé cette prise de position à la dénonciation de la « police de l'Internet » par François Bayrou, au mois de décembre dernier.
Cet argument est, selon moi, intellectuellement irrecevable. Vous savez en effet que, en parlant de « police de l'Internet », François Bayrou visait le dispositif que tendait à créer un amendement de sept pages, déposé la veille du débat à l'Assemblée nationale, et qui tendait à confier à des agents assermentés par les sociétés de perception des droits le contrôle des ordinateurs personnels des internautes. En revanche, je ne pense pas que François Bayrou ait jamais contesté le dispositif préventif, dans l'hypothèse où le contrôle serait effectué par des officiers de police judiciaire.
Par ailleurs, et ce sera ma dernière remarque sur le système des sanctions, certaines dispositions ont un caractère imprécis. Nous proposerons donc des amendements tendant à les préciser.
Enfin, certains amendements nous inquiètent. Il s'agit, outre des amendements dits « Vivendi », sur lesquels nous reviendrons, des amendements nos 23 et 24 rectifié de la commission, portant respectivement sur les articles 13 et 14. Ils tendent en effet à supprimer systématiquement les références aux actes réalisés à des fins d'interopérabilité, qui n'étaient pas concernés par les sanctions prévues par ces articles dans la « petite loi » transmise par l'Assemblée nationale.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur. Puisque les articles et les amendements dont nous abordons la discussion concernent les sanctions, je tiens à vous rappeler la position de la commission.
D'abord, nous avons décidé de ne modifier qu'à la marge les dispositions qui se rapportent aux sanctions. Il nous est en effet apparu que, dans ce domaine, le texte issu de l'Assemblée nationale représente un bon compromis entre les souhaits exprimés par les internautes et la protection légitime qui est due au détenteur des droits. C'est la raison pour laquelle nous avons émis de nombreux avis défavorables sur les amendements qui visent à alourdir, à alléger, voire à supprimer les sanctions prévues dans le texte.
Dans la mesure où nous sommes parvenus à un dispositif équilibré, qui peut être compris du plus grand nombre tout en étant efficace pour protéger les droits des auteurs, il ne nous apparaît pas nécessaire d'y revenir.
Ensuite, j'adresserai à M. le ministre la même question que Mme Morin-Dessailly. Elle est légitime et est souvent posée par nos concitoyens. Elle porte, d'une part, sur les procédures utilisées pour la recherche et le constat des infractions, ainsi que pour l'établissement des procès-verbaux, et, d'autre part, sur les actes sanctionnés par les contraventions.
Autrement dit, comme s'est interrogée notre collègue, y aura-t-il autant de contraventions que d'oeuvres téléchargées ou bien la contravention sanctionnera-t-elle un acte de téléchargement susceptible d'englober un grand nombre de fichiers protégés ?
Cette question est récurrente. Il convient, bien entendu, qu'une réponse précise y soit apportée.
M. le président. L'amendement n° 158, présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Ivan Renar.
M. Ivan Renar. Cet amendement vise à supprimer l'article 12. Nous estimons qu'il a déjà été défendu, dans la mesure où nous avons déjà développé de nombreux arguments sur cette question.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. En cohérence avec ce que j'ai expliqué voilà un instant, j'émets un avis défavorable sur cet amendement, qui vise à supprimer des sanctions.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 12.
(L'article 12 est adopté.)
Article 12 bis
Après l'article L. 335-2 du même code, il est inséré un article L. 335-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 335-2-1. - Est puni de trois ans d'emprisonnement et de 300 000 € d'amende, le fait :
« 1° D'éditer, de mettre à la disposition du public ou de communiquer au public, sciemment et sous quelque forme que ce soit, un dispositif manifestement destiné à la mise à disposition du public non autorisée d'oeuvres ou d'objets protégés ;
« 2° D'inciter sciemment, y compris à travers une annonce publicitaire, à l'usage d'un logiciel mentionné au 1°.
« Ces dispositions ne sont pas applicables aux logiciels destinés au travail collaboratif, à la recherche ou à l'échange de fichiers ou d'objets non soumis à la rémunération du droit d'auteur. »
M. le président. Je suis saisi de dix amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 159 est présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 212 est présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et M. Desessard.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Ivan Renar, pour présenter l'amendement n° 159.
M. Ivan Renar. Le présent article décrit de nouveau - c'est très clair dans le rapport - des scénarios possibles de fraudes. Par un renversement de notre approche traditionnelle du délit, nous invoquons de nouveau la présomption de culpabilité !
La législation concernant la contrefaçon est suffisamment claire pour que, ici comme dans les articles précédents, nous n'ayons pas à nous improviser auteurs de scénarios improbables : laissons cela à la police et aux services de la répression des fraudes ! Parlons plutôt du droit des auteurs et des droits voisins.
De tout temps, les chercheurs ont échangé leurs informations pour enrichir leurs travaux des avancées ainsi mises en commun. Cette philosophie de l'échange et de la mise en commun des connaissances est une invention non pas d'Internet, mais bien des êtres humains dans leur quête du savoir. Le patrimoine de l'ensemble de l'humanité se voit ainsi enrichi de la somme des recherches individuelles et nationales, dans tous les domaines de l'activité humaine. Or le présent article met en danger la liberté de création des chercheurs et censure leur activité.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous vous demandons de voter la suppression du présent article.
M. le président. La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Je voudrais vous poser une question sur la procédure, monsieur le président. Peut-être ne l'ai-je pas bien comprise.
Sur chaque article, un amendement de suppression est défendu, puis rejeté. Or, vous ne mettez pas aux voix l'article lui-même.
M. le président. Si, à chaque fois !
Après le rejet de l'amendement de suppression, je demande au Sénat si l'on peut considérer que le vote sur l'article est conforme à la position prise précédemment par le Sénat.
Chacun s'en souvient, j'ai mis aux voix l'article 10...
M. David Assouline. Pas les autres !
M. le président. Si !
Il n'y a aucun problème : les articles ont été mis aux voix les uns après les autres !
M. David Assouline. Donc, vous considérez que, chaque fois, nous votons contre l'article ?
M. le président. Tout à fait !
M. David Assouline. Je tiens à préciser clairement que nous sommes opposés à ces articles.
Je vous demande, monsieur le président, même en cas de rejet d'un amendement de suppression, de mettre chaque fois l'article aux voix afin que nous puissions exprimer notre vote en levant la main.
M. le président. C'est exactement ce que je fais, selon une pratique depuis longtemps observée au Sénat, mais qui implique effectivement que chacun suive les propos tenus par la présidence !
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour présenter l'amendement n° 212.
Mme Marie-Christine Blandin. L'article 12 bis prévoit de punir de trois ans d'emprisonnement et de 300 000 euros d'amende le fait d'éditer et de mettre à disposition du public sciemment, y compris à travers une annonce publicitaire, un logiciel « manifestement destiné à la mise à disposition du public non autorisée d'oeuvres protégées ».
En dehors de ceux qui font publicité explicite de la finalité de leur logiciel, un logiciel « manifestement destiné à la mise à disposition du public non autorisée d'oeuvres protégées » s'apparente à un sac « manifestement destiné à cacher des objets dérobés ». J'ai coutume de porter un sac, je ne suis pas une voleuse en puissance. Au moins aux caisses des magasins suspicieux ne condamne-t-on pas le simple port d'un sac. (Murmures.)
Monsieur le ministre, les logiciels, s'ils ne sont pas explicitement destinés à des échanges d'oeuvres, alors qu'elles sont protégées et qu'il faudrait les payer, existent pour les universités, pour la recherche, et la rédaction de cet article ne met pas les usages licites à l'abri.
Aujourd'hui, tous les dispositifs existant sur Internet risquent de répondre à votre critère, à commencer par le Web, les blogs, les serveurs FTP, les logiciels de messagerie, les protocoles de communication.
En outre, il apparaît très difficile, pour quiconque, de savoir si l'autorisation de mise à disposition d'une oeuvre a bien été donnée. D'ailleurs, des actions judiciaires ont été engagées par plusieurs ayants droit contre des plateformes de téléchargement payant. La Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, la SACEM, s'est retournée contre E-Compil France, la Spedidam s'est retournée contre plusieurs plateformes, dont E-Toons.
De surcroît, cet article réprime le fait d'inciter à l'usage de tel ou tel logiciel.
Ainsi, le fait de recommander à un ami l'utilisation d'un type de logiciel ou de signaler l'existence d'un nouveau dispositif serait passible de trois ans de prison. C'est grave ! Même les journalistes, qui ne sont ni juges ni avocats, devront redoubler d'attention avant de présenter un logiciel d'échange, de crainte que celui-ci ne soit dénoncé comme étant « manifestement destiné à ». Nous défendrons d'ailleurs un amendement visant à remplacer « manifestement » par « explicitement ».
La loi doit être intelligible par tous et le Conseil constitutionnel nous oblige, nous, législateurs, à définir les infractions en termes suffisamment clairs et précis afin d'exclure l'arbitraire.
M. le président. L'amendement n° 22, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. Dans le deuxième alinéa (1°) du texte proposé par cet article pour l'article L. 335-2-1 du code de la propriété intellectuelle, remplacer le mot :
dispositif
par le mot :
logiciel
II. Supprimer le dernier alinéa du même texte.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur. Cet amendement procède à la correction d'une erreur matérielle, en supprimant le dernier alinéa du texte proposé pour l'article L. 335-2-1 du code de la propriété intellectuelle.
M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 41 est présenté par M. Gaillard.
L'amendement n° 55 est présenté par Mme Morin-Desailly, M. Nogrix et les membres du groupe Union centriste - UDF.
L'amendement n° 213 est présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et M. Desessard.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Dans le deuxième alinéa (1°) du texte proposé par cet article pour l'article L.335-2-1 du code de la propriété intellectuelle, remplacer le mot :
manifestement
par le mot :
explicitement
La parole est à M. Yann Gaillard, pour défendre l'amendement n° 41.
M. Yann Gaillard. Dans Le Misanthrope, Molière fait dire à Alceste : « on ne voit pas les coeurs ». De même, on ne voit pas vraiment la manifestation.
Je préfère, comme Mme Blandin l'a dit, même si elle a amplifié plus que je ne l'aurais voulu cet amendement assez modeste, l'adverbe « explicitement » à l'adverbe « manifestement. »
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour présenter l'amendement n° 55.
Mme Catherine Morin-Desailly. Cet amendement est défendu.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour présenter l'amendement n° 213.
Mme Marie-Christine Blandin. Il est soutenu.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 42 est présenté par M. Gaillard.
L'amendement n° 214 est présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et M. Desessard.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Dans l'avant dernier alinéa (2°) du texte proposé par cet article pour l'article L.335-2-1 du code de la propriété intellectuelle, remplacer les mots :
à l'usage
par les mots :
à un usage illicite
La parole est à M. Yann Gaillard, pour défendre l'amendement n° 42.
M. Yann Gaillard. Mme Blandin a déjà abordé ce point. À la mention « à l'usage », je préfère l'expression « à un usage illicite ».
Mme Marie-Christine Blandin. Il est défendu.
M. le président. L'amendement n° 186 rectifié, présenté par MM. Retailleau et Darniche, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le dernier alinéa de cet article :
« Ces dispositions ne sont pas applicables aux logiciels destinés à l'échange de fichiers professionnels, à la recherche ou à l'échange autorisé de fichiers ou d'objets protégés par le droit d'auteur. »
La parole est à M. Bruno Retailleau.
M. Bruno Retailleau. Faut-il interdire une technique simplement parce qu'elle peut s'accompagner d'usages illicites ? Va-t-on, en France, interdire la voiture parce que sa mauvaise utilisation peut entraîner des accidents graves ?
Si l'amendement n°22 présenté par la commission est adopté en l'état, certaines des exceptions qui avaient été ajoutées par l'Assemblée nationale vont être supprimées. Ce serait à mon sens une erreur. Il faut être ferme sur les usages illicites de la technique du pair à pair, mais accepter un certain nombre d'exceptions, notamment pour la recherche ou lorsqu'il s'agit d'échanges de fichiers ne donnant pas lieu à rémunération puisque, dans ce cas, il n'y a pas d'usage licite ou illicite, et dans le cas du travail collaboratif.
Mon amendement a précisément pour objet de définir le travail collaboratif, qui est un échange de fichiers professionnels.
Supprimer le dernier alinéa de l'article 12 bis dans lequel sont mentionnées ces trois exceptions, ce serait porter une atteinte grave à la liberté et risquer de voir des entreprises fuir vers le Luxembourg ou la Belgique, où l'on aura le droit de travailler en utilisant la technique du pair à pair.
La vraie question est donc la suivante : la protection des oeuvres peut-elle conduire à l'interdiction d'une technique, même lorsque cette technique est licitement utilisée ?
M. le président. L'amendement n° 91 rectifié bis, présenté par MM. P. Dominati, Masson et Darniche, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par cet article pour l'article L. 335-2 du code de la propriété intellectuelle par un alinéa ainsi rédigé :
« Ces dispositions ne sont pas applicables aux logiciels et aux dispositifs manifestement destinés à une utilisation légale, dont l'équilibre économique ne dépend pas de la mise à disposition du public non autorisée d'oeuvres ou d'objets protégés ».
Cet amendement n'est pas défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. Sur les amendements identiques nos 159 et 212, dont l'adoption aurait pour conséquence de supprimer des sanctions, la commission a émis un avis défavorable.
S'agissant des amendements identiques nos 41, 55 et 213, la commission s'est interrogée sur l'opportunité de substituer l'adverbe « explicitement » à l'adverbe « manifestement », dans la mesure où les adverbes « sciemment » et « manifestement » permettent déjà de caractériser avec précision tant l'intention délictuelle de l'éditeur ou du fournisseur du logiciel que la vocation coupable de ce dernier. Sur ce sujet, nous souhaiterions connaître l'avis du Gouvernement.
La mention du caractère illicite des logiciels proposée à travers les amendements identiques nos 42 et 214 paraît superflue puisque les actes incriminés réalisés à partir de ces logiciels sont, par définition, illicites.
Afin d'éviter tout malentendu, nous souhaitons tout de même rappeler que, conformément au principe de neutralité technologique, cet article vise non pas les logiciels peer to peer en eux-mêmes, mais bien un usage précisément défini et illicite de ces logiciels, à savoir la mise à disposition non autorisée d'oeuvres ou d'objets protégés.
La commission s'en est donc remise à la sagesse de notre assemblée sur ces deux amendements identiques.
Enfin, elle a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 186 rectifié.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. En ce qui concerne les amendements identiques nos 159 et 212, l'objectif essentiel du projet de loi est de favoriser l'émergence d'offres de systèmes d'échange pair à pair légaux. Cela passe notamment par une responsabilisation pénale des éditeurs de logiciels pour que l'offre qu'ils proposent soit légale.
Il n'est pas acceptable que certains de ces éditeurs incitent les consommateurs à la contrefaçon en leur promettant la culture gratuite tout en les laissant assumer seuls les risques de poursuites judiciaires.
L'article 12 bis du projet de loi ne vise ni à imposer ni à interdire une technologie. L'enjeu est de créer les conditions propices à l'émergence d'un nouveau modèle économique de diffusion des produits culturels. Son champ d'application est bien ciblé, puisqu'il sera nécessaire de prouver, comme toujours en droit pénal, l'intention frauduleuse de l'éditeur du logiciel.
Dans ces conditions, je ne puis être favorable à ces amendements qui auraient pour effet de concentrer les poursuites judiciaires sur les seuls internautes et de freiner le développement d'offres légales.
La disposition relative à la déresponsabilisation pénale des éditeurs de logiciels, prévue par l'amendement n° 22, s'inscrit pleinement dans la stratégie du Gouvernement consistant à graduer les sanctions et à appliquer prioritairement les sanctions les plus lourdes à ceux qui organisent la casse du droit d'auteur et en tirent profit sur le dos des internautes.
Proposée à la suite d'une large concertation menée par le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique, cette disposition est d'application très restrictive, puisqu'il ne s'agit absolument pas de rendre les éditeurs responsables de l'utilisation que les internautes font de leurs logiciels. C'est l'intention frauduleuse de l'éditeur lui-même qu'il faut prouver.
Cette mesure s'inscrit dans un vaste mouvement au plan mondial, faisant d'ailleurs suite à plusieurs décisions de justice, notamment de la Cour suprême des États-unis, qui a reconnu coupables deux éditeurs de logiciels sur ce même critère de l'intention frauduleuse.
Comme je l'avais indiqué à l'Assemblée nationale, le dernier alinéa de l'article 12 bis va de soi sur le plan juridique. Les conditions d'application de cet article sont en effet déjà très strictes, puisque l'intention frauduleuse de l'éditeur du logiciel devra être prouvée. Il est évident qu'un logiciel, même destiné au partage illicite d'oeuvres protégées, peut également être utilisé à des fins licites, notamment avec des oeuvres non protégées. Cela n'enlève rien à l'intention frauduleuse de l'éditeur et ne doit pas servir d'alibi à des personnes qui organisent la casse du droit d'auteur pour en tirer profit.
C'est la raison pour laquelle je suis favorable à l'amendement n° 22.
Sur les amendements identiques nos 41, 55 et 213, j'émets un avis défavorable.
La disposition discutée est une forme de déclinaison particulière du régime plus général de la complicité par fourniture de moyens pour permettre une application plus directe. La rédaction retenue dans l'article 12 bis est très restrictive : il faut que l'intention soit manifeste. Outre les règles du droit pénal, les dispositions prévues dans le texte me paraissent être de nature à répondre aux préoccupations exprimées par les auteurs de ces trois amendements.
Exiger que l'intention soit explicite pourrait rendre ce dispositif quasiment inapplicable. L'intention n'est jamais explicite et il est très facile de contourner une telle exigence.
Dans ces conditions, je ne puis être favorable à la disposition proposée dans ces trois amendements, qui aurait pour effet de concentrer les poursuites judiciaires sur les seuls internautes, ce qui n'est pas le point d'équilibre que nous souhaitons obtenir les uns et les autres.
Je suis également défavorable aux amendements identiques nos 42 et 214.
L'article 12 bis ne vise en aucun cas des logiciels dont l'utilisation a été détournée vers des usages illicites, comme semblent le craindre les auteurs de ces deux amendements, mais concerne bien des logiciels pour lesquels l'intention frauduleuse de l'éditeur est manifeste.
Le caractère manifeste de l'intention frauduleuse la rend apparente, y compris de tiers qui pourraient inciter sciemment à l'usage d'un tel logiciel. Par conséquent, c'est en connaissance de cause qu'ils inciteront à l'usage de ces logiciels. Préciser que l'incitation doit elle-même viser des usages illicites n'est donc pas nécessaire.
Enfin, je suis défavorable à l'amendement n° 186 rectifié.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 159 et 212.
Mme Catherine Morin-Desailly. Nous voterons les amendements nos 159 et 212, car l'article 12 bis n'est que la version pénale du célèbre « amendement Vivendi », qui fait courir de graves risques aux créateurs de logiciels, notamment.
En effet, la sanction prévue par cet article pose le problème des logiciels tout à fait légaux que des usages rendent illicites. Comment imaginer, en effet, qu'on sanctionne l'inventeur d'une technique pour l'utilisation illicite qui peut en être faite ?
Les éditeurs de logiciels communicants - serveurs web, serveurs mail, messageries instantanées, peer to peer... - ne peuvent être placés dans une situation d'insécurité juridique permanente ni être tenus pour responsables des actes illicites commis à l'aide de leur outil. Quoi qu'en disent les défenseurs de cet amendement, la responsabilité des échanges d'oeuvres sans autorisation relève des internautes qui les pratiquent.
Permettez-moi à ce sujet de vous citer un extrait d'une lettre d'une association américaine d'informaticiens fondée en 1947, et comptant 80 000 membres, l'Association for Computing Machinery ou ACM. Cette association a pris position publiquement en faveur de la responsabilité individuelle et de la neutralité de la technique, lorsqu'une disposition équivalente à celle dont nous débattons a été proposée par des sénateurs américains.
Voici ce qu'avait écrit I'ACM à l'époque : « Toute action législative visant à contraindre ou prohiber une technologie au lieu de pénaliser les comportements ne pourra qu'affaiblir notre système éducatif, diminuer notre compétitivité sur le marché des nouvelles technologies et interférer avec notre sécurité informatique collective. »
Mes chers collègues, en ne s'appliquant qu'en France, ce dispositif pénaliserait fortement la création et l'innovation technologiques françaises, qui devront composer avec une réglementation largement plus restrictive et répressive que dans d'autres pays.
L'insécurité juridique ainsi créée serait par ailleurs majeure : nul ne sait quels sont les logiciels visés par cet amendement. M. le rapporteur ou M. le ministre pourraient-ils d'ailleurs nous éclairer à ce sujet ?
Le problème se pose notamment pour les logiciels peer to peer dont le principe est de permettre aux internautes de mettre à disposition du public le contenu d'un disque dur. Il est impossible de connaître à l'avance le contenu des fichiers qui vont être mis à disposition.
En outre, permettez-moi de douter de l'efficacité d'un tel dispositif pour lutter contre la contrefaçon. La France va-t-elle empêcher les internautes de télécharger des logiciels légaux dans les pays voisins ? Ne risque-t-on pas de freiner la libre circulation des logiciels sur le marché intérieur ? Un logiciel pourrait être interdit dans notre pays, mais être légal en Belgique, par exemple.
Sans vouloir cautionner pour autant toutes les pratiques répréhensibles qui contournent le droit d'auteur et l'ensemble des droits qui touchent à la diffusion d'une oeuvre, nous sommes plus que sceptiques quant aux conséquences dramatiques que cet article aurait pour la recherche et l'innovation en France. Le développement des logiciels libres, à la différence des logiciels propriétaires, risque d'être entravé par la mise en oeuvre des dispositions de cet article.
Enfin, je remarque qu'un avis défavorable a été donné sur l'amendement n° 186 rectifié, défendu par mon collègue Bruno Retailleau, qui soulignait que le dernier alinéa du texte adopté par l'Assemblée nationale pour cet article était supprimé. Or cet alinéa était essentiel.
M. le président. La parole est à M. Yann Gaillard, pour explication de vote.
M. Yann Gaillard. Monsieur le président, compte tenu de la complexité du sujet et des explications de M. le ministre, je retire les amendements nos 41 et 42.
M. le président. Les amendements nos 41 et 42 sont retirés.
La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.
M. Bruno Retailleau. Je partage l'opinion de Catherine Morin-Desailly.
Permettez-moi simplement de réparer un oubli : mon collègue Philippe Dominati n'a pas pu être présent pour soutenir ses amendements, qui recoupent parfaitement les miens. Je souhaitais le dire solennellement.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 159 et 212.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 55 et 213.
Mme Marie-Christine Blandin. Si la suppression de l'article 12 bis indisposait ceux qui souhaitent se doter d'outils pour sanctionner, je regrette que le débat sur les adverbes « manifestement » et « explicitement » ait été tranché un peu rapidement.
« Manifestement » renvoie au jugement subjectif de l'observateur. Il instaure la suspicion : « Je vois que votre logiciel d'échange est manifestement destiné à échanger de la musique sans payer ».
Tandis que « explicitement », sans atténuer la répression, reste plus neutre dans l'appréciation : « Je vois bien que vous incitez à la contrefaçon. Et si vous n'y incitez pas dans la publicité, je me fais fort de le prouver et vous êtes coupable. »
Le choix de l'adverbe « explicitement » est donc tout à fait défendable et je le défendrai.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 55 et 213.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L'amendement n° 186 rectifié n'a plus d'objet, compte tenu de l'adoption de l'amendement n° 22 de la commission.
Je mets aux voix l'article 12 bis, modifié.
(L'article 12 bis est adopté.)
Article additionnel après l'article 12 bis
M. le président. L'amendement n° 92 rectifié bis, présenté par MM. P. Dominati, Masson et Darniche, est ainsi libellé :
Après l'article 12 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Si un éditeur fournit un service ou un logiciel établissant des connexions de réseaux informatiques qui relient directement entre eux les utilisateurs ;
- s'il est manifestement destiné à une utilisation légale ;
- s'il sensibilise explicitement les utilisateurs aux mesures à adopter pour protéger leur vie privée et pour les protéger contre les virus informatiques ;
- s'il ne porte atteinte à aucune mesure de protection du contenu ;
-s'il met en oeuvre les dispositifs imposés par la législation pour empêcher la mise à disposition du public non autorisée d'oeuvres ou d'objets non protégés ;
alors cet éditeur ne peut être tenu responsable du détournement de son service ou de son logiciel par ses utilisateurs, et cet éditeur ne pourra donc être poursuivi pour une infraction commise par un de ses utilisateurs.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Article 13
Après l'article L. 335-3 du même code, sont insérés deux articles L. 335-3-1 et L. 335-3-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 335-3-1. - I. - Est puni de 3 750 € d'amende, le fait de porter atteinte sciemment, à des fins autres que la recherche, à une mesure technique efficace telle que définie à l'article L. 331-5, afin d'altérer la protection d'une oeuvre par un décodage, un décryptage ou toute autre intervention personnelle destinée à contourner, neutraliser ou supprimer un mécanisme de protection ou de contrôle, lorsque cette atteinte est réalisée par d'autres moyens que l'utilisation d'une application technologique, d'un dispositif ou d'un composant existant mentionné au II.
« II. - Est puni de six mois d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende, le fait de procurer ou proposer sciemment à autrui, directement ou indirectement, des moyens conçus ou spécialement adaptés pour porter atteinte à une mesure technique efficace telle que définie à l'article L. 331-5, par l'un des procédés suivants :
« 1° En fabriquant ou en important une application technologique, un dispositif ou un composant, à des fins autres que la recherche ;
« 2° En détenant en vue de la vente, du prêt ou de la location, en offrant à ces mêmes fins ou en mettant à disposition du public sous quelque forme que ce soit une application technologique, un dispositif ou un composant ;
« 3° En fournissant un service à cette fin ;
« 4° En incitant à l'usage ou en commandant, concevant, organisant, reproduisant, distribuant ou diffusant une publicité en faveur de l'un des procédés visés aux 1° à 3°.
« III. - Ces dispositions ne sont pas applicables aux actes réalisés à des fins d'interopérabilité ou de sécurité informatique, dans les limites des droits prévus par le présent code.
« Art. L. 335-3-2. - I. - Est puni de 3 750 € d'amende, le fait de supprimer ou de modifier, sciemment et à des fins autres que la recherche, tout élément d'information visé à l'article L. 331-10, par une intervention personnelle ne nécessitant pas l'usage d'une application technologique, d'un dispositif ou d'un composant existant, conçus ou spécialement adaptés à cette fin, dans le but de porter atteinte à un droit d'auteur, de dissimuler ou de faciliter une telle atteinte.
« II. - Est puni de six mois d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende, le fait de procurer ou proposer sciemment à autrui, directement ou indirectement, des moyens conçus ou spécialement adaptés pour supprimer ou modifier, même partiellement, un élément d'information visé à l'article L. 331-10, dans le but de porter atteinte à un droit d'auteur, de dissimuler ou de faciliter une telle atteinte, par l'un des procédés suivants :
« 1° En fabriquant ou en important une application technologique, un dispositif ou un composant, à des fins autres que la recherche ;
« 2° En détenant en vue de la vente, du prêt ou de la location, en offrant à ces mêmes fins ou en mettant à disposition du public sous quelque forme que ce soit une application technologique, un dispositif ou un composant ;
« 3° En fournissant un service à cette fin ;
« 4° En incitant à l'usage ou en commandant, concevant, organisant, reproduisant, distribuant ou diffusant une publicité en faveur de l'un des procédés visés aux 1° à 3°.
« III. - Est puni de six mois d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende, le fait, sciemment, d'importer, de distribuer, de mettre à disposition du public sous quelque forme que ce soit ou de communiquer au public, directement ou indirectement, une oeuvre dont un élément d'information mentionné à l'article L. 331-10 a été supprimé ou modifié dans le but de porter atteinte à un droit d'auteur, de dissimuler ou de faciliter une telle atteinte.
« IV. - Ces dispositions ne sont pas applicables aux actes réalisés à des fins de recherche, d'interopérabilité ou de sécurité informatique, dans les limites des droits prévus par le présent code. »
M. le président. L'amendement n° 178, présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
I - Au début du premier alinéa du II du texte proposé par cet article pour l'article L. 335-3-1 du code de la propriété intellectuelle, supprimer les mots :
de six mois d'emprisonnement et
II - Procéder à la même suppression au début du premier alinéa du II et au début du III du texte proposé par cet article L.335-3-2 du code de la propriété intellectuelle.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Le présent amendement vise à supprimer toutes les peines d'emprisonnement prévues pour celles et ceux qui permettraient à d'autres personnes de porter atteinte aux mesures techniques de protection.
Nous avons déjà développé les raisons qui motivent notre opposition à la batterie de mesures techniques de protection et, par conséquent, aux sanctions encourues à cet égard. En effet, les éléments d'infraction, la nature des sanctions et les voies de droit possibles sont définies de manière vague et imprécise. Elles nous paraissent même en contradiction avec le principe de légalité des délits et des peines, qui impose à la loi pénale de prévoir avec une précision suffisante tous les éléments de l'infraction et la nature des sanctions.
Le caractère fortement répressif de cette loi à l'égard des moyens numériques d'échange et de partage interpersonnel non marchand des biens culturels nous fait redouter un grave divorce entre les citoyens de notre pays et les artistes et créateurs. En effet, le coeur du problème n'est pas la seule rémunération des auteurs et des ayants droit. Les droits du citoyen et la pérennité de la culture sont, eux aussi, remis en cause par ces systèmes dits de protection.
Par conséquent, je vous invite à voter notre amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. Comme je l'ai déjà évoqué, cet amendement vise à supprimer des sanctions.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Le contournement des mesures techniques est sanctionné de façon proportionnée et adaptée. La gradation des sanctions proposées est similaire à celle qui protège déjà les systèmes de cryptage pour les chaînes de télévision payantes.
Un internaute qui télécharge illégalement de la musique ou un film sur Internet pour son usage personnel ne risquera plus la prison. En revanche, le pourvoyeur de moyens de contournement des mesures de protection ou d'atteinte aux informations sur les oeuvres, qui les rend ainsi accessibles au plus grand nombre et favorise des atteintes répétées à leur encontre, doit être sanctionné plus sévèrement, en relation directe avec la gravité des faits commis.
L'éventail des sanctions figurant dans le projet de loi vise dont à établir un équilibre entre l'obligation de protection des mesures techniques et la nécessité de différencier les niveaux de responsabilité des intervenants.
Votre amendement aboutirait à remettre en cause cet équilibre. Je n'y suis donc pas favorable.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.
Mme Marie-Christine Blandin. L'argument que je souhaite développer s'éloigne du sujet : Internet, les nouvelles technologies, etc.
La jeunesse qui pratique ce genre d'échanges, y compris des échanges de mesures techniques et autres - car il n'y a pas de séparation stricte entre dealers et consommateurs -, se trouverait désormais exposée au risque de la prison, dont tous les observateurs nous disent aujourd'hui qu'elle est la meilleure école du crime pour la jeunesse.
Nous pouvons écoutez vos arguments sur les enjeux financiers, les peines, les sanctions... Mais tel n'est plus le cas dès qu'il s'agit de la prison. Je voterai donc l'amendement présenté par nos amis du groupe CRC, parce que nous mesurons combien des adolescents attardés peuvent être abîmés au contact délétère de l'univers carcéral.
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 215, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le III du texte proposé par cet article pour l'article L. 335-3-1 du code de la propriété intellectuelle :
« III. - Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux actes réalisés à des fins d'interopérabilité, de recherche, de sécurité informatique, de protection de la vie privée, ou pour l'usage licite de l'oeuvre ou de l'objet protégé. »
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. Cet amendement tend à substituer une rédaction très claire à celle du texte adopté par l'Assemblée nationale.
Nous déclarons manifestement et explicitement ce qui doit être autorisé et qu'il serait bon d'écrire dans la loi.
M. le président. L'amendement n° 23, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. Dans le III du texte proposé par cet article pour l'article L. 335-3-1 du code de la propriété intellectuelle, après les mots :
à des fins
supprimer les mots :
d'interopérabilité ou
II. Dans le IV du texte proposé par cet article pour l'article L. 335-3-2 du même code, après les mots :
à des fins de recherche
supprimer les mots :
, d'interopérabilité
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur. La mise en oeuvre de l'interopérabilité doit davantage être recherchée dans le cadre des dispositions prévues par l'article L. 331-5-2 du code de la propriété intellectuelle, introduit par l'article additionnel avant l'article 7 bis du présent projet de loi, qui instaure une procédure de conciliation conduite sous l'égide de l'Autorité de régulation des mesures techniques de protection.
Les personnes qui contourneraient les mesures techniques de protection pour se faire justice elles-mêmes, d'une certaine manière, et rendre leurs appareils de lecture interopérables avec un système auquel elles n'ont pas accès, ne peuvent dans ces conditions être exclues des sanctions prévues par le présent article.
