L'article 3 de la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 précitée est ainsi modifié :
1° Les premier, deuxième et troisième alinéas sont ainsi rédigés :
« L'office est administré par un conseil d'administration comprenant deux parlementaires, désignés l'un par l'Assemblée nationale et l'autre par le Sénat, des représentants de l'Etat et un représentant du personnel de l'office. Le conseil d'administration fixe les orientations générales concernant l'activité de l'office ainsi que, pour la période comprise entre la date d'entrée en vigueur de la loi n° du janvier modifiant la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile et l'adoption de dispositions communautaires en cette matière, la liste des pays considérés comme des pays d'origine sûrs, mentionnés au 2° de l'article 8. Il délibère sur les modalités de mise en oeuvre des dispositions relatives à l'octroi du statut de réfugié ou de la protection subsidiaire. Le président du conseil d'administration est nommé parmi ses membres par décret sur proposition du ministre des affaires étrangères.
« Le délégué du haut-commissaire des Nations unies pour les réfugiés, ainsi que trois personnalités qualifiées nommées par décret, assistent aux séances du conseil d'administration et peuvent y présenter leurs observations et leurs propositions. Au moins l'une des trois personnalités qualifiées susmentionnées représente les organismes participant à l'accueil et à la prise en charge des demandeurs d'asile et des réfugiés.
« L'office est géré par un directeur général, nommé par décret sur proposition conjointe du ministre des affaires étrangères et du ministre de l'intérieur. » ;
2° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu'une demande d'asile est rejetée, le directeur général de l'office ou le président de la commission des recours des réfugiés transmet la décision motivée au ministre de l'intérieur. A la demande de ce dernier, le directeur général de l'office communique à des agents habilités des documents d'état civil ou de voyage permettant d'établir la nationalité de la personne dont la demande d'asile a été rejetée, ou à défaut une copie de ces documents, à la condition que cette communication s'avère nécessaire à la mise en oeuvre d'une mesure d'éloignement et qu'elle ne porte pas atteinte à la sécurité de cette personne ou de ses proches. »
M. le président. La parole est à M. Louis Mermaz, sur l'article.
M. Louis Mermaz. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous présenterons dans un instant un amendement de suppression de l'article 2. Si le Sénat voulait bien l'adopter, nous gagnerions beaucoup de temps. Sinon, nous présenterons un certain nombre d'amendements dits de repli.
Nous ne pouvons que nous féliciter de constater que, sur une initiative de l'Assemblée nationale acceptée par le Gouvernement, deux parlementaires siégeront désormais à l'OFPRA. Quant à la présence du représentant de l'Etat, elle est tout à fait normale. Ce que nous souhaiterions, c'est qu'il soit précisé que plusieurs ministères seront également représentés, notamment celui de l'éducation nationale, tant l'apprentissage de la langue française par les enfants de candidats au statut de réfugié ou à la protection subsidiaire est important. Il faudrait en effet qu'ils apprennent notre langue - cela vaut aussi pour leurs parents - dans le cadre d'une formation postscolaire.
Nous allons évidemment achopper - on a en a beaucoup parlé et je serai bref - sur l'établissement d'une liste de pays considérés comme sûrs. Bien sûr, on nous dit que cette liste sera provisoire, car à partir du printemps prochain sa rédaction relèvera de la compétence de l'Europe. Il n'en reste pas moins que, dans un premier temps, une tâche aussi redoutable nous semble au-dessus des forces de l'OFPRA. Et si on lui soufflait la liste à adopter, ce serait porter atteinte à son indépendance.
Par ailleurs, la notion de pays sûr - cela a été dit surabondamment - nous mettra dans des difficultés considérables, car s'il fallait faire des admonestations, voire rompre des liens diplomatiques avec des pays qui, sur le plan du fonctionnement démocratique, ne donnent pas satisfaction, je crois, hélas ! qu'il existe de nombreux pays avec lesquels nous ne pourrions plus entretenir de relations. Je me garderai bien de toute énumération afin de ne froisser personne et de ne pas gêner l'action de la diplomatie française.
Cet article 2 prévoit que le président du conseil d'administration de l'OFPRA continuera d'être nommé parmi les membres du conseil sur proposition du ministre des affaires étrangères ; nous n'avons rien à y redire. En revanche, je l'ai indiqué hier dans mon intervention, nous sommes très inquiets de savoir que le directeur général de l'office sera désormais flanqué d'un préfet, lequel sera en relation avec un autre préfet installé au sein du ministère de l'intérieur. Nous nous demandons quel est l'objet de cette mesure. Au reste, il n'y a pas lieu de se poser la question : il s'agit d'accélérer le départ des déboutés.
Enfin, le 2° de l'article 2 constitue la disposition qui nous inquiète par-dessus tout. En effet, il est ainsi rédigé : « Lorsqu'une demande d'asile est rejetée, le directeur général de l'office ou le président de la Commission des recours des réfugiés transmet la décision motivée au ministre de l'intérieur. A la demande de ce dernier, le directeur général de l'office communique à des agents habilités des documents d'état civil ou de voyage permettant d'établir la nationalité de la personne dont la demande d'asile a été rejetée, ou à défaut une copie de ces documents. »
Certes, je sais bien qu'il est écrit : « à la condition que cette communication s'avère nécessaire à la mise en oeuvre d'une mesure d'éloignement et qu'elle ne porte pas atteinte à la sécurité de cette personne ou de ses proches ». Mais, dans la mesure où l'exposé des motifs du projet de loi précise qu'une information des consulats des pays d'origine pourra avoir lieu, mon inquiétude ne fait que s'amplifier.
J'ai posé une question sur ce point à M. Dominique de Villepin, qui ne m'a pas répondu. Je constate d'ailleurs que, souvent, lorsque nous posons des questions, on ne nous répond pas. Chacun peut le comprendre : la non-réponse a en fait une signification beaucoup plus lourde que le silence.
Je souhaite donc, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous nous disiez ce que vous pensez de cette disposition que nous jugeons pour notre part inconstitutionnelle, car les documents sur lesquels s'appuiera le demandeur d'asile ou de protection subsidiaire pour plaider son dossier sont dits inviolables. C'est l'une des dimensions les plus lourdes de conséquences du présent projet de loi.
J'insiste donc : j'aimerais que vous nous disiez comment, nonobstant cette disposition dangereuse, vous pouvez nous garantir que la sécurité de la personne sera assurée. Si vous réussissez à nous persuader, vous aurez de la chance, car si l'on se réfère aux dispositions prévues par le projet de loi, je ne vois pas comment cela sera possible.
MM. Michel Dreyfus-Schmidt et Jean-Pierre Sueur. Très bien !
SOUHAITS DE BIENVENUE
À Mme MONIQUE GAGNON-TREMBLAY,
VICE-PREMIÈRE MINISTRE DU QUÉBEC
M. le président. Il m'est particulièrement agréable de saluer la présence, dans notre tribune officielle, de Mme Monique Gagnon-Tremblay, vice-première ministre du Québec, ministre des relations internationales et de la francophonie.
Mme Monique Gagnon-Tremblay connaît bien la France. Elle y est déjà venue lors de réunions de l'Assemblée parlementaire de la francophonie, institution à laquelle nous sommes tous très attachés dans cet hémicycle.
Sa visite, la première dans notre pays depuis son accession à ce poste prestigieux à la suite des élections législatives québécoises qui se sont déroulées au printemps dernier, contribue au développement de relations soutenues entre nos deux pays francophones. Je salue à cet égard l'action du groupe interparlementaire France-Québec et de son président, notre éminent collègue Philippe Marini.
Je forme des voeux pour que la venue en France de Mme Gagnon-Tremblay fortifie les liens indéfectibles qui nous unissent à nos cousins d'Amérique et nous renforce dans le combat pour la diversité culturelle et la défense de la langue française que nous partageons ensemble avec tant de conviction. (M. le secrétaire d'Etat, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et applaudissent.)
DROIT D'ASILE
Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, modifiant la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile.
Dans la suite de la discussion de l'article 2, la parole est à M. Robert Bret.
M. Robert Bret. L'article 2 du présent projet de loi traite de l'organisation de l'OFPRA et de la transmission des documents relatifs à la demande d'asile au ministère de l'intérieur.
Je souhaite tout d'abord souligner l'absence, dans la nouvelle composition du conseil d'administration, des organisations officiellement habilitées à s'occuper des demandeurs d'asile.
C'est à l'article 2 qu'est introduite la notion de « pays d'origine sûrs ». Même si nous aurons l'occasion de revenir ultérieurement sur ce concept, notamment lors de l'examen de l'amendement que nous présenterons à l'article 6, il me semble essentiel d'en dire quelques mots avant d'engager la discussion sur cet article 2.
L'OFPRA se verrait confier la lourde tâche de fixer la liste des pays d'origine sûrs. Or cette notion est en contradiction avec la tradition même de notre pays en matière d'asile.
