Article additionnel après l'article 5
M. le président. L'amendement n° 40, présenté par M. Mercier et les membres du groupe de l'Union centriste, est ainsi libellé :
« Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 339 du code électoral est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les candidats au sein d'une section doivent être éligibles dans le département constitutif de cette section. »
La parole est à M. Michel Mercier.
M. Michel Mercier. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, cet amendement, vous ne pouvez pas me le refuser !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Oh si !
M. Michel Mercier. C'est impossible !
Il répond exactement à votre objectif d'ancrage des conseillers régionaux.
Pour l'instant, ceux-ci flottent dans les sections et l'on ne sait pas où ils se posent ! (Sourires.)
Pour ma part, en revanche, je prévois que les candidats au sein d'une section doivent être éligibles dans le département constitutif de cette section.
Cet amendement, vous ne pouvez pas me le refuser car il s'incrit tout à fait dans le droit-fil de tous les propos que vous avez tenus.
Si vous me le refusez, j'en ferai un fait personnel ! (Protestations amusées sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président. En fin de séance, monsieur Mercier, pour les faits personnels ! (Sourires.)
Quel est l'avis de la commission ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. Je suis désolé de donner un avis défavorable sur cet amendement, mais la raison est toute simple : il est possible de se présenter comme candidat au siège de conseiller général en dehors de son canton, ou au siège de député dans une autre circonscription (M. Michel Mercier s'exclame.)
Il est possible de choisir et de préférer être conseiller régional au titre du département x plutôt que du département y.
Je rappelle une fois encore que nous débattons non pas d'un scrutin départemental mais d'un scrutin régional avec des sections départementales. Dès lors, à partir du moment où l'on est inscrit comme électeurs dans la région, il n'y a aucune raison de l'être dans le département.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Monsieur Mercier, j'ai le coeur déchiré de devoir vous donner un avis défavorable.
Vous nous êtes tellement sympathique. Mais la raison doit dominer le coeur et la raison nous dit que, le scrutin étant régional, nous devons en rester à une logique régionale, en conformité avec la loi du 19 janvier 1999...
M. Michel Mercier. On vous la reproche !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Je sais bien, monsieur Mercier, que vous êtes un départementaliste impénitent !
En conformité avec la loi de 1999, nous avons voulu au contraire créer une logique régionale. Un attachement indissoluble avec le département viendrait obérer le principe même de la régionalisation.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.
Mme Marie-Christine Blandin. Cet amendement apparaît effectivement comme un recul par rapport à la fois à l'identité régionale et à la loi de 1999 ; c'est pourquoi nous ne nous y reconnaissons pas.
En revanche, le plaidoyer de M. le ministre utilisant à maintes reprises le qualificatif « régional » à titre de justification nous laisse perplexes sur le fait qu'il ait introduit des sections départementales dans le présent projet de loi, alors qu'elles n'avaient plus lieu d'être.
M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, pour explication de vote.
M. Michel Mercier. Comme il est très tard et qu'il n'y aura qu'une seule lecture, il faut saisir toutes les occasions de nous faire expliquer la loi. Après son vote par le Sénat, on n'en parlera plus et les électeurs devront voter en ne connaissant rien de cette loi qui est obscure et ambiguë.
C'est la raison pour laquelle chaque fois qu'une question surgit, je la pose, ensuite, M. le rapporteur et M. le ministre répondent.
Personnellement, mon seul but est la clarté. Je souhaite en effet que les électeurs sachent ce qui va leur arriver. D'ailleurs, plus on avance dans les explications, plus on comprend que cette loi est quelque peu bizarre et aurait bien mérité une discussion dans les deux assemblées ou, tout au moins, un examen en commission mixte paritaire.
Toutefois, comme M. le ministre et M. le rapporteur viennent de s'expliquer clairement, il ne nous reste plus qu'à plaindre les petits départements qui verront disparaître leurs conseillers régionaux et les collègues qui leur expliqueront.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Bien au contraire !
M. Michel Mercier. Sous le bénéfice de ces observations, je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 40 est retiré.
Les articles 6 et 7 ainsi que les amendements tendant à insérer des articles additionnels avant l'article 8 ou après l'article 8 ont été examinés hier soir.
M. le président. « Art. 8. - L'article L. 360 du code électoral est ainsi modifié :
« 1° Au premier alinéa, les mots : "dernier élu" sont remplacés par les mots : "dernier élu dans la même section départementale" ;
« 2° Dans la dernière phrase du deuxième alinéa, les mots : "dans l'ordre de la liste" sont remplacés par les mots : "dans l'ordre de la section départementale". »
La parole est à M. Gérard Le Cam, sur l'article.
M. Gérard Le Cam. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'article 8 vise à transposer les modalités de remplacement des conseillers régionaux existant actuellement aux sections départementales prévues par le présent projet de loi.
Cet article est donc la conséquence de la création de ces subdivisions régionales qui reprennent le département pour cadre.
Pour la clarté du débat, je vous rappellerai les explications de notre rapporteur : « Le siège vacant serait désormais pourvu par le candidat venant immédiatement après le dernier élu dans la section départementale de la liste à laquelle appartenait le conseiller à remplacer.
« Si le candidat appelé à pourvoir le siège devenu vacant se trouvait placé, de ce fait, en situation d'incompatibilité et renonçait au mandat de conseiller régional, il serait remplacé par le candidat suivant dans l'ordre de la section départementale. »
Une nouvelle fois, monsieur le rapporteur, vous justifiez une telle disposition par le souci de rapprocher les élus régionaux de leurs électeurs. Or, dois-je vous rappeler que le projet de loi que vous défendez avec autant d'abnégation vise, pour l'essentiel, à écarter toute une catégorie d'électeurs de la représentation régionale ?
En effet, comment parler d'amélioration de la représentation alors que, de l'avis de tous à l'exception de l'UMP, vous menacez gravement le pluralisme ?
Or c'est le pluralisme qui garantit la représentation la plus exacte du corps électoral et non pas un hypothétique rapprochement géographique.
Je vous rappelle une nouvelle fois que la position actuelle de la majorité sénatoriale se situe en nette contradiction avec sa position antérieure exprimée en 1996.
Dans son rapport d'alors, M. Paul Girod apportait une précision intéressante : « Le président Valéry Giscard d'Estaing, pourtant partisan du passage au cadre régional, a évoqué quelques solutions pour tenter de conciler ce cadre avec la nécessaire représentation des départements : par exemple, l'attribution des sièges pourrait s'effectuer en fonction des attaches départementales déclarées par les candidat (...). Il est toutefois convenu qu'un tel système imposerait une grille de lecture pouvant soulever des difficultés d'ordre constitutionnel, dans la mesure où il méconnaîtrait peut-être le principe d'égalité des suffrages. »
Le président Valéry Giscard d'Estaing a, par ailleurs, admis que la répartition des sièges à la plus forte moyenne dans le cadre régional ferait différer la représentativité des élus en fonction du poids démographique de chaque département.
En d'autres termes, certains candidats de tel ou tel département bénéficieraient des résultats obtenus par leur parti dans un autre département. Cela équivaudrait à un mécanisme de report de voix que le président Valéry Giscard d'Estaing a lui-même qualifié d'assez contestable, d'après la citation de M. Paul Girod.
« En toute hypothèse, concluait M. Paul Girod, un des inconvénients majeurs de tels systèmes est leur complexité, tant dans leur formulation que dans leurs effets. Ils ne seraient probablement pas bien perçus par les électeurs auxquels la loi doit, au contraire, proposer des choix simples et clairs. »
Cette citation, certes un peu longue, est édifiante. Le nouveau mode de scrutin régional est non seulement antidémocratique, mais aussi anticonstitutionnel puisque la création des sections départementales rompt le principe d'égalité.
