Article 1er
I. - L'article L. 225-37 du code de commerce est ainsi modifié :
1° Dans la dernière phrase du troisième alinéa, la référence : « L. 225-53, » est supprimée ;
2° Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le règlement intérieur peut également prévoir, sauf disposition contraire des statuts, que, dans les cas et aux conditions prévus par ceux-ci, et sauf opposition de l'un des administrateurs, sont réputés présents pour le calcul du quorum et de la majorité les administrateurs qui participent à la réunion du conseil par des moyens de télétransmission autres que la visioconférence, et dont la nature, les modalités d'utilisation et de preuve de l'identité des administrateurs sont déterminées par décret en Conseil d'Etat. Les statuts peuvent, le cas échéant, limiter la nature des décisions pouvant être prises lors d'une réunion tenue dans ces conditions. Le présent alinéa n'est pas applicable pour l'adoption des décisions mentionnées à la dernière phrase de l'alinéa précédent. »
II. - Avant le dernier alinéa de l'article L. 225-82 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le règlement intérieur peut également prévoir, sauf disposition contraire des statuts, que, dans les cas et aux conditions prévus par ceux-ci, et sauf opposition de l'un des membres du conseil de surveillance, sont réputés présents pour le calcul du quorum et de la majorité les membres du conseil qui participent à la réunion de celui-ci par des moyens de télétransmission autres que la visioconférence, et dont la nature, les modalités d'utilisation et de preuve de l'identité des membres sont déterminées par décret en Conseil d'Etat. Les statuts peuvent, le cas échéant, limiter la nature des décisions pouvant être prises lors d'une réunion tenue dans ces conditions. Le présent alinéa n'est pas applicable pour l'adoption des décisions mentionnées à la dernière phrase de l'alinéa précédent et ne peut, en tout état de cause, concerner la totalité des réunions du conseil de surveillance de chaque année. »
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, sur l'article.
Mme Marie-France Beaufils. L'article 1er, qui porte sur les conditions de quorum au sein des conseils d'administration est en apparence séduisant.
Il s'agit de prendre en compte quelques évolutions technologiques et de permettre une forme de dématérialisation. En effet, la présence de certains administrateurs n'est pas toujours aussi effective qu'on pourrait le souhaiter.
Au-delà des moyens d'ores et déjà retenus, tels que la visioconférence, de nouvelles propositions sont formulées. Toutefois, si les technologies de la téléphonie connaissent depuis plusieurs années une formidable évolution, si le flux des informations susceptibles de passer par ce canal est de plus en plus important et si l'article 1er n'est que la transposition en droit français d'une directive européenne, nous ne sommes pas certains que cette avancée technologique soit un progrès pour la gestion quotidienne de nos entreprises.
Une telle mesure est particulièrement adaptée aux administrateurs qui se dispensent concrètement d'un voyage au siège de l'entreprise. Dans l'absolu, on pourrait même finir par voir se dérouler des conseils d'administration totalement virtuels, à l'occasion desquels, cependant, toujours autant de jetons de présence seraient distribués...
La meilleure preuve que la disposition pose problème est la suppression de la référence à l'article L. 225-53, qui porte sur les nominations de directeurs généraux délégués, induisant la nécessité d'une présence physique des administrateurs pour statuer sur ce point.
Par conséquent, avec cet article 1er, la transparence de la gestion de nos entreprises ne bénéficie d'aucune avancée ; il s'agit d'une simple adaptation dépendant de la bonne volonté des uns ou des autres. De surcroît, la disposition est considérée comme devant être encadrée par la loi et le règlement et peut faire l'objet de dispositions statutaires.
Va-t-on ainsi réellement faciliter la gouvernance des entreprises ou seulement accélérer les processus décisionnels des dirigeants par ententes bien comprises et répartition des rôles plus ou moins tacite ?