M. le président. L'amendement n° 160, présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans le III du texte proposé par cet article pour l'article L. 335-3-1 du code de la propriété intellectuelle, après les mots :
d'interopérabilité ou de sécurité informatique
insérer les mots :
d'usage licite ou de protection de la vie privée
La parole est à M. Ivan Renar.
M. Ivan Renar. Le présent amendement vise à préserver la liberté des usagers ainsi que leur vie privée. La législation française reconnaît en effet le droit à chaque citoyen de protéger ses données personnelles et d'en contrôler l'usage.
La Commission nationale de l'informatique et des libertés ne saurait suffire à alerter et à remettre en question le maillage dangereux pour les libertés individuelles des mesures techniques de protection. La protection de la vie privée prime sur la protection juridique des mesures techniques de protection.
Par conséquent, je vous invite à voter notre amendement.
M. le président. L'amendement n° 216, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le IV du texte proposé par cet article pour l'article L. 335-3-2 du code de la propriété intellectuelle :
« IV. - Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux actes réalisés à des fins d'interopérabilité, de recherche, de sécurité informatique, de protection de la vie privée, ou pour l'usage licite de l'oeuvre ou de l'objet protégé. »
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. Cet amendement reprend exactement la rédaction de l'amendement n° 215, puisque l'architecture de ce projet de loi répète les mêmes interdictions au gré de la déclinaison des droits ou des procédures. Nous prenons donc les mêmes précautions.
M. le président. L'amendement n° 161, présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans le IV du texte proposé par cet article pour l'article L. 335-3-2 du code de la propriété intellectuelle, après les mots :
d'interopérabilité ou de sécurité informatique,
insérer les mots :
d'usage licite ou de protection de la vie privée
La parole est à M. Ivan Renar.
M. Ivan Renar. Cet amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. Les amendements nos 215, 160, 216 et 161 visent, on l'a dit, à élargir considérablement le champ des motifs permettant légalement aux utilisateurs d'altérer, de neutraliser ou de supprimer les mesures techniques protégeant les droits d'auteur.
Bien que les préoccupations sous-tendant ces amendements soient légitimes, les dispositifs présentés risquent, en raison de l'imprécision de leurs contours, de vider de leur sens les nouveaux articles du code de la propriété intellectuelle.
C'est la raison pour laquelle, sous réserve de l'adoption des modifications proposées au travers de l'amendement n° 23, la commission préfère maintenir la rédaction actuelle de l'article 13 et émet un avis défavorable sur les quatre amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 215.
En ce qui concerne l'amendement n° 23, la rédaction très large adoptée par l'Assemblée nationale n'était pas suffisamment précise. On pouvait craindre qu'elle ne permette tout contournement au prétexte de l'interopérabilité, au mépris des intérêts de l'auteur, réduisant ainsi à néant la portée des mesures techniques, et donc de ce projet de loi.
Pour autant, l'article 13 tend à sanctionner les personnes qui fournissent des moyens destinés à porter atteinte aux mesures techniques. Or lire une oeuvre sur un autre lecteur que celui qui a été prévu par le fournisseur de mesures techniques, dans le respect des utilisations autorisées par les titulaires de droits, n'est pas porter atteinte à la mesure technique et ne tombe donc pas sous le coup des dispositions de l'article si le droit d'auteur est respecté.
En d'autres termes, l'interopérabilité, dans ces conditions, n'est pas un contournement. Le juge devra en tenir compte dans l'interprétation stricte du texte qu'il devra faire, s'agissant de droit pénal, et permettre ainsi l'interopérabilité qui facilitera l'accès aux oeuvres dans le respect des droits des créateurs.
Dans la perspective de la commission mixte paritaire, une rédaction devra, me semble-t-il, être trouvée afin de préciser que n'est pas assimilable à une mesure de contournement technique un acte visant à lire sur un support une oeuvre légalement acquise, à condition que soient préservés l'ensemble des droits attachés à l'oeuvre.
C'est la raison pour laquelle je m'en remets à la sagesse du Sénat sur l'amendement n° 23.
En ce qui concerne les amendements nos 160, 216 et 161, le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote sur l'amendement n° 23.
M. Bruno Retailleau. Nous sommes ici au coeur du débat sur l'interopérabilité.
Monsieur le ministre, je considère qu'en acceptant la suppression en deux occurrences, à l'article 13, du terme « interopérabilité », comme le prévoit l'amendement, on affaiblira cette notion. Je puis même vous assurer que, aux yeux d'un juge qui aura à apprécier un certain nombre de circonstances difficiles par ailleurs, elle se trouvera anéantie.
Cela dénote une fois de plus, à mon sens, la conception qui est la vôtre de l'interopérabilité. Il n'est plus permis d'avoir des doutes sur ce point, d'autant que, à l'article 14, un autre amendement visera à supprimer le mot « interopérabilité » dans le texte du projet de loi.
Ne changeons donc pas de langage en fonction des interlocuteurs : on est pour ou contre l'interopérabilité, et si on est pour, on la garantit. Les choses doivent être précises et claires. Les mots ont un sens, en tout cas ils en auront un pour un juge.
Par conséquent, si vous n'entendez pas permettre à des systèmes de communiquer entre eux et aux gens d'accéder aux oeuvres quels que soient les logiciels et les supports employés, il faut le dire et, éventuellement, assumer cette position.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.
Mme Catherine Morin-Desailly. Dans la logique de ce que j'ai dit sur l'article, j'indique que les amendements nos 23 et 24 rectifié de la commission, ce dernier portant sur l'article 14, nous inquiètent nous aussi, puisqu'ils tendent à supprimer les références aux actes réalisés à des fins d'interopérabilité, qui n'étaient pas concernés par les sanctions prévues dans le texte qui nous a été transmis par l'Assemblée nationale.
Nous voterons donc contre ces amendements.
M. David Assouline. Quel est le résultat du vote, monsieur le président ?
M. le président. L'amendement n'a pas été adopté, monsieur Assouline. C'est tout ! Les voix « contre » étaient plus nombreuses que les voix « pour ».
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Cela vous étonne, monsieur Assouline ?
M. David Assouline. Oui, sinon je n'aurais pas posé cette question !
M. le président. Où est le problème ? Je vous garantis, monsieur Assouline, que le Sénat a rejeté cet amendement, cela par onze voix contre dix.
Je donne cet élément non pour me justifier, mais pour que vous soyez pleinement satisfait et que vous puissiez tenir vos statistiques ! Vous pourrez ainsi continuer à travailler dans la sérénité qui sied à cette assemblée !
Je mets aux voix l'amendement n° 160.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote sur l'amendement n° 216.
Mme Marie-Christine Blandin. Je me bornerai à redonner lecture des mesures que nous proposons au Sénat d'inscrire à l'article L. 335-3-2 du code de la propriété intellectuelle :
« Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux actes réalisés à des fins d'interopérabilité, de recherche, de sécurité informatique, de protection de la vie privée, ou pour l'usage licite » - j'insiste sur ce terme - « de l'oeuvre ou de l'objet protégé. »
Je précise que les amendements nos 216, 217 et 218 présentent la même rédaction.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote sur l'article 13.
Mme Catherine Morin-Desailly. Compte tenu du fait que nous avons obtenu satisfaction à propos de l'amendement n° 23, nous voterons bien sûr cet article.
M. le président. Je mets aux voix l'article 13.
(L'article 13 est adopté.)
Article 14
Après l'article L. 335-4 du même code, sont insérés deux articles L. 335-4-1 et L. 335-4-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 335-4-1. - I. - Est puni de 3 750 € d'amende, le fait de porter atteinte sciemment, à des fins autres que la recherche, à une mesure technique efficace telle que définie à l'article L. 331-5, afin d'altérer la protection d'une interprétation, d'un phonogramme, d'un vidéogramme ou d'un programme par un décodage, un décryptage ou toute autre intervention personnelle destinée à contourner, neutraliser ou supprimer un mécanisme de protection ou de contrôle, lorsque cette atteinte est réalisée par d'autres moyens que l'utilisation d'une application technologique, d'un dispositif ou d'un composant existant mentionné au II.
« II. - Est puni de six mois d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende, le fait de procurer ou proposer sciemment à autrui, directement ou indirectement, des moyens conçus ou spécialement adaptés pour porter atteinte à une mesure technique efficace telle que définie à l'article L. 331-5, par l'un des procédés suivants :
« 1° En fabriquant ou en important une application technologique, un dispositif ou un composant, à des fins autres que la recherche ;
« 2° En détenant en vue de la vente, du prêt ou de la location, en offrant à ces mêmes fins ou en mettant à disposition du public sous quelque forme que ce soit une application technologique, un dispositif ou un composant ;
« 3° En fournissant un service à cette fin ;
« 4° En incitant à l'usage ou en commandant, concevant, organisant, reproduisant, distribuant ou diffusant une publicité en faveur de l'un des procédés visés aux 1° à 3°.
« III. - Ces dispositions ne sont pas applicables aux actes réalisés à des fins d'interopérabilité ou de sécurité informatique, dans les limites des droits prévus par le présent code.
« Art. L. 335-4-2. - I. - Est puni de 3 750 € d'amende, le fait de supprimer ou de modifier, sciemment et à des fins autres que la recherche, tout élément d'information visé à l'article L. 331-10, par une intervention personnelle ne nécessitant pas l'usage d'une application technologique, d'un dispositif ou d'un composant existant, conçus ou spécialement adaptés à cette fin, dans le but de porter atteinte à un droit voisin du droit d'auteur, de dissimuler ou de faciliter une telle atteinte.
« II. - Est puni de six mois d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende, le fait de procurer ou proposer sciemment à autrui, directement ou indirectement, des moyens conçus ou spécialement adaptés pour supprimer ou modifier, même partiellement, un élément d'information visé à l'article L. 331-10, dans le but de porter atteinte à un droit voisin du droit d'auteur, de dissimuler ou de faciliter une telle atteinte, par l'un des procédés suivants :
« 1° En fabriquant ou en important une application technologique, un dispositif ou un composant, à des fins autres que la recherche ;
« 2° En détenant en vue de la vente, du prêt ou de la location, en offrant à ces mêmes fins ou en mettant à disposition du public sous quelque forme que ce soit une application technologique, un dispositif ou un composant ;
« 3° En fournissant un service à cette fin ;
« 4° En incitant à l'usage ou en commandant, concevant, organisant, reproduisant, distribuant ou diffusant une publicité en faveur de l'un des procédés visés aux 1° à 3°.
« III. - Est puni de six mois d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende, le fait, sciemment, d'importer, de distribuer, de mettre à disposition du public sous quelque forme que ce soit ou de communiquer au public, directement ou indirectement, une interprétation, un phonogramme, un vidéogramme ou un programme, dont un élément d'information mentionné à l'article L. 331-10 a été supprimé ou modifié dans le but de porter atteinte à un droit voisin du droit d'auteur, de dissimuler ou de faciliter une telle atteinte.
« IV. - Ces dispositions ne sont pas applicables aux actes réalisés à des fins d'interopérabilité ou de sécurité informatique, dans les limites des droits prévus par le présent code. »
M. le président. L'amendement n° 179, présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
I - Au début du premier alinéa du II du texte proposé par cet article pour l'article L. 335-4-1 du code de la propriété intellectuelle, supprimer les mots :
de six mois d'emprisonnement et
II - Procéder à la même suppression au début du premier alinéa du II et au début du III du texte proposé par cet article pour l'article L. 335-4-2 du code de la propriété intellectuelle.
La parole est à M. Ivan Renar.
M. Ivan Renar. Je considère que les amendements nos 179, 162 et 163, que notre groupe présente à cet article, sont défendus.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 179 ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 217, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le III du texte proposé par cet article pour l'article L. 335-4-1 du code de la propriété intellectuelle :
« III. - Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux actes réalisés à des fins d'interopérabilité, de recherche, de sécurité informatique, de protection de la vie privée, ou pour l'usage licite de l'oeuvre ou de l'objet protégé. »
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. Les amendements nos 217 et 218 ont été défendus.
M. le président. L'amendement n° 24 rectifié, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. Dans le III du texte proposé par cet article pour l'article L. 335-4-1 du code de la propriété intellectuelle, après les mots :
à des fins
supprimer les mots :
d'interopérabilité ou
II. Dans le IV du texte proposé par cet article pour l'article L. 335-4-2 du même code, après les mots :
à des fins
supprimer les mots :
d'interopérabilité ou
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur. Nous retirons cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 24 rectifié est retiré.
L'amendement n° 162, présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans le III du texte proposé par cet article pour l'article L. 335-4-1 du code de la propriété intellectuelle, après les mots :
d'interopérabilité ou de sécurité informatique,
insérer les mots :
d'usage licite ou de protection de la vie privée
Cet amendement a été défendu.
L'amendement n° 218, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le IV du texte proposé par cet article pour l'article L. 335-4-2 du code de la propriété intellectuelle :
« IV - Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux actes réalisés à des fins d'interopérabilité, de recherche, de sécurité informatique, de protection de la vie privée, ou pour l'usage licite de l'oeuvre ou de l'objet protégé. »
Cet amendement a été défendu.
L'amendement n° 163, présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans le IV du texte proposé par cet article pour l'article L. 335-4-2 du code de la propriété intellectuelle, après les mots :
d'interopérabilité ou de sécurité informatique,
insérer les mots :
d'usage licite ou de protection de la vie privée
Cet amendement a été défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. La commission est défavorable à tous ces amendements. (Rires sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote sur l'article 14.
M. Bruno Retailleau. Compte tenu du retrait de l'amendement n° 24 rectifié, nous voterons bien entendu cet article.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.
Mme Catherine Morin-Desailly. Les explications que j'ai données à propos de l'article 13 valent pour cet article.
M. le président. Je mets aux voix l'article 14.
(L'article 14 est adopté.)
Article 14 bis
L'article L. 335-5 du même code devient l'article L. 335-5-1 et l'article L. 335-5 est ainsi rétabli :
« Art. L. 335-5. - Les dispositions du présent chapitre ne sont pas applicables à la reproduction non autorisée, à des fins personnelles, d'une oeuvre, d'une interprétation, d'un phonogramme, d'un vidéogramme ou d'un programme mis à disposition au moyen d'un service de communication au public en ligne.
« Elles ne s'appliquent pas non plus à la communication au public, à des fins non commerciales, d'une oeuvre, d'une interprétation, d'un phonogramme, d'un vidéogramme ou d'un programme au moyen d'un service de communication au public en ligne, lorsqu'elle résulte automatiquement et à titre accessoire de leur reproduction dans les conditions visées au premier alinéa.
« Les actes visés aux deux alinéas précédents constituent des contraventions prévues et réprimées par décret en Conseil d'État.»
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 25 rectifié, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Après l'article L. 335-10 du même code, il est inséré un article L. 335-11 ainsi rédigé :
« Art. L. 335-11 - Les dispositions du présent chapitre ne sont pas applicables à la reproduction non autorisée, à des fins personnelles, d'une oeuvre, d'une interprétation, d'un phonogramme, d'un vidéogramme ou d'un programme protégés par un droit d'auteur ou un droit voisin et mis à disposition au moyen d'un logiciel d'échange de pair à pair.
« Elles ne s'appliquent pas non plus à la communication au public, à des fins non commerciales, d'une oeuvre, d'une interprétation, d'un phonogramme, d'un vidéogramme ou d'un programme au moyen d'un service de communication au public en ligne, lorsqu'elle résulte automatiquement et à titre accessoire de leur reproduction dans les conditions visées au premier alinéa.
« Les actes visés aux deux alinéas précédents constituent des contraventions prévues et réprimées par décret en Conseil d'État. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur. La rédaction présentée à l'article 14 bis pour le premier alinéa de l'article L. 335-5 du code de la propriété intellectuelle est trop large. L'adopter en l'état reviendrait à ériger en contravention non seulement le téléchargement, que l'on appelle download, d'une oeuvre protégée, mais également toute copie opérée sur un site et relevant sans conteste de l'exception pour copie privée.
L'adoption de cette rédaction aurait pour effet de délégaliser toute copie réalisée à partir d'une mise en ligne. Le présent amendement a donc pour objet de ne maintenir dans le champ de la contravention que la copie d'une oeuvre protégée opérée sur un réseau de pair à pair.
M. le président. L'amendement n° 182, présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour l'article L. 335-5 du code de la propriété intellectuelle :
« Art. L. 335-5. - Les dispositions du présent chapitre ne sont pas applicables à la communication au public, à des fins non commerciales, d'une oeuvre, d'une interprétation, d'un phonogramme, d'un vidéogramme ou d'un programme au moyen d'un service de communication au public en ligne, lorsqu'elle résulte automatiquement et à titre accessoire de leur reproduction à des fins d'usage privé.
« Les actes visés à l'alinéa précédent constituent des contraventions prévues et réprimées par décret en Conseil d'État. »
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Je serai très brève, puisque nos travaux semblent s'accélérer...
Cet amendement tend à supprimer l'alinéa de la rédaction présentée pour l'article L. 335-5 du code de la propriété intellectuelle qui transforme, de notre point de vue, tous les internautes en contrevenants s'agissant de la copie privée réalisée à partir d'Internet. Ce qui fonde pour nous la copie privée, c'est bien l'usage qui en est fait, personnel et familial, et non pas le moyen utilisé pour la réaliser.
Il restait néanmoins à préciser que la réalisation d'une copie privée à l'aide d'un logiciel mettant à disposition l'oeuvre pendant le téléchargement constitue un acte illégal. C'est ce que nous proposons ici de faire.
M. le président. L'amendement n° 56, présenté par Mme Morin-Desailly, M. Nogrix et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
I. Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 335-5 du code de la propriété intellectuelle après les mots :
à des fins personnelles,
insérer les mots :
par une personne physique,
II. Dans le même alinéa, après le mot :
programme
insérer les mots :
protégés par le droit d'auteur ou un droit voisin
III. Dans le même alinéa, remplacer les mots :
d'un service de communication au public en ligne
par les mots :
d'un logiciel d'échanges de pair à pair
IV. Dans le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 335-5 du code de la propriété intellectuelle, remplacer les mots :
d'un service de communication au public en ligne
par les mots :
d'un logiciel d'échanges de pair à pair
IV. Dans le même alinéa, supprimer les mots :
automatiquement et
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. Cet amendement a pour objet de préciser le périmètre du champ contraventionnel de l'article L. 335-5 du code de la propriété intellectuelle.
Cet article vise donc non pas les seuls logiciels d'échange de pair à pair, mais la quasi-totalité des services proposés sur Internet, et fait courir un risque pénal à l'ensemble des utilisateurs de l'internet qui téléchargent, par exemple, des fichiers à partir de blogs ou de sites officiels.
Au premier alinéa sont visés les téléchargements effectués à partir d'un service de communication au public en ligne. Le champ d'application de cet alinéa est extrêmement large et inclut l'ensemble des services du web, hors radiodiffusion et correspondance privée : sites, blogs, newsgroups et autres services similaires.
La reproduction en cause concerne des oeuvres pour lesquelles les autorisations de mise à disposition n'auraient pas été obtenues ou pour lesquelles aucune autorisation de reproduction n'est délivrée.
En d'autres termes, pour se prémunir contre un risque pénal, l'internaute doit être en mesure d'apprécier la licéité de la mise à disposition de l'oeuvre qu'il entend copier. Or ce contrôle est hors de portée des internautes, car il suppose une connaissance du titulaire de droits sur chaque oeuvre « disponible » ou une mention de l'autorisation de copie.
Les conclusions du rapporteur de la commission des affaires culturelles du Sénat vont dans ce sens et confirment l'existence de ce risque.
Dans le second alinéa, le texte incrimine les actes de mise à disposition illicites au moyen des logiciels d'échange pair à pair réalisés par des particuliers. Ce nouveau dispositif précise que les mises à dispositions sont liées aux téléchargements visés à l'alinéa premier de manière automatique et accessoire.
Une certaine interprétation du terme « automatique » pourrait conduire à exclure les actes qui ne reposent pas sur une simultanéité de la mise à disposition avec la reproduction par téléchargement. Dès lors, tous les utilisateurs de peer to peer pourraient ne pas bénéficier de la loi pénale plus douce, mais relever du régime de la contrefaçon.
Concrètement, il s'agit de viser les cas où l'internaute a stocké des fichiers dans le dossier partagé après les avoir téléchargés et met en oeuvre le logiciel de peer to peer dans sa seule fonction upload. Si, avec certains logiciels, téléchargement et mise à disposition sont intimement liés, il existe des cas où des logiciels de peer to peer offrent au partage des fichiers sans qu'un acte de téléchargement soit lié.
Il paraît donc nécessaire de faire en sorte que l'ensemble des cas d'utilisation des logiciels d'échanges pair à pair mis en oeuvre par les particuliers soit couvert à l'alinéa 2 et que celui-ci ne soit pas limité à certaines technologies.
C'est pourquoi nous pensons que, plutôt que de mentionner le terme « automatique », il est préférable de se référer de façon générale à la mise à disposition via l'utilisation d'un logiciel d'échange pair à pair, comme à l'alinéa précédent.
Le caractère « accessoire » de la mise à disposition, en revanche, devrait être maintenu pour éviter des utilisations manifestement abusives : numérisation de contenus dans le but de mise à disposition hors download par injection dans le réseau.
M. le président. L'amendement n° 137, présenté par M. Karoutchi, est ainsi libellé :
Remplacer le dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 335-5 du code de la propriété intellectuelle par cinq alinéas ainsi rédigés :
« Les actes visés aux deux alinéas précédents sont constatés par les agents mentionnés à l'article L. 331-2. Ces derniers peuvent à tout moment demander à la personne dont l'activité est d'offrir l'accès à des services de communication au public en ligne, au moyen duquel ont été commis ces actes, de lui communiquer une référence correspondant au titulaire de l'accès en cause.
« Cet agent peut alors lui demander son concours pour transmettre un message de mise en demeure à la personne téléchargeant illicitement, par voie électronique ou par lettre recommandée.
« Lorsqu'un agent mentionné à l'article L. 331-2 transmet au collège des médiateurs un procès-verbal constatant la réalité de ces actes, le collège des médiateurs peut prononcer des sanctions pécuniaires dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État. Le montant de l'amende prononcée ne peut excéder 300 €.
« En cas d'infraction réitérée dans les deux années à compter de la date à laquelle la sanction précédemment prononcée est devenue définitive, le montant de l'amende est porté à 1 000 €.
« Le montant de l'amende prononcée peut être porté, même pour la première infraction à 15 000 € si l'auteur du manquement est une personne morale. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 101, présenté par M. Longuet, est ainsi libellé :
Au début du dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 335-5 du code de la propriété intellectuelle, ajouter les mots :
Sans préjudice de l'application de l'article additionnel après l'article L. 335-10.
La parole est à M. Gérard Longuet.
M. Gérard Longuet. Sur le fond, cet amendement, qui est une coordination avec l'amendement n° 102 tendant à insérer un article additionnel après l'article 14 bis, sera défendu en même temps que celui-ci.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. L'acte de téléchargement de fichiers ne peut pas être assimilé à de la copie privée. Il convient, par conséquent, de ne pas modifier les dispositions du présent texte sur ce point précis. C'est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 182.
L'amendement n° 56 nous semble satisfait par l'amendement n° 25 rectifié de la commission, qui a pour objet de ne maintenir dans le champ de la contravention que la copie d'une oeuvre protégée opérée sur un réseau de pair à pair. Je vous propose donc, madame, de retirer votre amendement.
L'amendement n° 101 renvoie à un article additionnel, dont l'insertion sera proposée tout à l'heure, qui a pour objet d'instaurer des sanctions aggravées pour les téléchargements massifs. Or, pour les raisons que j'indiquais en préambule à cette discussion, la commission a souhaité maintenir le régime des sanctions adopté par l'Assemblée nationale, qui lui paraît à la fois juste et équilibré. Elle n'a donc pas voulu donner suite, qu'il s'agisse des suppressions ou, éventuellement, des aggravations de sanctions. C'est la raison pour laquelle, préférant en rester là, elle n'est pas favorable à cet amendement, pas plus qu'elle ne l'est à d'autres du même ordre.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 25 rectifié.
Il émet en revanche un avis défavorable sur l'amendement n° 182.
Il en va de même pour l'amendement n° 56, madame, l'amendement n° 25 rectifié du rapporteur, auquel le Gouvernement est favorable, me semblant répondre à votre préoccupation, ainsi que vient de l'exposer M. le rapporteur.
Quant à l'amendement n° 101 présenté par M. Longuet, il aborde un point sur lequel j'aurai bien évidemment l'occasion de revenir plus amplement dans la suite de la discussion. À ce stade de la discussion, et par mesure de cohérence, j'émets un avis défavorable.
M. le président. Madame Morin-Desailly, l'amendement n° 56 est-il maintenu ?
Mme Catherine Morin-Desailly. Non, je le retire, monsieur le président.
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Merci, madame !
M. le président. L'amendement n° 56 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 101.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 14 bis, modifié.
(L'article 14 bis est adopté.)
Articles additionnels après l'article 14 bis
M. le président. L'amendement n° 105, présenté par M. Longuet, est ainsi libellé :
Après l'article 14 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 331-2 du code de la propriété intellectuelle est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Lorsqu'elles sont effectuées par des dispositifs, logiciels ou tout autre moyen informatique ou électronique ayant fait l'objet d'une homologation par arrêté conjoint du ministre de la culture et du ministre de l'intérieur, les constatations relatives aux reproductions ou représentations illicites au moyen d'un service de communication au public en ligne font foi jusqu'à preuve du contraire.
« Pour l'application des dispositions relatives à l'amende forfaitaire, le lieu du traitement automatisé des informations nominatives concernant les constatations effectuées par les appareils de contrôle automatisé est considéré comme le lieu de constatation de l'infraction. »
La parole est à M. Gérard Longuet.
M. Gérard Longuet. Le problème soulevé par les amendements que je vais avoir l'honneur de défendre devant la Haute Assemblée est celui de la réalité de la sanction de la copie illégale par un particulier.
L'amendement n° 105 a pour objet de renforcer les capacités de contrôle en faisant en sorte que les systèmes de contrôle bénéficient d'un privilège de bonne foi et fassent autorité jusqu'à ce que l'on prouve qu'ils n'ont pas, en effet, identifié un abus de copie. Par ailleurs, pour des raisons de commodité et de simplicité, il me semble que le tribunal compétent pour constater l'infraction doit être le tribunal du siège où se trouve implanté le système de contrôle.
L'objet de cet amendement - comme celui de l'amendement suivant, n° 102, et de l'amendement n° 101, qui n'a pas été adopté ; mais il ne portait pas sur l'essentiel - est donc de donner une réalité au contrôle contraventionnel et, le cas échéant, délictuel des infractions au droit de propriété.
Je suis assez attaché à l'ensemble de ces amendements, ayant, dans un passé lointain, présenté, au nom du Gouvernement, un projet de loi relatif à la répression de la contrefaçon. J'insisterai donc très fortement auprès de notre assemblée : sans doute faut-il considérer les usages, sans doute ne faut-il pas mettre sur le même plan le contrefacteur professionnel et celui qui, à un moment ou un autre, par convivialité, par esprit d'amitié ou de solidarité familiale, peut élargir au-delà de son droit personnel le droit de copie. Mais, si nous ne nous donnons pas les moyens d'assurer une effectivité du contrôle contraventionnel et délictuel de la copie peer to peer des particuliers, nous découragerons l'investissement et dans ce secteur de la création audiovisuelle, et dans le secteur de la création musicale.
Je suis pour ma part persuadé, monsieur le ministre, que le niveau que vous proposez, et que l'Assemblée nationale a retenu, est parfaitement insuffisant pour sanctionner la copie systématique.
Comme l'indiquait mon collègue Roger Karoutchi dans son amendement n° 137, que je n'ai pas pu défendre puisque je n'en étais pas cosignataire - et j'en profite pour exposer l'amendement de fond qui suivra, l'amendement n° 102, ce qui nous permettra de gagner du temps -, le niveau de contravention proposé, ajouté à la faible probabilité statistique de la réalité de cette contravention, encourage très nettement l'usager à une totale indifférence à l'égard du contrôle du droit de propriété, dont pourtant, monsieur le ministre, nous avons tous reconnu la nécessité pour soutenir la création artistique.
Si nous en restions au seul niveau proposé par l'Assemblée nationale, nous serions, je crois, dans une sorte d'aimable hypocrisie : certes, un droit serait reconnu, mais sa sanction ne correspondrait en rien, lorsque nous avons affaire non pas à de dangereux récidivistes, la formule serait excessive, mais à des personnes qui contournent systématiquement le droit de propriété, à un risque délictuel ou contraventionnel, puisqu'elle serait très inférieure à ce que coûte le paiement effectif d'un droit d'usage de la musique et de la télévision.
C'est donc, monsieur le ministre - et je vous remercie d'être attentif à mon propos -, à une véritable organisation de l'indifférence à l'égard du droit de propriété, je pèse mes termes, que nous sommes en train de procéder. C'est la raison pour laquelle j'attends avec beaucoup d'intérêt votre avis sur l'amendement n° 105 mais, surtout, sur l'amendement n° 102, que nous examinerons immédiatement après.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. Nous l'indiquions tout à l'heure, l'amendement n° 105 vise à instaurer un traitement automatisé des informations nominatives relatives aux infractions constatées.
Il ne nous paraît pas apporter toutes les garanties nécessaires, en termes de procédure pénale, quant à l'identification des auteurs d'infractions. C'est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Le Gouvernement est très attaché à la mise en oeuvre effective du régime de contravention : c'est évidemment l'un des points d'équilibre du texte, et je me réjouis de constater que nous partageons cette préoccupation.
Pour autant, je l'ai indiqué à l'Assemblée nationale, il ne s'agit pas de mettre en oeuvre un régime massif et systématique, comme pour le code de la route : il s'agit de faire en sorte de différencier les responsabilités, notamment de viser principalement ceux qui sont, par exemple, les éditeurs de logiciels manifestement destinés à contourner les mesures de protection.
L'objet de votre amendement, monsieur le sénateur, est de préciser la force probante des constats effectués grâce à des logiciels. Sur Internet, l'infraction peut être constatée à distance, et il n'y a alors pas d'ambiguïté sur le lieu de constatation. Votre préoccupation me paraît donc satisfaite en l'état actuel du droit.
Quant aux autres questions que vous avez évoquées, j'y répondrai tout à l'heure lorsque je m'exprimerai sur l'amendement n° 102.
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. Compte tenu des apaisements apportés par le ministre, je retire l'amendement n° 105.
M. le président. L'amendement n° 105 est retiré.
L'amendement n° 102, présenté par M. Longuet, est ainsi libellé :
Après l'article 14 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 335-10 du code de la propriété intellectuelle, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Est puni d'une amende de 3 750 euros le fait de procéder, sans autorisation, à la reproduction à des fins personnelles d'oeuvres ou d'objets protégés en application des livres I et II du présent code mis à disposition du public au moyen d'un logiciel d'échanges de pair à pair, ou à leur communication au public par ce moyen, lorsqu'elle résulte automatiquement et à titre accessoire de leur reproduction dans les conditions précitées, dès lors que les faits précités portent au moins sur 20 oeuvres audiovisuelles ou sur 200 oeuvres ou objets protégés quelle qu'en soit la nature. »
Cet amendement a déjà été défendu.
Le sous-amendement n° 273 rectifié, présenté par MM. Karoutchi, Trucy et Grignon, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par l'amendement n° 102 pour l'article additionnel créé après l'article L. 335-10 du code de la propriété intellectuelle, remplacer les mots :
sur 20 oeuvres audiovisuelles ou sur 200 oeuvres ou objets protégés
par les mots :
sur 25 oeuvres audiovisuelles ou sur 250 oeuvres ou objets protégés
La parole est à M. Francis Grignon.
M. Francis Grignon. Ce sous-amendement vise à introduire un niveau de sanction adapté, en l'occurrence une peine délictuelle minimale, pour les pratiques de téléchargement ou de mise à disposition en pair à pair qui portent sur un nombre substantiel d'oeuvres ou d'objets protégés. Ce dispositif permet aussi de préserver le droit à réparation des victimes.
L'augmentation des seuils, initialement fixés à 20 oeuvres audiovisuelles et à 200 oeuvres ou objets protégés, tend à souligner que ce dispositif concerne spécifiquement des cas de méconnaissance substantielle et répétée de la propriété intellectuelle dépassant clairement la situation occasionnelle, qui, seule, peut justifier de la mansuétude d'une simple contravention.
S'agissant des films cinématographiques, l'habitude illicite ainsi caractérisée tient compte de la fragilité de leur exploitation à l'intérieur de la chronologie des médias.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. On l'aura compris, l'amendement n° 102 tend à alourdir les sanctions auxquelles s'exposerait un internaute qui téléchargerait illégalement un nombre important d'oeuvres protégées. On peut donc s'interroger sur les conséquences pratiques de la mise en oeuvre de cette disposition.