Nous voterons contre cet article, qui tend à valider pleinement le maintien de la circonscription régionale en brouillant les pistes avec la création de sections départementales.
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers amendements sont identiques.
L'amendement n° 80 est présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 269 est présenté par M. Frimat, Mme Blandin, MM. Domeizel, Dreyfus-Schmidt, Estier, Godefroy, Lagauche, Masseret, Peyronnet et Sueur, Mme M. André, MM. Badinter, Courrière, Debarge, Frécon, C. Gautier, Mahéas, Sutour et les membres du groupe socialiste et apparenté.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer l'article 8. »
L'amendement n° 270 rectifié bis, présenté par M. Domeizel et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit cet article :
« Le premier alinéa de l'article L. 360 du code électoral est ainsi rédigé :
« Le conseiller régional dont le siège devient vacant pour quelque cause que ce soit est remplacé par le candidat suivant de la même liste issu du même département. Si aucun candidat non élu ne remplit cette condition, il est remplacé par le candidat venant immédiatement après le dernier élu de ladite liste dans la section départementale où la même liste a obtenu le meilleur score. »
L'amendement n° 81, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer le premier alinéa (1°) du texte proposé par cet article pour l'article L. 360 du code électoral. »
L'amendement n° 83, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa (1°) du texte proposé par cet article pour l'article L. 360 du code électoral, après les mots : "dernier élu", insérer les mots : "dernière élue". »
L'amendement n° 82, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer le deuxième alinéa (2°) du texte proposé par cet article pour l'article L. 360 du code électoral. »
La parole est à M. Gérard Le Cam, pour défendre l'amendement n° 80.
M. Gérard Le Cam. Cet amendement de notre groupe tendant à supprimer l'article 8 du présent projet de loi est fondé sur plusieurs motivations que nous allons rappeler. Le premier motif relève de la simple logique. A partir du moment où nous estimons que le mode de scrutin régional ne doit pas être modifié dans le sens du présent projet de loi, nous ne pouvons évidemment que proposer la suppression de cet article.
Notre position est donc strictement cohérente avec notre conception de la réforme du mode de scrutin régional, fort éloignée, au demeurant, de celle qui est mise en oeuvre dans ce texte.
Le second motif qui découle du précédent est la mise en oeuvre du remplacement des vacances de sièges occupés dans les conseils régionaux dès lors que l'on crée les conditions objectives d'une représentation exorbitante du ou des courants politiques majoritaires au détriment de tous les autres.
Les conseils régionaux qui seront élus en 2004, si l'on suit les attendus et les caractéristiques du projet de loi, seront beaucoup moins pluralistes que ceux que nous connaissons aujourd'hui.
Nul doute, et nous l'avons déjà largement souligné dans les débats, que ce que l'on pourra gagner en stabilité et en solidité des majorités de gestion sera nettement perdu en termes de pluralisme et de qualité du débat démocratique.
Dans le même temps, pour parvenir à ce résultat, nul doute aussi que les courants majoritaires s'appuieront d'abord et avant tout sur le réseau des élus locaux ou nationaux qui leur serviront de locomotive, tant sur le plan de la liste régionale dans son ensemble que dans le cadre des sections départementales.
Ne dit-on pas, par exemple, que la tête de liste à droite de la région Ile-de-France est disputée entre l'actuel ministre de l'intérieur, notre collègue sénateur M. Roger Karoutchi ou encore le secrétaire d'État aux programmes immobiliers de la justice, M. Pierre Bédier ?
De la même manière, dans la région Provence-Alpes-Côte d'azur, il y aurait concurrence entre, MM. Renaud Muselier, Thierry Mariani pour s'affirmer le leader de la liste UMP et, peut-être, M. Christian Estrosi.
Or, pour tous ces candidats potentiels, il y a fort à parier que le fait de se présenter aux élections régionales sera finalement relativement secondaire et qu'ils seront rapidement amenés à se démettre de leur mandat, ne serait-ce que parce qu'ils en exercent d'autres.
Posons la question autrement : les électeurs se doutent-ils qu'avec le mode de scrutin qui nous est proposé, il se produira rapidement un problème de cumul des mandats qui risque fort de dénaturer le sens de leur vote aux élections régionales, au profit de règles du jeu posées au niveau de l'appareil de tel ou tel parti politique ?
M. Maurice Ulrich. Qu'est-ce que vous en savez ?
M. Gérard Le Cam. Car c'est à cela que l'on parvient si l'on suit la logique du texte : à force de tout faire pour assurer le pouvoir d'une force dominante quel qu'en soit le prix pour la juste représentation du suffrage des électeurs, on crée les conditions pour que ne siègent en dernière instance dans les conseils régionaux que deux catégories d'élus : soit des professionnels de la politique se servant de ce mandat pour asseoir une position avant d'être appelés à d'autres fonctions ; soit des élus de second rang embarqués dans un groupe plus ou moins nettement majoritaire où ils joueront le rôle de faire-valoir des premiers.
Ne serait-ce que pour ces raisons, nous ne pouvons qu'inviter le Sénat à supprimer l'article 8 du présent projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour défendre l'amendement n° 269.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Cet amendement, qui est identique au précédent et se justifie par son texte-même, a été défendu.
M. le président. La parole est à M. Bernard Frimat, pour défendre l'amendement n° 270 rectifié bis.
M. Bernard Frimat. C'est un amendement auquel notre collègue Claude Domeizel tient beaucoup. Je vais essayer de vous faire partager son raisonnement en en gardant sa clarté.
Dans les sections départementales, le nombre de candidats est supérieur de deux - de manière uniforme, d'ailleurs - au nombre de conseillers régionaux actuels élus par département.
Dans certains départements, ce nombre est très faible. Le plus petit département compte actuellement trois conseillers régionaux. Sa démographie n'étant pas en expansion, on peut penser que ce nombre n'augmentera pas et que, dans le meilleur des cas, il restera de trois, pour un « vivier » - si vous me permettez ce terme - de cinq.
Les rapports de chiffres étant extrêmement courts, on ne peut pas écarter l'idée qu'une représentation relativement monocolore de ce département, ajoutée aux conséquences de la loi sur les cumuls, évoquée à l'instant par notre collègue Le Cam, conduise à un épuisement, qui n'est pas mathématiquement impensable, de la liste de candidats. Il n'y aurait alors plus d'impétrants, ce qui entraînerait une vacance du poste, sans possibilité de le pourvoir.
Si je vous ai bien compris, monsieur le ministre, il est inconcevable, dans la mesure où il s'agit d'un scrutin régional, qu'une vacance prive une liste de l'un de ses représentants. Mais si une telle situation devait se présenter, ce qui est tout à fait possible sur de tout petits effectifs, on aboutirait à une négation marginale du suffrage universel, une liste régionale n'ayant plus le nombre d'élus que le peuple lui aura confié.
Ne convient-il pas d'éclairer ce point dans le souci, évoqué par M. Michel Mercier tout à l'heure, d'améliorer la loi et d'en comprendre toutes les facettes ?
La solution que notre ami Claude Domeizel propose est relativement simple. Toutefois, si vous en trouviez une meilleure, je serais très honoré que sa proposition soit sous-amendée par le rapporteur, le Gouvernement ou encore l'UMP qui, sur le plan de la créativité électorale, a quand même des qualités que nous devons saluer malgré le silence persistant qui est le sien actuellement !
A défaut d'un meilleur amendement, auquel la qualité de vos arguments nous permettrait de nous rallier avec raison, à défaut de le faire avec le coeur, pourquoi ne pas adopter celui que vous propose M. Domeizel ?
