M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 30 sexies.
Article 31
I. - Lorsque le contribuable a transféré son domicile hors de France dans un État membre de la Communauté européenne, ou dans un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale, avant le 1er janvier 2005, l'impôt établi sur le fondement du 1 bis de l'article 167 du code général des impôts dans sa rédaction en vigueur avant le 1er janvier 2005 est dégrevé d'office pour la fraction correspondant aux titres qu'il détient au 1er janvier 2006. Les reports d'imposition des plus-values afférentes à ces titres existant à la date du transfert du domicile hors de France sont rétablis de plein droit.
II. - Les dispositions du I entrent en vigueur à compter du 1er janvier 2006.
M. le président. L'amendement n° 49, présenté par MM. Sergent, Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Marc Massion.
M. Marc Massion. Le Gouvernement a, pour des raisons de mise en conformité avec le droit communautaire, supprimé en 2005 un dispositif mis en place sous la précédente législature et qui visait à dissuader les délocalisations fiscales des particuliers en permettant le rappel de l'ensemble des reports d'imposition lorsque les intéressés changeaient de résidence fiscale.
Malheureusement, le Gouvernement ne propose aucune solution alternative pour juguler ce type de comportement.
Il se contente de lancer, sans moyens, la France dans une concurrence régulée, si l'on peut dire, par la course au moins-disant fiscal, ce qui aura des effets négatifs sur les comptes publics et sur la capacité de croissance, à terme, de l'économie française.
L'article 31 vise ainsi à assurer aux contribuables qui auraient été soumis au dispositif « anti-délocalisations » la simple remise en cause de ces effets passés, une nouvelle fois sans aucune avancée pour régler la question de fond posée.
Nous proposons donc la suppression de cet article.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'article 31 réalise une mise en conformité par rapport au droit communautaire. Sa suppression ne paraît ni possible ni d'ailleurs opportune.
L'avis de la commission est donc tout à fait défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 31.
(L'article 31 est adopté.)
Article additionnel après l'article 31
M. le président. L'amendement n° 50, présenté par MM. Sergent, Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 31, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le deuxième alinéa de l'article 238 A du code général des impôts, les mots : « inférieur de plus de la moitié » sont remplacés par les mots : « inférieur de plus du tiers ».
La parole est à M. Marc Massion.
M. Marc Massion. L'article 209 B du code général des impôts permet de rattacher aux bénéfices d'une société imposable en France une partie des bénéfices de sociétés dont elle détient un certain pourcentage de capital et qui sont situées dans des pays à régime fiscal privilégié. Il s'agit là d'un moyen mis à la disposition de l'administration fiscale, dans le cadre de la lutte contre l'évasion fiscale.
Ce moyen d'action s'appuie sur la définition du « régime fiscal privilégié », posée à l'article 238 A du code général des impôts. Mais, alors que cette possibilité reposait sur la référence à un « écart notable » entre l'impôt acquitté à l'étranger et l'impôt français, cette référence a été supprimée au profit d'une définition précise de l'écart d'imposition.
Ce qui caractérise désormais le régime fiscal privilégié, c'est une différence de plus de 50 % entre l'impôt acquitté à l'étranger et celui dont l'entreprise, ou l'entité, aurait été redevable en France dans les conditions de droit commun.
Or cette évolution est particulièrement favorable aux entreprises concernées car, jusque-là, l'écart retenu par la doctrine administrative était de 33 %. De fait, cette évolution signe un affaiblissement des moyens mis à la disposition de l'administration pour lutter contre l'évasion fiscale.
Nous proposons donc de revenir à une définition plus stricte du régime fiscal privilégié, qui serait présumé dès lors que l'écart d'imposition est de 33 %.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Le même amendement a été présenté par le même groupe l'année dernière. La commission avait alors émis un avis défavorable et il n'y a aucune raison de modifier cette position.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Loos, ministre délégué. Nous estimons qu'un différentiel de 33 % n'est pas réaliste et que retenir 50 % est tout à fait pertinent. Au demeurant, on observe souvent des différentiels proches de 100 % !
Par conséquent, nous demandons le retrait ou le rejet de cet amendement.