Tout d'abord, l'amende envisagée, qui serait de 3 750 euros, nous ramènerait dans le champ des délits, alors que le projet de loi soustrait précisément, sous certaines conditions, les actes de téléchargement au champ de la contrefaçon pour les requalifier en simples contraventions. L'adoption de cet amendement ne faciliterait pas la compréhension par l'internaute des peines auxquelles il s'expose. Or, la commission a justement été très attentive à ce que l'internaute puisse comprendre à la fois les risques qu'il encourt et les peines éventuelles auxquelles il s'expose s'il télécharge illégalement.
Ensuite, le ministre nous a indiqué que la procédure envisagée se proposait de surveiller les oeuvres et non pas les consommateurs. On peut donc s'interroger sur la façon dont seraient recueillies et conservées les informations qui permettraient de constater un grand nombre de téléchargements massifs résultant d'une accumulation d'actes de téléchargement.
Ces considérations ont conduit la commission à rester fidèle à la voie équilibrée qu'elle a approuvée et à émettre un avis défavorable sur l'amendement n° 102.
En ce qui concerne le sous-amendement n° 273 rectifié, pour les raisons qui ont déjà été exprimées, la commission émet également un avis défavorable.
Toutefois, je saisis cette occasion pour demander à M. le ministre de nous préciser la façon dont le Gouvernement envisage le problème des sanctions relatives au téléchargement, car un grand nombre d'amendements ont été déposés sur ce sujet.
Si la réponse du Gouvernement est suffisamment précise, elle devrait permettre d'apaiser de nombreuses inquiétudes.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Je rejoins l'idée de votre amendement, monsieur Longuet, qui s'inscrit parfaitement dans la logique de la graduation des sanctions à l'égard des internautes que le Gouvernement a voulu mettre en place. Il est en effet essentiel que les sanctions soient à la fois proportionnées et dissuasives.
Pour autant, en raison de l'évolution rapide des technologies, il paraît difficile de figer dans la loi des seuils qui déclencheront non seulement des sanctions plus lourdes, mais aussi des procédures plus intrusives.
Afin d'éviter, comme vous le craignez à juste titre, que les sanctions ne soient trop faibles, le Gouvernement créera, par décret, une contravention d'un niveau plus élevé lorsque les quantités d'oeuvres téléchargées ou mises à disposition dépasseront certains seuils, ce qui permettra une mise en oeuvre plus souple.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 102 et, pour les mêmes raisons, sur le sous-amendement n° 273 rectifié.
Par ailleurs, pour répondre à la demande de M. le rapporteur, je vais tenter de clarifier le système des sanctions prévues par le Gouvernement.
Le téléchargement est défini comme la reproduction illicite d'oeuvres ou de supports de droits voisins, telle qu'elle est entendue habituellement dans le code de la propriété intellectuelle, avec une précision supplémentaire relative au vecteur utilisé à cette fin, à savoir un service de communication au public en ligne.
Ces infractions nouvelles seront constatées par la surveillance des oeuvres exercée sur le web par les services de police et de gendarmerie. C'est le fait de télécharger et, le cas échéant, de laisser ce téléchargement à la disposition de tiers qui sera réprimé.
Je le répète, ce ne sont pas les internautes qui feront l'objet d'une surveillance, ce sont les oeuvres. Or, ce sont les auteurs qui décident du régime de diffusion de leurs créations et de leurs oeuvres. Par conséquent, les oeuvres sont en quelque sorte codifiées, d'où l'idée de répertoire pour clarifier les enjeux : personne ne pourra ignorer quelle est la codification, quels sont les droits attachés à une oeuvre.
D'ailleurs, c'est l'impossibilité pour l'internaute de savoir exactement quel était le régime de protection ou non d'une oeuvre, l'absence de notoriété, qui a légitimé certaines décisions de justice rendues récemment.
De nombreuses précautions sont prises, à la fois pour être efficace et pour qu'il n'y ait pas d'intrusion dans la vie privée, afin que, une fois pour toutes, il soit clair que protéger le droit d'auteur en mettant en oeuvre des sanctions proportionnées ne porte pas atteinte à la liberté de communication et aux échanges privés. Ce n'est pas le même sujet, ce n'est pas la même responsabilité.
J'en viens maintenant à la compétence des services de l'État, qui est un point très important.
La recherche des infractions consistera à surveiller les oeuvres protégées, en les recherchant par mot clé sur les logiciels d'échange proposés au public, comme n'importe quel internaute peut le faire.
Cette surveillance sera exercée par les agents des services enquêteurs - police ou gendarmerie - qui pourront être saisis par les agents agréés et assermentés désignés par le Centre national de la cinématographie, les organismes professionnels d'auteurs ou par les sociétés de perception et de répartition des droits.
Ces constatations ne seront pas nominatives : l'agent relèvera des numéros d'adresse Internet, qui peuvent changer. La surveillance des échanges illégaux est une surveillance des oeuvres et non pas - j'y insiste - une surveillance des internautes. Cette démarche n'entraîne aucune surveillance des communications privées et préserve l'anonymat des internautes.
Il conviendra ensuite de procéder à une enquête. Avec l'autorisation du procureur de la République, le service enquêteur procèdera à l'identification du titulaire d'accès au moyen d'une réquisition adressée au fournisseur d'accès à Internet à partir de l'adresse Internet et de l'heure de la constatation. Nous reviendrons, dans la suite de la discussion, sur un certain nombre d'éléments qui constitueront des garanties de l'effectivité de la démarche.
Enfin, la condamnation ou la relaxe est décidée par un juge, éventuellement un juge de proximité. La contravention sera établie sur le constat d'un téléchargement ou du partage d'une ou plusieurs oeuvres.
Enfin, - autre point très important - avec les différents ministères concernés, sur instruction très précise du Premier ministre, nous constituons des équipes de fonctionnaires de l'État qui seront spécialisées dans la recherche de ces infractions.
J'espère avoir clarifié les différentes dispositions que nous mettons en place. Nous avons le souci de l'effectivité ; là aussi, c'est le point d'équilibre qui est le plus important. Il ne faut pas provoquer des peurs inutiles, mais il convient de mettre au point un dispositif qui fasse que chacun assume ses responsabilités.
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 273 rectifié.
M. Gérard Longuet. Je voterai le sous-amendement n° 273 rectifié, qui a le mérite de montrer que nous ne voulons frapper que ceux qui font un commerce régulier ou qui ont en permanence ce type de comportement. C'est la valeur symbolique de cette consommation illégale que nous souhaitons souligner.
Monsieur le ministre, j'ai écouté votre intervention et elle m'a, pour l'essentiel, convaincu. La volonté du Gouvernement est forte. Mais je voudrais que notre Haute Assemblée envoie un signal aux professionnels du cinéma et de l'audiovisuel qui ont fixé des règles pertinentes d'équilibre entre les différents modes de diffusion.
L'investissement cinématographique, en particulier, est aujourd'hui un investissement extrêmement lourd, dont la diffusion repose sur des canaux qui évoluent et qui sont en concurrence.
La profession a considéré, en bonne intelligence, que l'exploitant en salle qui prenait le risque d'un investissement lourd pouvait bénéficier d'une priorité, et la guerre, qui aurait pu être meurtrière, entre la diffusion en salle et la diffusion par un système audiovisuel, qu'il soit général, adressé ou crypté, et donc payant, n'a pas eu lieu.
Après des années de conflits, de discussions et de négociations, les professionnels ont abouti à une organisation qui permet à celui dont l'investissement est lourd d'équilibrer son budget.
Ces professionnels assurent une animation sur l'ensemble du territoire national. Le cinéma est un lieu de rencontres, de convivialité, d'échanges. C'est une façon pour de nombreux jeunes de devenir des cinéphiles, alors que leur intention première était d'abord de ne pas rester chez eux et d'être avec d'autres adolescents de leur âge.
Cela n'interdit pas aujourd'hui la diffusion des films à un public plus large, qui reste chez lui et qui est servi à domicile, par les différentes formes d'accès télévisé. Je ne souhaite pas qu'un détournement des facilités qu'offre Internet aboutisse à perturber cet équilibre. C'est la raison pour laquelle votre volonté me rassure, monsieur le ministre.
Un vote qui rappellerait le caractère contraventionnel fort ou délictuel - 3 750 euros constitue la limite du délit - exprimerait la volonté de ne pas remettre en cause un équilibre qui repose sur le courage des uns, celui d'investir, et qui pourrait être détruit par la malice des autres.
Je tiens à ce que l'on se prononce cet amendement, même s'il n'est pas adopté par la Haute Assemblée, car je comprends, monsieur le ministre, que vos intentions sont semblables aux miennes, mais pour être certain de vous soutenir dans cet effort, débattre de ce sujet et exprimer une conviction n'est pas totalement inutile.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 273 rectifié.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante-cinq, est reprise à vingt-deux heures.)
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi relatif au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information.
Articles additionnels après l'article 14 bis (suite)
M. le président. Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'examen du dernier amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 14 bis.
L'amendement n° 103, présenté par MM. Dufaut et Longuet, est ainsi libellé :
Après l'article 14 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L 335-10 du code de la propriété intellectuelle, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Le titulaire d'un accès à des services de communication au public en ligne doit veiller à ce que cet accès ne soit pas utilisé à des fins de reproduction ou de représentation d'oeuvres de l'esprit sans l'autorisation des titulaires des droits prévus aux livres I et II, lorsqu'elle est requise, en mettant en oeuvre les moyens de sécurisation qui lui sont proposés par le fournisseur de cet accès. »
La parole est à M. Alain Dufaut.
M. Alain Dufaut. Nous avons été nombreux, dans la discussion générale, à nous interroger sur la fiabilité des contrôles et sur l'effectivité des sanctions.
Cet amendement n° 103 vise à répondre pour partie au souci d'effectivité de la sanction, souci qui a également été évoqué tout à l'heure par M. le ministre, en limitant les procédures judiciaires sans fin.
En effet, afin de rendre applicables les sanctions contraventionnelles, il paraît nécessaire de responsabiliser davantage le titulaire de l'abonnement. Cette responsabilisation éviterait d'alourdir la procédure, avec des enquêtes parfois intrusives pour identifier l'utilisateur premier responsable, utilisateur qui peut bien évidemment être un tiers.
L'abonné devrait notamment s'assurer que son abonnement n'est pas utilisé à des fins de partage illicite, en utilisant les outils de sécurisation proposés par les fournisseurs d'accès à Internet.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. Avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Je tiens, dans cette intervention, à préciser la façon dont le groupe socialiste a abordé l'ensemble des articles qui prévoient les sanctions applicables à toutes les pratiques et téléchargements estimés illicites.
Comme nous l'avons dit dans la discussion générale, nous ne portons pas la responsabilité de ce projet de loi, ni du dérapage qui s'est produit lorsque, comme seul rempart contre le téléchargement illicite, le Gouvernement s'est présenté en première lecture devant l'Assemblée nationale avec une transposition de la directive et un dispositif répressif. C'était sa façon d'empêcher l'expansion d'un phénomène qui se déployait depuis deux ans. (M. le ministre manifeste son agacement.) Ne vous énervez pas, monsieur le ministre. Je vous l'ai déjà dit trois fois et, si je sens que cela vous irrite, je vous le répéterai encore souvent ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Jacques Legendre. Cela rime à quoi ?
M. David Assouline. Vous aviez alors prévu des peines de prison. Mais vous êtes revenu sur cette forme de sanction, à la demande du Président de la République, qui a estimé que l'on ne pouvait pas parvenir à un équilibre de cette façon.
Néanmoins, le feu était allumé. Depuis, on constate un certain clivage dans le débat. Il est devenu difficile de s'accorder, de manière responsable, sur des dispositions visant à unir le droit à la culture et le droit de la culture, les internautes et les créateurs, dans la recherche de l'intérêt commun.
Le dispositif que vous prévoyez est incohérent. Nous sommes bien entendu opposés au téléchargement illégal, mais à la condition qu'il soit combattu dans un projet de loi destiné à protéger le droit d'auteur. À l'ère du numérique, il aurait fallu répondre aux questions qui se posent par la répression, certes, mais aussi par la recherche d'un consensus, d'une politique qui permette réellement les offres légales, gratuites ou pas. Il aurait fallu, par la prévention, par des initiatives du Gouvernement, y compris en direction de l'école, expliquer à tous les jeunes que ce comportement, qui leur apparaît tout à fait normal, est illicite. Bref, il aurait fallu taper au plus près du problème.
Nous ne sommes pas intervenus sur les articles relatifs à cette question. Nous nous sommes limités à lever la main pour voter contre les dispositions qui nous étaient soumises. Je tiens à cet instant, sans allonger le débat, à expliquer ce qui nous a conduits à voter comme nous l'avons fait.
Monsieur le ministre, vous portez la responsabilité du fait que ce dispositif n'a pas de pertinence, pour ne pas dire qu'il sera inefficace.
La sanction a d'abord une valeur pédagogique. Elle est même parfois la meilleure des pédagogies, à condition de ne pas prévoir de peines de prison. Mais encore faut-il se donner les moyens de la rendre effective !
Comme j'ai déjà eu l'occasion de vous le dire, monsieur le ministre, je ne pense pas que vous vous empresserez de vous donner les moyens d'appliquer à une échelle massive les dispositions répressives prévues dans ce texte. En effet, dans la période qui s'ouvre, nombre de membres du Gouvernement auront la tête ailleurs du fait de l'échéance électorale qui se profile. Je ne vous fais pas de procès d'intention, mais je pense que tout cela ne vous aidera pas à faire preuve de promptitude pour envoyer des millions d'amendes.
Nous allons donc laisser s'installer le fait que, bien qu'il y ait une loi pour pénaliser, on ne voit rien venir. Cela va décrédibiliser un peu plus votre action.
Et maintenant, le rapporteur accepte un amendement qui, de fait, prévoit des sanctions à l'encontre des parents, car c'est bien de cela qu'il s'agit.
Nous ne pouvons pas cautionner ce côté improvisé, bricolé.
M. le président. Veuillez conclure, monsieur Assouline.
M. David Assouline. Notre groupe a voté contre le dispositif qui nous était soumis dans ces articles, sans chercher à l'améliorer par voie d'amendements puisque c'est l'édifice lui-même qui ne va pas.
En revanche, nous avons déposé des amendements sur l'article 14 quater, qui est plus précis, et nous expliquerons pourquoi lors de sa discussion.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 14 bis.
Article 14 ter
I. - Dans l'article L. 335-5 du même code, tel qu'il résulte de l'article 14 bis de la présente loi, les mots : « trois précédents articles » sont remplacés par les mots : « articles L. 335-2, L. 335-3 et L. 335-4 ».
II. - Dans l'article L. 335-6 du même code, les mots : « Dans tous les cas prévus aux quatre articles précédents, » sont remplacés par les mots : « En cas de condamnation pour l'une des infractions prévues et réprimées au présent chapitre, ».
III. - Dans l'article L. 335-7 du même code, les mots : « Dans les cas prévus aux cinq articles précédents, » sont remplacés par les mots : « Lorsqu'il est fait application de l'article précédent, ».
IV. - Dans l'article L. 335-8 du même code, les mots : « définies aux articles L. 335-2 à L. 335-4 du présent code » sont remplacés par les mots : « prévues et réprimées au présent chapitre ».
V. - Dans l'article L. 335-9 du même code, les mots : « définies aux articles L. 335-2 à L. 335-4 » sont remplacés par les mots : « prévues et réprimées au présent chapitre ».
M. le président. L'amendement n° 234, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Modifier ainsi cet article :
1°- Dans le I, remplacer les références :
L. 335-2, L.335-3 et L.335-4
par les références
L. 335-2 à L.335-4-2
2°- Dans le II, remplacer les mots
l'une des infractions prévues et réprimées
par les mots
l'un des délits prévus et réprimés
3°- Rédiger ainsi le IV:
IV- Dans le premier alinéa de l'article L. 335-8 du même code, les mots : « infractions définies aux articles L. 335-2 à L.335-4 du présent code », sont remplacés par les mots : « délits prévus et réprimés au présent chapitre ».
4° - Rédiger ainsi le V:
V- Dans l'article L. 335-9 du même code, les mots : « infractions définies aux articles L. 335-2 à L. 335-4 » sont remplacés par les mots : « délits prévus et réprimés au présent chapitre ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 14 ter, modifié.
(L'article 14 ter est adopté.)
Article 14 quater
Après l'article L. 335-10 du même code, il est inséré un chapitre VI ainsi rédigé :
« CHAPITRE VI
« Prévention de la contrefaçon dans le domaine des communications électroniques
« Art. L. 336-1. - Lorsqu'un logiciel est manifestement utilisé à une échelle commerciale sous quelque forme que ce soit, pour la mise à disposition ou l'acquisition illicite d'oeuvres ou d'objets protégés par un droit de propriété littéraire et artistique, le président du tribunal de grande instance, statuant en référé, peut ordonner sous astreinte toute mesure nécessaire à la protection desdits droits et conformes à l'état de l'art.
« Il peut notamment enjoindre à l'éditeur du logiciel de prendre toute mesure pour en empêcher ou limiter l'usage illicite autant qu'il est possible. Ces mesures ne peuvent toutefois avoir pour effet de dénaturer ni les caractéristiques essentielles ni la destination initiale du logiciel.
« L'article L. 332-4 est applicable aux logiciels mentionnés au présent article. »
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 134 est présenté par M. Assouline, Mme Blandin, M. Lagauche, Mme Tasca, MM. Yung, Bockel, Lise, Vidal et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 164 est présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. David Assouline, pour présenter l'amendement n° 134.
M. David Assouline. Il ne nous paraît pas opportun, surtout après l'adoption de l'article 12 bis, de prévoir une responsabilité civile des éditeurs de logiciels en donnant compétence au président du tribunal de grande instance pour prendre en référé des mesures permettant d'empêcher ou de limiter l'utilisation des logiciels à des fins d'échanges commerciaux illicites d'oeuvres ou d'objets protégés.
Voilà pourquoi nous souhaitons la suppression de l'article 14 quater.
M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, pour présenter l'amendement n° 164.
M. Ivan Renar. Le présent article manque son but qui serait, si j'en crois le rapport, de « permettre au juge civil de prendre, en référé, des mesures pour limiter ou empêcher l'utilisation de logiciels à des fins d'échanges illicites d'oeuvres ou d'objets protégés ».
En revanche, il enclenche la destruction du logiciel libre alors même que l'administration française y a recours. L'utilisation et les possibilités offertes par les logiciels libres sont exponentielles. Elles ouvrent des champs intéressants dans beaucoup de domaines, et le Gouvernement tue la poule aux oeufs d'or. L'industrie du logiciel français, notamment l'industrie du logiciel libre, peut se sentir ainsi menacée.
Le consortium Object Web, qui regroupe des entreprises françaises et étrangères - Atos Origin, Bull, Dassault, France Télécom, Thalès, Red Hat - ainsi que des acteurs de la recherche - l'Institut national de recherche en informatique et en automatique, l'INRIA, le Commissariat à l'énergie atomique, le CEA, le Centre national de la recherche scientifique, le CNRS -, s'est d'ailleurs inquiété, dans une lettre ouverte, des risques qu'une telle disposition ferait peser sur son activité, risques qui pourraient l'amener à reconsidérer sa localisation en France.
Des représentants de la société Sun Microsystems, société forte de 11 milliards de dollars de chiffre d'affaires et de 31 000 emplois dans le monde, ont exprimé des inquiétudes similaires dans un article qui a fait la une de l'International Herald Tribune, le 27 avril dernier.
La notion de risque de contrefaçon finit, comme celle de culpabilité, par corseter l'industrie comme elle vise à corseter l'individu a priori, au point de déclencher un immobilisme dévastateur pour tout le secteur indépendant de cette industrie face à la puissance financière, commerciale et politique de Microsoft, pour ne pas le nommer.
C'est pourquoi nous appelons le Sénat à voter la suppression de l'article 14 quater.
M. le président. L'amendement n° 26 rectifié, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Après l'article L. 335-10 du même code, il est inséré un chapitre VI ainsi rédigé :
« CHAPITRE VI
« Prévention du téléchargement illicite
« Art. L. 336-1. - Il est créé un registre public, dans lequel les titulaires des droits prévus aux livres I et II inscrivent, pour leurs oeuvres et objets protégés diffusés sous forme numérisée, les informations d'identification, ainsi que les informations relatives aux droits et aux conditions d'utilisation.
« Ces informations sont accessibles librement et sans contrepartie, dans un standard ouvert, au sens de l'article 4 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique.
« Un décret en Conseil d'État précise la nature des oeuvres et objets protégés concernés et les modalités de mise en oeuvre du registre.
« Art. L. 336-2. - Lorsqu'un logiciel est principalement utilisé pour la mise à disposition illicite d'oeuvres ou d'objets protégés par un droit de propriété littéraire et artistique, le président du tribunal de grande instance, statuant en référé, peut ordonner sous astreinte à l'éditeur du logiciel toutes mesures nécessaires à la protection desdits droits et conformes à l'état de l'art.
« Ces mesures peuvent s'appuyer sur l'utilisation des informations mentionnées à l'article précédent. Elles ne peuvent toutefois avoir pour effet de dénaturer les caractéristiques essentielles ou la destination initiale du logiciel.
« L'article L. 332-4 est applicable aux logiciels mentionnés au présent article. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur. La commission s'était montrée réservée sur le dispositif adopté par l'Assemblée nationale, qui instaure une forme de responsabilité civile des éditeurs et des fournisseurs de logiciels manifestement utilisés pour des échanges illicites d'oeuvres protégées, et cela nous avait conduits à adopter un amendement de suppression du présent article.
Au cours des deux semaines qui se sont écoulées, notre réflexion s'est poursuivie, notamment en liaison avec le Gouvernement et avec les différentes parties concernées, sur les avantages et les inconvénients d'un dispositif auquel les représentants de la filière culturelle, et les artistes notamment, sont très attachés, car ils y voient un moyen efficace de défense de leurs droits.
Nous avons donc travaillé à une nouvelle rédaction de cet article qui permettrait d'en conserver les avantages tout en réduisant les inconvénients qu'il présentait et qui tenaient pour l'essentiel à une définition beaucoup trop large de son champ d'application.
Après avoir réfléchi à nouveau, la rédaction que la commission vous propose d'adopter aujourd'hui se présente sous trois aspects principaux.
D'abord, nous nous sommes attachés à rectifier un certain nombre de maladresses rédactionnelles, par exemple la référence à la notion d'échelle commerciale ou, dans le titre du chapitre VI, la référence à la contrefaçon qui aurait pu être une source d'ambiguïté et d'insécurité juridique.
Dans un deuxième temps, nous avons veillé à recentrer le dispositif de responsabilité civile sur les seuls éditeurs de logiciels pour éviter les interférences avec les dispositions relatives à la responsabilisation des autres acteurs de l'internet, qui figurent dans la loi n° 2004-575, du 21 juin 2004, pour la confiance dans l'économie numérique.
Enfin, dans un troisième temps, nous nous sommes efforcés de compléter le dispositif de responsabilité civile ainsi recentré par la création d'un registre public qui, comme cela a été évoqué tout à l'heure, permettra à tout un chacun de disposer librement et sans contrepartie des informations d'identification et des informations relatives aux droits et aux conditions d'utilisation de l'ensemble des oeuvres et des objets protégés par un droit d'auteur ou par un droit voisin. Ce registre public, aisément consultable, permettra à tous d'être pleinement informés sur le caractère licite ou illicite du téléchargement des oeuvres qu'ils envisagent.
Telles sont, monsieur le président, les raisons pour lesquelles nous proposons cet amendement sur lequel nous demanderons la priorité.
M. le président. Le sous-amendement n° 263, présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer le texte proposé par l'amendement n° 26 rectifié pour l'article L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Par ce sous-amendement, nous proposons la suppression de l'article 14 quater, malgré la nouvelle rédaction proposée par M. le rapporteur.
La première partie de l'amendement n° 26 rectifié, qui vise à créer un article L. 336-1 du code de la propriété intellectuelle concernant le registre public, est très positif, puisqu'il promeut la liberté d'accès aux informations des oeuvres.
En revanche, la seconde partie, qui tend à créer un article L. 336-2, reprend les dispositions de l'article 14 quater initialement proposé par l'Assemblée nationale, article que nous souhaitons supprimer, comme vient de l'indiquer M. Renar.
Tout d'abord, monsieur le rapporteur, permettez-moi de m'étonner de la transformation de votre amendement de suppression en un amendement visant à réintroduire la disposition que vous proposiez précédemment de faire disparaître !
N'avez-vous pas écrit, monsieur le rapporteur, que « les dispositions du présent article risquent de susciter, du fait de leur imprécision, une incertitude juridique qui peut être préjudiciable au développement de l'Internet, et contre laquelle la très grande majorité des acteurs de l'économie numérique [vous] ont vivement mis en garde » ?
Ces considérations vous avaient conduit à recommander la suppression du présent article, et voilà maintenant que vous nous proposez de le réintroduire, sous une forme plus dangereuse encore !
C'est toute l'industrie du logiciel français, et notamment l'industrie du logiciel libre, que vous menacez.
Par ailleurs, nous craignons que votre proposition tendant à permettre aux juges d'imposer aux éditeurs de logiciels d'aller vérifier à chaque téléchargement que l'oeuvre téléchargée n'est pas une contrefaçon ne soit bien peu réaliste techniquement. Avez-vous la moindre idée de l'infrastructure technique qu'il faudrait mettre en oeuvre pour vérifier en temps réel les fichiers téléchargés par des millions d'internautes ?
Qui plus est, au-delà du fait qu'elle ne fonctionnera sans doute jamais, une ligne Maginot numérique fait peser un risque majeur à nos entreprises innovantes, notamment aux plus petites, lesquelles ne pourront pas « absorber » l'insécurité juridique que créerait une telle disposition, si celle-ci avait un jour force de loi.
Selon nous, l'alinéa 1er de l'article 809 du nouveau code de procédure civile garantit déjà, de manière largement suffisante au regard de l'article 8.3 de la directive 2001/29 que nous transposons, la possibilité pour un titulaire de droit de demander une ordonnance sur requête à l'encontre des éditeurs de logiciels, pour prévenir un dommage imminent ou faire cesser un trouble manifestement illicite.
Nous rejetons la logique de la présomption de culpabilité, qui ne fera que favoriser le développement de réseaux d'échanges chiffrés et anonymes.
Voilà pourquoi, mes chers collègues, nous vous invitons à supprimer le texte proposé par l'amendement n° 26 rectifié pour l'article L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle.
M. le président. Le sous-amendement n° 265, déposé par M. Yann Gaillard, est ainsi libellé :
Au début du premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 26 rectifié pour l'article L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle, remplacer les mots :
Lorsqu'un logiciel est principalement utilisé
par les mots :
Lorsqu'une application logicielle est principalement utilisée
La parole est à M. Yann Gaillard.
M. Yann Gaillard. Il faut parler d'application logicielle plutôt que de logiciel, pour souligner que cela concerne des ensembles achevés, tels qu'ils sont mis à la disposition d'usagers du public, et non pas des briques logicielles, des composants destinés à être inclus dans d'autres systèmes et applications.
En effet, dans la mesure où ce sont les usages qui motivent l'application de ce texte, ce sont uniquement les applications destinées au grand public qui peuvent être visées.
M. le président. Le sous-amendement n° 266, présenté par M. Yann Gaillard, est ainsi libellé :
Compléter in fine le premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 26 rectifié pour l'article L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle par les mots :
avec un délai de mise en conformité qui ne peut être inférieur à quatre mois
La parole est à M. Yann Gaillard.
M. Yann Gaillard. Il semble normal de prévoir un délai d'au moins quatre mois pour la mise en conformité, car l'urgence des mesures reste relative, étant donné que le besoin de cette mise en conformité ne peut être constaté, selon les termes mêmes de l'amendement n° 26 rectifié, que si l'application logicielle est déjà fort répandue.
Ce délai permet aussi - c'est une mesure protectrice des logiciels libres - d'éviter l'utilisation abusive en référé de ce texte comme arme anticoncurrentielle.
M. le président. Le sous-amendement n° 44 rectifié, présenté par M. Yann Gaillard, est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 26 rectifié pour l'article L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle par une phrase ainsi rédigée :
Ces mesures ne peuvent porter que sur les interfaces graphiques interactives mettant en oeuvre le logiciel.
La parole est à M. Yann Gaillard.
M. Yann Gaillard. Il importe de ne pas modifier inconsidérément, pour des raisons autres que techniques, les composantes fonctionnelles qui peuvent être intégrées par des professionnels dans de nombreux contextes et systèmes, lesquels pourraient donc être profondément perturbés par de telles modifications.
Ce rôle multiple et purement technique des composantes fonctionnelles, réutilisables dans divers contextes, est précisément ce qu'est censé protéger « la neutralité technologique », qui est garantie par ce projet de loi, comme M. le ministre de la culture le précisait, lors de son audition du 4 avril 2006.
Les interfaces graphiques interactives, qui servent précisément d'intermédiaires techniques pour les usages du public, usages qui font l'objet de cet article, sont le seul contexte naturel pour ajouter des dispositifs destinés à « empêcher ou limiter l'usage illicite. »
M. le président. Le sous-amendement n° 287 rectifié, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :
Après le premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 26 rectifié pour l'article L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les producteurs de phonogramme sont tenus de délivrer au registre public toutes les informations nécessaires à la répartition des droits perçus et principalement : le nom des artistes -interprètes, le nom et la nationalité du producteur, le titre de l'interprétation, le lieu de fixation et l'année de fixation du phonogramme.
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. Dans l'amendement n° 211, qui visait à introduire un article additionnel avant l'article 6, nous vous avons proposé que soit rassemblé obligatoirement l'ensemble des indications qui seraient données par les éditeurs de phonogramme.
M. le rapporteur nous a alors répondu que l'article 14 quater suggère l'installation d'un registre public, qui rassemblerait l'ensemble de ces renseignements.
Cependant, l'amendement n° 26 rectifié de la commission, qui évoque l'existence de ce registre, ne fait pas obligation aux producteurs de phonogramme de l'enrichir.
Le sous-amendement n° 287 rectifié vise donc à astreindre les producteurs de phonogramme à délivrer au registre public toutes les informations nécessaires.
M. le président. Le sous-amendement n° 267, présenté par M. Yann Gaillard, est ainsi libellé :
À la fin de la seconde phrase du deuxième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 26 rectifié pour l'article L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle, remplacer les mots :
les caractéristiques essentielles ou la destination initiale du logiciel
par les mots :
ni les caractéristiques essentielles, ni la destination initiale, ni les modalités de développement ou de mise à disposition de ces applications
La parole est à M. Yann Gaillard.
M. Yann Gaillard. Ce sous-amendement vise à garantir l'une des intentions du projet de loi, à savoir « l'avenir du logiciel libre », selon les propres termes de M. le ministre de la culture.
M. le président. Le sous-amendement n° 43 rectifié est ainsi libellé :
Dans la seconde phrase du deuxième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 26 rectifié pour l'article L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle, après les mots :
caractéristiques essentielles
insérer les mots :
techniques ou économiques
La parole est à M. Yann Gaillard.
M. Yann Gaillard. Ce sous-amendement vise également à garantir l'avenir du logiciel libre. Il s'agit de s'attacher non pas seulement aux caractéristiques techniques, mais aussi aux caractéristiques économiques.
Effectivement, l'un des objectifs de ce projet de loi ne serait pas rempli s'il était possible de dénaturer les caractéristiques économiques spécifiques indispensables au modèle de développement et de valorisation des logiciels libres, notamment si le coût marginal nul - c'est en général le cas - était remis en cause par l'obligation, par exemple, d'intégrer dans chaque copie du logiciel un dispositif dont le coût unitaire rendrait l'opération impossible.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. Les objections que soulèvent les auteurs des amendements identiques nos 134 et 164 à l'encontre de l'article 14 quater rejoignent les préoccupations de la commission qui, elle aussi, avait demandé dans un premier temps la suppression de cet article.
Mais compte tenu de l'importance attachée à cet article par les milieux artistiques, qui y voient un outil indispensable à la protection de leurs droits, nous avons souhaité proposer une nouvelle rédaction de ce texte, qui tienne compte des avis que nous avons émis en commission. Par conséquent, la commission est défavorable aux amendements nos 134 et 164.
Le sous-amendement n° 263 concerne les dispositions relatives à la création d'un registre public des oeuvres. Il supprime des dispositions relatives à la responsabilité civile des éditeurs de logiciels. À ce titre, il est contraire à la position de la commission, qui a donc émis un avis défavorable.
Quant au sous-amendement n° 265, il vise à introduire une précision qui ne nous semble pas absolument nécessaire. La commission y est donc défavorable.
S'agissant du sous-amendement n° 266, il nous paraît préférable de laisser l'autorité judiciaire décider, en fonction des circonstances, des délais qu'elle imposera, plutôt que de les fixer. La commission a donc émis un avis défavorable.
Pour ce qui concerne les sous-amendements nos 44 rectifié et 287 rectifié, je souhaiterais recueillir l'avis du Gouvernement.
S'agissant du sous-amendement n° 267, la commission préfère en rester à sa rédaction. Elle a donc émis un avis défavorable.