M. le président. La parole est à M. Gérard Le Cam, pour présenter les amendements n°s 81, 83 et 82.
M. Gérard Le Cam. Cette discussion est l'occasion de dénoncer, une fois encore, le fait que l'instauration des sections départementales au sein des listes régionales est nuisible pour la démocratie.
Si la loi du 19 janvier 1999 a, certes, le défaut de permettre la présentation de listes de candidats à rallonge, elle permet, grâce à ce dispositif, aux électeurs de connaître exactement la situation politique de leur région et la place que pourra y occuper le candidat de leur choix.
Avec le système des sections départementales, combiné à la règle de la parité, laquelle ne s'applique, entre parenthèses, qu'au premier tour, les électeurs seront dans l'impossibilité de faire un choix éclairé, qui réponde au mieux à leurs aspirations politiques.
Est-ce là rapprocher les élus régionaux de leurs électeurs, comme l'affirme dans son rapport M. Gélard, pour qui l'article 8 répond à cet objectif de proximité ? Il faudra nous donner d'autres explications pour nous convaincre !
En effet, on nous explique que l'on tire la conséquence de la création des sections départementales au sein des listes régionales pour fixer les modalités de remplacement des conseillers régionaux.
L'article L. 360 du code électoral dispose en effet que « le candidat venant sur une liste immédiatement après le dernier élu est appelé à remplacer le conseiller régional élu sur cette liste dont le siège devient vacant pour quelque cause que ce soit », notamment en raison de la règle de non-cumul des mandats.
L'article L. 360, tel qu'il est modifié par votre projet de loi, prévoit que le siège sera désormais pourvu par le candidat venant immédiatement après le dernier élu dans la section départementale de la liste à laquelle appartenait le conseiller à remplacer.
Vous avez d'ailleurs dû également modifier le tableau n° 7 annexé au code électoral, qui fixe, dans sa dernière colonne, le nombre de candidats par section départementale, région par région.
Toutefois, le nombre total de candidats est supérieur aux effectifs des conseils régionaux, à raison de deux postes supplémentaires par département, afin justement de pourvoir aux vacances de sièges susceptibles de se produire en cours de mandature.
Cette situation entraîne tout simplement la plus grande confusion, non seulement au sein des listes, mais aussi - et c'est plus grave - dans l'esprit des électeurs, qui, croyant voter pour une liste avec des candidats inscrits dans un ordre préalablement établi, pourront se retrouver avec un conseiller régional qu'ils ne souhaitaient pas forcément voir élu.
Ce n'est pas ce que l'on pourrait qualifier, à proprement parler, de démocratie. Les électeurs n'en seront que plus déconnectés de la vie politique de leur région et auront de plus, si une vacance se présente au sein du conseil régional, l'impression d'avoir été bernés.
Avec notre dernier amendement, qui est un amendement de repli au cas où notre amendement de suppression de l'article 8 serait rejeté, nous proposons, justement, de supprimer le premier alinéa dudit article, puisque nous en dénonçons le caractère antidémocratique.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. Sur les amendements identiques n°s 80 et 269, qui visent à supprimer l'article 8, je ne peux, par coordination avec ce que nous avons adopté avant, qu'émettre un avis défavorable.
Le problème, qui est réel, posé par M. Domeizel dans l'amendement n° 270 rectifié bis est partiellement résolu, puisque, pour la première fois dans l'histoire des élections régionales, il est prévu que, dans les sections départementales, il y aura deux noms de plus que de sièges à pourvoir.
Evidemment, on peut toujours envisager les pires catastrophes, par exemple que, dans un département où seuls trois sièges sont à pourvoir, les cinq membres de la liste meurent dans le même accident de voiture, ou encore qu'un membre de la liste voisine organise, comme dans Noblesse oblige, leur assassinat successif ! Mais il est tout de même quelque peu irréaliste d'envisager ces solutions extrêmes !
Cela dit, je tiens à préciser plusieurs points.
Tout d'abord, il est courant que les assemblées ne soient pas complètes. En particulier, rien n'oblige, quand une liste municipale est épuisée, de procéder à une élection partielle tant que le maire n'a pas à être élu.
De même, chacun sait que, dans l'année qui précède la fin du mandat législatif, on ne procède pas à des élections partielles. On peut espérer que le problème évoqué ne se posera qu'à la fin d'un mandat régional, auquel cas il n'y a pas lieu de prévoir de disposition particulière.
Enfin, ce n'est pas parce qu'il manquera une unité dans une liste régionale que la majorité en sera affectée. En effet, une prime majoritaire ayant été instituée, il y a peu de risques de voir une majorité bousculée.
La commission est défavorable aux amendements n°s 81 et 82, qui visent à supprimer les deux paragraphes de l'article 8.
Elle est également défavorable à l'amendement n° 83, d'ordre purement sémantique, qui traduit la volonté du groupe CRC, que l'on peut comprendre, de féminiser la rédaction du code électoral. Je vous ai dit ce que je pensais de cette rédaction hier : ce genre de problème pourra être résolu lors de la refonte totale dudit code et non à l'occasion d'une refonte partielle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Je ferai quelques remarques sur la question des remplaçants.
Le phénomène - que nous avons connu jusqu'à maintenant - d'accélération des démissions et de montée des remplaçants par les suivants de liste s'est beaucoup développé à la suite de l'entrée en vigueur de la loi relative au cumul des mandats, laquelle, avant d'entrer dans les moeurs, a eu des effets importants sur les listes en place. Le phénomène s'étant maintenant quelque peu stabilisé, nous devrions moins en souffrir. En outre, le fait de disposer de deux remplaçants en queue de liste devrait permettre de pallier les conséquences de ces démissions.
Par ailleurs, il peut arriver effectivement - tout peut arriver ! - que, dans certains cas, pour des raisons fortuites, il n'y ait pas de représentants. Ce n'est pas un drame dans notre République. Cela s'est déjà produit. Ainsi, lorsqu'un député vient à disparaître ou à démissionner moins d'un an avant le renouvellement, il n'est pas remplacé, et la circonscription et le département ne sont pas représentés.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Mais avant, si !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. A moins d'un an, non. On est dans le domaine de la souveraineté nationale.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Ce n'est pas moi qui compare, c'est vous !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 80 et 269.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 270 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 81.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 83.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 82.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 8.
(L'article 8 est adopté.)
Article 9 et article additionnel après l'article 4
M. le président. « Art. 9. - I A. - A la fin de l'avant-dernière phrase du deuxième alinéa de l'article L. 366 du code électoral, le mot : "moins" est remplacé par le mot : "plus".
« I. - Le dernier alinéa de l'article L. 366 du même code est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les sièges sont attribués aux candidats dans l'ordre de présentation sur chaque liste.
« Si plusieurs listes ont la même moyenne pour l'attribution du dernier siège, celui-ci revient à la liste qui a obtenu le plus grand nombre de suffrages. En cas d'égalité de suffrages, le siège est attribué au plus âgé des candidats susceptibles d'être proclamés élus. »
« II. - L'article L. 380 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 380. - Le candidat venant sur une liste immédiatement après le dernier élu est appelé à remplacer le conseiller de l'Assemblée de Corse élu sur cette liste dont le siège devient vacant pour quelque cause que ce soit.
« Si le candidat ainsi appelé à remplacer le conseiller de l'Assemblée de Corse se trouve de ce fait dans l'un des cas d'incompatibilité mentionnés à l'article L. 46-1, il dispose d'un délai de trente jours à compter de la date de la vacance pour faire cesser l'incompatibilité en démissionnant de l'un des mandats visés par ces dispositions. A défaut d'option dans le délai imparti, le remplacement est assuré par le candidat suivant dans l'ordre de la liste.