M. le président. L'article 32 a été supprimé par l'Assemblée nationale.
L'amendement n° 76, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Après le quatrième alinéa de l'article L. 1511-1 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« À cette fin, le conseil régional est habilité à constituer une commission de contrôle de suivi et d'évaluation des aides publiques versées aux entreprises, composées à parts égale de représentants de l'assemblée délibérante et des représentants du comité économique et social régional. Cette commission peut être saisie, en tant que besoin, par tout élu local, organisation syndicale ou professionnelle représentative. »
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Pour présenter cet amendement, je prendrai un exemple tiré de l'immédiate actualité.
Une ville importante de la région Champagne-Ardenne, Saint-Dizier, est confrontée depuis plusieurs semaines à une situation particulièrement préoccupante. Deux des entreprises les plus importantes de la ville, la société Mac Cormick France et la fonderie de machinisme agricole Bragarde, sont concernées par une procédure de redressement judiciaire faisant planer le risque de centaines de licenciements dans un bassin d'emplois déjà lourdement marqué par les restructurations.
Pour que chacun mesure la situation, il faut se souvenir que la ville de Saint-Dizier comptait, dans les années soixante-dix, près de 40 000 habitants et que, du fait de la baisse continue des emplois industriels dans le bassin d'emplois, elle n'en compte plus que 30 000 environ aujourd'hui.
Les coups portés à l'activité économique, notamment dans les secteurs historiques de la métallurgie et du textile, ont contribué à dégrader la situation de l'emploi. Ils ont évidemment pesé aussi sur la situation sociale des habitants, dont la plus grande partie ne dispose que de ressources modestes. En effet, près de 60 % des foyers ne sont pas imposables, tandis que le principal quartier d'habitat social de la ville est l'objet d'un grand projet de ville et d'une convention de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine.
L'annonce des difficultés financières de ces entreprises a provoqué la légitime colère des salariés des deux unités. Ceux-ci ont ainsi multiplié les actions depuis plusieurs semaines, afin de se faire entendre des pouvoirs publics mais aussi de l'actionnaire de référence, le groupe italien Argo Spa, qui a maintes fois manqué au respect des demandes des élus locaux, y compris à celles du député-maire UMP de la localité.
Il y a quelques raisons de penser que ce groupe italien, qui s'est porté voilà quelques années acquéreur des deux entreprises, ne s'est pas conduit de manière optimale du point de vue du droit en matière de gestion comptable et financière de l'activité.
Il a de surcroît obtenu, pour la fonderie du moins, le soutien financier de la région, pour un montant d'aides que l'on peut estimer, sous des formes diverses, à 3,5 millions d'euros. Cette situation pose des questions importantes.
L'argent des collectivités locales a-t-il été employé à bon escient, d'autant que les bilans de la société Mac Cormick France comme de la fonderie ont été sciemment détériorés pour présenter les résultats les plus négatifs possible ?
Les éléments financiers connus sont en effet troublants : on a ainsi pu observer la progression sensible du chiffre d'affaires de Mac Cormick France, tout en constatant la dégradation de la valeur ajoutée produite. Tout semble avoir été conduit pour dégrader la situation financière de l'entreprise et justifier ensuite les licenciements.
Nous pouvons même penser que, dans cette situation qui n'est pas isolée - citons, par exemple, la société Gomma, qui avait repris les activités de fabrication de pièces détachées de Citroën à Rennes -, nous sommes en présence de véritables patrons « voyous » - pour reprendre l'expression que certains avaient employée -, comme nous l'avions vu avec l'usine Flodor.
Les collectivités territoriales ne sont-elles pas en droit, au nom des habitants de la région, de demander des comptes sur l'utilisation qui a été faite de l'argent public ?
C'est d'ailleurs sous le bénéfice de ces considérations que le conseil régional de Champagne-Ardenne, par une délibération de portée générale, s'est pourvu d'une commission de contrôle, de suivi et d'évaluation des aides publiques régionales. Celui-ci a, en quelque sorte, anticipé la faculté que nous vous proposons de lui accorder, avec l'insertion des dispositions prévues par notre amendement dans le code général des collectivités territoriales.
Nous vous invitons à inscrire dans la loi ce qui est déjà, dans les faits, au menu de l'action de certains conseils régionaux, naturellement soucieux d'une bonne utilisation des deniers publics.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est très intéressée par les faits relatés par Mme Beaufils, mais elle a entendu le « trot du cavalier »...