Pour ces raisons mais aussi pour celles qui ont été présentées par Bernard Vera à l'occasion de la discussion de la question préalable, nous voterons contre l'article 1er.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 2, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I.- Le troisième alinéa de l'article L. 225-37 du code de commerce est ainsi rédigé :
« Sauf disposition contraire des statuts, le règlement intérieur peut prévoir que sont réputés présents pour le calcul du quorum et de la majorité les administrateurs qui participent à la réunion du conseil par des moyens de télécommunication permettant leur identification, garantissant leur participation effective et assurant la confidentialité des débats, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat. Les statuts peuvent, le cas échéant, limiter la nature des décisions pouvant être prises lors d'une réunion tenue dans ces conditions. Cette disposition n'est pas applicable pour les opérations prévues aux articles L. 232-1 et L. 233-16 du présent code. »
II.- Le troisième alinéa de l'article L. 225-82 du même code est ainsi rédigé :
« Sauf disposition contraire des statuts, le règlement intérieur peut prévoir que sont réputés présents pour le calcul du quorum et de la majorité les membres du conseil de surveillance qui participent à la réunion du conseil par des moyens de télécommunication permettant leur identification, garantissant leur participation effective et assurant la confidentialité des débats, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat. Les statuts peuvent, le cas échéant, limiter la nature des décisions pouvant être prises lors d'une réunion tenue dans ces conditions. Le présent alinéa ne peut concerner la totalité des réunions du conseil de surveillance de chaque année. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. La commission des finances est favorable au dispositif figurant à l'article 1er. Elle souhaiterait toutefois que quelques ajustements soient réalisés par rapport à la version votée à l'Assemblée nationale.
Tout d'abord, il nous semble préférable de parler de télécommunications, ce terme général risquant moins de dépendre de l'évolution des technologiques et ayant juridiquement plus de sens. En effet, monsieur le ministre, les conférences téléphoniques ou les visioconférences existent aujourd'hui, mais - et vous êtes mieux placé que moi pour le savoir - d'autres moyens technologiques, que nous n'imaginons pas encore aujourd'hui, verront sans doute le jour. Pourtant, ils devront se voir appliquer les procédures juridiques.
Bien entendu, il faudra veiller à l'identification des membres des conseils, garantir leur participation effective aux réunions, assurer la confidentialité des débats... En d'autres termes, il convient de porter attention aux conditions techniques, qu'un décret en conseil d'Etat pourra déterminer.
Par ailleurs, nous pensons opportun de maintenir les deux exceptions prévues par le texte initial du Gouvernement concernant les tenues physiques des conseils d'administration pour l'arrêté des comptes sociaux et l'arrêté des comptes consolidés. S'agissant des conseils de surveillance, c'est le directoire qui dresse ces comptes ainsi que le rapport de gestion.
Enfin, en vue d'obliger les conseils de surveillance à tenir au moins une réunion physique par an, la commission des finances propose de reprendre la formulation de l'amendement de notre collègue député Philippe Houillon selon laquelle la télétransmission ne peut concerner la totalité des réunions du conseil de surveillance de chaque année.
L'amendement de la commission des finances tend donc à mettre en oeuvre ces différents principes et à revenir à une rédaction proche du texte initial du Gouvernement.
M. le président. L'amendement n° 32, présenté par M. Buffet, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
I. - Le troisième alinéa de l'article L. 225-37 du code de commerce est ainsi rédigé :
« Sauf lorsque le conseil est réuni pour procéder aux opérations visées aux articles L. 232-1 et L. 233-16 et sauf disposition contraire des statuts, le règlement intérieur peut prévoir que sont réputés présents pour le calcul du quorum et de la majorité les administrateurs qui participent à la réunion par des moyens de visioconférence ou de télécommunication permettant leur identification et garantissant leur participation effective, dont la nature et les conditions d'application sont déterminées par décret en Conseil d'Etat. Les statuts peuvent limiter la nature des décisions pouvant être prises lors d'une réunion tenue dans ces conditions et prévoir un droit d'opposition au profit d'un nombre déterminé d'administrateurs. »
II. - Le troisième alinéa de l'article L. 225-82 du même code est ainsi rédigé :
« Sauf lorsque le conseil est réuni pour procéder aux opérations visées au cinquième alinéa de l'article L. 225-68 et sauf disposition contraire des statuts, le règlement intérieur peut prévoir que sont réputés présents pour le calcul du quorum et de la majorité des membres du conseil de surveillance qui participent à la réunion par des moyens de visioconférence ou de télécommunication permettant leur identification et garantissant leur participation effective, dont la nature et les conditions d'application sont déterminées par décret en Conseil d'Etat. Les statuts peuvent limiter la nature des décisions pouvant être prises lors d'une réunion tenue dans ces conditions et prévoir un droit d'opposition au profit d'un nombre déterminé de membres du conseil de surveillance. »
La parole est à M. François-Noël Buffet, rapporteur pour avis.