« Le représentant de l'Etat en Corse notifie le nom de ce remplaçant au président de l'Assemblée de Corse.
« Le mandat de la personne ayant remplacé un conseiller de l'Assemblée de Corse dont le siège était devenu vacant expire lors du renouvellement de l'Assemblée de Corse qui suit son entrée en fonction.
« Lorsque les dispositions des premier et deuxième alinéas ne peuvent être appliquées, le siège demeure vacant jusqu'au prochain renouvellement de l'Assemblée de Corse. Toutefois, si le tiers des sièges de l'Assemblée de Corse vient à être vacant par suite du décès de leurs titulaires, il est procédé au renouvellement intégral de l'Assemblée de Corse dans les trois mois qui suivent la dernière vacance pour cause de décès, sauf le cas où le renouvellement général de l'Assemblée de Corse doit intervenir dans les trois mois suivant ladite vacance. »
La parole est à M. Robert Bret, sur l'article.
M. Robert Bret. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet article 9 est relatif à l'élection des conseillers à l'Assemblée de Corse. Son objet est de laisser inchangées les règles applicables à leur élection, issues du statut de 1991, lequel a institué un mode de scrutin sur le modèle de celui qui est appliqué pour les élections municipales dans les communes de 3 500 habitants et plus.
Selon le droit en vigueur, les conseillers de l'Assemblée de Corse sont élus au scrutin de liste à deux tours, avec dépôt de listes complètes comportant autant de noms que de sièges à pourvoir, sans adjonction ni suppression de noms.
S'agissant des seuils, seules sont admises au second tour les listes ayant obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés au premier tour. Ce seuil est donc identique à celui qui est prévu par le droit actuel pour les élections régionales, contre un seuil de 10 % du nombre des électeurs inscrits prévu dans le présent projet de loi.
Quant à la fusion entre plusieurs listes en vue du second tour, aucun seuil n'est prévu, contre un seuil actuel de 3 % des suffrages exprimés et 5 % dans votre texte pour les élections régionales.
Pour des raisons de prudence, comme on peut le lire dans le rapport, votre projet, monsieur le ministre, ne modifie pas le mode de scrutin actuel - et donc les seuils - pour l'élection des conseillers à l'Assemblée de Corse. Vous estimez en effet prématuré de procéder à une modification du mode de scrutin sans connaître les résultats en cours sur l'organisation institutionnelle de l'île. Soit.
Si l'on peut comprendre ce raisonnement, des questions demeurent toutefois.
Pourquoi maintenir un statu quo pour la Corse et pas pour le continent ?
Pourquoi conserver ici le seuil des 5 % des suffrages exprimés et le porter là à 10 % du nombre des électeurs inscrits ?
Pourquoi ce qui vaudrait pour la Corse ne vaudrait-il pas pour le continent ?
N'est-ce pas là la confirmation de ce que nous dénonçons depuis le début de nos débats, à savoir que les seuils « couperet » que vous voulez imposer constituent effectivement une atteinte au pluralisme de la vie politique française et vont aboutir à une bipolarisation ?
Vous le savez, monsieur le ministre, la question des seuils pour se maintenir au second tour et pour fusionner lors des élections régionales est la pierre angulaire de votre réforme et justifie notre plus vive opposition.
Pour ces raisons, nous n'avons pas souhaité déposer d'amendement qui aurait eu pour conséquence d'appliquer à la Corse ce que nous refusons pour le continent.
Telles sont, mes chers collègues, les observations que je tenais à formuler sur cet article 9.
M. le président. La parole est à M. Nicolas Alfonsi.
M. Nicolas Alfonsi. Je voudrais bien fixer les limites du débat que suscite l'article 9 sur le plan constitutionnel.
Cet article modifie les dispositions de l'article L. 366 du code électoral relatif au mode de scrutin pour l'élection des conseillers à l'Assemblée de Corse, en ce qu'il prévoit, en cas d'égalité de suffrages, l'attribution du dernier siège respectivement à la liste arrivée en tête au second tour dont tous les candidats ont la moyenne d'âge la plus élevée et au plus âgé des candidats susceptibles d'être proclamés élus.
L'article 9 reprend, sur ce point, les modifications de même sens apportées par l'article 3 à l'article L. 338 du code électoral pour l'élection des conseillers régionaux qui retenait auparavant, comme l'article L. 366, la moyenne d'âge la moins élevée et le moins âgé des candidats.
En revanche, si l'article 4 du projet de loi applicable à l'élection des conseillers régionaux prévoit qu'au sein de chaque section départementale la liste est composée alternativement d'un candidat de chaque sexe, cette modification apportée à l'article L. 346 du code électoral pour les conseils régionaux n'est pas reprise à l'article L. 370 du code électoral pour l'Assemblée de Corse.
Les dispositions maintenues de l'article L. 370 ne prévoient, en effet, comme par le passé, en ce qui concerne la déclaration de candidature pour l'élection à l'Assemblée de Corse, que l'obligation de faire figurer un nombre égal de candidats de chaque sexe au sein de chaque groupe entier de six candidats dans l'ordre de présentation de la liste. Cette obligation s'imposait jusqu'à présent dans les mêmes conditions pour les déclarations de candidature aux conseils régionaux comme à l'Assemblée de Corse.
L'article 3 de la Constitution, dernier alinéa, dispose que « la loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives. » L'article 4 de notre projet de loi favorise cet égal accès pour le mandat de conseiller régional. Mais faute, pour la Haute Assemblée, de rendre ce principe constitutionnel de parité plus effectif pour l'accès au mandat de conseiller à l'Assemblée de Corse, dans les mêmes termes que ceux résultant de l'article 4 du projet de loi pour le mandat de conseiller régional, les modifications apportées au régime électoral de l'Assemblée de Corse par l'article 9 conduisent à ce que les conditions d'exercice de ce principe constitutionnel puissent ne pas être les mêmes sur l'ensemble du territoire national.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Ça, c'est possible !
M. Nicolas Alfonsi. Ni la situation du corps électoral de la collectivité de Corse ni le mode de scrutin pour l'élection à l'Assemblée de Corse ne présentent de particularités autorisant le législateur à réserver aux candidats pour l'élection à cette assemblée un traitement différent au regard du principe constitutionnel de parité de celui des candidats aux conseils régionaux.
Les dispositions de l'article 9 sont, par conséquent, à notre avis, contraires au principe d'égal accès des hommes et des femmes aux mandats électoraux et fonctions électives et contraires au principe d'égalité devant la loi. (MM. Jacques Pelletier et Michel Mercier applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il s'agit d'un problème difficile. Je croyais me rappeler que le Conseil constitutionnel avait dit - mais je peux me tromper - qu'il pouvait y avoir un statut particulier pour la Corse, mais que, bien entendu, quand on modifierait le statut des autres régions, il faudrait aligner les deux statuts. S'il tel était le cas, cela poserait un premier problème constitutionnel.
Mais, ce qui est anticonstitutionnel, me semble-t-il, c'est le fait non pas qu'un problème ne soit pas réglé ici, mais que l'on prétende le régler ailleurs. En effet, il n'est pas pensable que le principe de parité ne soit pas appliqué de la même manière partout. C'est plus qu'un principe général : c'est un principe constitutionnel, puisque la parité, nous le savons, a été introduite dans la Constitution.
Le Conseil constitutionnel ne pourrait pas annuler une disposition qui n'est pas dans la loi, notamment dans l'article 9. En revanche, il pourrait parfaitement annuler les mesures que vous avez fait figurer dans les autres articles pour toutes les régions, au motif qu'il ne peut pas y avoir de différence entre les régions, y compris la Corse.