Je peux entendre, monsieur le secrétaire d'Etat, les justifications qui sont avancées pour introduire ce concept, justifications au premier rang desquelles se trouve la mise en conformité de notre droit avec celui d'autres pays de l'Union européenne et, au-delà, avec le droit communautaire - ce droit n'est pas encore édicté, nous n'avons pas cessé de le rappeler - ou encore avec les positions du HCR.
Mais si je peux entendre ces arguments, je ne peux les accepter. La France, par son histoire, ne saurait intégrer une telle notion, qui est en contradiction avec la philosophie même du droit d'asile et, au-delà, avec la philosophie des droits de l'homme.
Qui plus est, je déplore que vous envisagiez d'intégrer dans le droit français un concept qui, semble-t-il, ne devrait pas avoir de caractère contraignant pour les pays de l'Union.
Par ailleurs, monsieur le secrétaire d'Etat, la notion de pays d'origine sûrs est en totale contradiction avec l'article 3 de la convention de Genève aux termes duquel ladite convention doit s'appliquer sans discrimination quant au pays d'origine.
Un autre point important de cet article concerne la nomination du directeur général de l'OFPRA sur proposition conjointe du ministre de l'intérieur et du ministre des affaires étrangères. J'émets de nouveau les plus vives réserves sur cette disposition. Nous avons d'ailleurs déposé un amendement la concernant.
Lors de l'examen du texte à l'Assemblée nationale, nous avons échappé de peu à la mise en place d'une véritable cotutelle - pour ne pas dire d'une tutelle - du ministre de l'intérieur sur l'OFPRA. Il subsiste cependant quelques mesures qui risquent d'aboutir à un contrôle étroit du ministère sur l'office.
Voilà plus de cinquante ans que cette prérogative appartient au seul ministre des affaires étrangères. Nous estimons que cela doit rester la règle, en raison, d'une part, de la nature même de l'OFPRA, dont la vocation est la protection des demandeurs d'asile et non pas la maîtrise des flux migratoires, et, d'autre part, de la nature même du ministère des affaires étrangères, plus apte, à notre sens, à traiter ce type de dossier.
L'amendement n° 26 rectifié que mon groupe a déposé sur cet article tend à supprimer la disposition instaurant la transmission, par le directeur de l'OFPRA, des documents d'état civil ou de voyage.
Cette mesure s'inscrit en effet dans une logique de maîtrise du flux migratoire et apparaît en contradiction avec le droit et les garanties dont doivent bénéficier les demandeurs d'asile.
L'amendement de la commission des lois sur ce point peut s'interpréter de manière positive, mais un risque, inévitablement, demeure. En effet, cet amendement ne vise pas à supprimer l'alinéa concernant la communication des documents au ministère de l'intérieur.
Pour toutes ces raisons, nous voterons contre cet article.
M. le président. Je suis saisi de huit amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune. Toutefois, pour la clarté des débats, je les appellerai successivement.
L'amendement n° 52, présenté par MM. Dreyfus-Schmidt, Mermaz, Sueur, Rouvière, Madrelle et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Supprimer cet article. »
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. L'office est actuellement administré par un conseil d'administration à propos duquel, me semble-t-il, il n'y a jamais eu beaucoup de critiques. L'article 2 prévoit une nouvelle composition de ce conseil, sans apporter les précisions nécessaires. Certes, le projet de loi contient un article - nous en demanderons la suppression - qui prévoit qu'un décret en Conseil d'Etat précisera les dispositions relatives au conseil d'administration de l'Office. Nous avons demandé à plusieurs reprises que l'on nous communique ce projet de décret. Peine perdue !
Un tiens vaut mieux que deux tu l'auras : on sait ce que l'on a, mais on ne sait pas ce que l'on aurait. Voilà une première raison essentielle pour demander la suppression de l'article 2.
Evidemment, toute modification comporte du bon et du mauvais. Certes, Louis Mermaz se félicitait de la présence de deux parlementaires au conseil d'administration de l'OFPRA... Mais tant de parlementaires siègent dans tant d'organismes divers que cela contribue, avec les colloques organisés à la présidence du Sénat, à l'absentéisme que nous constatons.
Il est prévu par ailleurs qu'un représentant du personnel de l'office siège au conseil d'administration. On ne comprend pas très bien ce choix, car le projet de loi ne confère pas par la suite à ce représentant du personnel des compétences particulières. Il est évidemment toujours difficile de paraître s'opposer à ce type de mesure, qui ne nous gêne d'ailleurs pas.
Jusqu'à présent, l'office était géré par un directeur nommé par le ministre des affaires étrangères, ce qui nous paraissait très bien. Pourquoi faudrait-il maintenant que le directeur devienne « général », sinon pour lui affecter un colonel qui deviendra sans doute son adjoint ? Le texte ne le précise pas encore, mais c'est évidemment ce que cachent ces dispositions. Or il n'existe aucune raison de mettre une dyarchie à la tête de ce conseil d'administration. La nomination d'un directeur par le seul ministre des affaires étrangères et non pas en collaboration avec le ministre qui est chargé des problèmes d'immigration, c'est-à-dire le ministre de l'intérieur, nous paraissait tout à fait satisfaisant.
Se posent également les problèmes du secret et des personnalités... Et, si vous n'adoptez pas notre amendement de suppression, nous défendrons des amendements de repli, ce qui, évidemment, prendra un peu de temps, et nous nous en excusons. Mais, si tout le monde est pressé, nous ne le sommes pas, car nous faisons notre travail de parlementaires.
L'article 2 dispose en outre qu'« au moins l'une des trois personnalités qualifiées susmentionnées représente les organismes participant à l'accueil et à la prise en charge des demandeurs d'asile et des réfugiés ». Nous demandons - et la commission a émis un avis favorable ou, en tout cas, de sagesse sur cette proposition - que ces trois postes soient occupés par trois personnalités représentant les organismes participant à l'accueil et à la prise en charge des demandeurs.
Nous sommes donc en pays inconnu et nous demandons par conséquent, dans un premier temps, de supprimer purement et simplement l'article. Vous ne jouez pas le jeu de la transparence. Dans ces conditions, nous préférons conserver les dispositifs actuels.
M. le président. L'amendement n° 53, présenté par MM. Mermaz, Dreyfus-Schmidt, Sueur, Rouvière, Madrelle et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« I. - Dans la première phrase du texte proposé par le 1° de cet article pour le premier alinéa de l'article 3 de la loi du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile, après les mots : "des représentants de l'Etat", insérer les mots : ", un représentant de chacun des différents départements ministériels intéressés, un représentant, nommé par décret, des organisations officiellement habilitées à s'occuper des demandeurs d'asile et des réfugiés".
« II. - En conséquence, supprimer la dernière phrase du texte proposé par le 1° de cet article pour le deuxième alinéa de l'article 3 de la loi du 25 juillet 1952 précitée. »
La parole est à M. Louis Mermaz.
M. Louis Mermaz. Cet amendement, évidemment, n'aurait de sens que si, d'aventure, l'amendement précédent était rejeté. En effet, si l'article devait être supprimé, il n'y aurait plus lieu de débattre de sa rédaction.
M'étant déjà exprimé sur l'article 2, je serai bref.
L'amendement n° 53 a pour objet de garantir le caractère interministériel de la représentation des pouvoirs publics au sein du conseil d'administration de l'office.
Il vise également à maintenir au sein même du conseil d'administration la présence du représentant des organisations officiellement habilitées à s'occuper des demandeurs d'asile et des réfugiés. Il est important que les associations, qui effectuent un travail indispensable et qui possèdent une bonne connaissance des dossiers et des personnes, siègent au sein du conseil d'administration de l'OFPRA plutôt que d'autres personnalités.
M. le président. L'amendement n° 54, présenté par MM. Mermaz, Dreyfus-Schmidt, Sueur, Rouvière, Madrelle et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« A la fin de la deuxième phrase du texte proposé par le 1° de cet article pour le premier alinéa de l'article 3 de la loi du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile, supprimer les mots : "ainsi que pour la période comprise entre la date d'entrée en vigueur de la loi n° du modifiant la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile et l'adoption de dispositions communautaires en cette matière, la liste des pays considérés comme des pays d'origine sûrs, mentionnés au 2° de l'article 8". »
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. L'amendement n° 54 vise à supprimer une partie de l'article 2 qui n'a pas de raison d'être, pour des motifs évidents.
Vous proposez, monsieur le secrétaire d'Etat, que la liste des pays considérés comme des pays d'origine sûrs soit définie par l'OFPRA lors de la période transitoire entre l'adoption de la présente loi et l'adoption de dispositions communautaires. Or on ignore quand les dispositions communautaires seront adoptées ; elles n'existent pas pour le moment. Nous pouvons peser de tout notre poids pour que ces dispositions futures soient conformes à notre droit et à notre conception du droit d'asile, mais, dans ces conditions, vous nous conviez à une opération de législation-fiction à laquelle nous ne saurions souscrire.