Concernant le sous-amendement n° 43 rectifié, nous comprenons bien le souci de notre collègue Yann Gaillard de garantir l'avenir des logiciels libres en précisant que les mesures que pourra ordonner le président du tribunal de grande instance à un éditeur de logiciel ne pourront « avoir pour effet de dénaturer les caractéristiques essentielles techniques ou économiques » dudit logiciel.
À notre sens, la notion de caractéristiques essentielles d'un logiciel englobe les caractéristiques propres du logiciel libre, et le juge ne pourrait imposer à un éditeur de logiciel de changer de modèle économique, en transformant son logiciel, par exemple, en logiciel propriétaire, ou en rendant sa diffusion payante.
Je ne suis donc pas sûr qu'il soit utile d'inscrire une telle précision dans la loi. Quoi qu'il en soit, je souhaite connaître l'avis du Gouvernement sur ce point.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Le Gouvernement a émis un avis défavorable sur les amendements identiques nos 134 et 164.
En revanche, il est favorable à l'amendement n° 26 rectifié.
Sur les sous-amendements nos 263, 265, 266, 44 rectifié, 267 et 43 rectifié, le Gouvernement a émis un avis défavorable.
M. Ivan Renar. Tout le monde au vestiaire ! (Sourires.)
M. le président. J'ai été saisi par M. le rapporteur, au nom de la commission, d'une demande de priorité de mise aux voix de l'amendement n° 26 rectifié.
Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande ?
M. le président. La priorité est de droit.
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 263.
Mme Catherine Morin-Desailly. Monsieur le rapporteur, à ce stade de la discussion, nous nous étonnons, comme d'autres collègues, de la transformation de l'amendement de suppression voté en commission des affaires culturelles en un amendement qui a pour objet de réintroduire aujourd'hui la disposition que vous proposiez initialement de supprimer. Les arguments qui sont fort bien développés dans votre rapport et auxquels notre groupe s'était clairement rallié sont-ils devenus obsolètes en une semaine ?
Je n'exposerai pas ces arguments ; d'autres l'ont fait tout à l'heure. Je constaterai seulement que ce nouvel amendement n'apporte aucune précision permettant d'écarter l'insécurité juridique qui était à juste titre dénoncée dans votre rapport.
En résumé, cet amendement illustre le fait que tous les internautes sont considérés comme des présumés coupables qu'il faudrait mettre sous surveillance permanente. (M. le ministre fait un signe de dénégation.)
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Mais non !
Mme Catherine Morin-Desailly. Nous rejetons avec force cette logique qui ne fera que favoriser le développement de réseaux d'échanges chiffrés et « anonymisés », rendant plus difficile la mission des services de police.
Par conséquent, nous ne voterons pas l'amendement n° 26 rectifié, qui vise à rétablir l'article 14 quater. L'amendement de la commission que nous souhaitions voter ayant disparu, nous voterons en revanche le sous-amendement de suppression n° 263 de nos collègues.
M. le président. La parole est à M. Philippe Darniche, pour explication de vote.
M. Philippe Darniche. Pour des raisons identiques à celles qui viennent d'être exprimées, M. Retailleau et moi-même ne voterons pas non plus l'amendement n° 26 rectifié de la commission tendant à rédiger l'article 14 quater.
L'article 14 quater voté à l'Assemblée nationale représentait le pendant civil de l'article 12 bis. J'émettrai donc sur l'article 14 quater, qui tue totalement le principe du pair à pair, les mêmes critiques que celles qui ont été émises sur l'article 12 bis.
Monsieur le rapporteur, vous avez consacré quatre pages de votre rapport à la nécessité de supprimer l'article 14 quater, invoquant notamment l'insécurité juridique qu'il aurait créée. Subitement et de façon inexpliquée, vous proposez, par le biais de l'amendement n° 26 rectifié, une nouvelle rédaction de cet article qui crée ce registre public pour les « oeuvres et objets protégés diffusés sous forme numérisée ».
De plus, vous prévoyez pour le président du TGI la faculté d'ordonner sous astreinte à l'éditeur d'un logiciel de prendre toute mesure nécessaire pour assurer la compatibilité du logiciel avec le registre.
Je constate que votre amendement accroît l'insécurité juridique, puisqu'il crée une responsabilité aggravée du fait d'autrui. En fait, très curieusement, on sanctionnera par ce dispositif l'éditeur du logiciel et non pas l'internaute qui en fera, lui, un usage illicite !
De plus, je crains que, techniquement, un tel dispositif ne devienne vite une usine à gaz et n'entraîne, compte tenu de l'engorgement qui s'ensuivra, de nombreux problèmes en termes de qualité de service.
Telles sont toutes les raisons pour lesquelles je ne voterai pas l'amendement n° 26 rectifié.
M. le président. Monsieur Gaillard, le sous-amendement n° 265 est-il maintenu ?
M. Yann Gaillard. Permettez-moi de faire une constatation relative à la procédure utilisée.
Comme l'ont dit certains de nos collègues, nous pensions que la commission allait proposer la suppression de l'article 14 quater, ce qui avait d'ailleurs entraîné un certain mouvement de soulagement dans les milieux favorables aux logiciels libres. Ayant appris que la commission souhaitait en définitive rétablir cet article sous une autre forme, nous avons dû improviser, bricoler assez rapidement un certain nombre de sous-amendements afin de supprimer quelques effets jugés néfastes par les milieux en question. Cela explique, en l'occurrence, la lourdeur de l'atmosphère...
Cela étant, j'accepte de retirer le sous-amendement n° 265, ainsi d'ailleurs que les autres sous-amendements déposés à l'amendement n° 26 rectifié.
M. le président. Les sous-amendements nos 265, 266, 44 rectifié, 267 et 43 rectifié sont retirés.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 287 rectifié.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 26 rectifié.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 192 :
Nombre de votants | 320 |
Nombre de suffrages exprimés | 309 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 155 |
Pour l'adoption | 164 |
Contre | 145 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, l'article 14 quater est ainsi rédigé, et les amendements identiques nos 134 et 164 n'ont plus d'objet.
Article additionnel après l'article 14 quater
M. le président. L'amendement n° 104, présenté par MM. Dufaut et Longuet, est ainsi libellé :
Après l'article 14 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 335-10 du code de la propriété intellectuelle, il est inséré un chapitre ainsi rédigé :
« Chapitre ...
« Règles de compétence
« Art. L. ... - L'ensemble du contentieux de la propriété littéraire et artistique est attribué aux tribunaux de grande instance déterminés par voie réglementaire et aux cours d'appel auxquelles ils sont rattachés, à l'exception des contraventions, qui relèvent des tribunaux de police déterminés par voie réglementaire, et des recours formés contre les décrets, arrêtés et autres décisions de nature administrative, qui relèvent de la juridiction administrative. »
La parole est à M. Alain Dufaut.
M. Alain Dufaut. Cet amendement vise à spécialiser certaines juridictions en matière de propriété littéraire et artistique, comme c'est déjà le cas en matière de propriété industrielle.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. La commission est très réservée sur cet amendement et souhaiterait entendre l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. La loi a déjà donné compétence, pour connaître des délits du code de la propriété intellectuelle, à des juridictions spécialisées de niveau régional, spécialisation qui me paraît par conséquent de nature à répondre à votre préoccupation tout à fait légitime, monsieur le sénateur.
C'est la raison pour laquelle j'émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Monsieur Dufaut, l'amendement n° 104 est-il maintenu ?
M. Alain Dufaut. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 104 est retiré.
Article 14 quinquies
Les personnes dont l'activité est d'offrir un accès à des services de communication au public en ligne adressent, à leurs frais, aux utilisateurs de cet accès des messages de sensibilisation aux dangers du téléchargement et de la mise à disposition illicites pour la création artistique.
M. le président. L'amendement n° 235, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission, est ainsi libellé :
A. Avant le premier alinéa de cet article, ajouter un alinéa ainsi rédigé :
Après l'article L. 336-2 du même code, il est inséré un article L. 336-3 ainsi rédigé :
B. En conséquence, faire précéder cet article de la mention :
« Art. L. 336-3.-
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur. Cet amendement a pour objet d'insérer les dispositions du présent article dans le code de la propriété intellectuelle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 27, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter cet article par une phrase ainsi rédigée :
Un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités de diffusion de ces messages.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur. Cet amendement a pour objet de renvoyer à un décret en Conseil d'État le soin de déterminer les modalités de diffusion des messages de sensibilisation que les fournisseurs d'accès à Internet devront adresser à leurs abonnés pour les sensibiliser à la propriété littéraire et artistique.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Je suis très favorable à cet amendement, car cette tâche de pédagogie, qui est destinée à expliquer à l'ensemble de nos concitoyens, notamment aux plus jeunes, ce que signifie l'acte de création, ce qu'est la réalité des métiers artistiques et en quoi consiste tout ce qui participe à la création dans notre pays, mérite cette sensibilisation. Tous les abonnés à Internet recevront des messages d'information.
Cet amendement clarifie et amplifie ce qui avait déjà été prévu à l'Assemblée nationale.
M. le président. Je mets aux voix l'article 14 quinquies, modifié.
(L'article 14 quinquies est adopté.)
Articles additionnels après l'article 14 quinquies
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 45 est présenté par M. Gaillard.
L'amendement n° 57 est présenté par Mme Morin-Desailly, M. Nogrix et les membres du groupe Union centriste - UDF.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 14 quinquies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 122-1 du code de la consommation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Un service de vente ou de mise à disposition en ligne d'oeuvres, interprétations, phonogrammes, vidéogrammes ou programmes audiovisuels, doit accepter les transactions avec tout logiciel client interopérable. Tout dispositif d'exclusion, dont la présence n'est pas techniquement nécessaire pour réaliser la transaction, est assimilable à un refus de vente. »
La parole est à M. Yann Gaillard, pour présenter l'amendement n° 45.
M. Yann Gaillard. Cet amendement a pour objet de compléter l'article L. 122-1 du code de la consommation par une disposition du droit de la concurrence appliqué à ce secteur.
L'objectif de la loi est en effet de mettre fin au téléchargement sauvage d'oeuvres par le développement d'une offre légale en ligne. À cette fin, il est nécessaire que l'offre légale en ligne soit accessible pour tous.
M. le président. La parole est à M. André Vallet, pour présenter l'amendement n° 57.
M. André Vallet. Je défendrai également l'amendement n° 58.
Les amendements n° 57 et 58 ont pour objet d'assimiler à un refus de vente le fait d'exclure et d'interdire à certains logiciels clients l'accès au service de vente en ligne.
Il s'agit de préciser que les plates-formes marchandes doivent être accessibles non seulement aux navigateurs commerciaux, mais aussi aux navigateurs issus de logiciels libres.
Il convient ainsi de veiller à l'égalité d'accès aux plates-formes. Par ailleurs, la nature du navigateur ne doit pas constituer un frein.
L'amendement n° 57 modifie ainsi le code de la consommation, et l'amendement n° 58 le code du commerce.
L'usage de mesures techniques de protection sur les oeuvres mises à disposition ou en vente ne peut en effet amener à ce que les plates-formes techniques destinées à implémenter ce service de vente utilisent des protocoles nouveaux.
Sans cette clause de protection, il serait possible d'opérer une discrimination entre les systèmes clients en ne permettant pas d'offrir à tous, avec les garanties de la concurrence, le moyen d'accéder à ces services.
De telles pratiques porteraient atteinte au droit du consommateur qui utilise un système dont les logiciels clients sont arbitrairement refusés par le service. Elles porteraient également atteinte au libre exercice de la concurrence entre les diverses plates-formes, c'est-à-dire entre les éditeurs ou les distributeurs, et donc indirectement aux intérêts du consommateur.
Pour toutes ces raisons, nous vous invitons à adopter les amendements nos 57 et 58, mes chers collègues.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. Grâce à l'amendement n° 18, devenu article additionnel après l'article 7 bis, « tout éditeur de logiciel, tout fabricant de système technique et tout exploitant de service qui souhaite améliorer l'interopérabilité des systèmes et des services existants peut demander à l'autorité de favoriser ou de susciter une solution de conciliation, dans le respect des droits des parties, pour obtenir du titulaire des droits sur la mesure technique les informations essentielles à l'interopérabilité ».
Il ne nous semble donc pas souhaitable d'adopter les amendements identiques nos 45 et 57. Toutefois, j'aimerais connaître l'avis du Gouvernement sur ce sujet.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 45 et 57.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 46 est présenté par M. Gaillard.
L'amendement n° 58 est présenté par Mme Morin-Desailly, M. Nogrix et les membres du groupe Union centriste-UDF.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 14 quinquies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 420-2 du code de commerce est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Est également prohibée, dans un service de vente ou de mise à disposition en ligne d'oeuvres, interprétations, phonogrammes, vidéogrammes ou programmes audiovisuels, dès lors qu'elle est susceptible d'affecter le fonctionnement ou la structure de la concurrence, la mise en oeuvre de dispositifs d'exclusion de logiciels clients interopérables quand ces dispositifs ne sont pas techniquement nécessaires pour réaliser les transactions. »
La parole est à M. Yann Gaillard, pour présenter l'amendement n° 46.
M. Yann Gaillard. Il est défendu, monsieur le président.
M. Michel Thiollière, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 46 et 58.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Article 15
Après l'article L. 342-3 du code de la propriété intellectuelle, sont insérés deux articles L. 342-3-1 et L. 342-3-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 342-3-1. - Les mesures techniques efficaces au sens de l'article L. 331-5 qui sont propres à empêcher ou à limiter les utilisations d'une base de données que le producteur n'a pas autorisées en application de l'article L. 342-1, bénéficient de la protection prévue à l'article L. 335-4-1.
« Les producteurs de base de données prennent dans un délai raisonnable, le cas échéant après accord avec les autres parties intéressées, les mesures volontaires qui permettent le bénéfice des exceptions définies à l'article L. 342-3 dans les conditions prévues à l'article L. 331-6.
« Tout différend relatif à la faculté de bénéficier des exceptions définies à l'article L. 342-3 qui implique une mesure technique visée au premier alinéa du présent article est soumis au collège des médiateurs prévu à l'article L. 331-7.
« Art. L. 342-3-2. - Les informations sous forme électronique relatives au régime des droits du producteur d'une base de données, au sens de l'article L. 331-10, bénéficient de la protection prévue à l'article L. 335-4-2. »
M. le président. L'amendement n° 236, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Modifier ainsi le texte proposé par cet article pour l'article L. 342-3-1 du code de la propriété intellectuelle
1°- Rédiger ainsi le deuxième alinéa :
« Les producteurs de bases de données qui recourent aux mesures techniques de protection mentionnées à l'alinéa précédent prennent cependant les dispositions utiles pour que leur mise en oeuvre ne prive pas les bénéficiaires des exceptions définies à l'article L. 342-3 de leur bénéfice effectif, suivant les conditions prévues aux articles L. 331-6 et suivants.
2°- À la fin du dernier alinéa, remplacer les mots :
au collège des médiateurs prévu à l'article L. 331-7
par les mots :
à l'Autorité de régulation des mesures techniques de protection prévue à l'article L. 331-7.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président. Le sous-amendement n° 275, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Dans le dernier alinéa de l'amendement n° 236, après les mots :
mesures techniques
supprimer les mots :
de protection
La parole est à M. le ministre, pour présenter le sous-amendement n° 275 et pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n°236.
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Les mesures techniques n'ont pas pour seule fonction de protéger les droits, elles servent également à gérer ceux-ci, afin de permettre la mise en place de nouveaux modèles, notamment en ligne. Il convient donc d'ouvrir la rédaction.
Sous réserve de l'adoption de ces dispositions, le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 236.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 275 ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. La commission émet un avis favorable sur ce sous-amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'article 15, modifié.
(L'article 15 est adopté.)
Article additionnel après l'article 15
M. le président. L'amendement n° 165, présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 15, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 212-3 du code de la propriété intellectuelle est ainsi rédigé :
« Art. L. 212-3. - Sont soumises à l'autorisation écrite de l'artiste-interprète, la fixation de sa prestation, sa reproduction, sa mise à- disposition du public par la vente, l'échange, le prêt et le louage, et sa communication au public, y compris sa mise à la disposition du public, par fil ou sans fil, de manière que chacun puisse y avoir accès de l'endroit et au moment qu'il choisit individuellement, ainsi que toute utilisation séparée du son et de l'image de la prestation lorsque celle-ci a été fixée à la fois pour le son et l'image.
« Cette autorisation et les rémunérations auxquelles elle donne lieu sont régies par les dispositions des articles L. 762-1 et L. 762-2 du code du travail, sous réserve des dispositions de l'article L. 212-6 du présent code.
« En ce qui concerne spécifiquement la location, les titulaires du droit voisin, tels les artistes-interprètes, bénéficient d'un droit à rémunération équitable payée par les personnes qui louent des phonogrammes ou des vidéogrammes. Ce droit à rémunération équitable doit être exercé par une société de perception et de répartition des droits agréée à cet effet par le ministre chargé de la culture. Cet agrément est délivré en considération des critères énumérés à l'article L. 132-20-1. Un décret en Conseil d'État fixe les conditions de délivrance et de retrait de l'agrément. »
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Le projet de loi ne prévoit aucune disposition relative au contenu des droits des artistes-interprètes. Il est donc nécessaire de mettre sur ce point précis aussi la loi française en conformité avec les normes fixées par les directives européennes 92/100 et 2001/29.
La directive 92/100 précise que « le droit exclusif d'autoriser ou d'interdire la location et le prêt appartient :
- à l'auteur, en ce qui concerne l'original et les copies de son oeuvre,
- à l'artiste-interprète ou exécutant, en ce qui concerne les fixations de son exécution,
- au producteur de phonogrammes, en ce qui concerne ses phonogrammes [...] ».
De plus, « lorsqu'un auteur ou un artiste-interprète ou exécutant a transféré ou cédé son droit de location en ce qui concerne un phonogramme ou l'original ou une copie d'un film à un producteur de phonogrammes ou de films, il conserve le droit d'obtenir une rémunération équitable au titre de la location. Le droit d'obtenir une rémunération équitable au titre de la location ne peut pas faire l'objet d'une renonciation de la part des auteurs ou artistes-interprètes ou exécutants. »
Tel est le sens de cet amendement que je soumets à votre approbation, mes chers collègues.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. Cet amendement vise à transposer dans le code de la propriété intellectuelle les dispositions de la directive 92/100, qui reconnaît aux artistes-interprètes un droit de location et de prêt sur leurs prestations.
Si notre législation reconnaît à cette catégorie d'artistes des droits de fixation, de reproduction et de communication publique, elle n'a jamais vraiment explicitement accordé à ceux-ci ni le bénéfice des droits de location et de prêt ni la rémunération correspondante.
C'est la raison pour laquelle la commission s'en remet à la sagesse de l'assemblée.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Annie David. Et la transposition de la directive ?
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.
Mme Marie-Christine Blandin. J'ai déjà eu l'occasion d'évoquer les droits perdus au fil de l'évolution des techniques, notamment ceux des artistes-interprètes. Nous avons ici l'opportunité de reconnaître enfin la place de ces derniers, leur juste - bien que très modeste - rémunération, et les conditions pour la créer.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 165.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 15.
M. Ivan Renar. Rendez-vous à la buvette ! (Sourires.)
Article 15 bis
L'avant-dernier alinéa de l'article L. 122-2 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Toutefois, l'acheminement, à l'intérieur d'un même ensemble d'habitations, à l'initiative du gestionnaire de cet ensemble d'habitations, du signal télédiffusé d'origine reçu au moyen d'une antenne collective, ne constitue pas une télédiffusion distincte. »
M. le président. L'amendement n° 78, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
L'article L. 132-20 du code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :
1° Au début du premier alinéa, il est inséré la mention :
I. -
2° L'article est complété par un II ainsi rédigé :
« II.- L'autorisation de télédiffuser une oeuvre par voie hertzienne comprend la distribution sans frais supplémentaire de cette télédiffusion sur les réseaux internes aux immeubles ou ensembles d'immeubles collectifs à usage d'habitation installés par leurs propriétaires ou copropriétaires, ou par les mandataires de ces derniers, à seule fin de permettre le raccordement de chaque logement à des dispositifs collectifs de réception des télédiffusions par voie hertzienne normalement reçues dans la zone. »
La parole est à M. Michel Charasse.
M. Michel Charasse. Par cet amendement, je propose une nouvelle rédaction de l'amendement adopté par l'Assemblée nationale tendant à insérer un article additionnel et relatif à l'arrêt dit « Parly 2 » de la Cour de cassation du 1er mars 2005, qui assimile à une câblodistribution soumise à autorisation des ayants droit l'installation par une copropriété d'un réseau permettant la réception dans les logements de services de télévision hertzienne captés par une antenne collective. En quelque sorte, il faut payer des droits d'auteur à des sociétés de gestion.
Conformément à la lettre de l'article L. 132-20 du code de la propriété intellectuelle, cette jurisprudence n'en est pas moins susceptible d'avoir des conséquences fâcheuses. En effet, elle pourrait créer une différence de traitement difficilement justifiable entre les familles bénéficiant d'un logement individuel et celles qui sont logées dans des immeubles collectifs, et donc imposer des charges non négligeables aux organismes gestionnaires de logements sociaux.
Par ailleurs, elle pourrait aller à l'encontre des efforts déployés et des mesures prises pour éviter le foisonnement d'antennes individuelles, et compromettre ainsi les résultats positifs obtenus du point de vue tant de l'esthétique que de la sécurité.
Enfin, elle pourrait aller contre les intérêts des auteurs si les chaînes de télévision faisaient valoir qu'elles n'ont pas à acquitter les droits que l'arrêt de la Cour de cassation permet de mettre à la charge du public desservi par des antennes collectives.
Certes, les sociétés de droits, conscientes des réactions négatives que pouvait susciter l'issue d'une action à laquelle elles s'étaient pourtant jointes, ont indiqué qu'elles n'avaient pas vraiment l'intention de percevoir des redevances auprès des syndics d'immeubles. Cependant, si limitée que puisse être l'application de la jurisprudence connue sous le nom de « Parly 2 », elle n'en crée pas moins une situation choquante au regard de l'égalité devant la loi.
La rédaction proposée par le présent amendement a pour objet de remédier à cette situation, tout en améliorant la rédaction du texte issue des travaux de l'Assemblée nationale, et surtout d'insérer la disposition dans le code de la propriété intellectuelle.
M. le président. Le sous-amendement n° 276, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par l'amendement n° 78 pour le II de l'article L. 132-20 du code de la propriété intellectuelle, après les mots :
voie hertzienne
insérer les mots :
de chaînes gratuites
et après les mots :
mandataires de ces derniers,
insérer les mots :
à des fins non commerciales,
La parole est à M. le ministre, pour présenter le sous-amendement n° 276 et pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 78.
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Ce sous-amendement vise à clarifier le fait que seules les chaînes gratuites sont concernées par l'amendement n° 78 et que le raccordement des foyers est réalisé à des fins non commerciales. Sous réserve de l'adoption de ce sous-amendement, le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 78.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. Je souhaiterais que M. Charasse accepte de rectifier son amendement n° 78, afin de supprimant les termes « sans frais supplémentaire », qui sont superfétatoires.
M. Michel Charasse. D'accord !
M. Michel Thiollière, rapporteur. En conséquence, la commission est favorable à cet amendement ainsi qu'au sous-amendement.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 78 rectifié, présenté par M. Charasse, et ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
L'article L. 132-20 du code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :
1° Au début du premier alinéa, il est inséré la mention :
I. -
2° L'article est complété par un II ainsi rédigé :
« II.- L'autorisation de télédiffuser une oeuvre par voie hertzienne comprend la distribution de cette télédiffusion sur les réseaux internes aux immeubles ou ensembles d'immeubles collectifs à usage d'habitation installés par leurs propriétaires ou copropriétaires, ou par les mandataires de ces derniers, à seule fin de permettre le raccordement de chaque logement à des dispositifs collectifs de réception des télédiffusions par voie hertzienne normalement reçues dans la zone. »
La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 276.
M. Michel Charasse. Monsieur le ministre, votre sous-amendement me laisse perplexe.
Si mon amendement est adopté sous-amendé, le problème sera réglé, si je comprends bien, pour les antennes collectives recevant des chaînes gratuites. Mais il ne le sera pas pour celles qui reçoivent des chaînes payantes. Or les personnes habitant un logement équipé d'une antenne individuelle ne paient rien dans aucun des deux cas. Je comprends donc mal votre démarche, car il sera difficile d'expliquer votre proposition aux habitants des immeubles collectifs, d'autant que les titulaires d'antennes individuelles n'auront eux toujours rien à payer.
Certes, je ferai ce que le Sénat décidera, car c'est la moindre des choses. Mais je vous souhaite bien du plaisir, monsieur le ministre, pour annoncer aux habitants raccordés à une antenne collective recevant des chaînes payantes qu'ils devront payer des droits d'auteur à une société de gestion. Ils choisiront alors d'installer des antennes individuelles pour recevoir gratuitement toutes les chaînes, et on verra fleurir toutes ces horreurs sur les immeubles !
En outre, lorsqu'une antenne collective recevra à la fois les chaînes gratuites et les chaînes payantes, qui montera sur le toit, monsieur le ministre, vous ou des membres de vos services, pour aller la découper en rondelles, une pour le public et l'autre pour le privé ?
M. Ivan Renar. Il serait préférable de retirer ce sous-amendement, monsieur le ministre !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur. Je suis sensible aux commentaires que vient de formuler M. Charasse. C'est pourquoi la commission émet un avis favorable sur l'amendement n° 78 rectifié dans sa rédaction actuelle. Mais j'aimerais connaître l'avis du Gouvernement sur les remarques de M. Charasse.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. L'essentiel est qu'il s'agisse des chaînes normalement reçues dans la zone concernée. Je m'en remets donc à la sagesse que j'imagine extrême de la Haute Assemblée. (Sourires.)
M. le président. En conséquence, l'article 15 bis est ainsi rédigé.
Articles additionnels après l'article 15 bis
M. le président. L'amendement n° 100 rectifié, présenté par MM. Alduy et Demuynck, est ainsi libellé :
Après l'article 15 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. Dans l'année qui suit la promulgation de la présente loi, le Gouvernement transmet au Parlement un rapport relatif aux modalités de création d'un portail public de téléchargement légal des oeuvres numériques qui ne sont pas disponibles à la vente sur les plates-formes légales de téléchargement.
II. En lien avec les collectivités territoriales et les directions régionales aux affaires culturelles, ce rapport devra dresser l'inventaire des festivals existant dans les régions et des artistes diffusés dans ces festivals.
III. Ce rapport devra également dresser une liste des artistes qui souhaitent connaître leurs oeuvres afin d'en assurer la publicité auprès des programmateurs de festivals.
IV. Ce rapport devra être également transmis aux deux commissions des affaires culturelles et des affaires économiques des deux assemblées.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 171 rectifié, présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 15 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I - Une taxe sur le chiffre d'affaires des personnes dont l'activité est d'offrir un accès à des services de communication en ligne, ainsi que sur le chiffre d'affaires réalisé en France par les fabricants de matériel informatique, est instituée.
II - Le montant de cette taxe est de 0,5 % du chiffre d'affaires.
La parole est à M. Jack Ralite.
M. Jack Ralite. La diffusion des oeuvres sur Internet n'est possible que parce qu'il y a des fabricants de matériels informatiques et des fournisseurs d'accès. Ce n'est un secret pour personne que ces derniers ont utilisé comme argument de vente l'accès illimité à la culture. De fait, ils sont devenus des diffuseurs, à l'instar des chaînes de télévision. D'ailleurs, l'accord sur la vidéo à la demande signé entre les producteurs de cinéma et le fournisseur d'accès Free en est l'illustration, puisque ce dernier s'engage à investir dans la création cinématographique.
Nous sommes confrontés ici à un problème similaire à celui qui a été soulevé par l'exception pédagogique : l'accord ou la loi ?
S'agissant de l'exception pédagogique, notre assemblée a opté pour la loi, qui est plus pérenne, plus officielle et, théoriquement, moins tributaire des rapports de pouvoir.
De même, s'agissant de la participation des fabricants de matériel informatique et des fournisseurs d'accès à Internet, nous souhaitons que la représentation nationale ne se satisfasse pas d'un accord, certes positif, entre des parties privées. Il faut aller plus loin et légiférer en posant le principe de la participation des industriels qui permettent la diffusion des oeuvres sur Internet au financement de la création.
C'est pourquoi nous proposons de taxer le chiffre d'affaires des fournisseurs d'accès à Internet et des fabricants de matériel à hauteur de 0,5 %.
Le produit de cette taxe pourrait être affecté, comme l'est la contribution des chaînes de télévision à hauteur de 5,5 % de leur chiffre d'affaires, aux comptes spéciaux de soutien à l'industrie cinématographique et audiovisuelle. Bien sûr, il faudrait aussi créer un compte spécial pour le financement de l'industrie musicale.
Ainsi, cette taxation pourrait contribuer au financement de la création musicale et audiovisuelle. Plus précisément, elle permettrait de financer la plate-forme publique de téléchargement dont nous avons déjà débattu la semaine dernière, et dont nous reparlerons lors de la présentation de notre sous-amendement n° 256 rectifié à l'amendement 40 de la commission.
Cette mesure de démocratisation de l'accès à la culture serait financée par la taxe dont nous vous proposons la création.
Pour toutes ces raisons, nous vous demandons de voter le présent amendement, mes chers collègues.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. La commission s'est interrogée sur l'opportunité de créer une taxe sur le chiffre d'affaires des fournisseurs d'accès. Elle a conclu au caractère discutable d'une telle mesure et émet donc, pour cette raison, un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. J'ai veillé avec beaucoup d'attention à l'accord qui a été récemment conclu entre les fournisseurs d'accès à Internet, le monde du cinéma et le monde de la télévision. Celui-ci, de manière fort heureuse, permet des financements supplémentaires pour la production cinématographique.
De la même manière, les décisions qu'ont prises récemment un certain nombre de chaînes de télévision à l'égard du court-métrage sont elles aussi essentielles pour soutenir la production cinématographique.
Enfin, quand vous prenez des décisions - et je sais que cela préoccupe certains -, elles ont des conséquences. Sachez que les crédits d'impôt que vous avez votés en faveur du cinéma et de la production audiovisuelle ont eu des résultats considérables pour l'emploi, puisque le nombre de semaines de tournage en France a augmenté de 37 % entre 2004 et 2005.
Le soutien concret à la création et à la production est un sujet de préoccupation pour moi, comme il l'est pour chacun d'entre vous. En l'espèce, je considère que la voie contractuelle est la meilleure. C'est la raison pour laquelle j'émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.
Mme Catherine Morin-Desailly. Nous avons nous-mêmes posé le principe de la participation des fournisseurs d'accès à l'investissement dans la création culturelle au moyen des amendements d'appel nos 49 et 50, tendant à insérer des articles additionnels après l'article 5. Nous avions finalement conclu qu'une telle décision était prématurée. C'est pourquoi, par logique, nous ne voterons pas cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 172, présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 15 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I- Il est créé un établissement public à caractère administratif, placé sous l'autorité du ministère de la culture, chargé, en collaboration avec les personnes dont l'activité est d'offrir un accès à des services de communication en ligne, et s'appuyant sur les informations prévues à l'article L. 331-10 du code de la propriété intellectuelle, d'observer l'audience en ligne des oeuvres musicales et cinématographiques et de calculer la juste rémunération des ayants droit y correspondant.
II- Dans le respect des dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, cet établissement public a une obligation de secret concernant toutes les données à caractère personnel qu'il serait amené à traiter.
III- Les sociétés civiles prévues par l'article L. 321-1 du code de la propriété intellectuelle concluent un accord de cession de droits avec les personnes dont l'activité est d'offrir un accès à des services de communication en ligne. Celles-ci font payer à leurs utilisateurs le prix correspondant aux oeuvres téléchargées calculé par l'établissement public mentionné au II du présent article.
IV- En fonction de son revenu, la facture de l'usager sera en partie prise en charge par l'État et les collectivités locales qui le souhaiteraient.
V- L'augmentation des charges induite par cette participation publique sera compensée à due concurrence par la création d'une taxe sur le chiffre d'affaires des personnes dont l'activité est d'offrir un accès à des services de communication en ligne.
La parole est à M. Jack Ralite.
M. Jack Ralite. Dans la discussion générale, j'avais proposé que l'on réfléchisse pour l'avenir. Les dispositions adoptées ne seront pas d'effet immédiat, et, quelle que soit l'issue du vote de ce soir, nous serons obligés de revenir sur ces questions plus tôt qu'on ne le pense, car le présent texte ne résout pas les problèmes posés.
Le débat sur le présent projet de loi a été rendu très houleux par une polémique : les huit millions de Français pratiquant le téléchargement sans payer de droits d'auteur et de droits voisins sont-ils des contrefacteurs ?
D'un point de vue juridique, la question se pose effectivement. La jurisprudence, en l'état actuel du droit positif, est contradictoire. Cette question était d'autant plus brûlante - elle l'est d'ailleurs toujours - qu'elle en entraîne une autre : celle de la rémunération des auteurs, des artistes et des producteurs.