Dès lors, elle ne peut être favorable à cet amendement.
Mme Marie-France Beaufils. C'est une forme de contournement de votre part !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Pardonnez-moi, chère collègue, mais cette disposition n'est pas susceptible d'être traitée dans une loi de finances.
M. Michel Charasse. En ce cas, il n'y a pas de débat !
M. le président. Monsieur le rapporteur général, invoquez-vous l'irrecevabilité prévue par l'article 45 du règlement du Sénat ?
Mme Marie-France Beaufils. C'est une irrecevabilité très particulière !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je l'invoque, monsieur le président.
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 76 n'est pas recevable.
Article additionnel avant l'article 32 bis
M. le président. L'amendement n° 181 rectifié, présenté par MM. Bailly, Émin, Lesbros, Puech, Humbert, Pierre, Nachbar, P. Blanc, Vial, de Raincourt, Emorine, Trucy, Gaillard et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Avant l'article 32 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I.- 1. Dans l'avant-dernier alinéa du II de l'article 1465 A du code général des impôts les mots : « qui respectent les critères définis aux a, b et c, mais qui ne sont pas membres d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, » sont supprimés.
2. À la fin du même alinéa, les mots : « 31 décembre 2006. » sont remplacés par les mots : « 31 décembre 2008. »
II.- La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. François Trucy.
M. François Trucy. Il m'arrive souvent de me demander si les excellents techniciens qui s'acharnent à perfectionner les textes en mesurent toutes les conséquences pratiques pour les communes ! (Exclamations amusées sur la plupart des travées.)
Le décret du 21 novembre 2005, pris en application de la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux, a ainsi redéfini les zones de revitalisation rurale. En conséquence, ces textes vont entraîner la sortie desdites zones de 477 communes avant la fin de l'année 2005.
Or le classement en ZRR permet aux entreprises industrielles, artisanales ou commerciales, ainsi qu'aux professions libérales qui créent ou reprennent une activité dans ces communes, de bénéficier d'exonérations fiscales. Ce classement est donc essentiel pour favoriser la création d'emplois et le développement économique.
Dans ces conditions, il importe, en fonction de ces nouvelles dates, de laisser aux communes susceptibles de sortir des ZRR le temps nécessaire pour adapter leurs actions en faveur du développement économique à leur nouvelle situation et, en particulier, de constituer une intercommunalité à fiscalité propre pour les communes qui répondent aux critères prévus à cette fin.
Si vous votez cet amendement, mes chers collègues, le délai initialement fixé à la fin de l'année 2006 sera porté à la fin de l'année 2008.
En fait, il convient de distinguer deux catégories de communes.
D'une part, les 477 communes que je viens d'évoquer étaient précédemment en zone de revitalisation rurale et ne répondent plus aux critères socioéconomiques fixés. D'autre part, certaines communes - elles étaient encore quelques centaines à la fin de l'année 2004 - répondent à ces critères mais ne sont pas membres d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre. Les premières sortiront normalement du dispositif à la fin de l'année 2005, les secondes bénéficieront d'un délai d'un an, jusqu'à la fin de l'année 2006.
Voilà pourquoi, par cet amendement de simplification, nous vous proposons de fixer la date de sortie des ZRR au 31 décembre 2008, aussi bien pour les communes qui ne répondent plus aux critères que pour celles qui doivent créer un établissement public de coopération intercommunale.
Compte tenu du coût excessivement faible pour les finances publiques de cette mesure et de l'espoir que cet amendement pourrait faire naître dans 477 petites communes rurales réparties dans 60 départements, je me permets de vous inviter à adopter cet amendement.
M. Joël Bourdin. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet exposé est très documenté et très convaincant. Il faut en rendre hommage à notre collègue François Trucy, qui nous propose de maintenir le classement en ZRR de 477 petites communes jusqu'au 31 décembre 2008, alors que leur classification selon le droit existant ne subsisterait que jusqu'au 31 décembre 2006.
La commission a exprimé un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Loos, ministre délégué. Le Gouvernement a bien étudié la question.
Nous avons constaté que les 477 communes que vous évoquez ont toutes connu des évolutions démographiques favorables avec, dans certains cas, des augmentations de population de 10 %, de 12 %, voire de 33 %. Elles comptent ainsi près de 45 habitants au kilomètre carré, alors que le seuil réglementaire est de 31 habitants au kilomètre carré.