Permettez-moi de rappeler le point de vue d'un certain nombre d'instances dont la compétence en matière de droit d'asile est unanimement reconnue.
Ainsi, selon France Terre d'asile, confier à l'OFPRA le soin d'établir la liste des pays considérés comme des « pays d'origine sûrs » n'est pas une « disposition conforme à la Constitution, car le législateur ne peut, selon le Conseil constitutionnel, modifier le droit constitutionnel à l'asile que pour le rendre plus effectif ».
Par ailleurs, toujours selon France Terre d'asile, « cette tâche contreviendrait à la mission de protection confiée àl'OFPRA. Juge et partie, cette institution deviendrait l'enjeu de pressions politiques et diplomatiques, contrairement aux objectifs que rappelle la convention de Genève dans son préambule ».
Selon Amnesty international, et M. Bret le rappelait à l'instant, « cette notion est contraire à l'article 3 de la convention de Genève qui demande aux Etats d'appliquer la convention "sans discrimination quant au pays d'origine"... ».
Amnesty international rappelle en outre que la directive est toujours en discussion au sein de l'Union européenne et que les garanties qui figuraient dans l'annexe de la proposition initiale de la Commission européenne sont supprimées les unes après les autres par les divers Etats membres.
La France - c'est moi, et non pas Amnesty international, qui pose cette question - va-t-elle aussi supprimer ces garanties les unes après les autres pour être dans le concert ambiant ?
Enfin, Amnesty international « demande que la procédure prioritaire, aux garanties déjà moindres, ne soit pas étendue à une nouvelle catégorie définie dans des termes imprécis : celle des pays d'origine considérés comme "sûrs" ».
Je terminerai en évoquant l'avis très argumenté de la commission nationale consultative des droits de l'homme, qui est tout à fait éloquent :
« Cette disposition est, en effet, contraire à l'économie générale de la convention de Genève et notamment à ses articles 1er et 3. La définition du réfugié donnée à l'article 1er A, 2° de la convention n'autorise aucunement la prise en compte de la nature du pays d'origine, sûr ou non sûr, dans cette définition. Quant à l'article 3, il pose le principe de non-discrimination entre les demandeurs d'asile selon leur nationalité ou leur pays d'origine. L'importance et la portée de ce principe sont clairement explicitées par les travaux préparatoires à la rédaction de cet article 3.
« En outre, parce qu'elle élargit le champ d'application de la procédure prioritaire et qu'elle réduit à quinze jours le délai d'examen des demandes d'asile des personnes en provenance d'un pays d'origine sûr, cette disposition apparaît incompatible avec toutes les garanties requises pour un tel examen, notamment son caractère individuel, la présence d'un interprète, le droit à un conseil, le droit d'être entendu, le droit à un recours suspensif et en urgence... Elle est donc contraire à la Constitution car elle a pour effet, à l'occasion d'une disposition législative, d'affaiblir le droit d'asile au lieu de le rendre plus effectif. »
Voilà ce que disent les meilleurs experts en matière de droit d'asile ! Ma question reste la même : saurons-nous les entendre ?
M. le président. L'amendement n° 55, présenté par MM. Dreyfus-Schmidt, Mermaz, Sueur, Rouvière, Madrelle et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit la dernière phrase du texte proposé par le 1° de cet article pour le deuxième alinéa de l'article 3 de la loi du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile :
« Les trois personnalités qualifiées susmentionnées représentent les organisations officiellement habilitées à s'occuper des réfugiés. »
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je suis d'abord amené à rectifier l'amendement n° 53 qui, par erreur, visait « un représentant, nommé par décret, des organisations officiellement habilitées à s'occuper des demandeurs d'asile et des réfugiés ». Il convient, après les mots : « des représentants de l'Etat », de s'en tenir à insérer « , un représentant de chacun des différents départements ministériels intéressés », et, d'autre part, de supprimer le paragraphe II.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 53 rectifié, présenté par MM. Mermaz, Dreyfus-Schmidt, Sueur, Rouvière, Madrelle et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, et ainsi libellé :
« Dans la première phrase du texte proposé par le 1° de cet article pour le premier alinéa de l'article 3 de la loi du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile, après les mots : "des représentants de l'Etat", insérer les mots : ", un représentant de chacun des différents départements ministériels intéressés,". »
Veuillez poursuivre, monsieur Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous demandons, puisqu'il doit y avoir trois personnalités qualifiées et qu'on ne voit pas quelles autres personnalités que des représentants des organisations officiellement habilitées à s'occuper des réfugiés ce pourrait être, que toutes trois soient des représentants d'associations. C'est un minimum ! On prévoit bien quatre représentants de l'Etat, sans autre précision d'ailleurs, alors que jusqu'à présent on savait quels ministères - on peut comprendre qu'ils soient plusieurs à être intéressés - étaient représentés.
M. le président. L'amendement n° 26 rectifié, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :
« Supprimer le dernier alinéa du 1° et le 2° de cet article. »
La parole est à M. Robert Bret.
M. Robert Bret. Nous avons déjà exprimé - dans notre intervention générale, en défendant la question préalable et, il y a encore un instant, dans notre prise de parole sur l'article - nos vives préoccupations quant à l'immixtion du ministère de l'intérieur au sein de l'OFPRA.
Cette tentative de mainmise découle de la logique globale - et erronée - de ce texte d'orientation sécuritaire.
Il ressort des différentes interventions du ministre des affaires étrangères qu'il perçoit d'un mauvais oeil la tutelle envisagée. Je le comprends, et je l'approuve. Depuis plus de cinquante ans, l'OFPRA dépend du ministère des affaires étrangères et les questions apparentées à l'ordre public ne sauraient s'intégrer à la gestion de cet organisme.
Pour justifier cet état de fait, vous invoquez la disparition de l'asile territorial. Cela soulève quand même une question primordiale dans la gestion des dossiers ! A un moment ou à un autre, il faudra bien en effet qu'un ministre prime sur l'autre dans la prise de décision. S'agira-t-il du ministre de l'intérieur, ou du ministre des affaires étrangères ?
La confidentialité des dossiers des demandeurs d'asile est un droit et une garantie, monsieur le secrétaire d'Etat !
C'est un droit, et, si cette disposition était adoptée, ce serait en totale contradiction avec le principe d'inviolabilité des données individuelles tel que défini dans les quatrième et cinquième alinéas de l'article 3 de la loi du 25 juillet 1952.
Quatrième alinéa : « Tous les membres du personnel de l'office sont tenus au secret professionnel en ce qui concerne les renseignements qu'ils auront reçus dans l'exercice de leurs fonctions. »
Cinquième alinéa : « Les locaux de l'office ainsi que ses archives et, d'une façon générale, tous les documents lui appartenant ou détenus par lui sont inviolables. »
De plus, le Conseil constitutionnel, dans une décision du 22 avril 1997, a considéré que la confidentialité des éléments d'informations détenus par l'OFPRA relatifs à la personne sollicitant en France la qualité de réfugié est une garantie essentielle qui implique notamment que les demandeurs du statut de réfugié bénéficient d'une protection particulière.
C'est aussi pour les réfugiés une garantie de protection de la vie privée. Il faut se placer dans le contexte d'une personne en exil, traquée dans son pays, qui doit se livrer corps et âme sur son passé, sa vie, ses relations, donner les noms de ses bourreaux ou de ses contacts. En ne lui garantissant pas une confidentialité totale et exclusive sur les renseignements qu'elle aura à fournir, ce texte fait courir le risque de marginaliser plus encore les réfugiés, qui perdraient confiance en notre système, en notre pays.
Pourtant, c'est bien sur des notions de confiance et de protection que le droit d'asile doit s'appuyer, monsieur le secrétaire d'Etat. Je crains fortement qu'avec une telle mesure les demandeurs d'asile, alors même qu'ils désireraient obtenir une situation régulière en France, ne refusent de se présenter à un organisme ne leur apportant pas toutes les garanties nécessaires à leur protection.
Et que penser de la situation de ceux qui, déboutés, devraient retourner dans leur pays sans avoir l'assurance que leur tentative sera sans conséquence sur leur sécurité et sur celle de leur famille ?
M. le président. L'amendement n° 56, présenté par MM. Dreyfus-Schmidt, Mermaz, Sueur, Rouvière, Madrelle et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« I. - Rédiger comme suit le texte proposé par le 1° de cet article pour le troisième alinéa de l'article 3 de la loi du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile :
« L'office est géré par un directeur nommé par le ministre des affaires étrangères pour une durée de cinq ans. »
« II. - Dans les première et seconde phrases du texte proposé par le 2° de cet article pour compléter l'article 3 de la loi du 25 juillet 1952 précitée, remplacer les mots : "directeur général" par le mot : "directeur". »
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous nous opposons à ce que le directeur devienne directeur général. Nous nous en sommes déjà largement expliqués et l'exposé des motifs du projet de loi est clair à cet égard : « La tutelle de l'office restera toutefois assurée par le seul ministère des affaires étrangères, l'article 1er de la loi du 25 juillet étant inchangé sur ce point. »
Pourquoi, dès lors, faire nommer le directeur général - au lieu d'un directeur, ce qui paraissait suffire jusqu'à présent - par accord entre le ministère des affaires étrangères, qui est le seul tuteur, et le ministère de l'intérieur ?