La polémique a conduit à des errements de part et d'autre : je récuse radicalement la notion de pirate, qui relève selon moi de la propagande et de l'amalgame déplacé. Pour autant, je ne suis pas présentement favorable à la gratuité, non plus que je ne le suis au compromis, de piètre qualité, envisagé un moment, à savoir la « licence globale ».
Tant que les auteurs vivront dans un monde payant, ils devront être eux aussi payés pour le travail fourni. Il en va de même pour les artistes et les producteurs. Il faut donc trouver autre chose que l'interdiction pure et simple d'un côté, la liberté libertaire de l'autre.
Cet amendement vise à procurer aux titulaires de droits une rémunération adaptée à l'environnement numérique. Le mécanisme qui nous avons imaginé implique les internautes, les fournisseurs d'accès, les titulaires de droits, les sociétés de perception et de répartition de ces droits ainsi qu'un nouvel établissement public à caractère administratif.
Les titulaires de droits cèdent leurs droits exclusifs aux fournisseurs d'accès, qui, devenant alors officiellement les diffuseurs, établissent à l'attention de l'internaute la facture correspondant au nombre d'oeuvres téléchargées.
Les fournisseurs d'accès perçoivent cette rémunération et la transmettent, via l'établissement public nouvellement créé, aux sociétés de perception et de répartition des droits, qui la répartissent aux titulaires de droits.
L'établissement public joue un rôle central, car il est chargé, grâce aux informations afférentes au régime des droits, d'évaluer la diffusion des oeuvres sur Internet et de calculer les droits correspondant à cette diffusion. Il n'effectue pas lui-même la répartition, mais transmet le résultat de ses calculs aux sociétés de perception et de répartition des droits, les SPRD, lesquelles se chargent effectivement de la rémunération.
Il faudra bien sûr que son activité soit contrôlée de près par la CNIL.
En outre, nous souhaitons l'intervention de l'État, des collectivités qui le souhaitent, voire des entreprises, avec des modalités de redistribution diversifiées, tels des mécanismes du type « carte orange », inventée par les transports franciliens. Je pense à une carte Internet qui prendrait en charge une partie significative de la facture des internautes les plus modestes, par exemple ceux qui ne sont pas assujettis à l'impôt sur le revenu. C'est une idée.
Les intérêts de ce mécanisme sont les suivants : ce dernier sauvegarde le droit exclusif ; il permet une rémunération des auteurs, artistes et producteurs proportionnelle à la diffusion des oeuvres ; il ne va pas à l'encontre de l'accroissement de la diffusion des oeuvres permise par Internet, mais, au contraire, il soutient la démocratisation culturelle par l'intervention publique en soutien du paiement final de l'utilisateur.
Pour toutes ces raisons, nous vous demandons de voter le présent amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. Cet amendement évoque une piste généreuse, mais qui n'est pas forcément celle qui est privilégiée par le projet de loi, puisqu'il s'agit de favoriser l'émergence de plates-formes de téléchargement légal permettant à la fois une juste rémunération des auteurs et bien entendu un accès le plus large possible aux oeuvres.
C'est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable.
M. Ivan Renar. C'est bien regrettable !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Le Gouvernement émet aussi un avis défavorable, parce que le système dont il est question dans cet amendement ne serait pas efficace. J'ajoute que ce projet de loi est généreux, parce qu'il va créer des offres nouvelles attractives.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 172.
(L'amendement n'est pas adopté.)
TITRE II
DROIT D'AUTEUR DES AGENTS DE L'ÉTAT, DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES ET DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS À CARACTÈRE ADMINISTRATIF
Article 16
I. - Le troisième alinéa de l'article L. 111-1 du code de la propriété intellectuelle est ainsi rédigé :
« L'existence ou la conclusion d'un contrat de louage d'ouvrage ou de service par l'auteur d'une oeuvre de l'esprit n'emporte pas dérogation à la jouissance du droit reconnu par le premier alinéa, sous réserve des exceptions prévues par le présent code. Sous les mêmes réserves, il n'est pas non plus dérogé à la jouissance de ce même droit lorsque l'auteur de l'oeuvre de l'esprit est un agent de l'État, d'une collectivité territoriale, d'un établissement public à caractère administratif, d'une autorité administrative indépendante dotée de la personnalité morale ou de la Banque de France. »
II. - Le même article est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions des articles L. 121-7-1 et L. 131-3-1 à L. 131-3-3 ne s'appliquent pas aux agents auteurs d'oeuvres dont la divulgation n'est soumise, en vertu de leur statut ou des règles qui régissent leurs fonctions, à aucun contrôle préalable de l'autorité hiérarchique. »
M. le président. L'amendement n° 170, présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après la première phrase du texte proposé par le I de cet article pour le troisième alinéa de l'article L. 111-1 du code de la propriété intellectuelle, insérer une phrase ainsi rédigée :
Les conseils des prud'hommes ne sont pas compétents pour régler les différends qui peuvent s'élever entre un auteur salarié et son employeur et qui relèvent des dispositions du livre premier et troisième du présent code.
La parole est à M. Ivan Renar.
M. Ivan Renar. Depuis l'adoption de la loi du 11 mars 1957 sur la propriété littéraire et artistique, les tentatives de faire basculer les droits patrimoniaux de l'auteur salarié dans l'escarcelle de l'employeur ont été fort nombreuses.
Cette loi a heureusement posé le principe - codifié à l'article L. 111-1 du code de la propriété intellectuelle - que le contrat de travail n'emporte pas automatiquement cession des droits d'auteur du salarié à son employeur, protégeant ainsi les journalistes, les réalisateurs, les dessinateurs, bref, tous ceux qui sont auteurs et qui ont dans le même temps un statut salarié.
Mais un courant défend les intérêts des entreprises contre les auteurs et remet régulièrement en cause ce principe clair en tentant de faire admettre l'idée d'une cession automatique ou implicite des droits de l'auteur salarié à l'employeur.
La jurisprudence des juridictions civiles résiste à ce mouvement en s'appuyant sur la défense de l'auteur salarié, qui est prévue dans le code. Mais récemment, deux décisions de la chambre sociale de la Cour de cassation, en s'appuyant sur le fait qu'aucun article du code de la propriété intellectuelle ne réserve la compétence de son application aux juridictions civiles, ont considéré que la juridiction prud'homale serait compétente en matière de droit d'auteur.
Or les conseils de prud'hommes, juridictions professionnelles non averties des règles du droit d'auteur, n'ont pas la même rigueur dans l'application du code de la propriété intellectuelle. Ainsi, ils ont considéré que le producteur d'une oeuvre audiovisuelle est cessionnaire des droits d'une réalisatrice alors qu'aucun contrat, ni de travail ni de cession de droits, n'a été signé !
C'est faire basculer le droit des salariés en faveur de l'employeur, contre la volonté du législateur, en violation des dispositions les plus protectrices de l'auteur.
Quand on connaît la grande complexité du code de la propriété intellectuelle - cette complexité sera d'ailleurs encore accentuée par les modifications qui nous sont aujourd'hui proposées -, il est évident que seuls des magistrats connaissant à la fois les règles du contrat civil et le statut protégé de l'auteur sont capables de déterminer la qualité d'auteur, la protection de l'oeuvre, de surveiller que les règles de la cession prévues par le code de la propriété intellectuelle seront respectées et de faire respecter les droits moraux et patrimoniaux de l'auteur.
Imagine-t-on un instant un conseil de prud'hommes trancher du droit moral de l'auteur dans un conflit avec l'employeur ? Imagine-t-on un instant un conseil de prud'hommes dire que tel écrit, tel film, tel dessin, tel plan d'architecture serait ou ne serait pas une oeuvre ? C'est pourtant ce qui est en train de se dessiner après que les conseils de prud'hommes ont été déclarés compétents en la matière.
Les conseillers prud'homaux consultés, tant employeurs que salariés, ne le souhaitent pas, compte tenu de la tâche complexe qui est déjà la leur.
Aussi, mes chers collègues, je vous demande de voter cet amendement n° 170, qui vise simplement à faire en sorte que les conseils de prud'hommes ne soient pas compétents pour interpréter et appliquer le code de la propriété intellectuelle.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. La commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable. Les questions posées sont certes intéressantes, mais je les soumettrai à la concertation d'une instance qui travaille de manière très efficace, à savoir le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique.
M. le président. Je mets aux voix l'article 16.
(L'article 16 est adopté.)
Article 17
Après l'article L. 121-7 du même code, il est inséré un article L. 121-7-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 121-7-1. - Le droit de divulgation reconnu à l'agent mentionné au troisième alinéa de l'article L. 111-1, qui a créé une oeuvre de l'esprit dans l'exercice de ses fonctions ou d'après les instructions reçues, s'exerce dans le respect des règles auxquelles il est soumis en sa qualité d'agent et de celles qui régissent l'organisation, le fonctionnement et l'activité de la personne publique qui l'emploie.
« L'agent ne peut :
« 1° S'opposer à la modification de l'oeuvre décidée dans l'intérêt du service par l'autorité investie du pouvoir hiérarchique, lorsque cette modification ne porte pas atteinte à son honneur ou à sa réputation ;
« 2° Exercer son droit de repentir et de retrait, sauf accord de l'autorité investie du pouvoir hiérarchique. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 219, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :
Supprimer l'avant dernier alinéa (1°) du texte proposé par cet article pour l'article L. 121-7-1 du code de la propriété intellectuelle.
L'amendement n° 220, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit l'avant dernier alinéa (1°) du texte proposé par cet article pour l'article L. 121-7-1 du code de la propriété intellectuelle :
«1° S'opposer à la modification de l'oeuvre, lorsqu'elle est décidée par l'autorité investie du pouvoir hiérarchique dans la mesure strictement nécessaire à l'accomplissement d'une mission de service public et que cette modification ne porte pas atteinte à son honneur et à sa réputation ;
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. Les droits d'auteur « à la française » se déclinent en droit patrimonial et en droit moral pour le créateur, et l'on ne peut que se féliciter de l'adoption de l'article 16, dans lequel il n'est pas dérogé à la jouissance de ses droits par un agent de l'État.
Ce texte reconnaît donc la persistance du lien entre l'oeuvre de l'esprit et l'auteur, même si celui-ci est salarié ou payé pour un service par l'État, une collectivité ou un établissement public à caractère administratif.
L'article 17 précise en son début comment s'appliquent les règles auxquelles est soumis l'agent et comment sont garanties la bonne organisation et l'activité de l'employeur.
C'est pourquoi les restrictions figurant à la fin de l'article 17 me semblent inopportunes et superflues. Elles sont superflues, car l'exercice de l'autorité hiérarchique permet des demandes fondées et un dialogue constructif. Il est inutile d'écrire que l'agent ne peut pas s'opposer à la modification de son oeuvre. En outre, ces restrictions sont inopportunes, car elles contredisent le droit moral.
Ajouterai-je qu'elles seraient du plus mauvais effet et que les élus locaux ici représentés n'ont aucune envie de se donner l'image de donneurs d'ordre soucieux, par exemple, de modifier des clichés photographiques ? La censure qui illustra l'histoire de quelques chefs d'État reniant leurs compagnons de route du passé n'est plus d'actualité. Ne laissons pas de rédaction résiduelle qui pourrait faire croire que ces pratiques seraient encore existantes et protégées par la loi. Nous n'en sommes plus là.
En revanche, le droit à l'intégrité de l'oeuvre ne doit pas être entamé. C'est précisément l'objet de l'amendement de suppression n° 219, qui est complété par l'amendement n° 220 de repli. Si nous souhaitons inscrire une disposition dans la loi, précisons au moins les conditions qui encadrent ces éventuelles modifications d'une oeuvre.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. La proposition de l'amendement n° 219 est cohérente avec la tradition personnaliste du droit d'auteur, rappelée par MM. Ralite et Charasse, selon laquelle le droit moral de l'auteur ne doit faire l'objet de restrictions qu'à titre exceptionnel et sous le contrôle du juge.
Consulté sur le projet de loi, le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique a reconnu dans son avis 2001-1 qu'« aucune réglementation restrictive du droit moral n'apparaît souhaitable ».
C'est la raison pour laquelle la commission s'en remet à la sagesse du Sénat sur cet amendement.
En revanche, elle émet un avis défavorable sur l'amendement n° 220.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote sur l'amendement n° 219.
Mme Marie-Christine Blandin. L'avis de M. le ministre, un peu sec, ne nous éclaire pas beaucoup. J'imagine assez mal qu'il cautionne l'utilisation de logiciels permettant par exemple à un élu de faire disparaître telle ou telle personne d'une photo officielle.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 221, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :
Supprimer le dernier alinéa (2°) du texte proposé par cet article pour l'article L. 121-7-1 du code de la propriété intellectuelle.
L'amendement n° 222, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le dernier alinéa (2°) du texte proposé par cet article pour l'article L. 121-7-1 du code de la propriété intellectuelle :
« 2° Exercer son droit de repentir ou de retrait, sauf lorsque l'exploitation de l'oeuvre décidée par l'autorité investie du pouvoir hiérarchique porte atteinte à son honneur ou sa réputation. »
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. Dans le même état d'esprit, nous n'avons pas à entamer le principe du droit moral en interdisant le droit de repentir ou de retrait.
L'employeur n'en est pas spolié pour autant, car il dispose de tous les moyens de l'autorité hiérarchique si des pratiques répétées ne sont pas conformes à ses attentes et s'il estime que le service public en est altéré.
Mais l'éventualité très marginale de l'exercice du droit de repentir et de retrait par un salarié ne justifie pas que la loi mentionne une telle exception au droit moral.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. Pour les mêmes raisons que précédemment, la commission émet un avis de sagesse sur l'amendement n° 221 et un avis défavorable sur l'amendement n° 222.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur les deux amendements.
M. le président. Je mets aux voix l'article 17.
(L'article 17 est adopté.)
Article 18
Après l'article L. 131-3 du même code, sont insérés trois articles L. 131-3-1 à L. 131-3-3 ainsi rédigés :
« Art. L. 131-3-1. - Dans la mesure strictement nécessaire à l'accomplissement d'une mission de service public, le droit d'exploitation d'une oeuvre créée par un agent de l'État dans l'exercice de ses fonctions ou d'après les instructions reçues est, dès la création, cédé de plein droit à l'État.
« Pour l'exploitation commerciale de l'oeuvre mentionnée au premier alinéa, l'État ne dispose envers l'agent auteur que d'un droit de préférence. Cette disposition n'est pas applicable dans le cas d'activités de recherche scientifique d'un établissement public à caractère scientifique et technologique ou d'un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel, lorsque ces activités font l'objet d'un contrat avec une personne morale de droit privé.
« Art. L. 131-3-2. - Les dispositions de l'article L. 131-3-1 s'appliquent aux collectivités territoriales, aux établissements publics à caractère administratif, aux autorités administratives indépendantes dotées de la personnalité morale et à la Banque de France à propos des oeuvres créées par leurs agents dans l'exercice de leurs fonctions ou d'après les instructions reçues.
« Art. L. 131-3-3. - Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application des articles L. 131-3-1 et L. 131-3-2. Il définit en particulier les conditions dans lesquelles un agent, auteur d'une oeuvre, peut être intéressé aux produits tirés de son exploitation quand la personne publique qui l'emploie, cessionnaire du droit d'exploitation, a retiré un avantage d'une exploitation non commerciale de cette oeuvre ou d'une exploitation commerciale dans le cas prévu par la dernière phrase du dernier alinéa de l'article L. 131-3-1. »
M. le président. L'amendement n° 223, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :
Après le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 131-3-1 du code de la propriété intellectuelle, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, la mention du nom de l'agent pour toute exploitation de l'oeuvre relevant du premier alinéa est impérative.
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. L'article 18 du projet de loi est innovant, car il dispose que le droit d'exploitation d'une oeuvre créée par un agent public est cédé de plein droit à l'État. Cette mesure est juste, car ces oeuvres sont réalisées dans le cadre d'un travail rémunéré.
Cette cession est encadrée, puisque la rédaction envisage même, sans toutefois en préciser les modalités, une éventuelle exploitation commerciale et l'intéressement de l'auteur. Il faudra finaliser cette réflexion pour que les acteurs du secteur privé ne se plaignent pas de distorsion à la concurrence.
La proposition formulée par cet amendement n° 223 concerne plus le droit moral que la rémunération. Il s'agit de préciser que le nom de l'agent doit impérativement être mentionné. Les élus locaux maîtrisent les publications institutionnelles de leur collectivité. Si la photographie ou l'ours de la publication mentionne le nom de l'auteur, les clichés peuvent être utilisés à l'extérieur. Cet amendement est donc utile.
Il arrive même que des produits soient vendus dans le cadre d'une quasi-mission de service public, comme ce peut être le cas, par exemple, des posters d'un comité départemental de tourisme. Cet amendement devient alors nécessaire. Et si des exploitations commerciales sont envisagées, il devient indispensable.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. La cession légale prévue à l'article 18 du projet de loi porte sur le droit d'exploitation de l'oeuvre créée par un agent public.
Ce mécanisme ne porte donc en aucun cas atteinte aux différents attributs du droit moral de l'agent public dont fait partie le droit au respect de son nom.
C'est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable. Le texte ne vise en effet que le droit d'exploitation.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.
Mme Marie-Christine Blandin. Le droit d'exploitation ne peut se faire dans le respect des droits de chacun que s'il y a traçabilité de l'auteur de l'oeuvre.
M. le président. Je mets aux voix l'article 18.
(L'article 18 est adopté.)
Titre III
DISPOSITIONS APPLICABLES AUX SOCIÉTÉS DE PERCEPTION ET DE RÉPARTITION DES DROITS
Articles additionnels avant l'article 19
M. le président. L'amendement n° 79, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
Avant l'article 19, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa de l'article L.321-1 du code de la propriété intellectuelle, sont insérés quatre alinéas ainsi rédigés :
« Tout titulaire de droits peut, sur sa demande, être admis comme associé d'une société de perception et de répartition des droits ayant pour objet de gérer ces droits.
« Est réputée non écrite toute stipulation des statuts d'une société de perception et de répartition des droits déniant à ses associés, ou soumettant à l'autorisation de la société, le droit :
« - d'exercer individuellement certains de leurs droits patrimoniaux, à l'exception de ceux mentionnés aux articles L.122-10, L.132-20, L.133-1, L.214-1, L.217-2 et L.311-1 ;
« - de confier la gestion d'une partie de leurs droits à une autre société de perception et de répartition des droits. »
La parole est à M. Michel Charasse.
M. Michel Charasse. L'ensemble des amendements que je défends sont pratiquement tous plus ou moins issus du rapport de la commission de contrôle des sociétés de perception et de répartition des droits, institution présidée par M. Menasseyre et créée, on s'en souvient ici, sur l'initiative du Sénat.
S'agissant de l'amendement n° 79, comme vous le savez tous, il est pratiquement impossible de recouvrer les droits de la propriété intellectuelle sans adhérer à une société de gestion.
Deux propositions figurent dans cet amendement.
Premièrement, comme c'est le cas dans plusieurs législations étrangères, il s'agit de permettre à tout titulaire de droit d'être associé de la société qui gère ses droits. Il n'est pas admissible que les sociétés de perception prétendent avoir le droit de choisir leur associé alors qu'elles sont en situation de monopole.
Deuxièmement, il est prévu d'imposer aux sociétés de perception et de répartition des droits d'autoriser leurs associés à conserver la gestion individuelle d'une partie de leurs droits ou à les confier à une autre société.
Tels sont les deux objets de l'amendement n° 79, qui est pratiquement la copie de ce qui se fait dans de nombreuses législations étrangères.
M. le président. L'amendement n° 80, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
Avant l'article 19, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L.321-1 du code de la propriété intellectuelle est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les sommes réparties aux ayants droit intègrent les produits financiers et patrimoniaux des sociétés concernées.
« Les droits prescrits en application du troisième alinéa et ceux dont les titulaires ne bénéficient pas de l'application du présent code, ainsi que les produits financiers de ces droits, sont ajoutés à la fin de chaque exercice aux droits de même nature perçus pendant cet exercice. »
La parole est à M. Michel Charasse.
M. Michel Charasse. L'amendement n° 80 est lui aussi issu du rapport de la commission Menasseyre rendu public voilà un mois, mais il a un objet différent de celui de l'amendement précédent.
Il s'agit, compte tenu des constatations faites par la commission sur l'abondance des trésoreries placées des sociétés, qui produisent des intérêts importants, et sur l'importance du patrimoine de ces dernières qui génère lui aussi des produits élevés, de prévoir que tous ces revenus financiers ou revenus du patrimoine, qui appartiennent évidemment aux auteurs, soient désormais mis en répartition avec les droits d'auteur et s'ajoutent donc aux masses à répartir.
Il est tout de même anormal que des sommes aussi importantes appartenant aux auteurs ne leur soient jamais distribuées et que les sociétés s'en servent généralement sans donner d'explication à personne, pour empiler toujours plus de trésorerie et pour financer leurs frais de gestion, d'ailleurs de plus en plus élevés.
Par ailleurs, les droits qui ne peuvent pas être répartis, faute de connaître leurs bénéficiaires, seraient, contrairement à la pratique actuelle, ajoutés, eux aussi, aux sommes mises en distribution. C'est ce que recommande la commission de contrôle des sociétés de gestion.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. La commission s'en remet à la sagesse du Sénat sur les deux amendements, mais elle souhaiterait connaître l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements.
Les sociétés de gestion collective sont des sociétés de droit privé, auxquelles les auteurs adhèrent de façon libre et volontaire.
Il est proposé de renforcer par la loi les monopoles de fait. Or les statuts des sociétés ne peuvent prévoir des règles discriminatoires s'agissant des conditions d'adhésion pour les ressortissants communautaires. En France, les ayants droit peuvent d'ores et déjà librement adhérer à des sociétés établies et les quitter. Le fractionnement des apports de droit est déjà possible.
À cet égard, je relève que les statuts des sociétés de perception et de répartition des droits respectent le principe de libre choix repris dans la recommandation de la Commission européenne du 12 octobre 2005.
Comme vous le savez, le ministère de la culture et de la communication dispose d'un pouvoir de contrôle sur les statuts des sociétés, pouvoir qu'il vous propose de renforcer afin d'accroître son efficacité. Le Gouvernement dispose également des moyens de faire respecter le principe de liberté d'adhésion, sans avoir à remettre en cause les règles du droit civil.
Par ailleurs, il est normal que les SPRD, qui sont des sociétés professionnelles, puissent fixer certaines conditions d'admission pour s'assurer de la réalité de l'activité qui justifie que l'on puisse y adhérer. S'il apparaissait que les conditions ainsi posées soient abusives ou discriminatoires, les autorités de la concurrence, françaises ou européennes, pourraient être saisies sur le fondement du droit de la concurrence.
L'équilibre qui doit être assuré entre les droits dont la gestion est confiée aux SPRD et ceux dont les ayants droit peuvent conserver une gestion individuelle relève, là aussi, de l'application du droit de la concurrence et du contrôle des autorités de la concurrence françaises ou européennes. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 79.
Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur l'amendement n° 80. Le contrôle des associés s'exerce bien évidemment sur la répartition des perceptions, et les sociétés ont d'ores et déjà une obligation de loyauté à l'égard de leurs membres, corollaire de leur pouvoir d'agir par l'effet des apports. Je souhaite que l'information des ayants droit sur les critères de répartition soit pleine et entière et, de ce point de vue, des pistes de progrès existent.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. J'ai écouté M. le ministre avec beaucoup d'attention. Comme je l'ai indiqué au Sénat, je n'ai rien inventé. C'est un problème qui me préoccupe depuis longtemps, mais il se trouve que la commission de contrôle insiste particulièrement cette année sur cette question.
Monsieur le ministre, quand un auteur adhère à une société et décide ensuite de la quitter, elle lui répond qu'elle le radiera quand il lui donnera le nom de la nouvelle société à laquelle il compte adhérer. Tant que l'auteur ne dit pas à quelle société il va s'adresser, sa société d'origine refuse de le radier.
Les propos que vous avez tenus tout à l'heure sur la liberté, monsieur le ministre, propos qui sont sans doute l'émanation de vos bureaux et de vos services (M. le ministre proteste), me font bien rire, parce qu'ils ne correspondent pas du tout à la réalité.
Par ailleurs, quand l'auteur choisit d'adhérer à l'étranger - on peut adhérer à une société de droits n'importe où en Europe ou au Canada, par exemple -, la société concernée répond immédiatement : « J'ai bien reçu votre adhésion, j'en suis très content, et bienvenue chez nous ! Je vous prie de contacter mon correspondant en France, la SACEM ou la SACD ». Ainsi, en quittant, par exemple, la SACEM, vous vous retrouvez chez elle parce que les sociétés françaises sont généralement les correspondants des sociétés étrangères.
Voilà pourquoi je ne suis pas vraiment convaincu par vos propos.
J'ajoute, sur l'amendement n° 80, que l'on ne distribue pas tout aux auteurs. Il faut lire, mes chers collègues, le rapport Menasseyre : le stock de trésorerie est de plus en plus important, soutenu par d'énormes produits financiers. C'est l'argent des auteurs, et je trouve immoral que ces derniers ne reçoivent pas ce qui est à eux.
Par conséquent, je me permets d'insister auprès du Sénat, compte tenu en particulier de l'avis de sagesse avisée de la commission, pour que ces deux amendements soient adoptés.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 80.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 19
L'article L. 321-3 du code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :
1° Dans le deuxième alinéa, les mots : « le mois » sont remplacés par les mots : « les deux mois » ;
2° Le troisième alinéa est complété par les mots : « ainsi que la conformité de leurs statuts et de leur règlement général à la réglementation en vigueur » ;
3° Il est ajouté un quatrième alinéa ainsi rédigé :
« Le ministre chargé de la culture peut, à tout moment, saisir le tribunal de grande instance pour demander l'annulation des dispositions des statuts, du règlement général ou d'une décision des organes sociaux non conformes à la réglementation en vigueur dès lors que ses observations tendant à la mise en conformité de ces dispositions ou décision n'ont pas été suivies d'effet dans un délai de six mois à compter de leur transmission ou, si la nature des observations exige une décision de l'assemblée générale de la société concernée, dès lors que ces mêmes observations n'ont pas donné lieu à décision de la plus prochaine assemblée générale suivant leur transmission. »
M. le président. L'amendement n° 81, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par le 2° de cet article pour compléter le troisième alinéa de l'article L. 321-3 du code de la propriété intellectuelle, après les mots :
de leur règlement général
insérer les mots :
à la législation et
La parole est à M. Michel Charasse.
M. Michel Charasse. Je le retire, ainsi que les amendements nos 82 et 90.
M. le président. L'amendement n°81 est retiré.
L'amendement n° 82, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par le 3° de cet article pour compléter par un quatrième alinéa l'article L. 321-3 du code de la propriété intellectuelle, après les mots :
non conformes
insérer les mots :
à la législation et
Cet amendement a été retiré par son auteur.
L'amendement n° 83, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
Après les mots :
dans un délai de
rédiger comme suit la fin du texte proposé par le 3° de cet article pour compléter par un quatrième alinéa l'article L. 321-3 du code de la propriété intellectuelle :
deux mois à compter de leur transmission, ou de six mois si une décision de l'assemblée des associés est nécessaire. »
La parole est à M. Michel Charasse.
M. Michel Charasse. Cet amendement a pour objet de définir de manière plus réaliste les délais consentis aux sociétés de perception et de répartition des droits pour la mise en conformité de leurs décisions et des dispositions de leurs statuts ou règlements généraux.
J'ai retiré les deux amendements précédents, monsieur le président, parce qu'ils visaient à apporter une précision finalement inutile, puisque la référence à la réglementation couvre forcément la législation.
S'agissant de l'amendement n° 83, un délai de deux mois paraît amplement suffisant pour réformer une décision si l'intervention de l'assemblée des associés n'est pas nécessaire. Dans le cas contraire, il n'y a pas lieu d'attendre la réunion de l'assemblée annuelle de reddition des comptes, prévue par l'article 1856 du code civil, et un délai de six mois suffit pour élaborer les modifications nécessaires et organiser la tenue d'une assemblée des associés.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. La commission émet un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.
Mme Marie-Christine Blandin. Au cours des débats, une lettre émanant d'une société de gestion de droits d'auteur qui, si j'en juge par les termes utilisés, était sans doute mécontente des amendements de M. Charasse, nous a été remise en main propre.
Je tenais simplement à alerter notre institution sur ce genre de pratique qui relève de la pression.
En outre, je dirai, d'un point de vue purement pragmatique, que si tous les lobbies qui se sont formés et mobilisés autour de ce texte avaient agi de la sorte, nous faisant remettre en main propre par huissier leurs arguments, leurs doléances et propositions, notre pupitre n'y suffirait plus !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 83.
M. le président. Je mets aux voix l'article 19, modifié.
(L'article 19 est adopté.)
Article additionnel après l'article 19
L'amendement n° 84 rectifié, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé
Après l'article 19, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 321-5 du code de la propriété intellectuelle est ainsi rédigé :
« Art. L. 321-5. - L'information des associés est assurée dans les conditions prévues par l'article 1855 du code civil, aucun associé ne pouvant toutefois obtenir communication du montant des droits attribués à tout autre ayant droit que lui-même. »
La parole est à M. Michel Charasse.
M. Michel Charasse. Cet amendement prévoit que l'information des associés est assurée dans les conditions prévues par l'article 1855 du code civil, aucun associé ne pouvant toutefois obtenir communication du montant des droits attribués à un autre ayant droit que lui-même.
C'est une disposition qui nous revient, si je puis dire, puisqu'elle avait déjà été votée précédemment par le Sénat. Elle avait cours avant la loi Lang de 1985, sans avoir provoqué alors la moindre difficulté particulière d'application.
C'est une information à laquelle les membres des sociétés sont particulièrement attachés. C'est pourquoi je me permets d'insister pour que cet amendement soit adopté.
J'ajoute que le Sénat avait déjà adopté précédemment un amendement analogue le 17 juillet 2001.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. Cet amendement visant à apporter une meilleure information aux associés des SPRD, la commission émet un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Nous partageons tous cet objectif de transparence. Pour autant, un certain nombre de dispositions récentes, prises par voie réglementaire ou contractuelle, ont permis de progresser pour atteindre un bon point d'équilibre.
C'est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 84 rectifié.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 19.
Articles additionnels après l'article 19 ou après l'article 20
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 59, présenté par Mme Morin-Desailly, M. Nogrix et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Après l'article 20, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le deuxième alinéa de l'article L. 321-9 du code de la propriété intellectuelle, le taux : « 25 % » est remplacé par le taux : « 30 % ».
La parole est à M. André Vallet.
M. André Vallet. La rémunération pour copie privée instituée par loi de 1985 prévoit que 25 % de cette rémunération, soit environ 40 millions d'euros, est destinée à des actions d'aide à la création, à la diffusion du spectacle vivant et à des actions de formation des artistes.
Mais ce pourcentage n'est affecté qu'après déduction des frais de gestion des sociétés de perception et de répartition des droits qui s'élèvent à 5 % en moyenne.
Comme l'a montré le rapport récent de la commission permanente de contrôle des sociétés de perception et de répartition des droits, ces frais de gestion sont excessifs, au détriment des rémunérations des ayants droit et de l'aide au spectacle vivant.
Par conséquent, les 25 % ne sont perçus que sur les 95 % restants, et non pas sur la totalité de la rémunération pour copie privée. Il en résulte un manque pour ce fonds d'aide à la création et à la diffusion du spectacle vivant.
C'est pourquoi l'amendement n° 59 a pour objet d'augmenter ce fonds à hauteur de 30 %. Cette manne financière, extrêmement importante pour les manifestations culturelles ayant lieu dans toute la France et pour les artistes, doit être aussi juste que possible.
Si cet amendement est adopté, la création et le spectacle vivant bénéficieront de fonds plus importants dans une période où ils en ont bien besoin, monsieur le ministre, et alors que les sommes collectées au titre de la rémunération pour copie privée risquent d'être réduites.
M. le président. L'amendement n° 85, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
Après l'article 19, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les quatre premiers alinéas de l'article L. 321-9 du code de la propriété intellectuelle sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« Ces sociétés peuvent utiliser à des actions d'aide à la création, à la diffusion du spectacle vivant et à des actions de formation des artistes 5 % au plus des sommes provenant de la rémunération pour copie privée. Le montant et la répartition des sommes correspondantes sont soumis à l'approbation de l'assemblée des associés, qui se prononce à la majorité des deux tiers. »
La parole est à M. Michel Charasse.
M. Michel Charasse. Ma démarche est exactement à l'opposé de celle de mon collègue qui s'est exprimé à l'instant.
J'estime, en effet, que 25 %, aujourd'hui, c'est beaucoup trop ! Il s'agit de l'argent qui appartient à des auteurs, et c'est une ponction faite d'office sur les droits de ces derniers pour financer des opérations extérieures très variées, des spectacles, des invitations, des manifestations diverses, parfois des congrès syndicaux et autres, bref des choses qui n'ont souvent rien à voir avec l'intérêt des auteurs !
Je propose donc de ramener ce taux à 5 %, ce qui est largement suffisant ! (Rires.)
Vous pouvez rire, monsieur le ministre,...