M. François-Noël Buffet, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. L'amendement n° 32 tend tout d'abord à instaurer un régime juridique unique applicable tant à la visioconférence qu'aux autres moyens de télétransmission, en retenant par ailleurs la notion de moyens de télécommunication, ce vocable étant déjà utilisé dans d'autres dispositions du code de commerce.
Il vise ensuite à exclure, par souci de parallélisme avec le dispositif proposé pour le conseil d'administration, l'utilisation de moyens de télécommunication lorsque le conseil de surveillance est amené, en application du sixième alinéa de l'article L. 225-68 du code de commerce, à vérifier et contrôler les documents devant être présentés par le directoire à l'assemblée générale ordinaire.
Enfin, l'amendement a pour objet de permettre aux statuts de prévoir un droit d'opposition à la tenue d'une réunion du conseil d'administration ou du conseil de surveillance au profit d'une minorité d'administrateurs ou de membres du conseil de surveillance, fixée à un tiers.
M. le président. L'amendement n° 91, présenté par M. Marc, Mme Bricq, MM. Massion, Yung, Peyronnet, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer le 1° du I de cet article.
La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. Cet amendement est très simple : il vise à restreindre le champ offert à l'utilisation des moyens de télécommunication.
En effet, des précautions doivent être prises afin d'éviter que l'usage de la téléconférence ne devienne un moyen facile d'échapper au contrôle réel de tous les membres du conseil d'administration. Appliquer la télétransmission aux cas visés par cet article reviendrait à rendre possible la détermination de la rémunération du directeur général ou sa révocation par téléphone, ce qui est dangereux !
Sur proposition du rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale, le champ d'application de l'article 1er avait déjà été sérieusement restreint, ce qui montre que notre inquiétude est largement partagée.
En effet, l'article 1er prévoyait initialement d'étendre la télétransmission à la nomination, à la rémunération et à la révocation du président du conseil d'administration. Il s'appliquait également à la révocation du directeur général. Il n'était pas possible, sur ces questions importantes, de délibérer par téléphone ! A ce titre, la révocation d'un administrateur par téléphone pourrait faire l'objet d'une annulation par la jurisprudence.
Pourquoi les articles L. 225-47 et L. 225-55 du code de commerce ont-ils été réintégrés dans la dernière phrase du troisième alinéa de l'article L. 225-37 proposé alors que l'article L. 225-53 ne l'a pas été ? Cet article, qui porte sur les conditions de nomination des directeurs généraux délégués et sur la révocation du directeur général, doit également, nous semble-t-il, faire partie des cas d'exclusion du recours à la télétransmission.
Tel est l'objet de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Parmi les trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune, celui qui présente la meilleure rédaction est celui de la commission des lois.
En effet, cette rédaction tient compte des remarques que nous avons formulées tout en rédigeant l'article de façon plus globale, plus harmonieuse. C'est pourquoi, au nom de la commission des finances, je retire l'amendement n° 2.
Quant à l'amendement n° 91, je ne le crois pas utile, surtout si l'on adopte le dispositif de la commission des lois. Nous aurons à ce moment-là un dispositif tout à fait équilibré retenant l'innovation qui facilite la vie des entreprises mais maintenant dans certains cas la tenue physique des conseils d'administration ou conseils de surveillance.
Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 91.
M. Thierry Breton, ministre. Monsieur le rapporteur, le Gouvernement souscrit à la brillante synthèse que vous venez de faire. Vous avez parfaitement résumé la situation ! Le Gouvernement est donc favorable à l'amendement n° 32, mais défavorable à l'amendement n° 91.