Je souhaitais formuler cette première observation, car c'est là que m'apparaît l'inconstitutionnalité.
On nous a dit : on ne touche pas à la Corse, parce qu'on va discuter de son statut. On ne sait pas quand, on ne sait pas comment ! Ce n'est donc pas un motif valable.
Il n'y a pas de raison, me semble-t-il, de ne pas discuter en même temps du statut de la Corse et du statut des régions. Ce n'est pas ce qui est fait, alors que ce devrait être le cas. Une telle attitude pourrait également intéresser le Conseil constitutionnel.
Cela est d'autant plus vrai qu'on ne se contente pas, contrairement à ce que l'on dit, d'une réforme de forme pour éviter de prendre telle ou telle mesure. Le Gouvernement prétend qu'on ne modifie rien ! C'est faux, puisqu'on remplace, dans le texte de l'article 9, les mots : « le plus jeune » par les mots : « le plus âgé », pour départager éventuellement les candidats.
Cette modification - j'y ai fait allusion tout à l'heure - a été introduite par l'Assemblée nationale. Le projet gouvernemental ne touchait à rien, pas même à cette question du plus jeune ou du plus âgé. C'est à l'Assemblée nationale qu'a été adopté, en commission, un amendement que le Gouvernement, par gentillesse à l'égard de sa majorité, a inséré dans le texte adopté selon la procédure de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution. C'était sans doute une erreur et de l'Assemblée nationale et du Gouvernement. Vous auriez pu la rectifier si vous aviez accepté d'adopter des amendements - au moins un amendement - : la corriger n'aurait pas pris beaucoup de temps en commission mixte paritaire. Vous ne l'avez pas voulu ! Un principe est posé et il faut le respecter : silence dans les rangs, on ne touche à rien !
Vous vous retrouvez maintenant face à un problème : vous avez remplacé les mots « moins âgé » par les mots « plus âgé », mais vous refusez d'appliquer en Corse, comme dans les autres régions, le principe des listes dites « chabada » - soit un-un - et vous laissez subsister les listes « trois-trois ». C'est évidemment anticonstitutionnel !
Toutefois, ce qui est anticonstitutionnel, c'est non pas de laisser les listes « trois-trois » en Corse, mais de prétendre appliquer les listes « chabada » partout, alors que ce n'est pas le cas en Corse.
Telles sont les explications que je voulais donner sur l'ensemble de l'article 9.
M. le président. Je suis maintenant saisi de treize amendements, qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune. Mais, pour la clarté du débat, je les appellerai successivement.
L'amendement n° 271, présenté par M. Frimat, Mme Blandin, MM. Domeizel, Dreyfus-Schmidt, Estier, Godefroy, Lagauche, Masseret, Peyronnet et Sueur, Mme M. André, MM. Badinter, Courrière, Debarge, Frécon, C. Gautier, Mahéas, Sutour et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Supprimer l'article 9. »
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. La suppression de l'article 9 représenterait évidemment la meilleure solution. Cela donnerait satisfaction à ceux qui ne veulent rien modifier, mais qui modifient quand même. Cependant, le problème de la parité subsisterait.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 85 est présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 272 est présenté par M. Frimat, Mme Blandin, MM. Domeizel, Dreyfus-Schmidt, Estier, Godefroy, Lagauche, Masseret, Peyronnet et Sueur, Mme M. André, MM. Badinter, Courrière, Debarge, Frécon, C. Gautier, Mahéas, Sutour et les membres du groupe socialiste et apparenté.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer le I A de cet article. »
La parole est à M. Robert Bret, pour présenter l'amendement n° 85.
M. Robert Bret. Cet amendement vise à supprimer le I A de l'article 9. Comme l'a rappelé M. Dreyfus-Schmidt, le Gouvernement a intégré dans le projet de loi la règle selon laquelle, en cas d'égalité des suffrages, les sièges sont attribués à la liste dont la moyenne d'âge est la plus élevée, et au plus âgé des candidats susceptibles d'être élus.
On sait que le projet initial élaboré par le Gouvernement ne comportait pas cette disposition. En conséquence, celle-ci n'a pas été examinée en première lecture à l'Assemblée nationale et ne le sera pas plus au Sénat en raison de la discussion et du vote conforme qui ont lieu en ce moment.
Sur le fond, nous avons déjà eu l'occasion de débattre de cette question qui se posera pour les différents articles. A nos yeux, il n'est pas anodin de remplacer « moins » par « plus » au moment où il est urgent de moderniser la vie publique.
Malgré les explications de notre rapporteur, j'avoue ne pas comprendre la raison pour laquelle on accorde une prime à la liste dont les candidats ont la moyenne d'âge la plus élevée.
Pour ces raisons, nous proposons, je le rappelle, de supprimer le I A de l'article 9.
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour présenter l'amendement n° 272.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je trouve que nous sommes bien gentils de tendre une perche aux membres de la majorité en leur disant qu'ils se sont trompés en remplaçant les mots : « moins âgé » par les mots : « plus âgé ».
Nous vous proposons de supprimer cette mesure. Après tout, si vous voulez la laisser, c'est votre choix !
En ce qui nous concerne, nous retirons cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 272 est retiré.
L'amendement n° 87, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Dans le deuxième alinéa du I de cet article, après le mot : "candidats" insérer les mots : "ou candidates". »
La parole est à M. Robert Bret.
M. Robert Bret. A l'occasion de la discussion des articles précédents, nous avons déjà développé nos arguments justifiant le dépôt de cet amendement. Je n'y reviendrai donc pas dans le détail.
Entre nous, à la veille du 8 mars, la Haute Assemblée s'honorerait de voir nos amendements n°s 87, 88, 90, 91, 92 et 93 adoptés, amendements qui marquent effectivement, comme l'a encore rappelé M. le rapporteur, la volonté de féminiser la rédaction de notre code électoral. Mais pas seulement ! Je crois que c'est important. Là non plus, il ne serait pas anodin d'adopter ces amendements.
Cette intervention vaut, vous l'avez compris, pour la série d'amendements que j'ai évoquée.
M. le président. L'amendement n° 274, présenté par M. Frimat, Mme Blandin, MM. Domeizel, Dreyfus-Schmidt, Estier, Godefroy, Lagauche, Masseret, Peyronnet et Sueur, Mme M. André, MM. Badinter, Courrière, Debarge, Frécon, C. Gautier, Mahéas, Sutour et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit la dernière phrase du troisième alinéa du I de cet article, pour l'article L. 366 du code électoral :
« En cas d'égalité de suffrages, le siège est attribué par tirage au sort, parmi les candidats susceptibles d'être proclamés élus. »
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Cet amendement concerne le tirage au sort.
Nous avons pensé que le mot « tirage » rimait mieux avec « ancrage » que « magouillage ». C'est pourquoi nous vous avons proposé ce système pour la Corse. Mais, comme vous ne l'avez pas retenu par ailleurs, cela créerait une différence entre la Corse et les autres régions. Il ne serait donc pas logique que nous le proposions. Je retire donc cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 274 est retiré.
L'amendement n° 273, présenté par M. Frimat, Mme Blandin, MM. Domeizel, Dreyfus-Schmidt, Estier, Godefroy, Lagauche, Masseret, Peyronnet et Sueur, Mme M. André, MM. Badinter, Courrière, Debarge, Frécon, C. Gautier, Mahéas, Sutour et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Dans le troisième alinéa du I de cet article, pour l'article L. 366 du code électoral, remplacer le mot : "plus" par le mot : "moins". »
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il s'agit toujours de l'âge du capitaine !
A l'évidence, le tirage au sort réglait le problème du « plus » ou « moins ». Cela étant dit, nous avons retiré tout à l'heure notre amendement tendant à supprimer l'alinéa en question et nous vous avons dit pourquoi.