M. Michel Charasse. ... mais je sais bien que, si mon amendement est voté, vos services vont être très gênés. En effet, ils passent leur temps à solliciter des sociétés de gestion de droits pour quelques euros de plus, afin de compléter le budget de manifestations plus ou moins importantes que le ministère ne peut pas prendre en charge.
M. Michel Charasse. Si, c'est connu ! Cela se passe ainsi : « Allo "Coco", j'ai un festival à Avignon ; il me manque 300 000 ; le ministre est d'accord pour 150 000 ; si la SACEM ou la SACD pouvaient me donner 150 000... ». Et l'autre répond : « Ah ! c'est difficile...Vois du côté de la SCAM, ou de l'ADAMI. ». Les choses se passent ainsi !
J'ajoute, monsieur le ministre, parce qu'on ne vous l'a peut-être pas dit, que la totalité des 25 % n'est pas dépensée. Mais le reliquat n'est pas pour autant redistribué aux auteurs !
M. Michel Charasse. Oui, cela peut donner des idées, surtout à vos services...
M. Ivan Renar. Les « cocos » n'ont rien à voir dans cette affaire ! (Rires.)
M. Michel Charasse. Allons bon !... C'est une expression familière du monde artistique que M. Ralite, qui le fréquente beaucoup, a comprise, lui, et il n'y a aucune confusion possible.
Pour en revenir à l'amendement, je propose donc le taux de 5 %, ce qui est largement suffisant pour ce que les sociétés de droits en font.
Monsieur le ministre, ne riez pas trop, relisez le rapport Menasseyre. Mais j'ai l'impression que vous n'avez pas beaucoup le temps de lire en ce moment, n'est-ce pas ? C'est dommage ! Ces débats représentent évidemment beaucoup de travail pour vous, mais, si vous aviez pris un petit moment pour lire ce rapport, comme je l'ai moi-même fait pendant un week-end, vous auriez été horrifié, surtout d'être le tuteur et le surveillant de tout ce bazar ! (Rires.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. La commission a estimé souhaitable d'en rester au taux de 25 % et émet donc un avis défavorable sur les amendements nos 59 et 85.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. La capacité financière offerte par cette tranche de 25 % est utilisée de manière positive et utile pour divers soutiens et interventions. Faut-il augmenter ce pourcentage ? Je ne le crois pas, parce que cela priverait les auteurs d'une juste rémunération.
En revanche, on peut atteindre l'objectif visé par l'amendement n° 59 en réduisant les frais de gestion des sociétés de droits.
M. Michel Charasse. Ah !
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements nos 59 et 85.
M. Michel Charasse. Ah !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 85.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article additionnel après l'article 19 (suite)
M. le président. L'amendement n° 86, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
Après l'article 19, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 321-9 du code de la propriété intellectuelle, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Les actions mentionnées au premier alinéa de l'article L. 321-9 s'entendent exclusivement :
« 1° Pour l'aide à la création, des concours apportés à la création d'une oeuvre, à son interprétation, à la première fixation d'une oeuvre ou d'une interprétation sur un phonogramme ou un vidéogramme ;
« 2° Pour l'aide à la diffusion du spectacle vivant, des concours apportés à la production, à la représentation et à la promotion des spectacles vivants ;
« 3° Pour l'aide à la formation, des concours apportés à des actions de formation d'auteurs ou d'artistes-interprètes. »
La parole est à M. Michel Charasse.
M. Michel Charasse. Apparemment, le Sénat ne veut pas diminuer le taux de prélèvement, bien que j'aie dit qu'il me semblait exagéré, d'autant plus, je le répète, que la totalité des fonds n'est pas utilisée, contrairement à ce que l'on pourrait croire.
L'amendement n° 86 tend, lui, à préciser d'une façon beaucoup plus stricte et plus claire quelles actions peuvent être financées avec cet argent arraché aux auteurs, sans leur accord, alors qu'il leur appartient, comme si l'on demandait aux chercheurs de financer la recherche sur leurs salaires !
Cet amendement prévoit que ces actions financées avec les 25 % maintenus concernent, premièrement, l'aide à la création, sous forme de concours apporté à la création d'une oeuvre, à son interprétation, à la première fixation d'une oeuvre ou d'une interprétation sur un phonogramme ou un vidéogramme, deuxièmement, l'aide à la diffusion du spectacle vivant par des concours apportés à la production, à la représentation, à la promotion des spectacles vivants, et, enfin, troisièmement, l'aide à la formation par des concours apportés à des actions de formation d'auteurs ou d'artistes-interprètes.
Le reste serait interdit, ce qui éviterait bien des gaspillages !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. Cet amendement est bienvenu, puisqu'il permet de définir précisément l'affectation des sommes prélevées en application de l'article L. 321- 9 et de limiter les abus liés à une interprétation extensive de dispositions réglementaires contestables. La commission émet donc un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Malgré l'excellente coopération entre le Gouvernement et la commission des affaires culturelles du Sénat, à la différence du rapporteur, j'émets un avis défavorable sur cet amendement.
En effet, ne croyez pas que les interventions décidées soient des abus.
M. Michel Charasse. Ce n'est pas moi qui le dis !
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Il existe de multiples causes susceptibles de nous rassembler, notamment en matière d'éducation artistique, de formation, de sensibilisation des jeunes, un certain nombre de manifestations qui ne sont pas, je le reconnais, exclusivement ou directement artistiques au sens classique du terme, mais qui, pour autant, correspondent à des missions culturelles souhaitables.
Je vous donnerai un exemple : si cet amendement était adopté, le financement des Victoires de la musique par ce fonds ne serait plus assuré.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. Michel Charasse. Si j'avais su, j'aurais apporté ma liste moi aussi !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 86.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 19.
Article 20
L'article L. 321-12 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les règles comptables communes aux sociétés de perception et de répartition des droits sont établies dans les conditions fixées par le Comité de la réglementation comptable. »
M. le président. L'amendement n° 87, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
I. - Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
... - A. Le premier alinéa de l'article L. 122-10 du code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :
1° La première phrase est ainsi rédigée : « Le droit d'autoriser la reproduction par reprographie d'une oeuvre publiée ne peut être exercé que par une société régie par le titre II du livre III et agréée à cette fin par le ministre chargé de la culture. »
2° Dans la deuxième phrase, les mots : « du droit ainsi cédé » sont remplacés par les mots : « de ce droit » ;
3° Dans la dernière phrase, le mot : « cessionnaire » est remplacé par le mot : « gestionnaire ».
B. Dans le dernier alinéa de l'article L. 122-12 du même code, le mot : « cessionnaires » est remplacé par le mot : « gestionnaires ».
... - A. L'article L. 321-2 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 321-2. - Les sociétés de perception et de répartition des droits sont les mandataires de leurs associés.
« Les contrats qu'elles concluent conformément à leur objet et en exécution des mandats de leurs associés avec les utilisateurs de tout ou partie de leur répertoire sont des actes civils. »
B. À l'expiration d'un délai d'un an suivant la date de publication de la présente loi, seront réputées non écrites les clauses statutaires des sociétés de perception et de répartition des droits non conformes au premier alinéa de l'article L. 321-2 du code de la propriété intellectuelle.
II. - En conséquence, faire précéder cet article de la mention :
I. -
La parole est à M. Michel Charasse.
M. Michel Charasse. Là encore, la commission permanente de contrôle des sociétés de perception et de répartition des droits a formulé un certain nombre d'observations, notamment sur la situation exacte des associés des sociétés, point important qui a dû, je l'espère, vous être signalé, monsieur le ministre.
Le dernier rapport de cette commission précise que cette harmonisation concernant les règles comptables des SPRD achoppe sur la question de la nature des relations contractuelles entre les sociétés et leurs associés. Ces relations, au-delà des formulations volontiers et sans doute intentionnellement approximatives des statuts, se situent soit dans la logique du mandat, soit dans celle d'une cession de droits.
Le régime de la cession de droits, inauguré par la SACEM en 1955, a été ensuite adopté, dans des conditions souvent peu respectueuses du principe de l'intangibilité des engagements des associés, par bon nombre de sociétés, et non des moindres - la SACD pour les droits audiovisuels, la SCAM, d'autres sociétés de droits et même les sociétés d'artistes-interprètes. Il a été prévu par la loi, bien inutilement et sans que les travaux préparatoires éclairent ce curieux choix, au profit des sociétés assurant la gestion collective obligatoire du droit de reproduction par reprographie.
Sans même parler du fait que les associés ne sont en général pas conscients d'avoir été ainsi dépossédés, l'« apport cession » pose un certain nombre de problèmes.
Il s'agit d'un « contrat innommé », qui ne s'analyse ni comme un apport en société ni comme un apport à titre onéreux. Quant à la qualification de « contrat fiduciaire », elle est de pure fantaisie, la fiducie n'existant pas en droit français, en tout cas, pas encore.
Il ne comporte pour l'associé que des désavantages par rapport au mandat.
Il a pour effet d'incorporer les droits aux actifs de la société, ce qui interdirait aux associés d'en recouvrer la propriété en cas de procédure collective.
Il n'est en rien indispensable pour donner aux SPRD les moyens d'exercer leur mission.
Afin d'écarter ces inconvénients, de clarifier les relations entre sociétés et associés, et de lever un obstacle sérieux à l'indispensable harmonisation des règles comptables des SPRD, cet amendement vise à généraliser le régime du mandat.
Il prévoit donc de rectifier la rédaction des dispositions du code relatives à la gestion du droit de reproduction par reprographie et de modifier l'article L. 321-2 pour poser le principe que les SPRD, comme le souhaite la commission de contrôle, ne peuvent être que les mandataires, et rien d'autre, de leurs associés.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. La commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 20.
(L'article 20 est adopté.)
Article additionnel après l'article 20
M. le président. L'amendement n° 88, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
Après l'article 20, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 321-12 du code de la propriété intellectuelle, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... Les sociétés de perception et de répartition des droits constituent, pour mener les actions de prévoyance de solidarité et d'entraide bénéficiant à leurs associés ou aux ayants droit de ces derniers, des personnes morales de droit privé régies par les dispositions du code de la mutualité. »
La parole est à M. Michel Charasse.
M. Michel Charasse. Cet amendement, dernier de ma série, concerne une question particulière. Les sociétés de gestion ont institué une cotisation obligatoire perçue sur les droits revenant aux auteurs pour financer des oeuvres sociales. C'est une sorte de mutualisation, qui fonctionne depuis fort longtemps.
Or, les règles européennes en matière de gestion de ce type de fonds d'assurances conduisent à proposer - c'est l'objet de mon amendement - que cette partie des prélèvements opérés sur les droits pour financer des oeuvres sociales sous une forme mutualiste soit soumise soit à totale concurrence - ce qui interdit tout système captif obligatoire -, soit au code de la mutualité. Ces fonds relèveraient ainsi des mêmes contrôles que les fonds mutualistes.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Michel Charasse. Pourrait-on savoir pourquoi ? Il ne faudrait pas que la Cour des comptes fourre son nez là-dedans...
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Il appartient aux associés de déterminer librement le mode de gestion de leurs droits. La cession des droits peut sembler contraignante pour le créateur mais elle le protège aussi. En effet, le rapport de force dans la négociation avec un utilisateur n'est pas souvent en faveur du créateur. Si je partage l'objectif d'harmoniser la présentation des comptabilités, il ne me semble aucunement nécessaire d'harmoniser la nature juridique des apports. C'est d'ailleurs la conclusion des études réalisées respectivement, même si on n'est pas toujours obligé de les suivre, par un magistrat à la Cour de cassation et par un professeur de droit, qui ont été transmises au conseil national de la comptabilité. Ces avis d'experts me semblent positifs.
M. le président. Monsieur Charasse, l'amendement est-il maintenu ?
M. Michel Charasse. Non, je le retire. À cette heure tardive, nous ne nous comprenons pas avec le ministre, qui ne m'a pas répondu exactement sur la question posée. J'y reviendrai. De toute façon, cela dure depuis Beaumarchais ; on peut donc bien attendre encore quelque temps...
M. le président. L'amendement n° 88 est retiré.
Article 20 bis
I. - Le 4° de la section V du chapitre II du titre Ier de la première partie du livre Ier du code général des impôts est ainsi rédigé :
« 4° Crédit d'impôt pour dépenses de production d'oeuvres phonographiques
« Art. 220 octies - I. - Les entreprises de production phonographique au sens de l'article L. 213-1 du code de la propriété intellectuelle, soumises à l'impôt sur les sociétés et existant depuis au moins trois années, peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de production, de développement et de numérisation d'un enregistrement phonographique ou vidéographique musical (vidéomusique ou disque numérique polyvalent musical) mentionnées au III, à condition de ne pas être détenues, directement ou indirectement, par un éditeur de service de télévision ou de radiodiffusion.
« II. - 1. Pour avoir droit au crédit d'impôt, les productions d'enregistrements phonographiques ou vidéographiques musicaux mentionnés au I doivent remplir les conditions cumulatives suivantes :
« a) Être réalisées avec le concours de personnel non permanent de l'entreprise : artistes-interprètes, solistes et musiciens, et techniciens collaborateurs à la réalisation de la production qui sont soit de nationalité française, soit ressortissants d'un État membre de l'Espace économique européen ; les étrangers autres que les ressortissants européens précités, ayant la qualité de résidents français, sont assimilés aux citoyens français ;
« b) Être réalisées par des entreprises et industries techniques liées à la production phonographique qui sont établies en France ou dans un État membre de l'Espace économique européen et qui y effectuent les prestations liées à la réalisation d'un enregistrement phonographique ainsi qu'aux opérations de post-production ;
« c) Porter sur des productions phonographiques d'albums de nouveaux talents au sens de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, et de compositeurs européens ou d'artistes-interprètes de musiques instrumentales qui n'ont pas dépassé le seuil de 100 000 ventes pour deux albums distincts précédant ce nouvel enregistrement.
« 2. Le développement et la numérisation des productions phonographiques doivent porter sur des productions phonographiques telles que définies au 1.
« III. - Le crédit d'impôt, calculé au titre de chaque exercice, est égal à 20 % du montant total des dépenses suivantes engagées entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2009, correspondant à des opérations effectuées en France ou dans un État membre de l'Espace économique européen.
« 1. Pour les dépenses correspondant aux frais de production d'un enregistrement phonographique :
« - les frais de personnel autre que le personnel permanent de l'entreprise : les salaires et charges sociales afférents aux artistes-interprètes, au réalisateur, à l'ingénieur du son et aux techniciens engagés pour la réalisation d'un enregistrement phonographique par l'entreprise de production ;
« - les dépenses liées à l'utilisation des studios d'enregistrement ainsi qu'à la location et au transport de matériels et d'instruments ;
« - les dépenses liées à la conception graphique d'un enregistrement phonographique ;
« - les dépenses de post-production : montage, mixage, codage, matriçage et frais de création des visuels ;
« - les dépenses liées au coût de numérisation et d'encodage des productions.
« 2. Pour les dépenses liées au développement de productions phonographiques mentionnées au 1 du II :
« - les frais de répétition des titres ayant fait l'objet d'un enregistrement dans les conditions mentionnées au 1 du II (location de studio, location et transport de matériels et d'instruments, salaires et charges sociales afférents aux personnes mentionnées au a du 1 du II) ;
« - les dépenses engagées afin de soutenir la production de concerts de l'artiste en France ou à l'étranger, dont le montant global est fixé dans le cadre d'un contrat d'artiste ou de licence ;
« - les dépenses engagées au titre de la participation de l'artiste à des émissions de télévision ou de radio dans le cadre de la promotion de l'oeuvre agréée, prévues par le contrat d'artiste ou de licence ;
« - les dépenses liées à la réalisation et la production d'images permettant le développement de la carrière de l'artiste ;
« - les dépenses liées à la création d'un site internet dédié à l'artiste dans le cadre du développement de sa carrière dans l'environnement numérique.
« Le montant des dépenses dites de développement éligibles au crédit d'impôt est limité à 350 000 € par enregistrement phonographique. Ces dépenses devront être engagées dans les dix-huit mois suivant la fixation de l'oeuvre au sens de l'article L. 213-1 du code de la propriété intellectuelle ou de la production d'un disque numérique polyvalent musical.
« 3. Le montant des dépenses définies aux 1 et 2, lorsqu'elles sont confiées à des entreprises mentionnées au b du 1 du II, sont plafonnées à 2 300 000 €.
« 4. Pour les entreprises qui ne répondent pas à la définition européenne de la petite et moyenne entreprise au sens du règlement (CE) n° 70/2001 de la Commission, du 12 janvier 2001, concernant l'application des articles 87 et 88 du traité CE en faveur des petites et moyennes entreprises, ces dépenses entrent dans la base de calcul du crédit d'impôt pour les seules productions qui excèdent la moyenne, après application d'une décote de 20 %, des productions définies au c du 1 du II réalisées au titre des deux derniers exercices. En cas de décimale, l'unité supérieure est retenue.
« IV. - Les dépenses ouvrent droit au crédit d'impôt à compter de la délivrance, par le ministère de la culture et de la communication, d'un agrément à titre provisoire attestant que les productions phonographiques remplissent les conditions prévues au 1 du II. Cet agrément est délivré après avis d'un comité d'experts dont les modalités de fonctionnement sont précisées par décret, sur la base de pièces justificatives comprenant, notamment :
« - par artiste-interprète ou compositeur, la liste des albums antérieurs, par ordre chronologique de première commercialisation en France et leurs résultats en nombre d'unités vendues ;
« - la liste des albums tels que définis au 1 du II par date de première commercialisation prévisionnelle pour l'exercice en cours ;
« - pour le calcul du seuil mentionné au 4 du III, la liste de l'ensemble des productions telles que définies au c du 1 du II, commercialisées les deux années précédant l'année de référence pour le calcul du crédit d'impôt.
« V. - Les subventions publiques reçues par les entreprises à raison des dépenses ouvrant droit au crédit d'impôt sont déduites des bases de calcul de ce crédit.
« VI. - 1. La somme des crédits d'impôt calculés au titre des dépenses éligibles ne peut excéder 500 000 € par entreprise et par exercice.
« 2. En cas de coproduction, le crédit d'impôt est accordé à chacune des entreprises, proportionnellement à sa part dans les dépenses exposées. »
II. - Après l'article 220 P du même code, il est inséré un article 220 Q ainsi rédigé :
« Art. 220 Q. - Le crédit d'impôt défini à l'article 220 octies est imputé sur l'impôt sur les sociétés dû par l'entreprise au titre de l'exercice au cours duquel les dépenses définies au III de cet article ont été exposées. Si le montant du crédit d'impôt excède l'impôt dû au titre dudit exercice, l'excédent est restitué.
« L'excédent de crédit d'impôt constitue au profit de l'entreprise une créance sur l'État d'un montant égal. Cette créance est inaliénable et incessible, sauf dans les conditions prévues par les articles L. 313-23 à L. 313-35 du code monétaire et financier.
« L'agrément visé au premier alinéa du IV de l'article 220 octies ne peut être accordé lorsque l'ensemble des obligations légales, fiscales et sociales ne sont pas respectées par l'entreprise souhaitant bénéficier du dispositif.
« Le crédit d'impôt obtenu au titre des dépenses relatives à des oeuvres n'ayant pas reçu, dans un délai maximum de vingt-quatre mois à compter de leur fixation au sens de l'article L. 213-1 du code de la propriété intellectuelle ou de la production d'un disque numérique polyvalent musical, l'agrément à titre définitif délivré par le ministère de la culture et de la communication attestant que les conditions visées au 1 du II ont été respectées, fait l'objet d'un reversement.
« L'agrément à titre définitif est délivré par le ministère de la culture et de la communication après avis d'un comité d'experts dont les modalités de fonctionnement sont précisées par décret, sur la base de pièces justificatives, comprenant notamment un document comptable certifié par un expert-comptable indiquant le coût définitif des opérations, les moyens de leur financement et faisant apparaître précisément les dépenses engagées ainsi que la liste nominative définitive du personnel non permanent, des entreprises et industries techniques et des prestataires spécialisés, précisant leur nationalité. »
III. - Le 1 de l'article 223 O du même code est complété par un q ainsi rédigé :
« q) Des crédits d'impôt dégagés par chaque société du groupe en application de l'article 220 octies ; les dispositions de l'article 220 Q s'appliquent à la somme de ces crédits d'impôt. »
IV. - Un décret fixe les conditions d'application du présent article.
V. - Les dispositions du I s'appliquent aux dépenses exposées pour la production, le développement et la numérisation d'enregistrements phonographiques ou vidéographiques musicaux ayant reçu un agrément à titre provisoire à compter du 1er janvier 2006.
VI. - La perte de recettes pour l'État est compensée par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. le président. L'amendement n° 29 rectifié, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le c) du 1 du II du texte proposé par le I de cet article pour l'article 220 octies du code général des impôts :
« c) porter sur des productions phonographiques d'albums de nouveaux talents définis comme :
- des artistes ou groupes d'artistes interprétant des oeuvres musicales d'expression française ou dans une langue régionale en usage en France ;
- des compositeurs ou des artistes-interprètes européens de musiques instrumentales.
Les artistes ou groupes d'artistes et les compositeurs ou artistes-interprètes mentionnés aux deux alinéas précédents ne doivent pas avoir dépassé le seuil de 100 000 ventes pour deux albums distincts précédant ce nouvel enregistrement.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur. C'est un amendement de précision.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 30, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le c) du 1 du II du texte proposé par le I de cet article pour l'article 220 octies du code général des impôts, remplacer les mots :
et de compositeurs européens ou d'artistes-interprètes
par les mots :
et de compositeurs ou d'artistes-interprètes européens
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de précision.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 31, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter le deuxième alinéa (1) du III du texte proposé par le I de cet article pour l'article 220 octies du code général des impôts par les mots :
ou vidéographique musical
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur. C'est aussi un amendement de précision.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 32, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le huitième alinéa (2) du III du texte proposé par le I de cet article pour l'article 220 octies du code général des impôts, après le mot :
phonographiques
insérer les mots :
ou vidéographiques musicales
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur. C'est également un amendement de précision.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 33, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter le 3 du III du texte proposé par le I de cet article pour l'article 220 octies du code général des impôts par les mots :
par entreprise et par exercice
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur. C'est encore un amendement de précision.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 34, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du 4 du III du texte proposé par le I de cet article pour l'article 220 octies du code général des impôts, remplacer les mots :
du règlement (CE) n° 70/2001 de la Commission, du 12 janvier 2001, concernant l'application des articles 87 et 88 du traité CE en faveur des petites et moyennes entreprises
par les mots :
de la recommandation n°2003/361/CE de la Commission, du 6 mai 2003, concernant la définition des micros, petites et moyennes entreprises
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur. C'est toujours un amendement de précision.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 20 bis, modifié.
(L'article 20 bis est adopté.)
Article 20 ter
Le II de l'article 5 de la loi n° 98-261 du 6 avril 1998 portant réforme de la réglementation comptable et adaptation du régime de la publicité foncière est complété par les mots : « et, lorsqu'ils concernent les sociétés de perception et de répartition des droits, du ministre chargé de la culture ». - (Adopté.)
Article additionnel après l'article 20 ter
M. le président. L'amendement n° 35, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l'article 20 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 132-25 du code de la propriété intellectuelle est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les accords relatifs à la rémunération des auteurs conclus entre les organismes professionnels d'auteurs ou les sociétés civiles d'auteurs mentionnées au titre II du Livre III et les organisations représentatives d'un secteur d'activité, peuvent être rendus obligatoires à l'ensemble des intéressés du secteur d'activité concerné par arrêté du ministre chargé de la culture. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur. La commission propose d'insérer un article additionnel visant à instituer une procédure d'extension des accords conclus entre des organisations représentatives et relatives à la rémunération des auteurs. Il s'agit de confier au ministre de la culture et de la communication compétence pour procéder à l'extension à l'ensemble d'un secteur d'activité d'accords collectifs visant à rémunérer les auteurs et signés par les organisations représentatives.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. Je n'ai pas très bien compris pourquoi la commission, à mon avis très avisée sur beaucoup de points, a déposé cet amendement. Ce dernier complète, si l'on peut dire car il n'a pas grand rapport avec lui, l'article L. 132-25 du code de la propriété intellectuelle, qui pose le principe de la rémunération proportionnelle des auteurs d'oeuvres audiovisuelles, cette rémunération devant être versée par le producteur.
Cet amendement prétend se calquer sur le dispositif de l'article L. 212-8 du code, qui, je crois, n'a été appliqué qu'une seule fois et qui permet l'extension par le ministre de la culture des accords collectifs fixant le niveau minimum des rémunérations, de nature salariale, dues aux artistes-interprètes des oeuvres audiovisuelles. C'est curieux, car, comme nous le savons, mes chers collègues, les droits d'auteur ne sont pas fixés par des accords collectifs.
Mais, en fait, il ne s'agit pas du tout de cela. L'amendement permettrait en effet l'extension des « accords relatifs à la rémunération des auteurs » - c'est ce que nous a dit M. le rapporteur - conclus par les sociétés de gestion.
Le problème vient du fait que les sociétés de gestion ne signent pas d'accords de rémunération. Elles concluent des accords autorisant l'exploitation des droits dont elles ont la gestion, autrement dit des contrats de cession de droits. Ou bien c'est ce que veut dire M. le rapporteur, mais c'est mal exprimé, ou c'est bien ce que je lis et, dans ce cas-là, je ne vois pas comment ces sociétés pourraient faire, puisque, je le répète, elles ne signent pas d'accords de rémunération.
Ce que l'on veut, me semble-t-il, c'est permettre d'étendre ces contrats à des exploitants qui ne les auraient pas signés, et à des droits dont les sociétés de droits ne seraient pas gestionnaires. Ce serait contraire à tous les principes du droit des contrats et du droit de propriété.
J'ajoute que le texte proposé par la commission me paraît d'autant plus choquant que les droits visés par cet amendement - il s'agit par exemple, vous le savez sans doute comme moi, monsieur le ministre, des droits d'exploitation des oeuvres cinématographiques sous forme de vidéogrammes et des droits de vidéo à la demande pour l'audiovisuel - peuvent parfaitement faire l'objet d'une gestion individuelle directe.
Cette gestion est à l'avantage des auteurs, qui peuvent négocier avec le producteur le taux de leur rémunération proportionnelle, qui perçoivent cette rémunération sans délai ni frais de gestion et qui peuvent par ailleurs, en application de l'article L. 132-28, en contrôler le mode de calcul.
Je ne souhaite pas qu'on me réponde que la gestion collective leur assure une rémunération plus importante : le protocole d'accord entre la SACD et les producteurs de cinéma pour la vidéo à la demande prévoit pour les auteurs une rémunération de 2 % ! Cela fait sûrement l'affaire des producteurs, mais à mon avis pas vraiment celle des auteurs.
Mais peu importe aux sociétés de gestion collective : ce qu'elles veulent, c'est développer le montant de leurs perceptions et de leurs prélèvements au titre des frais de gestion.
Monsieur le ministre, je ne vous ferai pas l'injure - j'ai trop d'estime pour vous - de croire que vous accepteriez d'étendre des accords de cession de droits.
Mais l'avenir n'appartient à personne et, de toute façon, même si ce texte ne devait jamais être appliqué, je crois préférable de ne pas inscrire dans le code de la propriété intellectuelle un dispositif qui porte autant atteinte au droit d'auteur.
La meilleure solution serait donc que la commission accepte de réfléchir et de retirer cet amendement dangereux, ou, sinon, que le Sénat ne le vote pas.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 20 ter.
TITRE IV
DÉPÔT LÉGAL
Article 21
Le dernier alinéa de l'article L. 131-2 du code du patrimoine est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les logiciels et les bases de données sont soumis à l'obligation de dépôt légal dès lors qu'ils sont mis à disposition d'un public par la diffusion d'un support matériel, quelle que soit la nature de ce support.
« Sont également soumis au dépôt légal les signes, signaux, écrits, images, sons ou messages de toute nature faisant l'objet d'une communication au public par voie électronique. » - (Adopté.)
Article 22
L'article L. 131-1 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les organismes dépositaires doivent se conformer à la législation sur la propriété intellectuelle sous réserve des dispositions particulières prévues par le présent titre. » - (Adopté.)
Article 23
I. - L'article L. 132-2 du même code est ainsi modifié :
1° Le quatrième alinéa c est ainsi rédigé :
« c) Celles qui éditent, produisent ou importent des logiciels ou des bases de données ; »
2° Avant le dernier alinéa, il est inséré un i ainsi rédigé :
« i) Celles qui éditent ou produisent en vue de la communication au public par voie électronique, au sens du deuxième alinéa de l'article 2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, des signes, signaux, écrits, images, sons ou messages de toute nature. »
II. - Après l'article L. 132-2 du même code, il est inséré un article L. 132-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 132-2-1. - Les organismes dépositaires mentionnés à l'article L. 132-3 procèdent, conformément aux objectifs définis à l'article L. 131-1, auprès des personnes mentionnées au i de l'article L. 132-2, à la collecte des signes, signaux, écrits, images, sons ou messages de toute nature mis à la disposition du public ou de catégories de public.
« Ces organismes informent les personnes mentionnées au i de l'article L. 132-2 des procédures de collecte qu'ils mettent en oeuvre pour permettre l'accomplissement des obligations relatives au dépôt légal. Ils peuvent procéder eux-mêmes à cette collecte selon des procédures automatiques ou en déterminer les modalités en accord avec ces personnes. La mise en oeuvre d'un code ou d'une restriction d'accès par ces personnes ne peut faire obstacle à la collecte par les organismes dépositaires précités.
« Les organismes chargés de la gestion des noms de domaine et le Conseil supérieur de l'audiovisuel sont autorisés à communiquer aux organismes dépositaires les données d'identification fournies par les personnes mentionnées au i de l'article L. 132-2.
« Les conditions de sélection et de consultation des informations collectées sont fixées par décret en Conseil d'État pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés. »
M. le président. L'amendement n° 36, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après le 1° du I de cet article, insérer deux alinéas ainsi rédigés :
1°bis Le septième alinéa (f) est ainsi rédigé :
« f) Les services de radio et de télévision au sens de la loi nº 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ; »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de précision visant à soumettre l'ensemble des services de radio et de télévision à l'obligation de dépôt légal.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'article 24 a été supprimé par l'Assemblée nationale.
Article 25
I et II. - Supprimés.
III. - A. - L'article L. 132-4 du code du patrimoine est ainsi rédigé :
« Art. L. 132-4. - L'auteur ne peut interdire aux organismes dépositaires, pour l'application du présent titre :
« 1° La consultation de l'oeuvre sur place par des chercheurs dûment accrédités par chaque organisme dépositaire sur des postes individuels de consultation dont l'usage est exclusivement réservé à ces chercheurs ;
« 2° La reproduction d'une oeuvre, sur tout support et par tout procédé, lorsque cette reproduction est nécessaire à la collecte, à la conservation et à la consultation sur place dans les conditions prévues au 1°. »
B. - Après l'article L. 132-4 du même code, sont insérés deux articles L. 132-5 et L. 132-6 ainsi rédigés :
« Art. L. 132-5. - L'artiste-interprète, le producteur de phonogramme ou de vidéogramme ou l'entreprise de communication audiovisuelle ne peut interdire la reproduction et la communication au public des documents mentionnés à l'article L. 131-2 dans les conditions prévues à l'article L. 132-4.
« Art. L. 132-6. - Le producteur d'une base de données ne peut interdire l'extraction et la réutilisation par mise à disposition de la totalité ou d'une partie de la base dans les conditions prévues à l'article L. 132-4. » - (Adopté.)
Article 25 bis
Le dernier alinéa de l'article 22 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Il contrôle leur utilisation.
« Le Conseil supérieur de l'audiovisuel et l'Agence nationale des fréquences prennent les mesures nécessaires pour assurer une bonne réception des signaux et concluent entre eux à cet effet les conventions nécessaires. » - (Adopté.)
Article additionnel après l'article 25 bis
M. le président. L'amendement n° 37 rectifié, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l'article 25 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le dernier alinéa du II de l'article 49 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Toutefois, par dérogation aux articles L. 212-3 et L. 212-4 du code de la propriété intellectuelle, les conditions d'exploitation des prestations des artistes-interprètes des archives audiovisuelles et sonores mentionnées à l'alinéa précédent et les rémunérations auxquelles ces exploitations donnent lieu sont régies par des accords conclus entre les organisations de salariés représentatives des artistes-interprètes et l'institut. Ces accords doivent notamment préciser le barème des rémunérations et les modalités de versement de ces rémunérations. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur. Afin de répondre au mieux à sa mission de service public de valorisation des programmes audiovisuels et sonores de son fonds d'archives, l'INA souhaite mettre en place un régime simplifié d'autorisation, de calcul et de versement des compléments de rémunération des artistes-interprètes, se substituant aux économies complexes des textes qu'il doit actuellement appliquer.
Cet amendement vise donc à autoriser l'INA à exploiter ces anciennes archives en lui permettant de conclure à cette fin avec les syndicats représentatifs de chaque catégorie d'artistes-interprètes des accords collectifs d'entreprise.