M. le président. En conséquence, l'article 1er est ainsi rédigé et l'amendement n° 91 n'a plus d'objet.
Article 2
I. - Le deuxième alinéa de l'article L. 225-96 du même code est ainsi rédigé :
« Elle ne délibère valablement que si les actionnaires présents ou représentés possèdent au moins, sur première convocation, le quart, et, sur deuxième convocation, le cinquième des actions ayant le droit de vote. A défaut, la deuxième assemblée peut être prorogée à une date postérieure de deux mois au plus à celle à laquelle elle avait été convoquée. Dans les sociétés ne faisant pas appel public à l'épargne, les statuts peuvent prévoir des quorums plus élevés. »
II. - La première phase du deuxième alinéa de l'article L. 225-98 du même code est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
« Elle ne délibère valablement sur première convocation que si les actionnaires présents ou représentés possèdent au moins le cinquième des actions ayant le droit de vote. Dans les sociétés ne faisant pas appel public à l'épargne, les statuts peuvent prévoir un quorum plus élevé. »
III. - L'avant-dernier alinéa de l'article L. 225-99 du même code est ainsi rédigé :
« Les assemblées spéciales ne délibèrent valablement que si les actionnaires présents ou représentés possèdent au moins, sur première convocation, le tiers, et, sur deuxième convocation, le cinquième des actions ayant le droit de vote et dont il est envisagé de modifier les droits. A défaut, la deuxième assemblée peut être prorogée à une date postérieure de deux mois au plus à celle à laquelle elle avait été convoquée. Dans les sociétés ne faisant pas appel public à l'épargne, les statuts peuvent prévoir des quorums plus élevés. »
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 63 est présenté par M. Vera, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 92 est présenté par M. Marc, Mme Bricq, MM. Yung, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Bernard Vera, pour présenter l'amendement n° 63.
M. Bernard Vera. L'article 2 est loin d'être secondaire puisqu'il porte sur les conditions d'organisation des assemblées générales extraordinaires d'actionnaires et prolonge la lettre et l'esprit de l'article 1er, dont nous n'avons pas approuvé les principes.
Par cet article, il est proposé concrètement que les conditions de quorum propres à l'organisation d'assemblées générales extraordinaires ayant vocation à apporter des modifications statutaires soient réduites.
S'agit-il de faciliter une plus grande souplesse de gestion des entreprises, qui, en définitive, ne profitera qu'au noyau dur des actionnaires, à ceux qui trustent les postes d'administrateurs et donnent le la pour les choix stratégiques de l'entreprise ? Nous sommes en droit de nous poser la question.
La démarche est pour le moins contradictoire avec certains aspects de la politique gouvernementale qui tend notamment à privilégier le développement de l'actionnariat des salariés comme des plus modestes épargnants.
Pour toutes ces raisons, nous ne pouvons qu'inviter le Sénat à voter cet amendement de suppression d'un article qui ne fera pas avancer la transparence dans la gestion des entreprises.
M. le président. La parole est à M. Richard Yung, pour présenter l'amendement n° 92.
M. Richard Yung. Nous pensons que l'article 2 est dangereux. S'il était adopté, il suffirait qu'un quart des actionnaires ayant le droit de vote soient présents ou représentés alors qu'un tiers est nécessaire aujourd'hui.
Le système des quorums a été mis en place pour garantir une participation importante des actionnaires aux décisions de la société ; en diminuant ces quorums, on affaiblit la démocratie actionnariale.
Les quorums sont destinés à éviter que les décisions des assemblées générales ne soient prises par une minorité des actionnaires présents. Le respect de la démocratie dans l'entreprise passe donc par la fixation de seuils de présence minimaux. En remettant ces règles en cause, on permet aux dirigeants de se passer facilement des actionnaires. Par exemple, avec un quorum fixé à un cinquième, il suffit qu'un dixième des actionnaires plus un soient favorables à une décision pour qu'elle soit adoptée.
De plus, cet article accroît le pouvoir des grands actionnaires au détriment des petits porteurs et des salariés de l'entreprise.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous proposons la suppression de cet article.
M. le président. L'amendement n° 3, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit les I et II de cet article :
I.- Le deuxième alinéa de l'article L. 225-96 du même code est ainsi rédigé :
« Elle ne délibère valablement sur première convocation que si les actionnaires présents ou représentés possèdent au moins le quart des actions ayant le droit de vote. Sur deuxième convocation, aucun quorum n'est requis. Dans les sociétés ne faisant pas appel public à l'épargne, les statuts peuvent prévoir un quorum plus élevé. »
II.- Le deuxième alinéa de l'article L. 225-98 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Dans les sociétés ne faisant pas appel public à l'épargne, les statuts peuvent prévoir un quorum plus élevé. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 3 et pour donner l'avis de la commission sur les amendements identiques nos 63 et 92.