Les zones de revitalisation rurale ont pour objet de réaliser une discrimination positive afin de venir en aide aux communes qui ont le plus de difficultés. À cette fin, il importe de concentrer les moyens et il nous semble donc logique de mettre fin au classement en ZRR des communes que vous évoquez.
Par ailleurs, ces communes sont informées de la situation depuis le début et les seuils retenus dans le décret du 21 novembre 2005 ont repris très exactement les valeurs antérieures.
Pour toutes ces raisons, monsieur le sénateur, je préférerais que vous retiriez l'amendement ; à défaut, le Gouvernement y serait défavorable.
M. le président. Monsieur Trucy, l'amendement n° 181 rectifié est-il maintenu ?
M. François Trucy. Je ne serais fidèle ni à l'esprit dans lequel j'ai déposé cet amendement ni à l'avis de la commission des finances si je le retirais, monsieur le président ! Vous me permettrez donc de le maintenir.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Cet amendement nous paraît aller dans le bon sens. C'est pourquoi le groupe socialiste le votera.
M. le président. La parole est à M. Yann Gaillard, pour explication de vote.
M. Yann Gaillard. Je suis un peu étonné de l'avis exprimé par M. le ministre. Je pensais que cet amendement recueillerait toutes les bénédictions...
M. Michel Charasse. De quelles églises ?
M. Yann Gaillard. En tout cas, il aura la mienne ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Charles Guené, pour explication de vote.
M. Charles Guené. Je préconise d'autant plus l'adoption de cet amendement qu'il concerne également les communes qui devraient sortir des ZRR parce qu'elles ne font pas partie d'une intercommunalité.
Pourquoi leur demander de le faire en une seule année ? Chacun sait que ce délai est un peu court pour toutes ces communes, qui attendent déjà depuis quelques années pour sortir des ZRR.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. Je ne suis pas sûr qu'il faille consacrer un long moment à cette affaire puisque, aux termes de cet amendement, la prolongation vaut pour deux ans. Nous aurons donc le temps de revoir ce point en 2008 ! Par conséquent, pourquoi nous chamailler aujourd'hui ?
Par ailleurs, j'ai cru comprendre, en entendant l'exposé de M. le ministre, que nous visions ici des populations situées à mi-chemin entre l'Éthiopie et le Niger, soit 45 habitants par village.
M. le président. Ne soyez pas désobligeant pour les autres pays, mon cher collègue !
Je mets aux voix l'amendement n° 181 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 32 bis.
Article 32 bis
I. - Le 3° bis de l'article 1469 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« 3°bis Les biens mentionnés aux 2° et 3°, utilisés par une personne passible de la taxe professionnelle qui n'en est ni propriétaire, ni locataire, ni sous-locataire et confiés en contrepartie de l'exécution d'un travail par leur propriétaire, leur locataire ou leur sous-locataire sont imposés au nom de la personne qui les a confiés, dans le cas où elle est passible de taxe professionnelle. »
II. - Les dispositions du I s'appliquent à compter des impositions établies au titre de l'année 2006.
M. le président. L'amendement n° 37, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'article 32 bis aborde une question bien connue du Sénat : les règles d'assujettissement à la taxe professionnelle des biens mis à disposition d'une personne par une autre.
Nous en avons longuement délibéré plusieurs années de suite, et la commission des finances ne voit aucune raison de modifier son analyse ou de changer de position. D'où sa préconisation de supprimer cet article.
Compte tenu de l'absence réelle d'évolution du contexte par rapport à l'an dernier, notre position sur l'assujettissement à la taxe professionnelle des utilisateurs pour les biens qui sont mis à leur disposition n'a pas lieu de changer.
Si nous changions de position, mes chers collègues, seraient redevables de la taxe professionnelle, au titre de ces matériels, un grand nombre de cafés, hôtels et restaurants.
Je sais bien qu'une partie de ces cafés, hôtels et restaurants, ceux qui réalisent les chiffres d'affaires les plus importants, bénéficient déjà d'un régime de plafonnement, mais il n'en reste pas moins qu'un très grand nombre d'entre eux ne sont pas compris dans ce plafonnement, ce qui entraînerait une augmentation sensible de leur taxation.