Franchement, nous ne comprenons pas, et c'est pourquoi nous vous proposons de revenir à l'ancien article 1er.
M. le président. L'amendement n° 6, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« I. - Après le premier alinéa du 2° de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« A l'expiration de leur période d'administration courante par l'office, les dossiers des demandeurs d'asile dont la demande aura été définitivement rejetée seront confiés à la garde du ministère des affaires étrangères. Seules les personnes autorisées par le directeur général de l'office y auront accès. Ces archives ne pourront être librement consultées qu'à l'issue des délais prévus à l'article 7 de la loi n° 79-18 du 3 janvier 1979 sur les archives. »
« II. - En conséquence, dans le premier alinéa du 2° de cet article, remplacer les mots : "un alinéa ainsi rédigé" par les mots : "deux alinéas ainsi rédigés". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Cet amendement relatif aux archives de l'OFPRA ne devrait guère nous diviser et répond en outre aux préoccupations gouvernementales.
Je rappelle que les archives de l'OFPRA sont constituées, pour leur quasi-totalité, des 1 100 000 dossiers individuels de demandeurs d'asile. L'accélération du rythme de dépôt des demandes impose, bien évidemment, de dégager de nouveaux espaces.
La direction des archives du ministère des affaires étrangères pourrait prendre en dépôt les archives les plus anciennes, mais ce transfert se heurte aux dispositions existantes de la loi du 25 juillet 1952, qui prévoit que « les locaux de l'office ainsi que ses archives et, d'une façon générale, tous les documents lui appartenant ou détenus par lui sont inviolables ».
Compte tenu de la confidentialité qui s'attache aux dossiers individuels détenus par l'OFPRA, le présent amendement permettrait de garantir les modalités de conservation et de consultation de cette catégorie d'archives publiques par une disposition légale particulière.
Il s'agit également de limiter l'accès à ces archives aux seules personnes autorisées par le directeur de l'OFPRA, ce qui offre toute garantie du respect du droit des personnes.
Les archives pourront être consultées dans les conditions prévues par la loi du 3 janvier 1979 sur les archives, qui fixe des délais compris entre 60 et 150 ans selon la nature des informations contenues dans les documents.
M. le président. L'amendement n° 57, présenté par MM. Mermaz, Dreyfus-Schmidt, Sueur, Rouvière, Madrelle et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Supprimer la seconde phrase du texte proposé par le 2° de cet article pour compléter l'article 3 de la loi du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile. »
La parole est à M. Louis Mermaz.
M. Louis Mermaz. Le 2° de l'article 2 est particulièrement inquiétant. En effet, il vise à ajouter un alinéa afin de permettre la transmission au ministère de l'intérieur par l'office de ses décisions motivées ainsi que des documents d'état civil ou de voyage qui faciliteront la mise en oeuvre des mesures d'éloignement des demandeurs d'asile déboutés.
On comprend pourquoi nous sommes en présence de deux préfets, l'un à l'OFPRA, l'autre auprès du ministre de l'intérieur : le système doit fonctionner essentiellement pour expulser les réfugiés qui n'auront pas obtenu cette qualification !
Mais, si je poursuis la lecture du texte, je trouve infiniment plus grave encore. L'amélioration de la transmission d'informations entre OFPRA et ministère de l'intérieur rendra plus aisée l'identification des personnes qui seraient tentées de dissimuler leur identité pour faire échec à une mesure d'éloignement et facilitera, le cas échéant, la délivrance des laissez-passer consulaires par les autorités des pays d'origine.
Nous avons entendu hier, dans cette enceinte, un membre éminent de la commission des lois produire un sophisme extraordinaire aux termes duquel, celui qui est débouté n'étant plus demandeur d'asile, il n'y a pas de raison de lui assurer la confidentialité des documents. C'est du Molière !
En fait, il s'agit de protéger le demandeur. Même une personne déboutée ne doit pas être livrée n'importe comment n'importe où. Il ne fait pas de doute que, lorsqu'elle est venue, parce qu'elle fuit un pays de dictature ou une zone d'exaction, sous une fausse identité, il serait très dommageable pour sa sécurité de révéler sa véritable identité, de faire connaître les raisons pour lesquelles elle est déboutée et, en plus, de fournir des documents de voyage, c'est-à-dire d'expliquer comment elle est parvenue jusqu'en France.
Je trouve cette disposition tout à fait scélérate.
Je souhaiterais, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous vous expliquiez sur ce point ; car aucune des questions que nous posons n'a jusqu'à présent obtenu de réponse, et je constate que, souvent, on nous répond à côté. C'est un vieux procédé, mais je suis sûr, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous aurez la franchise et le courage de me répondre. (M. Jean-Pierre Sueur applaudit.)
M. Claude Estier. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. L'amendement n° 52 vise à la suppression globale de l'article 2, et il paraît très peu raisonnable de le soutenir.
Dans la mesure où l'OFPRA se voit confier de nouvelles et importantes responsabilités, il paraît en effet relativement logique qu'à l'organisation actuelle succède une organisation légèrement différente.
Par ailleurs, l'entrée des parlementaires et d'un représentant du personnel dans le conseil d'administration de l'OFPRA n'est pas nécessairement une mauvaise chose. De même, les compétences supplémentaires octroyées au conseil d'administration peuvent être intéressantes.
Il s'agit en fait d'un amendement d'annonce, puisque les amendements suivants visent à supprimer une à une les dispositions contenues dans l'article 2.
La commission étant opposée à la suppression de l'article 2, elle a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 52.
Quant à l'amendement n° 53 rectifié, il vise, dans sa nouvelle version, à préciser qu'un représentant de chacun des différents départements ministériels intéressés siégera au sein du conseil d'administration de l'OFPRA. Sur ce point, M. le secrétaire d'Etat pourra apporter davantage de précisions que je ne saurais le faire.
D'après le rapport de la commission des lois et les informations qui m'ont été transmises, il était prévu cinq représentants de l'Etat.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Quatre !
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Je les cite, nous pourrons ainsi compter ensemble : le directeur des Français de l'étranger et des étrangers en France du ministère des affaires étrangères, le directeur des libertés publiques et des affaires juridiques du ministère de l'intérieur, le directeur des affaires civiles et du sceau du ministère de la justice, le directeur du budget du ministère de l'économie et des finances, le directeur de la population et des migrations du ministère des affaires sociales, soit cinq représentants.
Sur le fond, c'est un point sur lequel nous sommes du même avis, si ce n'est que la commission ne voit pas d'inconvénient à ce que ces représentants soient nommés par décret, ne serait-ce d'ailleurs qu'en raison de l'évolution des appellations des différentes structures ministérielles.
La commission a donc émis un avis défavorable sur l'amendement n° 53 rectifié.
L'amendement n° 54 tend à enlever compétence à l'OFPRA pour établir la liste des pays d'origine sûrs. Cette compétence est reconnue à titre provisoire puisque la liste, comme vous le savez, devra être établie à l'échelon européen. En outre, l'office a déjà aujourd'hui la responsabilité de fixer la liste des pays dans lesquels les circonstances politiques ont changé en application de l'article 1er C, 5° de la convention de Genève.
Il semble d'ailleurs que cette dernière liste et celle des pays d'origine sûrs se recouvrent pour une large part. Je précise que, sur ce point, le projet de loi me paraît s'inscrire beaucoup plus dans la prolongation de l'esprit de la loi RESEDA.
La commission émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 54.
L'amendement n° 55 tend à ce que les trois personnalités qualifiées appelées à participer aux réunions du conseil d'administration représentent les organisations habilitées à s'occuper des réfugiés.
Le texte du projet de loi tel qu'il a été modifié par l'Assemblée nationale prévoit déjà qu'une personnalité qualifiée au moins représente les organismes participant à l'accueil et à la prise en charge des demandeurs d'asile. Ces personnalités qualifiées ont en principe vocation à représenter les associations.
Sur ce point, la commission envisage de s'en remettre à la sagesse du Sénat, mais elle souhaite entendre d'abord l'avis du Gouvernement. En effet, ou bien le Gouvernement entend désigner simplement des représentants d'associations, auquel cas on peut voter sans trop de difficultés l'amendement de nos collègues socialistes, ou bien le Gouvernement souhaite pouvoir désigner parfois une personnalité aux compétences particulières - par exemple un ancien président de la CRR -, auquel cas il nous semble préférable de lui laisser une marge d'initiative.