M. Philippe Marini, rapporteur. La commission comprend les intentions qui animent le Gouvernement dans cette affaire, toutefois, elle craint un signal négatif pour l'actionnariat individuel et, de façon plus générale, pour les actionnaires minoritaires.
Nous avons donc considéré qu'une solution plus simple et plus efficace consisterait à aligner les quorums des assemblées extraordinaires sur ceux des assemblées ordinaires. Cette harmonisation nous semble d'autant plus souhaitable que les convocations portent aujourd'hui le plus souvent sur des assemblées générales mixtes, comportant une partie ordinaire et une partie extraordinaire.
La diminution du quorum des assemblées ordinaires ne paraît pas être une mesure très significative, monsieur le ministre. Même en abaissant le seuil, nous risquons de nous heurter très rapidement aux mêmes difficultés qu'actuellement. Il ne faudrait pas que, ne pouvant atteindre un quorum de 25 %, nous le fixions à 20 %, puis à 15 %, et que, finalement, nous vidions l'assemblée générale de son contenu.
Par conséquent, nous ne sommes pas totalement convaincus par le dispositif prévu à l'article 2. Nous lui préférons, au moins en première analyse, l'alignement des quorums en assemblées générales ordinaires et extraordinaires.
Cette mesure n'aurait pas d'impact sur la protection des actionnaires minoritaires puisque, pour les décisions importantes se traduisant par une modification des statuts, les règles de majorité renforcée applicables aux assemblées extraordinaires seraient maintenues.
Telle est, à ce stade, la position de la commission des finances, étant précisé que, pour les sociétés ne faisant pas appel public à l'épargne, il demeure toujours possible de prévoir dans les statuts des quorums plus élevés.
Enfin, nous proposons de maintenir le dispositif adopté par l'Assemblée nationale pour ce qui est des assemblées spéciales de porteurs de titres d'un genre particulier, notamment de porteurs d'obligations.
Pour ce qui est des amendements nos 63 et 92 de suppression de l'article, la commission n'y est pas favorable : elle préfère son compromis à des suppressions par trop radicales.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Thierry Breton, ministre. Je comprends la réaction de M. le rapporteur, mais il convient de tenir compte de la pratique : les assemblées générales, n'atteignant jamais leur quorum sur première convocation, se réunissent toujours en deuxième convocation, alors qu'aucun quorum n'est plus requis. Ce système a pour seul effet, en définitive, d'allonger les délais, car les entreprises, sachant qu'elles n'atteindront pas le quorum, ne se mobilisent pas vraiment à la première convocation.
Actuellement, les actionnaires ont finalement peu de réactivité aux besoins de l'entreprise, ce qui n'est pas satisfaisant.
Le Gouvernement pense qu'une fois le quorum légèrement abaissé, et donc plus facilement atteignable, l'entreprise se donnera les moyens de mobiliser les actionnaires. Aussi la proposition du Gouvernement va-t-elle, paradoxalement, dans le sens d'un renforcement de la démocratie actionnariale.
J'ajoute par ailleurs, comme je l'ai indiqué dans la discussion générale, qu'il nous faut réfléchir, avec les entreprises, aux moyens d'associer un nombre de plus en plus important d'actionnaires, qui, je le rappelle, ne sont pas tous localisés sur les mêmes territoires. Ils pourraient s'exprimer par la voie des nouvelles technologies, Internet en particulier, dès lors que les connections pourraient se faire en toute sécurité, comme pour les paiements.
Telles sont les raisons pour lesquelles, monsieur le rapporteur, je vous demande de reconsidérer la position de la commission.
Bien entendu, le Gouvernement est défavorable aux amendements de suppression nos 63 et 92.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 63 et 92.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Monsieur le rapporteur, l'amendement n° 3 est-il maintenu ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Je souhaiterais obtenir quelques précisions de la part de M. le ministre.
Je suis favorable à ce que l'on trouve des modalités pour inciter au vote électronique, ce qui devrait permettre, en effet, d'améliorer les taux de présence et de vote en assemblée générale.