De plus, il n'est pas possible de se borner à traiter une partie du problème. Or, si l'on adoptait l'article 32 bis, je crains beaucoup que l'on ne remette également en cause la situation des sous-traitants industriels. Souvenons-nous des débats que nous avons eus, en particulier sur la plasturgie, au sujet des sous-traitants de l'automobile : nous avions voulu préserver ces entreprises, qui doivent souvent faire face à un contexte compétitif difficile.
Enfin, il est possible, mes chers collègues, pour les détenteurs de ces matériels, de modifier le montage juridique de leurs opérations. Il leur est ainsi permis de céder ou de louer le matériel, ce qui déplacerait la charge de la taxe professionnelle.
Pour l'ensemble de ces raisons, la commission préconise la suppression de l'article 32 bis.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Loos, ministre délégué. Nous retrouvons ici, dans les mêmes termes, un débat qui a opposé l'année dernière deux points de vue différents, l'un au Sénat, l'autre à l'Assemblée nationale.
Je ferai un petit rappel historique.
S'agissant des mises à disposition gratuites d'équipements aux sous-traitants par les donneurs d'ordre, le Conseil d'État avait jugé, en 2003, que le redevable de la taxe professionnelle était le sous-traitant et non le donneur d'ordre, comme le prévoyait la doctrine administrative en vigueur.
Cette jurisprudence faisait peser une charge excessive sur les sous-traitants, qui sont placés, vous le savez, dans une situation concurrentielle difficile.
C'est pourquoi l'article 59 de la loi de finances rectificative pour 2003 a conforté la doctrine administrative. Mais il est allé trop loin, en visant toutes les mises à disposition gratuites.
Dès lors, de très nombreuses entreprises ayant prêté leurs biens à d'autres entreprises, par exemple dans le cadre de contrats d'approvisionnement, ont connu des ressauts d'imposition.
L'Assemblée nationale a donc recentré le champ de la mesure votée il y a deux ans aux biens confiés en contrepartie de l'exécution d'un travail, c'est-à-dire aux situations de sous-traitance. En effet, pour les autres mises à disposition gratuites, le problème ne se pose pas en termes aussi décisifs. Par exemple, dans le secteur de la plasturgie, les responsables vous disent qu'ils sont obligés de payer la taxe professionnelle sur des moules réalisés pour leurs clients, alors que leurs concurrents, dans les autres pays européens, ne connaissent pas une situation équivalente.
Vous souhaitez revenir de nouveau sur cette disposition, et je ne peux donner mon accord à cet amendement.
Tout d'abord, il ne faut pas perdre de vue que la taxe professionnelle est un impôt économique qui vise l'outil de travail dont l'entreprise dispose, qu'elle en soit propriétaire, locataire ou dépositaire. Les exceptions à ce principe doivent rester limitées, sauf à faire de la taxe professionnelle un impôt sur la propriété mobilière.
Par ailleurs, monsieur le rapporteur général, je sais que vous êtes soucieux de garantir aux collectivités territoriales leurs ressources fiscales.
Vous devriez donc être sensible à l'objectif visé au travers de l'article 32 bis, qui prévoit d'imposer les équipements concernés là où ils sont utilisés et de mettre fin à une rente de situation en faveur des collectivités qui ont la chance d'accueillir les entreprises propriétaires de ces équipements, alors même que lesdits équipements ne leur occasionnent aucune dépense puisque, précisément, ils sont localisés ailleurs !
L'article 32 bis permettra ainsi de mieux répartir la taxe professionnelle sur le territoire national, notamment en direction des communes rurales, qui sont pauvres en recettes fiscales et, surtout, en taxe professionnelle.
J'en viens enfin au problème du transfert de charges.
D'abord, il ne s'agit ici que de revenir à la décision rendue par le Conseil d'État. Ensuite, il ne faut pas exagérer l'ampleur de ces transferts, en particulier pour les débitants de boissons, que vous avez évoqués.
Il me semble, à cet égard, nécessaire d'apporter trois précisions.
Premièrement, il n'y aura pas le moindre ressaut d'imposition pour les entreprises dont les recettes annuelles sont inférieures à 150 000 euros car, dans ce cas, elles ne sont pas imposables sur les équipements et biens mobiliers dont elles disposent.