L'amendement n° 26 rectifié vise à empêcher à la fois la transmission des décisions motivées de la commission des recours des réfugiés au ministère de l'intérieur et la nomination du directeur général de l'OFPRA sur proposition conjointe du ministre des affaires étrangères et du ministre de l'intérieur.
Je donnerai en même temps l'avis de la commission sur l'amendement n° 56 de nos collègues du groupe socialiste, puisque ces deux questions sont désormais liées.
Si les informations relatives aux demandeurs d'asile sont confidentielles, les informations visées par le projet de loi concernent les personnes déboutées de leur demande, personnes qui ne bénéficient donc plus de la confidentialité.
Je ne suis pas vexé, loin s'en faut, et, même, je suis plutôt flatté d'avoir été comparé à Molière tout à l'heure, parce que je pense que c'est à moi que cela s'adressait. Je persiste à penser que, entre la notion de demandeur d'asile et la notion de « débouté du droit d'asile », il y a la même différence qu'entre la notion de candidat à un concours ou à un examen et la notion de lauréat audit concours ou audit examen.
M. Louis Mermaz. C'était à M. Gélard que je m'adressais !
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Je lui transmettrai le compliment, monsieur Mermaz !
S'agissant d'un aspect peut-être moins juridique de la question, mais qui me paraît correspondre à une préoccupation assez vive de nos concitoyens, je rappelle que, en l'état actuel des choses, de 95 % à 97 % des décisions prises après que l'OFPRA et la commission des recours des réfugiés ont effectué leur travail sans qu'aucune critique ne se soit élevée, comme je le soulignais hier, ne sont en fait pas mises en application. Bien qu'elles soient défavorables et qu'elles concernent ceux que l'on pourrait appeler les déboutés du droit d'asile, l'éloignement n'est pas décidé. Il va de soi, mes chers collègues, que la transmission de documents au ministre de l'intérieur visée par le projet de loi a également pour objet de faciliter l'éloignement.
La commission a donc émis un avis défavorable sur l'amendement n° 26 rectifié.
En ce qui concerne la nomination du directeur général de l'OFPRA sur proposition conjointe du ministre des affaires étrangères et du ministre de l'intérieur, il me semble que ce partage de la responsabilité se justifie par l'extension de la compétence de l'OFPRA à la protection subsidiaire, dispositif qui est l'héritier direct de l'asile territorial, lequel relève actuellement du seul ministre de l'intérieur. Je rappelle, à cet égard, que le nombre des demandes d'asile territorial est loin d'être insignifiant, puisque quelque 30 000 demandes sur 80 000 avaient été déposées à ce titre en 1982.
Enfin, je ne puis m'empêcher de penser que la suspicion qui s'attache non à la personne du ministre de l'intérieur mais à sa fonction tient du procès d'intention.
M. Robert Del Picchia. Très bien !
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Le ministre de l'intérieur et le ministre des affaires étrangères relèvent de toute façon de la même personne morale de droit public, à savoir l'Etat.
Pour ces raisons, la commission est défavorable à l'amendement n° 56.
L'amendement n° 57 appelle les mêmes observations que le précédent. C'est peut-être sur ce point que la divergence d'interprétation de la jurisprudence du Conseil constitutionnel entre le groupe socialiste et la commission est le mieux caractérisée.
Je donne lecture de la décision du Conseil constitutionnel citée dans l'objet de l'amendement n° 57 du groupe socialiste :
« La confidentialité des éléments d'information détenus par l'OFPRA relatifs à la personne sollicitant en France la qualité de réfugié...
M. Jean-Pierre Sueur. « Sollicitant » !
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. ... est une garantie essentielle du droit d'asile, principe de valeur constitutionnelle, qui implique notamment que les demandeurs du statut de réfugié bénéficient d'une protection particulière. »
M. Robert Del Picchia. Eh oui !
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. J'estime, pour ma part, que, lorsqu'on est débouté du droit d'asile,...
M. Jean-Pierre Sueur. On n'est plus demandeur !
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. ... on n'est plus demandeur du statut de réfugié.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Muselier, secrétaire d'Etat. L'adoption de l'amendement n° 52 tendant à la suppression de l'article, lequel décrit la nouvelle organisation administrative de l'OFPRA, entraînerait le maintien du statu quo et conduirait à un déséquilibre du présent projet de loi. Or la réforme de l'OFPRA constitue un volet majeur de la réforme.
Je voudrais rassurer M. Mermaz : nous n'entendons pas transformer l'OFPRA en officine de dénonciation des déboutés du droit d'asile ! Le Conseil constitutionnel, par sa décision de 1993, a confirmé l'inviolabilité des documents ayant trait aux dossiers des demandeurs d'asile. Cependant, les déboutés n'étant plus des demandeurs, la communication visée à l'article 2 ne viole pas le droit.
En tout état de cause, ce ne sont que les décisions de l'OFPRA ou de la CRR, ainsi que les documents d'état civil ou de voyage des déboutés, qui seront communiqués à des agents habilités du ministère de l'intérieur, l'OFPRA pouvant d'ailleurs refuser de le faire. L'objectif est que les décisions puissent être suivies d'effet.
Par deux fois, M. Dreyfus-Schmidt s'est plaint de ce qu'on ne lui ait pas communiqué le texte du projet de décret. Or, à ma connaissance, aucune demande à cette fin n'a jamais été présentée au ministère des affaires étrangères. (Sourires sur les travées de l'UMP. - M. Michel Dreyfus-Schmidt s'exclame.)
Quoi qu'il en soit, j'émets un avis défavorable sur l'amendement n° 52.
En ce qui concerne l'amendement n° 53 rectifié, la composition du conseil d'administration de l'OFPRA, telle que prévue dans le projet de loi, a été soigneusement étudiée. Elle répond à une double préoccupation d'équilibre et d'efficacité, prend en compte les intérêts des différentes parties et permet d'assurer, en particulier, le respect de l'interministérialité et la représentation des associations et des personnels de l'OFPRA. J'émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n° 54 vise quant à lui à supprimer la notion de pays d'origine sûr. Un pays d'origine sûr est un Etat qui veille au respect des principes de liberté et de démocratie, ainsi que des droits de l'homme et de l'Etat de droit. Des persécutions ne sauraient y être perpétrées, autorisées ou demeurer impunies. Cette notion n'est pas incompatible avec les dispositions de la convention de Genève, où elle semble être exprimée au moins de manière implicite. Cette convention tient compte de l'évolution d'un pays, un Etat pourvoyeur de réfugiés parce que dirigé de manière tyrannique pouvant, par suite d'un changement de circonstances, ne plus être considéré comme oppresseur. La conséquence pratique d'une telle démocratisation, c'est, pour le bénéficiaire du droit d'asile, la perte du droit de refuser de se réclamer de la protection du pays dont il a la nationalité.
Le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement n° 54.
S'agissant de l'amendement n° 55, la représentation au sein du conseil d'administration de l'OFPRA des associations habilitées à s'occuper des réfugiés est d'ores et déjà assurée par la rédaction actuelle du projet de loi. En revanche, l'adoption de l'amendement interdirait le recours à des universitaires, à des chercheurs ou à des personnalités dont la compétence en matière d'asile serait incontestable mais qui ne seraient pas, pour autant, les représentants d'associations. En conséquence, le Gouvernement émet un avis défavorable.
S'agissant de l'amendement n° 26 rectifié, les craintes d'un dysfonctionnement de l'OFPRA lié à la cotutelle qui sera exercée par le ministère des affaires étrangères et le ministère de l'intérieur sont infondées. Il convient de garder à l'esprit que le ministère de l'intérieur perdra la compétence en matière d'asile territorial qui lui avait été conférée par la loi RESEDA votée en 1998. En outre, l'article 1er de la loi du 25 juillet 1952 dispose que l'OFPRA dépend du ministère des affaires étrangères. L'avis du Gouvernement est donc défavorable.
Les mêmes causes emportant les mêmes effets, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 56.
En revanche, il est très favorable à l'amendement n° 6. Confier la gestion des archives aux services du ministère des affaires étrangères, dont la compétence dans ce domaine est reconnue, est une excellente idée.
Le Gouvernement est enfin défavorable à l'amendement n° 57, qui a pour objet de supprimer la transmission au ministère de l'intérieur, par le directeur de l'OFPRA, des documents d'état civil ou de voyage des déboutés du droit d'asile. Le rôle que le ministère de l'intérieur sera appelé à jouer dans l'éloignement des demandeurs déboutés n'est nullement choquant. Un demandeur d'asile qui a épuisé toutes les voies de recours et qui n'a pas établi qu'il encourait des risques en cas de retour dans son pays d'origine doit pouvoir y être reconduit. La question de la confidentialité ne se pose pas en ce qui concerne les personnes déboutées. En effet, monsieur Mermaz, si un individu est débouté du droit d'asile, c'est qu'il ne court aucun risque dans son pays d'origine. Le doute profite au demandeur.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Non, ce n'est pas vrai !