C'est sur l'initiative de notre commission que, dans la loi de sécurité financière notamment, les gérants d'actifs financiers se sont vu demander d'exprimer leur vote ou les raisons de leur abstention. Nous tenons beaucoup à ce que les représentants de l'actionnariat prennent toute leur place en assemblée générale, que leurs positions soient explicites et qu'ils fassent vivre l'assemblée générale dans les différentes circonstances de la vie de la société, notamment lorsque des situations spéciales se présentent.
Dès lors, pouvez-vous nous confirmer que l'intention du Gouvernement est bien de compléter le dispositif préconisé par la recherche de moyens légaux suffisamment sécurisés pour encourager le vote électronique ? Une telle orientation est-elle de nature à rencontrer les préoccupations exprimées par nos collègues spécialistes de ces sujets au sein de la commission des lois ?
Il serait utile qu'un débat ait lieu sur cette question, afin que nous puissions nous prononcer en toute lucidité.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Thierry Breton, ministre. Je vous le confirme bien volontiers, monsieur le rapporteur, le Gouvernement a l'intention, comme je l'ai indiqué dans mon discours liminaire, d'engager une réflexion sur les évolutions techniques qui permettraient d'accroître la démocratie actionnariale, tout en améliorant la sécurité juridique.
M. le président. La parole est à M. Robert Del Picchia, pour explication de vote.
M. Robert Del Picchia. Tout à l'heure, M. le rapporteur a fait allusion au vote des Français de l'étranger. C'était un bon exemple puisque le Sénat, tout comme l'Assemblée nationale, a récemment adopté une proposition de loi sur ce sujet.
Je rappelle que nous avons procédé à une première expérimentation de vote électronique aux Etats-Unis. Elle a parfaitement fonctionné : Les hackers, qui ont certainement essayé de la pirater - ça les amuse toujours ! - n'ont pas pu s'immiscer, le code donné et l'identification étant suffisamment complexes.
Il n'y a donc pas de raison qu'un tel dispositif ne soit pas mis en place pour les actionnaires, en France comme à l'étranger. Il y a en effet 2,2 millions de Français à l'étranger : ils ont aussi des actions en France et ils pourraient participer ainsi aux assemblées générales.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Il est vrai que la proposition de la commission des finances, en première analyse, est séduisante : le quorum est fixé au quart sur première convocation et il n'y a plus de quorum sur deuxième convocation.
Le Gouvernement, quant à lui, propose de fixer le quorum au quart, sur première convocation, puis au cinquième, sur deuxième convocation. Si le cinquième n'est pas atteint, il est possible de délibérer ultérieurement.
Pour ma part, il me semble préférable, si l'on veut développer la participation des actionnaires, de ne pas être trop brutal. Aussi, procéder en deux étapes me paraît plus réaliste, monsieur Marini.
Peut-être pourrions-nous continuer à réfléchir sur ces problèmes. Certes, ces questions sont très urgentes, mais nous verrons que nous aurons affaire, tout à l'heure, à d'autres urgences encore plus importantes, qui correspondent notamment à des besoins en termes d'application de la législation européenne.
Franchement, monsieur le rapporteur, pourquoi ne pas en rester à la position du Gouvernement sur ces quorums en assemblées générales ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Et Internet ?
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Ce point pose problème.
Monsieur Del Picchia, organiser un vote, c'est facile ; mais une assemblée générale ne se résume pas à un vote : des propositions sont faites, des résolutions sont mises aux voix...
M. Philippe Marini, rapporteur. Voilà !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Nous pourrons certes parvenir à la téléparticipation, mais pas dans l'immédiat, en raison de la complexité de la procédure, surtout s'il y a des milliers d'actionnaires.
M. Philippe Marini, rapporteur. Absolument !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Or les actionnaires participent de plus en plus aux assemblées générales, particulièrement en cas de problèmes stratégiques.
De toute façon, si elle est techniquement réalisable, la mise en place d'assemblées générales par Internet exigera une organisation extrêmement pointue.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. A la suite de cet utile débat, je retire l'amendement de la commission des finances,
Nous pourrons saisir l'opportunité que le Gouvernement a ouverte d'approfondir la question du vote électronique, système auquel n'est pas fondamentalement opposé le président de la commission des lois.
Dans l'attente de l'ouverture de ce chantier, il est sans doute préférable d'en rester à la version initiale du Gouvernement.
M. le président. L'amendement n° 3 est retiré.
Je mets aux voix l'article 2.
(L'article 2 est adopté.)