Par conséquent, logiques avec nous-mêmes, nous retirons cet amendement n° 273.
M. le président. L'amendement n° 273 est retiré.
L'amendement n° 88, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Dans la seconde phrase du dernier alinéa du I de cet article, après le mot : "candidats", insérer les mots : "ou candidates". »
Cet amendement a déjà été défendu.
L'amendement n° 364, présenté par MM. Pelletier, Fortassin, Laffitte, Alfonsi et les membres du groupe du Rassemblement démocratique et social européen, est ainsi libellé :
« Après le I, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Les deux dernières phrases du premier alinéa de l'article L. 370 du même code sont remplacées par un alinéa ainsi rédigé :
« Chaque liste est composée alternativement d'un candidat de chaque sexe. »
La parole est à M. Nicolas Alfonsi.
M. Nicolas Alfonsi. Cet amendement est très important. J'ai le sentiment que, dans cette assemblée, tout le monde est convaincu qu'un dérapage constitutionnel peut se produire.
Un problème juridique et un problème d'opportunité se posent.
Lorsque j'ai interrogé M. le rapporteur en commission, il m'a répondu d'une phrase dont vous mesurerez la pertinence juridique : « C'est la Corse ! »
Quand j'ai posé la question à M. le ministre de l'intérieur en séance, lors de la discussion générale, il m'a répondu - c'est un argument à peu près du même poids - que je devrais m'occuper de la parité au conseil général de la Corse-du-Sud.
Ce genre de propos se passe de commentaires. Il s'agit pourtant d'un problème fondamental : l'égal accès des hommes et des femmes aux mandats publics en Corse, à l'instar de ce qui se passe dans les autres conseils régionaux.
On ne va pas revenir à Montesquieu et à sa théorie des climats pour justifier ce genre de discrimination ! Il faut que vous considériez que ce texte est détachable de tous les arguments d'opportunité - appelons-les « politiques » - qui consistent à suggérer qu'il faut renvoyer cette question à plus tard, au motif qu'un statut particulier va être élaboré, et que ce statut forme un tout. En effet, nous sommes là dans une matière qui est parfaitement détachable. Le statut particulier appelle peut-être des mesures institutionnelles spécifiques, mais il ne saurait porter atteinte au principe d'égalité devant la loi.
Vous renvoyez cette question à la future organisation institutionnelle que prépare le ministre de l'intérieur, mais qui va faire l'objet d'une consultation. Par conséquent, on peut émettre deux hypothèses.
Il s'agira tout d'abord de savoir si la question que vous poserez - la fameuse consultation pour avis s'agissant de l'article 72 modifié de la Constitution - sera loyale au sens où l'entend le Conseil constitutionnel.
Ensuite, il se peut que cette consultation soit négative et, dans ce cas, il n'y aura plus de texte. Nous serons alors en contradiction avec le principe fondamental d'égalité devant la loi.
Monsieur le ministre, vous avez dit que vous preniez l'engagement de réintroduire la parité « un-un » dans le texte institutionnel sur la Corse. S'il ne devait pas y avoir de texte institutionnel pour la raison que j'ai évoquée, vous pourriez alors prendre l'engagement, dans le cadre soit d'une proposition de loi, soit d'un projet de loi, d'adapter le code électoral aux dispositions que j'appellerai improprement « nationales ».
Si vous ne le faisiez pas, nous serions dans une situation surréaliste, et il en découlerait trois conséquences.
La première concerne la parité, qui serait difficilement applicable en Corse. En effet, compte tenu du régime libéral qui existe en Corse en matière de seuil, aucune femme ne serait élue, car, sur nombre de listes, trois hommes seulement seraient élus.
La deuxième conséquence a trait au principe d'égalité devant la loi constitutionnelle.
Enfin - et cette troisième conséquence est, à mes yeux, fondamentale, car le principe d'égalité devant la loi me paraît plus important que celui de la parité -, vous feriez terriblement plaisir à la famille nationaliste, qui s'engouffrerait dans cette brèche constitutionnelle pour porter atteinte au droit de vote de ceux qui vivent en Corse, des gendarmes notamment. C'est un problème important, mes chers collègues, et je vous demande d'y être attentifs.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Je tiens à répondre à M. Alfonsi, car le problème qu'il soulève n'est pas négligeable.
Tout d'abord, le ministre de l'intérieur, M. Nicolas Sarkozy, s'est engagé à assurer la parité en Corse dans le cadre de la réorganisation du statut. Par conséquent, l'objectif n'est pas perdu de vue et il n'est pas question de ne pas le faire.
M. Nicolas Alfonsi. Sauf s'il n'y a pas de statut !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Comme vous le savez, actuellement, un travail est en cours sur ce sujet.
Ensuite, la réforme constitutionnelle prévoit un statut particulier. Nous ne sommes donc pas en infraction avec la Constitution.
M. le président. J'appelle maintenant en discussion l'amendement n° 260 rectifié, qui avait été précédemment réservé.
Cet amendement, présenté par M. Frimat, Mme Blandin, MM. Domeizel, Dreyfus-Schmidt, Estier, Godefroy, Lagauche, Masseret, Peyronnet et Sueur, Mme M. André, MM. Badinter, Courrière, Debarge, Frécon, C. Gautier, Mahéas et Sutour, Mmes Printz, San Vincente, Durrieu, Y. Boyer, Pourtaud et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« La dernière phrase du premier alinéa de l'article L. 370 du code électoral est ainsi rédigée :
« Chaque liste est composée alternativement d'un candidat de chaque sexe. »
La parole est à M. Bernard Frimat.
M. Bernard Frimat. Cet amendement a le même objet que les amendements précédents. Il nous semble cependant important de nous arrêter sur ce point, non pas que nous ayons l'outrecuidance de penser que nos explications seront meilleures que celles que vient de donner M. Alfonsi, mais parce qu'il s'agit là d'un problème essentiel. Nous sommes en effet convaincus que la loi du 6 juin 2000 n'est pas prise en compte. La réponse de Michel Dreyfus-Schmidt à l'intervention de M. Alain Vasselle, au nom de l'UMP, qui s'opposait à la parité, nous a permis d'y revenir.
La loi tendant à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives s'applique sur tout le territoire de la République. C'est simple : c'est un principe constitutionnel !
Vous avez fait allusion, monsieur le ministre, à la réponse aux intervenants de votre collègue M. Sarkozy, lors de la soirée qu'il a eu l'amabilité de passer en notre compagnie. Je vous citerai les propos qu'il a tenus ce soir-là : « Bref, quand l'attaque fait mal, vous tenez à répondre sur-le-champ ! » Mais cela s'inscrivait dans le climat ambiant ; ce n'était pas vraiment le sujet !
Je poursuis ma citation : « Vous me demandez : pourquoi pas la parité en Corse comme sur le continent ? Je vous signale qu'elle s'y appliquera aussi, que j'en prends l'engagement. Pourquoi demain plutôt qu'aujourd'hui ? Parce que nous avons un débat institutionnel sur la Corse. » Je ne pense pas déformer ses propos en tronquant la citation.
En quoi le débat institutionnel que le Gouvernement a sur la Corse, que nous suivons avec tout l'intérêt qu'il mérite et auquel nous nous intéresserons le moment venu, peut-il mettre en cause le principe de la parité ?
En quoi ce débat institutionnel peut-il remettre en cause l'application, sur le territoire de la République, du principe constitutionnel de parité ?