M. Robert Del Picchia. C'est un procès d'intention !
M. André Rouvière. Ce n'est pas évident !
M. Renaud Muselier, secrétaire d'Etat. Si vous n'avez pas confiance dans l'OFPRA ou la CRR, dites-le !
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote sur l'amendement n° 52.
M. Jean-Pierre Sueur. Nous sommes en pleine confusion s'agissant de cet article 2.
A nos yeux, deux choses doivent être absolument distinctes : d'une part, la politique de l'immigration, qui est soumise à des règles, à des lois que notre pays fixe librement et qui, dans une large mesure, est mise en oeuvre par le ministère de l'intérieur ; d'autre part, le droit d'asile, qui est un droit imprescriptible parce qu'il concerne des êtres humains se trouvant dans une situation très douloureuse, très difficile, et ayant été contraints de quitter leur pays.
Par conséquent, il convient de préciser clairement qu'il revient au ministère des affaires étrangères d'exercer les responsabilités en matière de droit d'asile. Cela est d'une haute portée symbolique, et vous savez pertinemment, monsieur le secrétaire d'Etat, que si ce point n'avait pas été d'importance, le Gouvernement n'aurait pas proposé de modifier le dispositif. Je ne suis d'ailleurs pas sûr que ce changement réponde à la volonté profonde du ministère des affaires étrangères et de ses représentants !
On retrouve à la fin de l'article 2 la confusion, le flou que j'évoquais. En effet, le Gouvernement fait le choix de violer la décision du Conseil constitutionnel relative à la confidentialité des éléments d'information détenus par l'OFPRA sur les demandeurs du droit d'asile, de manière que les documents d'état civil et de voyage de personnes ayant fait confiance à la France puissent être communiqués au ministère de l'intérieur. Ces personnes, étant persécutées, viennent frapper à notre porte en pensant que, parce que c'est la France, on examinera leur situation dans des conditions équitables et que, de toute façon, elles ne subiront aucun préjudice du fait d'avoir sollicité le droit d'asile.
A cet égard, je ne suis pas du tout d'accord, monsieur le rapporteur, avec l'interprétation que vous nous avez donnée de la décision du Conseil constitutionnel, et ce pour une raison très simple : si votre interprétation était la bonne, le Conseil constitutionnel aurait pu tout aussi bien écrire que la confidentialité des éléments d'information détenus par l'OFPRA relatifs à la personne ayant obtenu en France la qualité de réfugié est une garantie essentielle du droit d'asile. Le Conseil constitutionnel n'a donc nullement entendu restreindre le principe de la confidentialité des documents aux personnes ayant fait l'objet d'une décision positive ; il a visé expressément toute personne sollicitant la qualité de réfugié.
En conclusion, l'adoption des dispositions de l'article 2 provoquera in fine la rupture du rapport de confiance qui existait jusqu'à présent entre notre pays et des personnes dépourvues de papiers, parfois d'identité, de patrie, et soumises au malheur et à la persécution. Si, quand elles viennent frapper à notre porte, on décide de ne pas les accueillir, pour diverses raisons, qu'au moins elles ne subissent pas un préjudice, quel qu'il soit, pour s'être tournées vers la France !
Nous défendons là, mes chers collègues, une certaine idée de la France.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 52.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin
n° 29
:
Nombre de votants | 274 |
Nombre de suffrages exprimés | 274 |
Majorité absolue des suffrages | 138 |
Pour | 106 |
Contre | 168 |
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'amendement n° 53 rectifié.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je voudrais tout d'abord remercier M. le secrétaire d'Etat des précisions qu'il nous a apportées s'agissant des représentants de l'Etat au sein du conseil d'administration de l'office.
Cela étant, M. le secrétaire d'Etat m'a objecté que nous n'avions jamais demandé communication du projet de décret.
Je lui répondrai en premier lieu qu'il n'est jamais trop tard pour bien faire, et que nous sommes disposés à recevoir communication de ce texte à tout moment, par exemple tout de suite !
En second lieu, nous avions ingénument pensé que notre requête, formulée à plusieurs reprises en commission des lois, serait transmise. M. le rapporteur ou M. le président de la commission des lois s'exprimeront peut-être sur ce point, mais, en tout état de cause, nous avons fréquemment demandé que l'on veuille bien nous remettre le projet de décret.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Il fallait le demander directement au Gouvernement ! Nous ne sommes pas télégraphistes, mon cher collègue !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Pardonnez-moi ! La coutume parlementaire veut que nous nous adressions à la majorité, en particulier au rapporteur et au président de la commission. Quoi qu'il en soit, je ne me rappelle pas que vous nous ayez conseillé de nous adresser directement au Gouvernement ! Si tel avait été le cas, c'est bien évidemment ce que nous aurions fait. Toutefois, puisque le Gouvernement ne nous communique toujours pas ce projet de décret, nous n'avons pas de regrets à avoir !
Cela étant dit, il est maintenant annoncé que la représentation du Gouvernement au sein du conseil d'administration de l'office comptera cinq membres, dont les qualités ont été précisées, et non plus quatre. Je poserai alors une question toute bête : pourquoi ne pas l'écrire dans la loi ?
On m'a objecté que les titres des intéressés peuvent changer. C'est une évidence ! Ceux du haut-commissaire des Nations unies pour les réfugiés et du directeur de l'OFPRA peuvent eux aussi évoluer, la preuve en étant que le second doit devenir « directeur général » ! Tous les titres peuvent être modifiés, de même que les noms des associations, mais on fait la loi selon ce qui existe. En outre, même si le titre n'est plus le même, nul ne verra d'inconvénient à considérer le titulaire des fonctions comme la personne visée par la loi ! Franchement, l'objection ne tient pas, et l'on ne voit pas pourquoi le Gouvernement refuse d'inscrire ses intentions dans le texte. Il serait tout de même beaucoup plus clair de prévoir expressément que chacun des départements ministériels intéressés sera représenté ! D'ailleurs, monsieur le secrétaire d'Etat, vous ne risqueriez rien en acceptant notre amendement, puisque, précisément, vous avez l'intention de nous donner satisfaction !
Nous demandons simplement que les choses soient clairement précisées, afin que l'on ne puisse pas, par la suite, désigner d'autres personnes que les représentants de chacun des différents départements ministériels intéressés.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 53 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote sur l'amendement n° 54.
M. Jean-Pierre Sueur. Certains pensent peut-être qu'une liste des pays d'origine sûrs est une bonne idée. Selon moi, c'est une fausse bonne idée, qu'il sera très difficile de mettre en pratique.
L'OFPRA, comme d'ailleurs les organismes similaires de par le monde, fait d'ores et déjà la différence entre les pays selon qu'ils appliquent ou non les règles de liberté et de démocratie. C'est évident ! On ne met pas tous les pays sur le même plan, depuis la convention de Genève et même avant.
Aussi, à quoi sert-il de faire une liste ? Surtout, j'attire votre attention sur le fait qu'il sera très difficile d'élaborer une telle liste. S'agissant des premiers pays, il n'y aura pas trop de difficultés. Mais, rapidement, on arrivera aux cas limites, aux zones grises, aux pays pour lesquels il y aura des pressions afin qu'ils figurent sur la liste ou qu'ils n'y figurent pas. L'OFPRA sera soumis à des pressions politiques et diplomatiques, contraires au préambule de la convention de Genève.
Selon nous, il ne faut pas prendre un tel risque, qui est inutile. En effet, on peut fort bien, en l'absence de liste, prendre en compte la diversité de la situation des pays au regard de critères relatifs à la liberté et à la démocratie.
Enfin, je rappelle que s'engager dans cette voie, c'est s'exposer à quatre difficultés. Premièrement, c'est contraire à la convention de Genève, qui dispose que le statut de réfugié est toujours lié à la situation personnelle, et non à la situation d'un Etat. Deuxièmement, c'est contraire au préambule de cette convention, selon lequel les êtres humains, sans distinction, doivent jouir des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Troisièmement, c'est contraire à une décision du Conseil constitutionnel en date du 13 août 1993, qui prévoit que le législateur ne peut modifier le droit constitutionnel relatif à l'asile que pour le rendre plus effectif. Quatrièmement, cela introduit, à l'évidence, une inégalité entre les réfugiés. En effet, ceux qui seront originaires d'un pays figurant sur la liste verront réduit à quinze jours le délai d'examen de leur dossier, ce qui est contraire au principe d'égalité, à la convention de Genève et à la Constitution de la République française. Pourquoi prendre tant de risques pour établir une liste qui, finalement, n'aura pas d'utilité ?
M. André Rouvière. Très bonne argumentation !
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je veux nourrir encore notre recours devant le Conseil constitutionnel, qui, évidemment, sera formé.