M. Philippe Richert. Très bien !
M. François Loos, ministre délégué. Deuxièmement, la mesure est également neutre pour les débitants de boissons qui perçoivent des commissions de presse, de tabac ou de jeux lorsque l'activité de commissionnaire est prépondérante.
Troisièmement, dans l'hypothèse où l'article 32 bis se traduirait effectivement par une augmentation des bases, il reste aux entreprises la possibilité de bénéficier du plafonnement en fonction de la valeur ajoutée.
Pour ma part, je vois dans cette bataille une façon d'aider certains secteurs industriels, pour un coût à peu près nul.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le ministre, nous avons vraiment approfondi cette question depuis plusieurs années, nous avons étudié la jurisprudence et nous savons qu'il s'agit d'un problème juridiquement très délicat.
Les différentes considérations de la commission en la matière sont, bien entendu, détaillées dans son rapport écrit.
L'article 32 bis prévoit une solution ad hoc pour certains matériels mis à disposition. Par dérogation à la règle générale, ces matériels ne seraient pas imposés chez le donneur d'ordre, mais chez le sous-traitant ou le prestataire, c'est-à-dire chez l'utilisateur de ces matériels.
En clair, le problème spécifique qui est posé - et qui mérite toute notre considération et notre respect, bien entendu - est celui des machines à bière qui sont mises à la disposition des débits de boissons par l'industrie de la brasserie.
Cette industrie, je le répète, est éminemment sympathique, en particulier s'agissant des quelques très rares entreprises qui sont encore indépendantes. En effet, le secteur de la brasserie, dans son immense majorité, est constitué, je le rappelle, par des filiales françaises d'entreprises européennes ou multinationales.
Pour tenir compte des pratiques de ce métier et pour manifester notre sympathie à l'égard des quelques brasseries indépendantes qui existent encore, notamment dans la belle région d'Alsace, on a recherché une solution ad hoc : c'est l'amendement de MM. Reymann et Schneider, adopté à l'Assemblée nationale et devenu l'article 32 bis.
Pour ma part, je persiste à trouver cette solution dangereuse sur le plan du droit, car je crains qu'il ne s'agisse d'un nouveau prétexte pour faire évoluer la jurisprudence. Dans ces conditions, la solution générale qui a été trouvée, qui immunise les sous-traitants - en particulier ceux de l'automobile - risquerait d'être fragilisée.
En second lieu, je rappelle que le report de charges sur les cafetiers et les professions assimilées est loin d'être théorique, car les débits de boissons qui réalisent moins de 150 000 euros de chiffre d'affaires représentent près 80 % de la profession.
On dit à ses personnes que l'on plaide en faveur d'un taux abaissé de TVA pour la restauration et, dans le même temps, on prend des dispositions qui risquent d'entraîner une taxe professionnelle supplémentaire pour un certain nombre d'entre elles ! Certes, je rapproche ici deux taxes qui sont de nature très différente, mais elles risquent malgré tout de concerner un peu les mêmes personnes, puisqu'il y a une intersection entre les deux ensembles.
Enfin, on ne m'a toujours pas expliqué pourquoi il n'était pas possible aux brasseurs de faire évoluer leurs montages juridiques et, le cas échéant, de négocier différemment avec leurs prestataires ou leurs dépositaires pour se partager la charge de la taxe professionnelle ! En réalité, il s'agit d'accords commerciaux, et ces accords peuvent faire l'objet de pratiques professionnelles différentes.
Pour l'ensemble de ces raisons, monsieur le ministre, j'ai le regret de vous dire que la commission reste sur les positions qu'elle a défendues depuis plusieurs années.
Je prie nos collègues de la région d'Alsace et du département du Bas-Rhin de bien vouloir comprendre cette position. La commission est très sensible à ce qui lui a été dit, mais elle pense qu'une solution trop limitée, trop « sur-mesure », pourrait avoir de graves inconvénients par ailleurs.
M. le président. La parole est à M. Francis Grignon, pour explication de vote.
M. Francis Grignon. Monsieur le rapporteur général, je sais qu'à l'impossible nul n'est tenu. Permettez-moi néanmoins de tenter de vous convaincre du bien-fondé de cet article 32 bis, introduit, je le rappelle, par l'Assemblée nationale et soutenu par le Gouvernement.
La loi de finances rectificative pour 2003 contenait une mesure dont vous êtes, il me semble, à l'origine, ...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Chacun s'en souvient !
M. Francis Grignon. ... et qui consistait à transférer aux donneurs d'ordre la taxe professionnelle relative aux matériels qu'ils mettent à disposition des sous-traitants, mais sans les définir précisément. C'est bien le problème !
La loi est donc applicable depuis 2003, après la modification de l'article 1469 du code général des impôts, à tous les biens mis à disposition, autant pour l'exécution d'un travail - dans le secteur de l'automobile, par exemple - que dans une visée purement commerciale et sans obligation de travail - par exemple entre les producteurs de bière et les cafés, hôteliers et restaurateurs, comme cela a été dit, mais également entre ces mêmes producteurs et le secteur de la vie associative.
Nous sommes donc en présence d'un texte qui évite, certes, les délocalisations des industries sous-traitantes, mais qui pénalise un secteur économique dont l'emploi n'est pas délocalisable, celui de la brasserie, des cafés, hôtels et restaurants.
Sans l'article 32 bis, la loi aurait pour premier effet pénalisant de coûter 15 millions d'euros par an à une centaine de brasseurs, hors rétroactivité.
Si l'amendement de suppression était voté, la loi aurait pour deuxième effet pénalisant d'obliger le secteur brassicole, soumis par ailleurs à de fortes contraintes, à supprimer à terme la mise à disposition de matériels, ce qui se ferait bien évidemment aux dépens des cafés, hôtels et restaurants.
À un moment où le Gouvernement use de toute son influence pour ramener dans ce secteur la TVA à 5,5 % - ce qui n'est pas acquis -, il ne serait pas judicieux de pénaliser les cafés, hôtels et restaurants, qui, je le rappelle, créent de nombreux emplois de proximité non délocalisables. De plus, contrairement à ce qui se passe dans de nombreux pays, par exemple au Danemark, ce secteur enregistre chez nous un déficit d'emploi, le Sénat l'a montré dans un rapport relatif aux délocalisations publié en 2003.
Monsieur le rapporteur général, je pense avoir évoqué quelques-unes des bonnes raisons tendant au maintien de l'article 32 bis. Si l'amendement de suppression n'était pas retiré, je serais bien évidemment contraint de voter contre !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je me souviens, comme la plupart d'entre nous - Alain Lambert notamment -, de cette discussion, lors de l'examen du collectif de 2003, sur la taxe professionnelle applicable aux équipements et outillages mis à disposition des sous-traitants. (M. Alain Lambert opine.)
À cet égard, l'article 32 ter, que nous examinerons dans un instant, réglera un problème qui a surgi depuis que nous avons décidé de mettre la taxe professionnelle à la charge du propriétaire de ces biens. Il est en effet apparu que certains d'entre eux y échappaient du fait de leur domiciliation hors de France. Une instruction du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie a donc prévu que le sous-traitant devenait dorénavant le redevable de la taxe professionnelle.
L'article 32 ter offre donc la possibilité aux collectivités qui le souhaitent d'exonérer les sous-traitants qui se trouvent dans cette situation. Il s'agit en effet d'un mécanisme de délocalisation de l'activité, et l'on voit bien à quel point la taxe professionnelle peut être corrosive dans certains cas.
Cela étant, je voudrais dire à nos amis Alsaciens que l'importante réforme de la taxe professionnelle que nous venons de voter plafonnera la contribution par rapport à la valeur ajoutée. Dans ces conditions, il n'est pas exclu que les brasseurs puissent bénéficier d'un plafonnement à 3,5 % de la valeur ajoutée ! Pour en être tout à fait sûr, il faudrait procéder à des simulations, et vos services pourraient peut-être s'en charger, monsieur le ministre... Dès lors, ce qui paraît fâcheux à notre collègue M. Grignon devrait assez rapidement pouvoir s'estomper.
En tout cas, les liens entre les brasseurs et les cafetiers sont souvent très étroits et il n'est pas exclu que, dans certains cas, les brasseurs participent eux-mêmes au financement des cafés, notamment sous forme de caution auprès des organismes financiers.
Quoi qu'il en soit, comme l'a dit M. le rapporteur général, il nous paraît difficile de revenir sur les positions que nous avons arrêtées.