Oui, vous avez fait un effort en ce qui concerne la parité, et nous l'avons salué dans la discussion générale. Effectivement, vous tirez, dans votre texte, les conséquences de l'évolution constitutionnelle, et c'est un progrès. Mais nous nous interrogeons : pourquoi vos progrès sont-ils partiels ? Pourquoi la Corse, partie intégrante du territoire de la République, échapperait-elle à l'application du principe constitutionnel ?
En proposant que chaque liste soit composée alternativement d'un candidat de chaque sexe, nous n'introduisons aucune innovation juridique ; il n'y a rien d'extraordinaire dans ce dispositif.
Non, la difficulté tient plutôt au fait que, si vous acceptez ne serait-ce qu'un amendement, le Premier ministre pourrait éventuellement avoir un débat, à l'Assemblée nationale, sur les conclusions d'une commission paritaire. Est-ce si dramatique, quand on sait que ces conclusions ne peuvent faire l'objet d'amendements ?
Vous avez finalement la possibilité de choisir entre le confort d'une majorité absolue au Sénat et à l'Assemblée nationale, majorité qui refuse de débattre - et ce n'est même pas « section-halte », mais « silence dans les rangs » (sourires.),...
M. Patrice Gélard, rapporteur. En avant toute ! (Nouveaux sourires.)
M. Bernard Frimat. ... et le respect des principes constitutionnels.
Monsieur le ministre, ces principes peuvent être respectés même quand on a la majorité à l'Assemblée nationale et au Sénat, même quand les élections vous ont donné démocratiquement cette majorité. On peut revenir sur les circonstances, mais tel n'est pas le problème, le peuple s'est prononcé et le peuple a toujours raison.
Mais pourquoi, dans cet arbitrage entre les principes constitutionnels et le confort de votre majorité, choisissez-vous ce dernier ? Est-ce si inconfortable d'avoir la majorité absolue ? En quoi est-il nécessaire pour vous d'abuser de cette position dominante ?
Je conçois bien que cela vous agace, puisque l'un des fleurons de votre projet est justement la parité, celle qui peut vous faire dire que votre dispositif est meilleur que celui de 1999.
La Corse fait donc l'objet d'un traitement différencié. Et l'on comprend que, malgré toute son habileté dans le débat et sa pugnacité, que je salue, la pertinence de l'intervention du sénateur Alfonsi y ait posé vraiment un problème de fond au Gouvernement.
Alors, monsieur le ministre, n'attendez pas. Profitez de cette occasion et adoptez l'amendement de M. Alfonsi, si vous ne souhaitez pas adopter le nôtre. Je ne pense pas que la politique qu'entend mener le Gouvernement soit compromise si un court débat s'instaure au Sénat et à l'Assemblée nationale sur les conclusions d'une commission mixte paritaire.
M. le président. Les quatre amendements suivants sont présentés par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 90 est ainsi libellé :
« I. - Dans le deuxième alinéa du II de cet article, après le mot : "candidat", insérer les mots : "ou la candidate".
« II. - Dans le même alinéa, après les mots : "dernier élu", insérer les mots : "ou la dernière élue".
« III. - Dans le même alinéa, après le mot : "conseiller", insérer les mots : "ou la conseillère". »
L'amendement n° 91 est ainsi libellé :
« I. - Dans la première phrase du troisième alinéa du II de cet article, après le mot : "candidat", insérer les mots : "ou la candidate".
« II. - Dans la même phrase, après le mot : "conseiller", insérer les mots : "ou la conseillère".
« III. - Dans la seconde phrase du troisième alinéa du II de cet article, après les mots : "candidat suivant", insérer les mots : "ou la candidate suivante". »
L'amendement n° 92 est ainsi libellé :
« I. - Dans le quatrième alinéa du II de cet article, après le mot : "représentant", insérer les mots : "ou la représentante".
« II. - Dans le même alinéa, après le mot : "remplaçant", insérer les mots : "ou la remplaçante".
« III. - Dans le même alinéa, après le mot : "président", insérer les mots : "ou la présidente". »
L'amendement n° 93 est ainsi libellé :
« Dans l'avant-dernier alinéa du II de cet article, après le mot : "conseiller", insérer les mots : "ou la conseillère". »
Ces amendements ont déjà été défendus.
Quel est l'avis de la commission sur l'ensemble de ces amendements ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. L'amendement n° 271 étant un amendement de suppression, de même que l'amendement n° 85, j'émets un avis défavorable.
Sur l'amendement n° 87, amendement en quelque sorte sémantique, ainsi que sur les amendements n°s 88, 90, 91, 92 et 93, la commission émet également un avis défavorable.
J'en viens aux amendements n°s 260 rectifié et 364, qui sont similaires.
Je dois dire à M. Alfonsi que la question qu'il se pose sur la constitutionnalité est légitime et que je n'ai pas de réponse à lui apporter en l'espèce. Le Gouvernement nous en a donné une : il estime que le texte est conforme à la Constitution. Je ne suis pas en mesure, compte tenu de la complexité du problème, d'aller plus loin dans ma réponse. Je fais confiance au Gouvernement dans cette affaire, raison pour laquelle je le suivrai en ce qui concerne la Corse.
Dès lors, j'émettrai un avis défavorable sur ces deux amendements, tout en reconnaissant que le problème, bien réel, ne trouvera de solution qu'aux termes d'une loi nouvelle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Défavorable.
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'amendement n° 271.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je remercie M. le rapporteur de sa franchise : le problème est effectivement important.
J'y reviens, car je ne suis pas tout à fait d'accord avec ce qui a été dit tout à l'heure, y compris par notre collègue M. Alfonsi, qui s'interroge : et s'il n'y a pas de statut ? Effectivement, on nous dit depuis le début du débat que l'on verra quand la loi sur le statut sera applicable. C'est ce que l'on appelle renvoyer aux calendes grecques ; cela devrait d'ailleurs faire plaisir à notre rapporteur, lui qui aime bien la tradition ! (Sourires).
Mais enfin, à quel moment doit-on se placer ? En tout cas, pas au moment où se tiendront des élections régionales. Non, on doit se placer au moment où l'on fait la loi, et le Conseil constitutionnel aura à dire si la loi telle qu'elle lui est soumise est constitutionnelle ou si elle ne l'est pas.
Je sais bien que vous avez eu tendance à dire, dans un cas - on y reviendra, je vous l'ai dit -, celui de M. Pasqua : la loi va être votée, donc on peut l'appliquer. Non ! On n'applique la loi qu'à partir du moment où elle est votée et promulguée, et elle ne peut être promulguée qu'après avoir été validée par le Conseil constitutionnel...
M. Jean Chérioux. et publiée !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. ... et publiée, nous sommes d'accord.
Ici, c'est exactement la même chose. C'est au moment où le Conseil constitutionnel sera saisi de la loi sur la Corse qu'il devra dire si elle est ou non conforme à la Constitution.
Par conséquent, vous avez le choix entre deux solutions...
M. Patrice Gélard, rapporteur. Trois !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Non, deux ! Ou bien vous votez les amendements qui vous sont proposés, et c'est la commission mixte paritaire. Evidemment, c'est ouvrir la boîte de Pandore parce que certains en profiteront peut-être pour proposer quelques autres modifications, mais, comme vous y aurez la majorité avec vos amis de l'Assemblée nationale, monsieur le ministre, ce sera tout de même limité. C'est même vous qui pourrez proposer alors quelques amendements. La suite ira très vite, puisque seul le Gouvernement aura la possibilité de déposer des amendements sur le texte qui reviendra devant chacune des deux chambres. C'est une première solution.
Vous en avez une autre, qui consiste à laisser l'opposition saisir le Conseil constitutionnel, et le Conseil constitutionnel censurera. Et voilà ! Cette seconde solution a le mérite de la discrétion : cela se voit moins ! Dernièrement, le Conseil constitutionnel a censuré une disposition de la loi organique relative aux juges de proximité, et beaucoup, même parmi nos collègues, ne le savent pas.