M. le président. Le sous-amendement n° 89, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le début de la première phrase du texte proposé par l'amendement n° 37 rectifié pour compléter le dernier alinéa du II de l'article 49 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication :
Conformément à l'article L. 212-5 du code de la propriété intellectuelle, le niveau des rémunérations dues pour les modes d'exploitation non prévus par les conventions et accords collectifs applicables aux artistes-interprètes des archives audiovisuelles mentionnées à l'alinéa précédent peut être fixé par référence à des barèmes établis par des accords...
La parole est à M. Michel Charasse.
M. Michel Charasse. Depuis que le législateur a eu la fâcheuse idée, à mon avis, de confier à l'INA, en 1982 et en 1986, les droits d'exploitation d'une partie des archives audiovisuelles du secteur public, l'institut a exploité ces droits en spoliant les auteurs et artistes-interprètes concernés par ces archives. Il a essayé plusieurs fois d'obtenir du législateur la possibilité de se dispenser d'obtenir les autorisations des titulaires de droits exclusifs sur ces programmes, ou de s'épargner la peine de calculer et de verser les rémunérations, dérisoires, prévues, pour les titulaires qui avaient cédé ou étaient censés avoir cédé ces droits, par des conventions collectives antédiluviennes.
En 1997, l'INA a ainsi tenté de faire voter par le Parlement un régime original, réservé à son seul usage, de gestion collective obligatoire des droits exclusifs des artistes-interprètes. Cela lui aurait permis d'obtenir, sans doute sans trop de difficultés, des sociétés de gestion des droits des artistes l'autorisation d'exploiter à sa guise les archives et de s'en remettre à elles du soin de retrouver les titulaires de droits et de leur répartir, le cas échéant, le montant des sommes versées par l'institut.
Au passage, il était aussi envisagé de modifier, en tant que de besoin, la qualification juridique, salariale ou non, des rémunérations des artistes. Le Sénat s'est opposé à ce schéma, et l'affaire s'est provisoirement terminée avec la dissolution de l'Assemblée nationale.
En 1999, dans la perspective de l'examen de la future loi du 1er août 2000, un système, tout aussi exotique par rapport aux principes tant du droit de la propriété littéraire et artistique que du droit du travail, avait prévu de combiner la conclusion entre l'INA et les syndicats d'un accord collectif valant autorisation d'exploitation du fonds détenu par l'institut et des accords avec les sociétés de perception et de répartition des droits chargées du paiement des rémunérations à tous les intéressés, qu'ils soient ou non leurs associés. L'INA n'a cependant pas obtenu qu'il soit soumis au Parlement.
L'amendement n° 37 rectifié reprend le schéma toujours refusé jusqu'à présent par le Parlement.
Par dérogation à l'article du code de la propriété intellectuelle définissant les droits exclusifs des artistes, l'autorisation d'exploiter ces droits résulterait d'un accord entre, d'une part, l'INA, qui n'est pas leur employeur, et, d'autre part, des syndicats, qui n'ont aucune compétence pour contracter à la place des salariés ni pour disposer de leurs droits patrimoniaux exclusifs.
L'intervention des sociétés de gestion n'est pas mentionnée, mais rien n'exclut qu'elle soit prévue dans le cadre de la définition des modalités de versement des droits.
Ce montage est de mon point de vue inacceptable.
En revanche, on peut tout à fait concevoir que, dans le respect du code de la propriété intellectuelle, et bien que l'INA ne soit pas l'employeur des artistes concernés, un accord collectif permette d'encadrer la définition des rémunérations dues aux artistes qui avaient régulièrement cédé leurs droits pour les formes d'exploitation non prévues à l'époque.
C'est donc l'objet de ce sous-amendement qui précise, sur ce point, l'amendement déposé par M. le rapporteur.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. Le sous-amendement présenté par M. Charasse est contradictoire avec l'amendement n° 37 rectifié défendu par la commission. C'est la raison pour laquelle j'émets un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Je suis favorable à l'amendement n° 37 rectifié, mais défavorable au sous-amendement n° 89.
Permettez-moi de saisir cette occasion pour faire un peu de publicité : allez tous voir le site « ina.fr », qui est absolument passionnant et nous permet de redécouvrir l'histoire de notre pays. Cela étant, les auteurs n'en ont pas moins droit à une rémunération, et la loi doit s'en préoccuper. Mais, à l'époque où certains de ces documents ont été filmés, les contrats de travail étaient différents et Internet n'existait pas.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 89.
M. Michel Charasse. Je souhaite bien du plaisir à l'INA pour s'expliquer avec tous les auteurs auxquels aucune autorisation n'a évidemment été demandée pour sortir et exploiter ces archives. Tout cela va occuper les gens de l'institut pendant un certain temps ! On en reparlera bientôt mais, à mon avis, tout cela va coûter cher à l'INA, sauf si ce texte a pour objet de couvrir toutes les turpitudes...
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 25 bis.
Article 26
Le IV de l'article 49 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée est ainsi rédigé :
« IV. - En application des articles L. 131-2 et L. 132-3 du code du patrimoine, l'institut est seul responsable de la collecte, au titre du dépôt légal, des documents sonores et audiovisuels radiodiffusés ou télédiffusés ; il participe avec la Bibliothèque nationale de France à la collecte, au titre du dépôt légal, des signes, signaux, écrits, images, sons ou messages de toute nature faisant l'objet d'une communication publique en ligne. L'institut gère le dépôt légal dont il a la charge conformément aux objectifs et dans les conditions définis à l'article L. 131-1 du même code. » - (Adopté.)
Article 26 bis
Dans les articles L. 214-2 et L. 311-2 du code de la propriété intellectuelle, les mots : « en France » sont remplacés par les mots : « dans un État membre de la Communauté européenne ». - (Adopté.)
Article 27
L'article 2-1 du code de l'industrie cinématographique est ainsi rédigé :
« Art. 2-1. - Le Centre national de la cinématographie exerce les missions qui lui sont confiées par le titre III du livre Ier du code du patrimoine. » - (Adopté.)
TITRE V
DISPOSITIONS DIVERSES
Article 28 A
L'article L. 122-8 du code de la propriété intellectuelle est ainsi rédigé :
« Art. L. 122-8. - Les auteurs d'oeuvres originales graphiques et plastiques, ressortissants d'un État membre de la Communauté européenne ou d'un État partie à l'accord sur l'Espace économique européen, bénéficient d'un droit de suite, qui est un droit inaliénable de participation au produit de toute revente d'une oeuvre après la première cession opérée par l'auteur ou par ses ayants droit, lorsque intervient en tant que vendeur, acheteur ou intermédiaire un professionnel du marché de l'art.
« On entend par oeuvres originales au sens du présent article les oeuvres créées par l'artiste lui-même et les exemplaires exécutés en quantité limitée par l'artiste lui-même ou sous sa responsabilité.
« Le droit de suite est à la charge du vendeur. La responsabilité de son paiement incombe au professionnel intervenant dans la revente et, si la cession s'opère entre deux professionnels, au vendeur.
« Les professionnels du marché de l'art visés au premier alinéa doivent délivrer à l'auteur ou à une société de perception et de répartition du droit de suite toute information nécessaire à la liquidation des sommes dues au titre du droit de suite pendant une période de trois ans à compter de la revente.
« Les auteurs non ressortissants d'un État membre de la Communauté européenne ou d'un État partie à l'Espace économique européen et leurs ayants droit sont admis au bénéfice de la protection si la législation de l'État dont ils sont ressortissants admet la protection du droit de suite des auteurs des États membres et de leurs ayants droit.
« Un décret en Conseil d'État précise les conditions d'application du présent article et notamment le montant et les modalités de calcul du droit à percevoir, ainsi que le prix de vente au-dessus duquel les ventes sont soumises à ce droit. Il précise également les conditions dans lesquelles les auteurs non ressortissants d'un État membre de la Communauté européenne ou d'un État partie à l'accord sur l'Espace économique européen qui ont leur résidence habituelle en France et ont participé à la vie de l'art en France pendant au moins cinq ans peuvent demander à bénéficier de la protection prévue au présent article. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 38 rectifié, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans les premier et quatrième alinéas du texte proposé par cet article pour l'article L. 122-8 du code de la propriété intellectuelle, remplacer le mot :
revente
par le mot :
vente
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de précision.
M. le président. L'amendement n° 192 rectifié bis, présenté par M. Gaillard, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le troisième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 122-8 du code de la propriété intellectuelle :
« Le droit de suite est à la charge du vendeur. Son paiement est effectué par le professionnel intervenant dans la vente qui, le cas échéant, peut se substituer au vendeur pour l'accomplissement de ses obligations dans des conditions fixées par contrat. Lorsque la cession s'opère entre deux professionnels, la responsabilité du paiement incombe au vendeur.
La parole est à M. Yann Gaillard.
M. Yann Gaillard. Cet amendement n'a l'air de rien, mes chers collègues, mais il est en fait très important. (Sourires.) Il tend à résoudre un problème qui « plombe » le marché de l'art français depuis de nombreuses années, je veux parler du droit de suite.
Le droit de suite est payé par le vendeur ; comme c'est le vendeur qui choisit le pays dans lequel la vente est réalisée, il a tendance à privilégier celui où la charge est la plus faible pour lui.
Par cet amendement, il vous est donc proposé d'utiliser la souplesse offerte par la directive en permettant des arrangements entre le vendeur et les professionnels qui participent à la vente - les sociétés de vente, les galeristes, etc. Ainsi, nous serions dans une meilleure position concurrentielle, notamment à l'égard de Londres, notre principal concurrent.
Telle est la proposition qui vous est faite afin d'améliorer quelque peu le fonctionnement du marché de l'art français.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. La commission est favorable à l'amendement n° 192 rectifié bis.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Le Gouvernement est favorable aux amendements nos 38 rectifié et 192 rectifié bis.
M. le président. L'amendement n° 107, présenté par M. Dufaut et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 122-8 du code de la propriété intellectuelle par une phrase ainsi rédigée :
Par dérogation, ce droit ne s'applique pas lorsque le vendeur a acquis l'oeuvre directement de l'auteur moins de trois ans avant cette vente et que le prix de vente ne dépasse pas 10 000 euros.
La parole est à M. Alain Dufaut.
M. Alain Dufaut. Cet amendement vise à préciser le champ d'application du droit de suite au profit de l'auteur d'une oeuvre d'art originale. Il fixe en particulier des dérogations en matière de conditions de délai et de prix.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. Avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 28 A, modifié.
(L'article 28 A est adopté.)
Article additionnel après l'article 28 A
M. le président. L'amendement n° 90, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
Après l'article 28A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. Le premier alinéa de l'article L. 132-25 du code de la propriété intellectuelle est complété par une phrase ainsi rédigée : « Son montant est révisé tous les sept ans à la demande des auteurs. »
II. Le second alinéa de l'article L. 212-4 du même code est complété par les dispositions suivantes :
«, dont le montant est révisé tous les sept ans à la demande de l'artiste-interprète. La révision de la fraction de cette rémunération définie à l'article L. 212-6 est négociée individuellement entre l'artiste-interprète et le producteur. »
Cet amendement a été précédemment retiré par son auteur.
Article 28
I. - La présente loi est applicable à Mayotte, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna, dans les Terres australes et antarctiques françaises et en Nouvelle-Calédonie.
II. - Après l'article L. 811-2 du code de la propriété intellectuelle, il est inséré un article L. 811-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 811-2-1. - Pour leur application à Mayotte, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna, dans les Terres australes et antarctiques françaises et en Nouvelle-Calédonie, les articles L. 131-9 et L. 211-6 sont ainsi rédigés :
« «Art. L. 131-9. - Lorsque la première vente d'un exemplaire matériel d'une oeuvre a été autorisée par l'auteur ou ses ayants droit sur le territoire d'un État membre de la Communauté européenne ou d'un autre État partie à l'Espace économique européen ou sur le territoire de Mayotte, de la Polynésie française, des îles Wallis et Futuna, des Terres australes et antarctiques françaises et de la Nouvelle-Calédonie, la revente de cet exemplaire ne peut être interdite dans la Communauté européenne ou dans ces collectivités d'outre-mer ou en Nouvelle-Calédonie .
« «Art. L. 211-6. - Lorsque la première vente d'un exemplaire matériel d'une fixation protégée par un droit voisin a été autorisée par le titulaire du droit ou ses ayants droit sur le territoire d'un État membre de la Communauté européenne ou sur le territoire de Mayotte, de la Polynésie française, des îles Wallis et Futuna, des Terres australes et antarctiques françaises et de la Nouvelle-Calédonie, la revente de cet exemplaire ne peut être interdite dans la Communauté européenne ou dans ces collectivités d'outre-mer ou en Nouvelle-Calédonie. » » - (Adopté.)
Article 29
I. - Les dispositions de l'article 5 n'ont pas pour effet de protéger une interprétation, un phonogramme ou un vidéogramme dont la durée de protection a expiré au 22 décembre 2002.
II. - Les dispositions du titre II de la présente loi ne sont applicables aux oeuvres créées par les agents de l'État, d'une collectivité territoriale ou d'un établissement public à caractère administratif, antérieurement à l'entrée en vigueur de la présente loi, qu'à compter de cette entrée en vigueur.
Toutefois, l'application de ces dispositions ne peut porter atteinte à l'exécution des conventions en cours lors de l'entrée en vigueur de la présente loi, lorsque celles-ci ont pour objet des oeuvres créées par ces agents dans l'exercice de leurs fonctions ou d'après les instructions reçues, pour l'accomplissement de la mission de service public par la personne publique qui les emploie.
III. - Les dispositions de l'article L. 133-1 du code du patrimoine ne sont applicables aux personnes mentionnées au i de l'article L. 132-2 du même code qu'à l'expiration d'un délai de trois ans à compter de la promulgation de la présente loi.
M. le président. L'amendement n° 39, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du II de cet article, remplacer les mots :
ou d'un établissement public à caractère administratif,
par les mots :
, d'un établissement public à caractère administratif, d'une autorité administrative indépendante dotée de la personnalité morale ou de la Banque de France,
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 29, modifié.
(L'article 29 est adopté.)
Article 30
Dans les articles L. 730-1, L. 740-1, L. 760-1 et L. 770-1 du code du patrimoine, la référence : « L. 132-4 » est remplacée par la référence : L. 132-6 ». - (Adopté.)
Articles additionnels après l'article 30
M. le président. L'amendement n° 40, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l'article 30, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les dix-huit mois suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement présente au Parlement un rapport sur la mise en oeuvre des dispositions des titres Ier et IV.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur. Les dispositions du titre Ier et du titre IV du présent projet de loi ont respectivement pour objet d'adapter le droit d'auteur et les droits voisins et le dépôt légal au contexte de la société de l'information.
Compte tenu de l'évolution très rapide des technologies, il paraît indispensable de tirer rapidement les premiers enseignements de l'application de ces dispositions législatives pour s'assurer de leur bonne adéquation à un contexte évolutif et changeant, afin d'envisager, le cas échéant, les ajustements législatifs qui paraîtraient nécessaires.
M. le président. Le sous-amendement n° 258, présenté par M. Assouline, Mme Blandin, M. Lagauche, Mme Tasca, MM. Yung, Bockel, Lise, Vidal et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par l'amendement n° 40 par les mots :
et plus particulièrement sur les modalités de la mise en oeuvre, devant intervenir dans un délai de six mois suivant la remise du rapport, d'une plate-forme publique de téléchargement visant à la fois la diffusion des oeuvres des créateurs et interprètes dont les oeuvres et prestations ne sont pas disponibles à la vente sur les plates-formes commerciales de téléchargement et la juste rémunération des auteurs et artistes-interprètes.
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Nous avions présenté un amendement allant dans le même sens à l'article 1er bis. Le rapporteur nous ayant donné son aval lors de l'examen en commission, puis en séance publique, sous réserve de transformer notre texte en sous-amendement, nous obtempérons en espérant que le Sénat se ralliera à l'avis de la commission.
Je reprendrai donc l'argumentaire qui vous a déjà été présenté jeudi dernier, lors de la défense de l'amendement.
Il nous semble essentiel que l'offre légale en ligne se développe - nous l'avons tous dit dans la discussion générale - mais, à notre sens, il convient d'aller plus loin.
Le service public a un grand rôle à jouer en la matière. Le problème crucial sera de définir les modalités de financement d'une plate-forme de service public. Des pistes ont souvent été lancées : la taxation des disques durs, des fournisseurs d'accès, des éditeurs de logiciels... Aujourd'hui, les supports traditionnels audio et vidéo, comme les services audiovisuels, participent tous au financement de la création et des industries culturelles.
Le débat est néanmoins complexe et il n'a pas trouvé de réponse dans une transposition de directive ayant trait au droit d'auteur et aux droits voisins ; c'est pourquoi il faudra procéder à des concertations avant de le trancher.
Tout aussi cruciale me semble être la question du périmètre d'intervention du service public de téléchargement. Soutenir la création relève d'une mission de service public, surtout actuellement, alors que ce secteur est fragilisé.
Pour l'heure, l'Assemblée nationale a souhaité restreindre le périmètre d'intervention de la plate-forme publique à la diffusion d'oeuvres des jeunes talents non disponibles sur les plates-formes légales privées. Il nous semble indispensable que l'ensemble des créateurs ou interprètes d'oeuvres non disponibles sur les plates-formes proposées par les industries culturelles puissent bénéficier de ce service public, quel que soit leur âge.
En outre, il nous paraît nécessaire d'inclure les artistes-interprètes dans le bénéfice de la diffusion par la plate-forme de service public de leurs interprétations et, bien entendu, de les faire profiter, à ce titre, d'une rémunération équitable.
J'insiste particulièrement sur ce dernier point, car les artistes-interprètes, rémunérés au titre des droits voisins, sont actuellement les parents pauvres du système de répartition des droits, le dernier maillon de la chaîne.
Nous souhaitons donc que le Gouvernement puisse rapidement présenter au Parlement un rapport de préfiguration d'une telle plate-forme de service public de téléchargement.
M. le président. Le sous-amendement n° 256, présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par l'amendement n° 40 par une phrase ainsi rédigée :
Notamment, ce rapport étudiera les conditions de la mise en place d'une plateforme publique de téléchargement permettant à tout créateur vivant, absent des plates-formes commerciales de téléchargement de mettre ses oeuvres ou ses interprétations à disposition du public et d'en obtenir une juste rémunération, à hauteur de 50 % au moins du prix de vente publique.
La parole est à M. Jack Ralite.
M. Jack Ralite. Au moment de la discussion de l'article 1er bis, ma collègue Annie David avait proposé la création d'une plate-forme publique. La proposition avait été bien accueillie, mais il nous avait été conseillé de la présenter à nouveau sous forme de sous-amendement : tel est donc l'objet de ce sous-amendement n° 256.
Les députés se sont mis d'accord sur le principe de la création d'une plate-forme publique de téléchargement. Le texte adopté par l'Assemblée nationale précise en effet ceci : « Dans les six mois suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement transmet au Parlement un rapport relatif aux modalités de la mise en oeuvre d'une plate-forme publique de téléchargement visant à la fois la diffusion des oeuvres des jeunes créateurs dont les oeuvres ne sont pas disponibles à la vente sur les plates-formes légales de téléchargement et la juste rémunération de leurs auteurs. »
Le sous-amendement n° 256 vise à étendre au secteur numérique le principe de l'aide publique à la création et à la diffusion.
Il s'agit notamment de définir l'engagement de l'État dans la création d'une plate-forme publique de téléchargement qui donnera une visibilité aux créateurs vivants actuellement exclus des réseaux commerciaux.
Tel est l'esprit du présent sous-amendement que nous souhaitons, mes chers collègues, vous voir adopter.
M. le président. Le sous-amendement n° 274, présenté par M. Assouline, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par l'amendement n°40 par deux phrases ainsi rédigées :
Ce rapport propose la mise en oeuvre, devant intervenir dans un délai de six mois suivant sa remise, d'un dispositif de taxation du chiffre d'affaires des sociétés commerciales fournissant des prestations d'accès à l'internet, notamment par abonnement. Le produit de cette taxation devra permettre d'assurer le financement pérenne de la mise en place et du fonctionnement d'une plate-forme publique de téléchargement visant à la fois la diffusion des oeuvres des créateurs et interprètes dont les oeuvres et prestations ne sont pas disponibles à la vente sur les plates-formes commerciales de téléchargement et la juste rémunération des auteurs et artistes-interprètes.
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Selon des données statistiques datant de 2005, 12,4 millions de foyers français, soit près de la moitié d'entre eux, sont équipés d'un micro-ordinateur, et plus de 26 millions de Français âgés de onze ans et plus sont internautes.
Au quatrième trimestre de l'année 2005, 78,5 % des foyers ayant accès à l'internet étaient connectés en haut débit. En un an, le nombre de foyers ayant accès à l'internet à haut débit avait progressé de 81 %.
Le développement rapide de l'équipement informatique des ménages français et de l'accès de ces derniers à l'internet, notamment en haut débit, représente donc un marché de plus en plus important ayant généré, pour les fournisseurs d'accès, un chiffre d'affaires significatif de 817 millions d'euros sur les neuf premiers mois de l'année 2005, en hausse de 25 % par rapport à l'année précédente, dont 559 millions d'euros liés à l'ADSL.
Il est inutile de revenir sur l'usage généralisé fait aujourd'hui de l'internet, et principalement de l'ADSL, pour diffuser et échanger des supports numériques d'oeuvres artistiques.
Dès lors, au regard de la difficulté de garantir la rémunération des auteurs dans le cadre des échanges sur Internet, il serait particulièrement opportun de faire concourir les revenus générés par les ventes de prestations d'accès à Internet, par un mécanisme fiscal ou parafiscal, au financement de la diversité culturelle sur le réseau par la mise en oeuvre d'une plate-forme publique de téléchargement.
M. le président. Le sous-amendement n° 286, présenté par M. Fouché, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par l'amendement n° 40 par une phrase ainsi rédigée :
Ce rapport évalue l'efficacité des dispositions des articles L. 335-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle et rend compte de leur impact sur l'ensemble des industries culturelles et les filières de la création.
Ce sous-amendement n'est pas soutenu.
Quel est l'avis de la commission sur les sous-amendements nos 258, 256 et 274 ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. La commission souhaite le retrait du sous-amendement n° 258. À défaut, elle émettra un avis défavorable. Elle préfère en effet la rédaction du sous-amendement n° 256, dont l'objet est comparable, sous-amendement sur lequel elle émettra un avis favorable si M. Ralite accepte de supprimer les mots : « à hauteur de 50 % au moins du prix de vente publique.
S'agissant du sous-amendement n° 274, la commission émet un avis défavorable au motif qu'il créerait une taxation.
M. le président. Monsieur Ralite, que pensez-vous de la suggestion de M. le rapporteur ?
M. Jack Ralite. Je l'accepte, et je rectifie mon sous-amendement en ce sens, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 256 rectifié, présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, et ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par l'amendement n° 40 par une phrase ainsi rédigée :
Notamment, ce rapport étudiera les conditions de la mise en place d'une plateforme publique de téléchargement permettant à tout créateur vivant, absent des plates-formes commerciales de téléchargement de mettre ses oeuvres ou ses interprétations à disposition du public et d'en obtenir une juste rémunération.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Il serait très symbolique que nous arrivions à dégager un point d'accord sur ce sujet, et j'espère que nous allons y parvenir.
J'émets un avis favorable sur l'amendement n° 40.
En revanche, comme M. le rapporteur, j'émets un avis défavorable sur le sous-amendement n° 258.
Par ailleurs, je suis favorable au sous-amendement n° 256 rectifié. Effectivement, Internet peut être une chance de diffusion pour des artistes qui ne sont pas naturellement accueillis dans des festivals ou dans des salles de spectacle et de concert. Il s'agit donc pour moi d'un élément très important.
Pour finir, je suis défavorable au sous-amendement n° 274, car je ne pense pas que la taxe sur les fournisseurs d'accès à Internet soit la bonne manière de financer cette nouvelle plate-forme.
M. le président. Monsieur Assouline, acceptez-vous de retirer le sous-amendement n° 258 au profit du sous-amendement n° 256 rectifié ?
M. David Assouline. Ne pourrait-on faire l'inverse ? (Rires.) Non, je le maintiens.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 256 rectifié.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 30.
L'amendement n° 176, présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 30, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
I.- La force exécutoire de la présente loi est limitée au 31 décembre 2008.
II.- Dès la promulgation de la présente loi, un « Conseil Beaumarchais - Internet - Responsabilité publique » est créé.
Le Conseil est ainsi composé :
- dix parlementaires : cinq députés et cinq sénateurs ;
- dix artistes : deux musiciens, deux plasticiens, deux réalisateurs, deux comédiens, deux écrivains ;
- dix universitaires et chercheurs : deux juristes, deux économistes, un sociologue, un critique d'art, un philosophe, deux informaticiens, un mathématicien ;
- dix acteurs de l'internet : cinq industriels et cinq utilisateurs, dont deux bibliothécaires ;
- quatre journalistes professionnels.
Il est présidé par un membre de l'Académie des sciences.
Sa mission est de réfléchir aux meilleures solutions destinées à garantir de façon évolutive les droits d'auteurs et la liberté d'accès aux réseaux de communication électronique dans le cadre défini par la Commission nationale de l'informatique et des libertés. Pour cela, le Conseil réalisera notamment une veille internationale sur les évolutions en cours, confrontera les diverses solutions juridiques et techniques et présentera un ensemble de propositions au Parlement et au gouvernement. Le texte de la future loi devra s'inspirer, de façon substantielle, des propositions du Conseil.
Il rédigera un rapport final rendu public au terme de deux années d'activité et présentera un rapport intermédiaire à mi-parcours. Il animera un large débat public, y compris sur Internet et dans les médias.
Il dispose des moyens humains et financiers nécessaires à son bon fonctionnement et mis à sa disposition par les ministères de la culture, de la recherche, de l'industrie et des finances.
Ses modalités de fonctionnement seront définies par décret en Conseil d'État.
La parole est à M. Jack Ralite.
M. Jack Ralite. Cet amendement vise à créer un conseil de réflexion sur la question des droits d'auteur et la liberté d'accès aux réseaux de communication électronique. Il s'appellerait le « Conseil Beaumarchais-Internet-Responsabilité publique ».
Pour éviter les écueils d'un texte législatif adopté dans l'urgence et soumis aux risques d'une rapide inadaptation ou d'une juxtaposition des points de vue souvent partiels ou partiaux dans un domaine très complexe, en mutation rapide, et dont les enjeux sont essentiels pour la collectivité nationale, ce conseil devra mener une réflexion sereine, pluraliste et ouverte dont l'aboutissement permettra de proposer une législation apte à relever les défis des réseaux numériques.
La question de la responsabilité publique en matière d'internet, des nouvelles technologies et des choix à opérer en fonction de leur utilisation démocratique dans le cadre de la société dite « des connaissances » est centrale.
Comme cela a été maintes fois souligné lors de différentes discussions sur ce thème, l'internet pourrait être considéré comme un bien d'intérêt public ou général, surtout si ce n'est pas au sens économique du terme !
Afin de ne pas perdre le fil d'Ariane qui nous lie aux auteurs, aux créateurs, aux chercheurs, aux artistes et aux producteurs, nous vous proposons d'appeler ce conseil « Beaumarchais ».
La France et l'Allemagne, inspirées par le philosophe allemand Kant, selon lequel une oeuvre d'art ne peut être séparée de son auteur, ont développé l'idée de la personnalité unique de l'auteur.
Dès 1777, le dramaturge français Beaumarchais commença à réunir les auteurs au sein de la première société d'auteurs du monde et, en 1791, l'Assemblée nationale française adopta la première loi sur le droit d'auteur.
La visée humaniste de cette tradition met en valeur le talent humain à travers l'individu et le respect de l'intelligence humaine dans toutes ses activités.
Il faut sauvegarder et développer cette tradition française dans le cadre des nouvelles technologies présentes et à venir.
Le principe de composition du conseil, qui compte quarante-cinq membres, est celui d'une souveraineté élargie -dont l'élection de représentants des assemblées, d'institutions ou d'organismes reconnus d'utilité publique - sans se limiter aux seuls critères de la représentativité de ses membres.
Nous soumettons cette idée, jugée intéressante par l'ensemble de la commission des affaires culturelles, à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. Nous sommes tous sensibles, monsieur le sénateur, au rappel que vous faites de Beaumarchais, rappel qui nous permet de terminer cette séance comme nous l'avons commencée.
Quoi qu'il en soit, l'amendement 40, qui vient d'être adopté, permet justement de créer les moyens d'évaluer la loi dans le temps et de se donner tout le recul nécessaire. Nous pensons qu'il est suffisant.
C'est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur votre amendement, monsieur le sénateur.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Il est particulièrement important de faire en sorte de suivre de très près, pour les précéder, les évolutions de la technologie.
C'est la raison pour laquelle j'ai constitué l'Observatoire des usages numériques, qui regroupe un certain nombre de professionnels et de représentants de l'ensemble des secteurs concernés.
De la même manière, le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique a devant lui une échéance de travail, et j'imagine que la commission des affaires culturelles du Sénat continuera son travail d'éclaireur.
Je suis donc à la disposition de toutes les instances de concertation qui existent déjà pour continuer cette activité de prospective, d'interpellation et de préfiguration afin d'apporter les évolutions nécessaires.
Le Gouvernement émet par conséquent un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 176.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.
Mme Marie-Christine Blandin. Les Verts ne voteront pas ce projet de loi.
L'impérieuse nécessité de garantir les droits d'auteur à la française, patrimoniaux et moraux, nous a, ici, tous motivés.
Cependant, ni la méthode d'élaboration de la loi, ni le quasi-harcèlement de toutes les parties prenantes, ni les risques réels que vous prenez avec les DRM et leur cortège d'effets négatifs ne sont de « bonne démocratie » !
Je ne suis pas juste lorsque j'évoque toutes les parties prenantes puisque, entre les auteurs, les artistes-interprètes, voire les petits producteurs, d'une part, et les internautes, voire les acteurs du logiciel libre, d'autre part, les fournisseurs d'accès, les constructeurs en informatique, les gestionnaires de réseau, autrement fortunés, passent entre les gouttes des contributions comme de la répression si leurs pratiques sont illicites.
Nous nous félicitons néanmoins de la préservation des droits des photographes, à l'opposé des tropismes de certains éditeurs de presses vers le copyright.
Je regrette votre silence sur les agents publics.
Enfin, nous n'avons à mon avis procédé qu'à une ébauche ; la mise en oeuvre des dispositions adoptées révélera le manque à gagner des auteurs, ainsi que des dommages collatéraux.
M. le président. La parole est à M. Jack Ralite.
M. Jack Ralite. Le fond de ce débat au terme duquel nous arrivons était le droit d'auteur - avec son droit moral - et la copie privée adaptée aux dernières nouvelles technologies.
Fondamentalement, le texte adopté cède devant la pression du copyright et mutile l'avenir de la copie privée. En criant au loup-garou face aux nouveaux moyens techniques inventés par les hommes, nous les affermons aux grandes affaires au lieu de les civiliser !
Je me souviens, monsieur le ministre, de l'inauguration d'une exposition à la Villette, en 2004. Le catalogue contenait une phrase que je garde en mémoire : une certaine maturité commence à s'établir dans ces champs créatifs, qui permet de les réintégrer dans une continuité historique tout en obligeant l'invention de nouveaux types d'expérience.
C'est ce travail difficile qu'il nous aurait fallu accomplir ; or, nous ne l'avons pas fait.
Ce travail est difficile, car, comme c'est le cas pour tout moyen de transport, la régulation est longue à établir. Ainsi, il aura fallu quarante ans pour le chemin de fer, et de nombreuses années entre l'invention de la voiture et le code de la route !
En réalité, ce n'est pas l'invention de l'automobile, mais plutôt la survenue d'accidents qui a incité à organiser la régulation. Je me souviens de ce que disait Paul Virilio à cet égard : « inventer le navire, c'est inventer le naufrage, l'avion le crash, et le train, la catastrophe ferroviaire ».
Aujourd'hui, conscients de ces deux aspects, nous avions la possibilité de traiter la question fondamentalement. Or nous ne l'avons à mon avis pas fait, ce qui est regrettable.
Quoi qu'il en soit, j'ai senti que les questions évoquées étaient l'occasion de troubles dans cette assemblée. J'en veux pour preuve toutes les discussions sur l'interopérabilité, même si cette dernière n'a pas marqué le débat. Certains souhaitaient l'interopérabilité, mais d'autres, qui ont malheureusement réussi, voulaient la « rétrécir ».
Sur les deux amendements qui ont concerné la création d'une autorité administrative, les votes n'ont pas été tranchés.
Dans un cas, il y a eu 164 voix « pour », 159 voix « contre » et 5 abstentions. Cela signifie bien que la question existe et que nous n'avons pas su aller dans le sens d'une responsabilité publique nouvelle.
Dans l'autre cas, il y a eu 161 voix « contre », 120 voix « pour » et 41 abstentions. Faites l'addition des voix « pour » et des abstentions, et vous arriverez également à un équilibre !
Il y avait donc des possibilités que nous n'avons pas exploitées.