D'abord, on nous dit que c'est provisoirement que l'OFPRA va arrêter la liste des pays considérés comme des pays d'origine sûrs, en attendant que ce soit fait à l'échelon européen, par la directive. Il est dommage que M. Gélard ne soit pas présent ! En effet, sa dernière déclaration nous a ravis. Il nous a dit : « La directive européenne n'existe pas, arrêtez d'en parler ! » C'est ce que nous disons depuis hier soir. En effet, elle n'existe pas. On n'est même pas sûr qu'elle existe un jour. Le provisoire pourrait donc durer longtemps.
Par ailleurs, en ce qui concerne la Constitution, nous vous avons rappelé la décision de 1993 du Conseil constitutionnel et l'article 53-1 résultant de la révision de novembre 1993. Il faut encore rappeler, parce qu'on ne l'a pas encore cité, le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 : « Tout homme persécuté en raison de son action en faveur de la liberté a droit d'asile sur les territoires de la République. » Si une ordonnance a été prise en 1945, c'était, évidemment, en vertu des principes fondamentaux des lois de la République française.
Tout cela fait que ce que vous nous proposez, avec vos pays d'origine sûrs, est contraire à l'ensemble de notre Constitution, au préambule qui, vous le savez, forme un bloc avec l'ensemble, aux termes d'une jurisprudence constante du Conseil constitutionnel. C'est aussi contraire aux principes généraux des lois de la République, reconnus également comme étant constitutionnels par le Conseil constitutionnel. C'est contraire à l'article 53-1. Bref, c'est une notion qui n'est pas recevable de la part du Parlement français.
M. André Rouvière. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Robert Del Picchia, vice-président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, en remplacement de M. Paul Dubrule, rapporteur pour avis. Je souhaite dire quelques mots sur ce problème de la directive et de la liste.
J'étais rapporteur de la délégation du Sénat pour l'Union européenne sur cette communication. Je me suis donc rendu à Bruxelles. J'ai vu bon nombre de fonctionnaires de tous les pays, et notamment de la Commission. Je vous apporte une simple précision : il y aura une liste minimale, sur laquelle il n'y aura aucune discussion - tous les Etats membres accepteront cette liste a minima de pays d'origine sûrs - et chaque pays pourra ajouter des pays, s'il le souhaite. Il appartiendra à la France de décider quels pays elle entend ajouter à cette liste. Il n'y aura donc pas de risque.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 54.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'amendement n° 55.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. J'ai bien noté la réponse du Gouvernement, qui consiste à dire « laissez-moi la liberté de désigner qui je veux ». Je me méfie beaucoup des « personnes qualifiées », sans autre précision. Quand on précise qu'il s'agit de personnes qualifiées en telle matière, soit ! Pour le reste, prudence ! Les personnes qualifiées sont nées à une époque où on voulait placer un peu partout des petits copains, pour reprendre l'expression d'un ministre alors en fonctions.
M. Jean Chérioux. Ça devait être un gouvernement socialiste !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Non !
M. Jean Chérioux. Ah bon ?
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Celui qui avait parlé des petits copains - et qui parlait aussi des coquins - n'était pas socialiste, il était membre de votre majorité et a été souvent ministre : c'était M. Poniatowski, vous le savez parfaitement.
Je me rappelle très bien que c'est à cette époque, en 1958 pour être précis, qu'est apparue cette notion de personnes qualifiées.
Les débats se suivent mais ne se ressemblent pas. Nous avons eu un débat sur la criminalité organisée, un autre sur l'immigration, et nous sommes au troisième, sur le droit d'asile. Il est arrivé, au cours des deux précédents, que le Gouvernement entende ce que nous lui disions et propose de retenir ce qui émanait du débat parlementaire.
M. Jean Chérioux. C'était le ministre de l'intérieur ! Tout à l'heure, vous jetiez le doute sur le ministre de l'intérieur. Je constate que c'est un homme de dialogue !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. S'agissant de ce qui relève de son domaine de compétence, pourquoi pas ?
Vous pourriez transiger à deux représentants des organisations officiellement habilitées à s'occuper des réfugiés, en vous réservant la liberté de nommer par ailleurs une troisième « personne qualifiée ». Vous pourriez faire ce geste !
La commission s'en est remise à la sagesse du Gouvernement parce qu'elle pensait que le Gouvernement pouvait accepter ce que nous proposions, c'est-à-dire que les trois personnalités qualifiées représentent des organisations. Je propose, monsieur le ministre, de nous entendre et de dire « admettons-en deux », par exemple.
Mais si vous ne répondez pas, nous en tirerons les conséquences et nous tenterons d'être plus convaincants.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Tout à l'heure, j'ai émis, au nom de la commission, un avis de sagesse. En l'instant, j'interviens à titre individuel : j'ai été convaincu par les propos du Gouvernement, je suivrai son avis.
M. Robert Del Picchia, rapporteur pour avis. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 55.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 26 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 56.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 6.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Le groupe socialiste s'abstient.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Louis Mermaz, pour explication de vote sur l'amendement n° 57.
M. Louis Mermaz. Cet amendement, on le sait, a pour objet de supprimer la transmission, par le directeur de l'OFPRA, des documents d'état civil ou de voyage au ministère de l'intérieur.
Nous insistons beaucoup sur la confidentialité de ces documents, confirmée par le Conseil constitutionnel. En effet, celui-ci a censuré une loi de 1997, présentée par le ministre de l'intérieur de l'époque, M. Debré, qui prévoyait de permettre l'accès du fichier dactyloscopique de l'OFPRA à des agents spécialement habilités du ministère de l'intérieur.
Le Conseil constitutionnel l'avait censurée en ces termes : « La confidentialité des éléments d'information détenus par l'OFPRA relatifs à la personne sollicitant en France la qualité de réfugié est une garantie essentielle du droit d'asile, principe de valeur constitutionnelle, qui implique notamment que les demandeurs du statut de réfugié bénéficient d'une protection particulière. » Le fait que la mesure ne s'applique qu'aux personnes dont la demande d'asile a été rejetée ne change rien !
Ce débat me rappelle celui qui portait sur la pierre philosophale : celui qui a sollicité l'asile, soudain, n'est plus le même que celui qui est débouté ! Ainsi, Rachid, Mohamed, Orod, brusquement, parce qu'ils auraient été déboutés, ne seraient plus Rachid, Mohamed ou Orod ? Ce changement de nature profonde des personnes me paraît absolument ahurissant. C'est toujours du même individu qu'il s'agit, et le juridisme poussé à ce point, même par de bons esprits, aboutit à ce que la courtoisie m'interdit d'appeler du crétinisme. Vraiment, je suis effaré d'entendre pareils raisonnements, et je vois que beaucoup ici raisonnent ainsi. Je ne comprends pas ! C'est un peu comme lorsque l'on nous dit qu'on ne peut pas parler d'une directive parce qu'elle n'existe pas encore, ou, ainsi qu'on le fait ici, qu'il faut en parler parce qu'elle va exister. Cessons ces histoires de transsubstantiation dignes du Haut Moyen-Age pour être enfin de notre époque !
Il nous semble particulièrement dangereux de prendre de telles dispositions et de les renvoyer à l'habilitation d'agents chargés de recueillir ces documents ; là aussi, c'est un décret, dont on ne connaît rien, comme d'habitude, qui précisera les choses !
J'ajouterai, enfin, qu'il est prouvé par l'exposé des motifs - je me répète ! - que tout cela n'a qu'un objet : c'est pour débouter, faire partir, expulser et, si nécessaire, obtenir les laissez-passer du pays d'origine et les transmettre au consulat alors qu'il s'agit d'un pays que le réfugié a pourtant quelque raison de suspecter, que celui qui s'est vu refuser le droit d'asile avait pourtant des raisons de fuir !
Cette disposition est tout à fait aberrante, et c'est la raison pour laquelle, monsieur le président, nous demandons un scrutin public.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Sueur. Jusqu'à présent, nous n'avons pas obtenu de réponse aux objections fortes que nous avons soulevées à l'égard de l'interprétation de M. Gélard, reprise par M. le rapporteur.
Il est patent que la décision du Conseil constitutionnel, comme vient de le rappeler M. Mermaz, vise toute personne qui sollicite le droit d'asile. Il est patent que, si le Conseil constitutionnel avait voulu dire les choses autrement et rejoindre l'interprétation de MM. Lecerf et Gélard, il eût écrit que cette condidentialité ne s'appliquerait qu'aux personnes « ayant obtenu » le droit d'asile. Mais il a visé expressément les personnes « sollicitant » le droit d'asile. Plus loin, dans la même phrase, il parle des « demandeurs ». Par définition, quelqu'un qui est demandeur peut voir sa demande suivie de succès ou d'échec ! Mais les deux cas sont forcément visés dans la prise en compte de la notion de demandeur.
Ces arguments me paraissent vraiment clairs. A ce moment du débat, ou bien nous n'avons pas de réponse, auquel cas il faut voter, bien sûr, cet amendement, ou bien il y a une réponse que j'aimerais bien entendre, car il faut nous en faire part, cela peut toujours être utile.
Je conclus en rappelant que le droit d'asile est un droit imprescriptible, mais aussi un droit immémorial. Depuis toujours, depuis l'Antiquité, l'asile est accordé à quelqu'un qui vient frapper à la porte...
M. Jean Chérioux. De l'église !
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur Chérioux, à toutes les portes : la porte de l'église, qui vous est chère, comme toutes les autres portes.
M. Jean Chérioux. Mais c'était l'église !
Mme Nicole Borvo. A Saint-Bernard ?
M. Jean-Pierre Sueur. L'asile, disais-je, est accordé à quelqu'un qui attend de celui qui va au moins accepter d'ouvrir la porte une attitude positive. Cette attitude ne saurait en aucun cas se traduire par un préjudice pour celui qui fait confiance.
Il ne faut pas que tous ceux qui, du monde entier, font confiance à la France - parce que c'est la France -, subissent un préjudice. Il existe une sorte de contrat moral. En proposant, par cette disposition, de rompre la confidentialité, vous rompez ce contrat moral. C'est mauvais, non seulement pour l'image de notre pays mais aussi pour ses valeurs.
Comme notre interprétation de la décision du Conseil constitutionnel ne reçoit pour le moment aucune réponse, je vous prie instamment, mes chers collègues, de bien réfléchir, car il y aurait de grands avantages à voter cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean Chérioux, pour explication de vote.
M. Jean Chérioux. M. Sueur a raison : il ne faut pas priver les réfugiés susceptibles de bénéficier du droit d'asile de toutes les garanties qui leur sont données. Il est vrai qu'ils ont droit à la confidentialité, à la condition qu'il s'agisse effectivement de réfugiés qui peuvent éventuellement bénéficier du droit d'asile. Mais s'il s'agit d'étrangers qui ne sont en rien des réfugiés et qui utilisent abusivement le droit d'asile, croyez-vous que, à ce moment-là, un contrat moral nous lie à eux ? Pour qu'il y ait un contrat, il faut deux parties qui soient toutes deux de bonne foi. S'il n'y a pas bonne foi de la part de celui qui a utilisé abusivement une procédure qui n'était pas faite pour lui, il ne peut être question de contrat. (M. Laurent Béteille applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo. Monsieur Chérioux, accorder sa confiance consiste d'abord à ne pas considérer toute personne qui demande l'asile comme un suspect.
M. Jean Chérioux. Il y a de nombreux abus, et 85 % des demandes sont refusées parce que les demandeurs ne sont pas des réfugiés !
Mme Nicole Borvo. L'asile est refusé, c'est une réalité. Mais, actuellement, la protection n'est pas prévue pour toute personne à qui on a refusé ou accordé l'asile, elle est prévue pour toute personne qui demande l'asile.
Avec cet article, on est donc en train de tourner le droit.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Pas du tout !
Mme Nicole Borvo. A l'évidence, le détournement de ce droit que je considère comme fondamental montre que vous avez une approche policière du droit d'asile...
M. René Garrec, président de la commission des lois. Oh !
Mme Nicole Borvo. ... et que vous confondez asile et immigration.
Pour ces raisons, il faut absolument voter l'amendement n° 57. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Je n'ai aucun espoir de parvenir à convaincre mes collègues puisque, lorsque nous ne partageons pas leurs opinions, ils nous suspectent de crétinisme !
M. André Rouvière. N'exagérons rien !
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Monsieur Sueur, je reste en désaccord total avec votre interprétation de la décision du Conseil constitutionnel. Sans doute est-ce lié à mon élévation intellectuelle trop modeste par rapport à la vôtre...
M. Jean-Pierre Sueur. Je n'ai pas dit cela, et je ne le pense pas ! Je n'utilise pas ce genre d'arguments.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Merci, monsieur Sueur, je vous en donne acte très volontiers.
Je pense simplement que si le Conseil constitutionnel a souhaité distinguer, en matière de confidentialité, le cas des demandeurs d'asile, d'une part, et celui des déboutés du droit d'asile, d'autre part, c'est peut-être parce qu'il a pensé que les déboutés du droit d'asile sont des personnes que l'OFPRA et que la commission des recours des réfugiés ont considérées comme n'étant en aucune manière des personnes persécutées.
Comme effectivement aucune critique forte ne porte sur la jurisprudence et de l'OFPRA et de la CRR, j'ai la faiblesse de penser, à moins que les membres de l'office et de la commission ne soient atteints de la même déficience intellectuelle que nous, que leurs jugements sont pertinents et que, lorsque les personnes sont déboutées, c'est qu'elles ne sont pas persécutées, et que, si elles ne sont pas persécutées, communiquer les documents ne leur fait courir aucun risque.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Renaud Muselier, secrétaire d'Etat. Quand on ne dit rien, certains considèrent que l'on consent ; quand on répond, on a l'impression de ne pas être compris ; quand on répète pour la énième fois la même réponse, on donne l'impression d'être tous des crétins, ce qui n'élève pas le niveau du débat.
Pour autant, la vraie question, puisqu'il y a un risque fondamental, est de savoir si, à un moment ou à un autre, il existe une dérive policière ou un abus de droit ou s'il s'agit en fait de la mise en place d'un système qui nous permette, en accord avec les valeurs et les traditions de notre pays, en respectant son histoire et son honneur, de faire en sorte que ceux qui souffrent et qui sont en danger dans leur propre pays puissent trouver ici le réconfort et l'accueil nécessaires compte tenu du combat qu'ils mènent à titre personnel.
En l'occurrence, c'est clair. Ce projet de loi, article par article, même amendés, répond très clairement à cet objectif en permettant qu'ils puissent être dans notre pays en toute sécurité. En fait, on en revient toujours au même débat : s'agit-il d'asile ou d'immigration ? Et là, on confond les choses.
Cela dit, si vous faites confiance à l'OFPRA et à la CRR, vous êtes naturellement obligés de retirer ces amendements. Sinon, on marche sur la tête !
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il est possible, finalement, que ce soit le Conseil constitutionnel qui nous dise ce que le Conseil constitutionnel voulait dire.
M. Renaud Muselier, secrétaire d'Etat On verra !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je voudrais ajouter, en m'excusant notamment auprès de mes amis qui ont déjà déployé beaucoup de talent pour essayer de nous convaincre, deux nouveaux arguments qui me paraissent importants et qui procèdent de mon expérience de praticien.
Première observation : un avocat continue d'être tenu au secret professionnel, même lorsque l'affaire est terminée.
M. Jean-Pierre Cantegrit. Comme un médecin !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Tout à fait ! Un médecin aussi continue, après avoir soigné un patient, à être tenu au secret professionnel, même lorsque cette personne n'est plus son patient.
Ma seconde observation est la suivante : il y a les demandeurs d'asile économique, dont nous comprenons parfaitement que nous ne puissions malheureusement les accueillir tous, même si nous devons en prendre notre part, pour citer très exactement Michel Rocard dont les propos sont souvent mentionnés en partie seulement, et il y a les autres, ceux qui sont vraiment des réfugiés ou qui demandent véritablement le droit d'asile pour des raisons tout à fait valables.
Or - excusez-moi de faire encore appel à une expérience passée - il se trouve que la commission des recours des réfugiés donne souvent raison à l'intéressé contre ce qui avait d'abord été décidé par l'OFPRA. S'il n'y avait pas deux degrés de juridiction, le nombre de déboutés du droit d'asile serait beaucoup plus important qu'il ne l'est aujourd'hui.
Par ailleurs et surtout, beaucoup sont déboutés du droit d'asile parce qu'ils n'ont pas la possibilité de prouver ce qu'ils disent. Or ceux-là méritent pleinement de continuer à être protégés et il n'y a pas de raison de fournir quelque renseignement que ce soit à leur pays d'origine, alors que, s'ils sont rejetés, ils ne le seront pas dans leur pays même.
Vous savez bien qu'il ne suffit évidemment pas de se présenter devant l'OFPRA ou devant la commission des recours des réfugiés en disant : « Je suis persécuté, donc il faut m'accorder le droit d'asile ». La juridiction répond : « Prouvez-le ! » et, très souvent, malheureusement les éléments de preuve sont très difficiles à apporter.
C'est donc à ceux-là qu'il faut penser, mes chers collègues. C'est en pensant à eux que vous devez voter notre amendement qui tend à supprimer la seconde phrase du texte proposé par le 2° de l'article 2 pour compléter l'article 3 de la loi du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 57.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin
n° 30
:
Nombre de votants | 317 |
Nombre de suffrages exprimés | 315 |
Majorité absolue des suffrages | 158 |
Pour | 111 |
Contre | 204 |
Je mets aux voix l'article 2, modifié.
(L'article 2 est adopté.)