J'ai dit que vous aviez deux solutions, monsieur le ministre : vous n'en avez absolument pas d'autre !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Si, ne déposez pas de recours !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Encore une fois, la conséquence serait non pas uniquement l'abandon du « trois-trois » en Corse, mais l'annulation par le Conseil constitutionnel du « un-un », c'est-à-dire la formule une femme, un homme, une femme, un homme, et inversement, et ce pour toutes les autres régions. Ce serait un grand recul.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Ce n'est pas possible !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est, en tout cas, ma thèse, et je la crois tout à fait solide, monsieur le rapporteur.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Ce n'est pas la première fois qu'elle serait démentie !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. En la matière, j'ai déjà quelques précédents, monsieur le ministre, excusez-moi de vous le dire.
En tout cas, je pense que c'est ainsi que cela se passerait. Nous sommes, on l'a rappelé, à la veille du 8 mars : ce serait vraiment une réussite pour la Journée internationale de la femme !
M. le président. La parole est à M. Nicolas Alfonsi, pour explication de vote.
M. Nicolas Alfonsi. Au fond, mes chers collègues, nous n'épuisons pas notre compétence, et nous le savons. En même temps, il est établi que, avec ou sans réforme institutionnelle, cette « correction » interviendra.
Il faut quand même que vous preniez la mesure du risque encouru pour si peu de choses, si je considère a priori que la bonne foi est équitablement partagée sur les travées de cette assemblée.
Il faut bien prendre la mesure de la psychologie de l'opinion corse. Vous allez payer un prix très élevé le désarroi de ceux qui, demain, liront que, sur le continent, la parité entre les femmes et les hommes se situe à « un-un » et que, en Corse, elle se situe à « trois-trois ». Cela introduit de façon inconsciente dans l'esprit des gens l'idée qu'il y a quand même une différence sensible entre la Corse et le continent, donc qu'il n'y a pas d'égalité.
Par extension, cela reviendrait à accréditer l'idée qu'un statut particulier pourrait comporter de très nombreux droits fondamentaux, qui n'ont pas lieu d'être dans un statut particulier.
La situation est très complexe. Je crois que l'intérêt serait de voter cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Monsieur Alfonsi, sur cette importance question, soyons bien clairs : le Gouvernement travaille actuellement au statut, et les modalités techniques d'organisation de la parité seront fonction de ce statut. Cela étant, M. le ministre de l'intérieur a pris l'engagement clair de régler la question de la parité des femmes en Corse avant les prochaines élections régionales. Par conséquent, la question de l'égalité et des droits fondamentaux, au moment où aura lieu l'élection, sera réglée.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Ce n'est pas à ce moment-là qu'il faut le faire !
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.
Mme Marie-Christine Blandin. S'engager à instituer la parité en Corse dans le cadre d'un statut ou d'un calendrier, c'est remettre à demain ce que l'on peut faire aujourd'hui, mais ce n'est pas incompatible avec notre amendement. Je rappelle notre rédaction, qui est très simple : chaque liste est composée alternativement d'un candidat de chaque sexe. Si vous avez l'intention de le faire, nous, nous l'écrivons !
Aux portes des assemblées, motivées, politiquement engagées pour que cessent les violences, au risque de se faire agresser par certains, les femmes corses méritent bien les mêmes droits que celles du continent et n'ont aucune raison d'attendre que des hommes - car ce sont bien eux qui dialoguent - finalisent leur statut.
Ce que nous avons entendu tout à l'heure dans la bouche de M. Vasselle pour enrayer la parité fait frémir les rares femmes élues qui siègent ici. Je résume son propos : nous compliquerions la tâche des partis ; nous serions, par notre présence, obligée par les textes, un facteur de non-choix et de contrainte pour les électeurs ! L'orateur ne nous a même pas épargné les problèmes liés à notre constitution particulière - et il ne parlait pas des textes qui régissent la République ! (Sourires.)
Dites-vous, messieurs, que nous, les femmes, pouvons voir les choses en miroir. Vous nous dites que les femmes compliquent la tâche des partis, mais les femmes ont bien souvent l'impression que ce sont les partis qui leur compliquent la tâche ! Vous dites également que la présence des femmes sur les listes posent des problèmes. De notre point de vue, ce sont les hommes sur les listes et leur insistance qui nous posent problème ! Enfin, vous affirmez que, lorsqu'il y a des femmes, finalement, les électeurs n'ont pas le choix. Or, précisément, nous trouvons que notre absence des listes - ou notre rareté - fait que les électeurs n'ont vraiment pas le choix !
Pour en revenir aux femmes corses, monsieur le ministre, je souhaite vivement que les promesses que vous avancez soient inscrites dès ce soir dans la loi.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo. Monsieur le ministre, on ne peut imaginer que vous souhaitiez nous voir saisir le Conseil constitutionnel pour qu'il tranche. La preuve en est que vous avez voulu, au fond, qu'il y ait un débat au Parlement et, faute de l'avoir engagé à l'Assemblée nationale, vous nous obligez ici, au Sénat, à consacrer des heures à l'examen de ce texte.
Nous pouvons faire plusieurs suppositions. Peut-être n'avez-vous pas vu ce problème. Peut-être avez-vous oublié la Corse. Peut-être... Notre débat est l'occasion de rectifier cette erreur ou de réparer cet oubli. Pourquoi ne pas remédier aujourd'hui au problème quand nous en avons la possibilité ? Ce serait un signe de santé et de bon fonctionnement de nos institutions.
Par la même occasion, il serait tout aussi simple de féminiser le libellé des fonctions des candidats, surtout à la veille du 8 mars ! Lorsque l'on sait à quels débats la parité a donné lieu, ici, au Sénat - et je ne pense pas seulement à M. Vasselle -, on comprend qu'il s'agit d'un long combat et que nous sommes loin d'être au bout de nos peines. La représentation des femmes, que ce soit au Parlement ou au sein des exécutifs, lorsque les élections ne se font pas à la proportionnelle, montre que seule l'obligation et la loi font avancer les choses. Ce n'est pas dû à l'absence ou au manque de capacités des femmes, comme certains osent encore le dire.
M. Jean Chérioux. Nous n'avons rien dit de tel !
Mme Nicole Borvo. Il est vrai que vous n'êtes pas aussi directs. Mais on laisse entendre que les femmes doivent faire leurs preuves !
M. Jean-Pierre Schosteck. C'est vrai !
M. Roger Karoutchi. Les hommes aussi !
Mme Nicole Borvo. En revanche, on n'a jamais exigé des hommes qu'ils fassent leurs preuves avant d'être candidats. Mais c'est un vieux débat !
M. Roger Karoutchi. Ce ne sont pas les mêmes qualités !
Mme Nicole Borvo. En tout état de cause, il serait assez sain que, en l'absence de débat à l'Assemblée nationale, le Sénat, qui n'est sans soute pas responsable en cette affaire, puisse au moins corriger ce défaut du texte, qui pose problème à la Corse et aux femmes corses. Attendre un hypothétique statut - un statut qui ne sera peut-être pas accepté par la population - pour régler la question de la parité, c'est quand même un peu fort ! Au-delà, cela risque de poser un problème de constitutionnalité, non pas à la Corse, mais au Gouvernement et à ceux qui auront laissé passer ce texte sans le corriger.
M. Gérard Le Cam. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 271.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 85.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 87.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 88.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 364.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe du RDSE.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
125317317159150167
Je mets aux voix l'amendement n° 90.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 91.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 92.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 93.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 9.
(L'article 9 est adopté.)