Voilà, pour l'essentiel, ce que je voulais dire.
En 1996, lors de l'adoption d'une directive européenne, j'avais déclaré que l'heure me paraissait venue de donner un signal, car il était clair, notamment dans les débats de l'OMPI, que le copyright avançait. Je disais alors : il nous faudrait sonner le tocsin !
La question est même posée aux États-Unis. Un auteur explique en effet l'évolution américaine par le fait que les sociétés de communication ont réussi à convaincre les gouvernements que les critères d'intérêt public ont de moins en moins d'opportunité, puisque les innovations technologiques permettent au marché de résoudre les problèmes.
Une sorte de goutte-à-goutte est en train de se distiller et, si l'on n'y prend garde, un jour on se retrouvera noyé. Une pluie drue s'abat maintenant contre le droit d'auteur et contre l'intelligence créatrice, dans un mélange prospectif avec les nouvelles technologies porteuses de tant d'espérances.
À une époque, je disais « attention ! ». Aujourd'hui, je dis « non ! ». Nous ne pouvons pas accepter le projet de loi tel qu'il a abouti, même si, à certains moments, des initiatives provenant de la commission ou d'autre origine, ont été acceptées.
Il s'agit d'un problème difficile. J'en ai eu la preuve récemment lorsque je me suis rendu à deux rencontres internationales : l'une se déroulait à Munich, autour de soixante juristes Français et Allemands ; l'autre réunissait à Bruxelles, il y a quinze jours, soixante-quinze juristes venus de toute l'Europe. Les questions qui nous préoccupent ont été posées, mais elles n'ont pas obtenu de réponse.
Nous, nous sommes des législateurs et non des chercheurs. Il nous faut donc trancher. Toutefois, il y a deux façons de trancher : soit en caressant l'avenir, soit en le coupant. Malheureusement, ce soir, c'est le côté coupant plus que l'aspect caressant qui a prévalu.
À cause de notre très fort attachement au droit d'auteur, à cause de notre volonté d'appréhender d'une manière ouverte l'avènement des nouvelles technologies, nous voterons contre ce texte.
Pour terminer, monsieur le ministre, je voudrais citer une déclaration d'un artiste, Shigeru Miyamoto, que vous fîtes chevalier dans l'ordre des arts et des lettres le 13 mars 2006. Pour ceux qui ne le connaîtraient pas, je rappelle qu'il est le créateur de Mario et de Zelda, ce n'est donc pas un créateur que certains qualifieraient de classique.
Il a dit : « Je ne pense pas qu'il faille s'adapter à la console de jeu, c'est à la console de s'adapter à nous [...] Le problème n'est pas : "qu'est-ce que la machine peut afficher ?", c'est : "qu'est-ce que, moi, je veux produire sur cette machine ?" [...] Ce n'est pas la machine qui fait le créateur. C'est le contraire. »
Nous sommes des créateurs législatifs. Je trouve que ce soir, à travers un langage machiniste, nous avons trop oublié le créateur. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Le Gouvernement ayant déclaré d'urgence ce projet de loi déposé il y a trois ans sur le bureau de l'Assemblée nationale, nous voici parvenus au terme de l'unique lecture d'un texte techniquement complexe et politiquement délicat.
Rappelons que l'exercice des droits de la propriété intellectuelle se déroule désormais à l'ère des réseaux numériques, de la numérisation sans limite des oeuvres, dans le cadre d'une économie numérique en plein essor et appelée à se développer encore longtemps.
Dans ce contexte, la tentation, notamment pour les éditeurs de logiciels, est de capter à leur profit l'exploitation des droits d'usage des oeuvres protégées par leurs instruments techniques afin de rentabiliser les investissements nécessaires à la création de ceux-ci, et ce dans une stricte logique de copyright. Cette tentation risque de se concrétiser par la concentration des industries de contenants et de contenus, l'ensemble de la chaîne de valeur qui va de la production à la diffusion des oeuvres risquant d'être finalement contrôlée par quelques groupes intégrés. Il suffit de voir comment cela se concrétise avec Apple et de lire le numéro de Libération de ce matin pour constater comment des logiciels de peer to peer peuvent faire l'objet de conversions étonnantes.
En somme, l'économie numérique obéit bien aux mêmes règles que l'économie de marché en général. Le législateur est alors confronté à une seule alternative : laisser faire le marché ou le réguler.
S'il existe un outil essentiel de régulation de l'économie de la culture, c'est bien le droit d'auteur à la française plutôt que le copyright à l'anglo-saxonne. Ce sujet était au coeur de notre débat et des préoccupations du groupe socialiste.
Il est donc de la responsabilité du Gouvernement de confirmer le droit d'auteur, non seulement en protégeant les ayants droit, mais aussi en évitant l'émergence d'acteurs intégrés et monopolistiques de l'économie numérique. Malheureusement, le Gouvernement, qui semblait viser cet objectif, ne l'atteint pas au terme de l'examen de ce texte.
Il est vrai que votre attitude, monsieur le ministre, comme celle de la majorité, a consisté en général à rejeter nos amendements, à l'exception de deux : le premier, qui a été présenté hier soir, visait à garantir l'application de l'exception de décompilation, prévue par une directive communautaire de 1991, aux mesures techniques de protection ; le second, qui a été examiné aujourd'hui, tendait à promouvoir la création d'une plate-forme publique de téléchargement.
Pour nous, ces propositions étaient une façon de montrer l'état d'esprit dont nous ferions preuve face à un texte, qui, contrairement à celui-ci, ne serait pas de transition. Il faudra d'ailleurs associer l'ensemble des acteurs de la culture directement concernés, les acteurs-citoyens, les consommateurs, à l'élaboration d'un tel texte qui continuera de toute façon d'évoluer, mais qui permettra de résorber la fracture qui s'est fait jour dans ce débat entre internautes et créateurs.
À ce sujet, il est regrettable que vous ayez refusé d'envisager que les fournisseurs d'accès à Internet soient mis à contribution pour financer la création. Il faudra de toute façon chercher des contributions pour permettre l'accès à la culture au plus grand nombre sans pénaliser les créateurs et en leur permettant d'obtenir une juste rémunération.
Il est inutile d'insister sur notre proposition, qui a été rejetée, d'améliorer la composition du collège des médiateurs, instance initialement prévue par le texte issu de l'Assemblée nationale. La commission a transformé cet organisme en autorité administrative indépendante aux compétences élargies, sans assurer la cohérence de sa mission avec celles du CSPLA et de la commission de la copie privée et sans associer les consommateurs.
On peut donc dire que l'économie du projet de loi telle qu'on peut en juger aujourd'hui va à la fois dans le sens de la fragilisation de la protection des droits des créateurs et des artistes et de la généralisation progressive du copyright. En effet, monsieur le ministre, vous avez cherché à garantir le respect du droit d'auteur par la seule voie des mesures numériques de protection, sans obliger les éditeurs de ces dispositifs à assurer leur interopérabilité.
Le système de sanctions que vous avez cherché à mettre en place est flou, inefficace, fait de bric et de broc et a peu de chance d'être dissuasif, car il n'est pas crédible, tout comme le dispositif visant à assurer l'interopérabilité des mesures de protection. Dès lors, quelle est la crédibilité des pouvoirs publics à l'égard tant des créateurs et des artistes que des internautes ? À l'évidence, elle se réduit comme peau de chagrin.
Ce texte sera une mauvaise loi opposant l'intérêt des internautes à celui des auteurs dans une logique « perdant-perdant » de laquelle seules les industries de contenants sortiront gagnantes. Nous l'avions d'ailleurs dit dès la discussion générale. C'est surtout la méthode choisie qui a conduit à ce résultat.
La gauche s'inscrit résolument dans une autre logique que celle du Gouvernement : la démocratisation de la diffusion de la culture fait partie de nos valeurs, comme la protection des créateurs et des artistes, car l'une ne peut aller sans l'autre. L'équilibre entre ces deux objectifs de politique publique n'étant pas atteint par le projet de loi, nous voterons contre.
M. le président. La parole est à M. Philippe Darniche.
M. Philippe Darniche. Nous voici parvenus au terme d'un débat complexe et techniquement difficile. Je reconnais donc le grand mérite dont a fait preuve le Gouvernement en soumettant ce projet de loi à notre sagacité.
Cependant, je regrette que le texte soit plus restrictif que celui qui fut voté à l'Assemblée nationale, particulièrement sur deux points. Tout d'abord, l'interopérabilité n'est plus aujourd'hui garantie comme elle l'était initialement. Ensuite, je déplore la réécriture de l'article 14 quater.
Pour toutes ces raisons, Bruno Retailleau, trois de nos collègues non inscrits et moi-même nous abstiendrons.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. À l'issue de l'examen par le Sénat du projet de loi relatif au droit d'auteur et aux droits voisins, je tiens à insister sur l'objectif que nous avons toujours cherché à atteindre tout au long de ce débat : affirmer la priorité du droit d'auteur dans un contexte de mutation technologique. C'est la raison pour laquelle je réitère notre regret que le débat n'ait pas été plus approfondi.
La complexité du texte et la technicité des sujets qui ont été abordés nous ont sans doute privés d'une réflexion de fond sur un enjeu de société et d'avenir, à savoir l'accès et la diffusion des oeuvres sur Internet, la mise en place de nouveaux systèmes économiques permettant de proposer une offre légale et des espaces nouveaux à tous les créateurs.
Aussi ce projet de loi est-il un texte de transition, une étape. Nous serons conduits à revoir notre cadre législatif dans un délai relativement court compte tenu des évolutions majeures que cette question représente pour nos sociétés dans le cadre d'une mondialisation croissante.
Nous ne pouvons que regretter encore une fois que le Gouvernement ait déclaré l'urgence sur ce projet de loi, car les débats au sein de notre assemblée ont clairement montré que la navette parlementaire aurait été utile pour améliorer les dispositions essentielles du texte et arriver au meilleur équilibre possible.
Notre plus grande satisfaction est de voir le texte réaffirmer la primauté du droit d'auteur, principale source de la création artistique.
L'examen par le Sénat aura également permis d'améliorer le régime des exceptions au droit d'auteur. Nous nous réjouissons de voir enfin reconnu l'exception pédagogique en faveur de l'enseignement et de la recherche, même s'il faudra nous montrer vigilants sur la dotation budgétaire allouée aux universités, qui devront payer la rémunération forfaitaire.
Le texte adopté par le Sénat reprend également les garanties apportées par l'Assemblée nationale concernant l'exception pour copie privée. Même si nous avons exprimé nos inquiétudes sur la rémunération pour copie privée, laquelle est menacée par la systématisation des mesures techniques de protection, il nous semble que cette exception essentielle est garantie pour les usagers.
Nous avons un autre motif de satisfaction : la rédaction du texte se trouve sensiblement améliorée par la lecture au Sénat. Il faut saluer le bon travail de la commission des affaires culturelles et de son rapporteur.
Cependant, les discussions au sein de la Haute Assemblée ne nous ont pas permis d'aborder plusieurs enjeux essentiels, et nous restons perplexes sur plusieurs dispositions.
La principale est bien sûr l'interopérabilité. Nous avons essayé de sauvegarder les avancées de l'Assemblée nationale, qui avait affirmé clairement le principe de l'interopérabilité en lui conférant un cadre.
Même si plusieurs de nos amendements ont été adoptés, nous pensons que le texte issu du Sénat n'assure pas suffisamment la garantie de ce principe, qui a été renvoyée à l'Autorité de régulation. Nous espérons que la commission mixte paritaire permettra d'améliorer cet aspect du texte en revenant au plus près de la rédaction que l'Assemblée nationale a adoptée à l'unanimité.
La création de l'Autorité de régulation, qui remplace le collège des médiateurs, nous laisse également perplexe. Nous ne sommes pas totalement satisfaits par cette nouvelle autorité administrative indépendante, dont les missions sont très étendues. Nous avons exprimé nos doutes sur les coûts induits par cette nouvelle instance et sur son rôle en matière d'interopérabilité. Je regrette que nous n'ayons pas eu davantage de précisions sur les coûts.
Enfin, nous sommes perplexes sur le système de sanctions prévu par le projet de loi et nous sommes fermement opposés aux amendements pénalisant les éditeurs de logiciels menaçant directement l'activité des logiciels libres.
En outre, nous sommes déçus par l'absence de débats de fond et d'avenir dans notre assemblée. Il est en effet regrettable que nous n'ayons pu réfléchir aux questions qui se poseront dans un avenir très proche. Certains d'entre nous ont évoqué des pistes de réflexion sur les nouvelles sources de financement de la création artistique. Cependant, nous aurions aimé recueillir le point de vue d'un plus grand nombre de nos collègues.
La révolution numérique ne doit pas seulement être appréhendée comme une menace pour les industries culturelles. Elle peut aussi être une chance de développement. Il est dommage que nous remettions ces débats essentiels à une date ultérieure alors que de véritables pistes de réflexion auraient pu davantage être abordées dans cet hémicycle.
Le groupe UC-UDF, déçu qu'un débat plus approfondi n'ait pu se dérouler, ne pourra voter le projet de loi tel qu'il ressort de l'examen par le Sénat. Ainsi, les sénateurs du groupe centristes s'abstiendront et resteront vigilants sur les conclusions de la commission mixte paritaire.
M. le président. La parole est à M. Alain Dufaut.
M. Alain Dufaut. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à mon tour, et au nom du groupe UMP, je souhaite exprimer notre gratitude et nos remerciements au rapporteur, Michel Thiollière, au président de la commission, Jacques Valade, ainsi qu'à l'ensemble de la commission des affaires culturelles du Sénat, qui s'est considérablement investie dans l'examen de ce texte et dans la recherche permanente d'un juste équilibre entre la défense du droit d'auteur et la liberté de l'internaute.
Le débat que nous avons eu durant deux semaines a, me semble-t-il, incontestablement permis d'améliorer et d'enrichir le texte issu de l'Assemblée nationale.
Les exceptions déjà existantes et les nouvelles exceptions, qui contribuent positivement à la diffusion des oeuvres, ont été strictement encadrées afin de respecter les droits des auteurs et les titulaires des droits voisins.
Les responsabilités ont été clairement différenciées afin que les sanctions soient adaptées et effectives.
Outre des précisions essentielles sur les notions de mesures techniques de protection ou d'interopérabilité, le Sénat a prévu, avec l'Autorité de régulation des mesures techniques, un dispositif à la fois souple et capable de répondre à la diversité et à la complexité des situations et de suivre l'évolution des nouvelles technologies.
Il est vrai que nous ne sommes qu'au début d'un très long chemin. Celui-ci sera semé d'embûches, car il s'agit d'un domaine en perpétuelle mutation. Mais le présent texte a le mérite de poser les bases nécessaires à la construction de l'avenir.
Je conclurai en soulignant le rôle prépondérant joué par M. le ministre de la culture et de la communication. Je souhaite lui dire combien nous avons apprécié sa détermination et sa volonté permanente d'améliorer le texte. Il s'est toujours montré attentif aux remarques des sénateurs, sans jamais pour autant remettre en cause le fragile équilibre entre une juste rémunération des créateurs et la liberté d'accéder le plus largement possible aux oeuvres de l'esprit les plus diversifiées.
Oui, monsieur le ministre, comme vous le souhaitiez, le présent projet de loi, largement amendé par le Sénat, est devenu un support législatif à un « internet équitable » ! Soyez-en remercié.
Le groupe UMP votera bien évidemment ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Serge Lagauche.
M. Serge Lagauche. Nous arrivons au terme d'un débat complexe, qui s'est finalement déroulé dans un esprit de réel sérieux. Il faut dire que la passion des débats à l'Assemblée nationale était à la mesure de l'impréparation du Gouvernement sur ce projet de loi.
Comme nous l'avons amplement souligné lors de la discussion, nous étions prêts à approuver une transposition de directive a minima protégeant les droits d'auteur et les droits voisins, si elle était réalisée dans un esprit de concertation et de pédagogie. Au lieu de cela, nous nous sommes embarqués dans six mois d'une navette parlementaire ubuesque avec, en prime, une déclaration d'urgence tardive sur un texte déposé depuis près de trois ans.
Sous prétexte d'assurer la protection numérique de la propriété littéraire et artistique, le Gouvernement a proposé un projet de loi initial extrêmement répressif, assimilant le téléchargement illicite d'oeuvres et d'objets protégés à de la contrefaçon, alors qu'un tel comportement relève généralement de pratiques spontanées d'internautes désireux d'accéder à des contenus culturels multiples et variés.
Une telle provocation n'a pas manqué de mettre le feu aux poudres. Par le biais de très nombreux amendements, les députés ont relayé de manière souvent improvisée les préoccupations de toutes les parties au débat. Et vous n'avez rien trouvé de mieux, monsieur le ministre, que de retirer purement et simplement les dispositions en question, au lieu de laisser à la navette parlementaire le soin de faire son oeuvre.
C'est donc dans un contexte d'hostilité déclarée que le Sénat s'est trouvé saisi du projet de loi. Il a dû trouver une voie pour relayer les préoccupations tant de l'industrie culturelle et des ayants droit que des internautes, des éditeurs de logiciels et des industries concernées, et ce dans un cadre dépassant désormais la simple transposition de la directive puisque certaines questions primordiales comme celle de l'interopérabilité ayant été soulevées, il convenait de les régler au mieux.
Par leurs interventions et leurs amendements, les sénateurs socialistes ont donc souhaité contribuer au débat en maintenant un équilibre entre protection et développement de la création, d'une part, et droit d'accès à la culture, d'autre part.
Force est de constater que nos amendements n'ont trouvé que peu d'écho auprès de la Haute Assemblée : seuls deux d'entre eux ont été adoptés. Le premier tendait à garantir le respect de la directive du 14 mai 1991 concernant la protection juridique des programmes d'ordinateur et modifiant le code de la propriété intellectuelle sur l'exception de décompilation dans le cadre de la protection des mesures techniques. Le second avait pour objet de prévoir les conditions de mise en oeuvre d'une plateforme de téléchargement publique.
Le texte issu du Sénat ne peut pas nous satisfaire pleinement. Nous ne pouvons pas cautionner la nouvelle Autorité de régulation des mesures techniques, voulue par M. le rapporteur. Celle-ci constitue une nouvelle instance de régulation aux compétences beaucoup trop larges pour un secteur dont on ne maîtrise pas encore l'évolution. Nous regrettons que le collège de médiateurs, dans une formation élargie mais avec des compétences maintenues - c'est la formule que nous souhaitions -, n'ait pas été préféré.
Certes, les sanctions figurant dans le projet de loi initial ont été davantage graduées en fonction de la nature de la faute, mais rien ne nous assure qu'elles trouveront une application effective ni qu'elles seront réellement dissuasives pour les internautes peu soucieux des droits d'auteur.
Nous aurions aimé que certaines de nos propositions - je pense notamment à celle relative à la garantie de la chronologie des médias dans les modalités de la mise en oeuvre de l'exception pour copie privée dans le cadre numérique - soient retenues.
Vous comprendrez donc que nous ne pouvons pas cautionner ce texte, sur lequel le Gouvernement et le Sénat n'ont pas fait preuve d'une ouverture d'esprit suffisante. Le groupe socialiste votera donc contre ce projet de loi.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Tasca.
Mme Catherine Tasca. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il était grand temps de transposer dans notre droit la directive européenne du 22 mai 2001 sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information.
Il n'était en effet plus réaliste de prétendre vouloir assurer le respect du droit d'auteur et des droits voisins sans en organiser les protections face à l'explosion de nouvelles pratiques, qui doivent retrouver leur place dans un cadre légal.
Mais, monsieur le ministre, ce texte est une occasion manquée. Il nous laisse au milieu du gué, car il a d'emblée créé un affrontement non résolu à ce jour entre les intérêts légitimes des auteurs et les aspirations nouvelles des internautes.
Tout au long de l'examen de votre projet de loi, on a hésité - je dirais même « divagué » - entre ces deux objectifs, allant même parfois jusqu'à confondre le nouveau principe d'interopérabilité avec une autorisation de contourner les mesures de protection. On a également mélangé copie privée et téléchargement. Cela ne sert ni les auteurs, ni les internautes, ni les éditeurs de logiciels libres, qui ne sauraient être confondus avec le piratage.
À l'actif de ce texte figurent de nouvelles exceptions très importantes, qui ouvrent un champ véritablement neuf. Je pense notamment à l'exception pédagogique pour l'éducation et la recherche, ainsi qu'à l'exception pour l'accès des personnes handicapées au monde numérique, donc à la culture. Ce texte a également - c'est fondamental pour moi - réaffirmé l'indivisibilité du droit d'auteur, qui est le socle du développement de la vie intellectuelle et artistique.
En revanche, plusieurs points sont à mettre au passif de ce projet de loi. D'abord, comme nous l'avons tous souligné, vous avez opté pour l'apparition de cette énième autorité dite indépendante, au lieu de creuser le sillon de la médiation et de la collégialité. De même, nous sommes nombreux à avoir des doutes quant à l'efficacité des mesures de protection et des sanctions.
Heureusement, nous sommes tous conscients que ce texte n'est qu'une étape.
Pour notre part, sénateurs socialistes, nous avons pris date pour travailler à dessiner rapidement une nouvelle économie de la culture qui ne saurait sacrifier la rémunération des auteurs. Nous souhaitons également oeuvrer pour responsabiliser chaque maillon de la chaîne, plutôt que de tout reporter sur l'internaute ou de tout demander à l'auteur. Enfin, nous voulons trouver la voie d'une collaboration fructueuse entre la création et le monde numérique. Nous devrons y arriver. Nous ne saurions donc nous contenter du texte tel qu'il est issu de ce débat.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 193 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 292 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 147 |
Pour l'adoption | 164 |
Contre | 128 |
Le Sénat a adopté.
La parole est à M. le ministre.
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Je voudrais remercier très sincèrement M. le président de la commission des affaires culturelles du Sénat, M. le rapporteur et l'ensemble des sénateurs qui ont voté ce projet de loi.
Il faut que les Français le sachent. S'il y a réconciliation - je pèse mes mots - entre les créateurs, les auteurs, les artistes, les techniciens et les internautes, c'est grâce à votre vote. Si le spectre de la prison pour l'internaute ordinaire disparaît, c'est grâce à vous. Si la sanction qui pénalisera en revanche ceux qui veulent casser notre système de droit d'auteur intervient, c'est également grâce à vous. Si l'avant-garde est au rendez-vous, c'est-à-dire si le droit pour chaque internaute de lire une oeuvre quel que soit le support est établi - de ce point de vue, nous serons observés dans le monde entier -, c'est grâce à ceux qui ont voté ce texte.
Dans ce débat, je n'ai pas entendu de propositions alternatives. Ceux qui le souhaitent auront la possibilité d'en émettre ; je les écouterai avec la plus grande attention.
Mais il ne fallait pas attendre. Attendre, c'était tout simplement offrir un peu moins de chance aux créateurs français et européens.
Vous avez fait oeuvre utile, mesdames, messieurs les sénateurs, et je vous en remercie. Nous devons continuer le travail qui est engagé. En effet, la technologie galope ; il faut faire en sorte qu'elle soit une chance pour ceux qui veulent se lancer. Je pense à tous les jeunes créateurs, à tous les jeunes auteurs, à ceux pour lesquels faire rayonner leur talent est difficile. Internet peut être une chance, mais pour qu'il le soit véritablement, il fallait qu'il y ait des garanties.
Par conséquent, au terme de ce débat, mon cri du coeur sera : « Vive l'offre nouvelle rendue possible par ce texte ! ».
Vous avez fait oeuvre utile en créant une sécurité juridique pour les professionnels et en permettant à tous ceux qui ont la charge de donner des contenus accessibles au plus grand nombre sur internet de faire leur travail. Merci à chacune et à chacun !
Le travail que nous avons accompli aura, me semble-t-il, des développements proches. Peut-être obtiendrons-nous dans les jours prochains une nouvelle avancée de la part de l'Union européenne, qui sera la reconnaissance de notre crédit d'impôt pour l'industrie phonographique. Là encore, ce sera une oeuvre utile.
Monsieur le président, je vous remercie d'avoir mené à bien ces débats avec flegme, mais également avec fermeté. Le bateau est arrivé à bon port et je vous en sais gré. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
4
DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI
M. le président. J'ai reçu de M. Jean-Louis Masson une proposition de loi visant à uniformiser la taille et l'impression des bulletins de vote.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 344, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
5
TEXTES SOUMIS AU SÉNAT EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION
M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- Proposition de règlement du Conseil relatif à la conclusion de l'accord sous forme d'échange de lettres relatif à la prorogation du protocole fixant les possibilités de pêche et la contrepartie financière prévues dans l'accord entre la Communauté économique européenne et le gouvernement de la République de Guinée-Bissau concernant la pêche au large de Guinée-Bissau pour la période allant du 16 juin 2006 au 15 juin 2007.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-3140 et distribué.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- Proposition de décision du Conseil relative à la signature au nom de la Communauté européenne, et à l'application provisoire de l'accord sous forme d'échange de lettres relatif à la prorogation du protocole fixant les possibilités de pêche et la contrepartie financière prévues dans l'accord entre la Communauté économique européenne et le gouvernement de la République de Guinée-Bissau concernant la pêche au large de Guinée-Bissau pour la période allant du 16 juin 2006 au 15 juin 2007.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-3141 et distribué.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- Proposition de décision du Conseil relative à la signature, au nom de la Communauté européenne, d'un arrangement entre la Communauté européenne, la République d'Islande et le Royaume de Norvège sur les modalités de la participation de ces États aux activités de l'Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l'Union européenne. Proposition de décision du Conseil relative à la conclusion, au nom de la Communauté européenne, d'un arrangement entre la Communauté européenne, la République d'Islande et le Royaume de Norvège sur les modalités de la participation de ces États aux activités de l'Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l'Union européenne.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-3142 et distribué.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- Proposition de décision du Conseil concernant la signature de l'accord de réadmission entre la Communauté européenne et la Fédération de Russie. Proposition de décision du Conseil concernant la conclusion de l'accord de réadmission entre la Communauté européenne et la Fédération de Russie.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-3143 et distribué.
6
DÉPÔT DE RAPPORTS
M. le président. J'ai reçu de M. Philippe Goujon un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative à la prévention des violences lors des manifestations sportives (n° 305, 2005-2006).
Le rapport sera imprimé sous le n° 338 et distribué.
J'ai reçu de M. Jean-Claude Carle un rapport fait au nom de la commission des affaires culturelles sur la proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale, relative aux délégués départementaux de l'éducation nationale (n° 299, 2005-2006).
Le rapport sera imprimé sous le n° 339 et distribué.
J'ai reçu de M. Henri de Richemont un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur :
- le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant réforme des successions et des libéralités (n° 223, 2005-2006) ;
- et la proposition de loi de MM. Patrice Gélard, Philippe Leroy, Daniel Goulet, Jean Jacques Hyest, François Gerbaud, Jean-René Lecerf, Alain Milon, Yannick Texier, Mme Paulette Brisepierre, MM. François-Noël Buffet, José Balarello, Bernard Fournier, Charles Pasqua, Jean-Luc Miraux, René Garrec, Christian Cointat, Michel Esneu, Paul Natali, André Ferrand, Mme Joëlle Garriaud-Maylam, MM. Louis Grillot, Henri de Raincourt, Jean-Patrick Courtois, Charles Guené, Pierre André, Hugues Portelli, Marcel-Pierre Cléach, Bernard Saugey, Henri de Richemont, Louis Duvernois, Jean-Marc Juilhard, Mme Janine Rozier, MM. Michel Guerry, Roland du Luart, Michel Doublet, Jean Bizet, Michel Houel et Mme Colette Melot relative au régime des biens acquis postérieurement à la conclusion d'un pacte civil de solidarité (n° 162, 2004 2005).
Le rapport sera imprimé sous le n° 343 et distribué.
7
DÉPÔT DE RAPPORTS D'INFORMATION
M. le président. J'ai reçu de MM. Jacques Valade, Jean-Claude Carle, Jean-Léonce Dupont, Pierre Laffitte, Serge Lagauche, Jean-Marc Todeschini et Jean-François Voguet un rapport d'information fait au nom de la commission des affaires culturelles à la suite d'une mission effectuée en Chine du 24 septembre au 2 octobre 2005.
Le rapport d'information sera imprimé sous le n° 340 et distribué.
J'ai reçu de M. Philippe Adnot un rapport d'information fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation sur la valorisation de la recherche dans les universités.
Le rapport d'information sera imprimé sous le n° 341 et distribué.
J'ai reçu de Mme Fabienne Keller un rapport d'information fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation sur les enjeux budgétaires liés au droit communautaire de l'environnement.
Le rapport d'information sera imprimé sous le n° 342 et distribué.
J'ai reçu de MM. Alain Vasselle et Bernard Cazeau un rapport d'information fait au nom de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale, la MECSS, de la commission des affaires sociales sur la dette sociale.
Le rapport d'information sera imprimé sous le n° 345 et distribué.
8
ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd'hui, jeudi 11 mai 2006 à dix heures, quinze heures et, éventuellement, le soir :
1. Discussion de la question orale avec débat (n° 11) de M. Jacques Pelletier à M. le Premier ministre sur le respect effectif des droits de l'homme en France.
Suite à la publication, le 15 février 2006 du rapport du commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe « sur le respect effectif des droits de l'homme en France », M. Jacques Pelletier attire l'attention du M. le Premier ministre d'une part, sur le diagnostic préoccupant que dresse ce rapport en matière de respect des droits de l'homme dans notre pays, et d'autre part, sur les recommandations très précises du commissaire aux droits de l'homme adressées aux autorités françaises.
Le rapport identifie un certain nombre de problèmes concernant le manque de moyens de la justice, les conditions de détention, l'internement des jeunes ou des malades psychiatriques, le traitement des étrangers arrivant sur le territoire, l'asile et les procédures d'expulsion, la discrimination et la xénophobie, les violences domestiques, les gens du voyage ou encore la traite des humains. Le commissaire aux droits de l'homme fait part de son impression que la France ne se donne pas toujours les moyens suffisants pour traduire concrètement un arsenal juridique de haut niveau et qu'il semble exister « un fossé qui peut s'avérer très large entre ce qu'annoncent les textes et la pratique ».
Aussi, concernant plus précisément la situation des prisons françaises et conditions de détention dans les établissements pénitentiaires de notre pays, il apparaît comme inquiétant de constater que le récent rapport du commissaire aux droits de l'homme rejoint en grande partie les observations et les conclusions déjà alarmantes des rapports parlementaires de juin 2000 des commissions d'enquête du Sénat (n° 449, 1999-2000) et de l'Assemblée nationale (n° 2521, 1999-2000).
Dans ces conditions, M. Jacques Pelletier souhaiterait connaître de la part du Premier ministre son évaluation de la situation actuelle en matière de respect effectif des droits de l'homme dans notre pays. Il lui demande, enfin, s'il entend suivre tout ou partie des recommandations formulées par le commissaire aux droits de l'homme dans son rapport.
Aucune inscription de parole dans la discussion générale n'est plus recevable.
2. Discussion des conclusions du rapport (n° 333, 2005-2006) de M. Roland Ries, fait au nom de la commission des affaires économiques sur la proposition de loi (n° 183, 2005-2006) de MM. Roland Ries, Jean Pierre Bel, Yannick Bodin, Roland Courteau, Michel Dreyfus Schmidt, Louis Le Pensec, Roger Madec, François Marc, Jean-Pierre Michel, Jean-Marc Pastor, Jean-François Picheral, Mme Gisèle Printz, MM. Daniel Reiner, Thierry Repentin, Mme Patricia Schillinger, MM. Marcel Vidal, Gérard Collomb et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, tendant à promouvoir l'autopartage.
Aucune inscription de parole dans la discussion générale n'est plus recevable.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
3. Débat sur le rapport d'information (n° 440, 2004 2005) de M. Yann Gaillard sur la politique de l'archéologie préventive.
Aucune inscription de parole dans la discussion générale n'est plus recevable.
4. Débat sur le rapport d'information (n° 62, 2005-2006) de M. Jean-Jacques Jégou sur l'informatisation dans le secteur de la santé.
Aucune inscription de parole dans la discussion générale n'est plus recevable.
5. Discussion des conclusions du rapport (n° 329, 2005-2006) fait au nom de la commission des affaires sociales sur la proposition de loi de M. Nicolas About visant à accorder une majoration de pension de retraite aux fonctionnaires handicapés (n° 289, 2005-2006).
Aucune inscription de parole dans la discussion générale n'est plus recevable.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
Délai limite pour les inscriptions de parole et pour le dépôt des amendements
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant réforme des successions et des libéralités (n° 223, 2005-2006) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 15 mai 2006, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 15 mai 2006, à douze heures.
Deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale, relative aux délégués départementaux de l'éducation nationale (n° 299, 2005-2006) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 17 mai 2006, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 16 mai 2006, à dix-sept heures.
Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative à la prévention des violences lors des manifestations sportives (n° 305, 2005-2006) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 17 mai 2006, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 16 mai 2006, à dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée le jeudi 11 mai 2006, à une heure.)
La Directrice
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD