SEANCE DU 10 DECEMBRE 2001
M. le président.
« Art. 52
bis
. - I. - Après l'article 72 D du code général des impôts,
il est inséré un article 72 D
bis
ainsi rédigé :
«
Art. 72 D
bis. - I. - Les exploitants agricoles soumis à un régime
réel d'imposition et qui ont souscrit une assurance couvrant les dommages aux
cultures ou la mortalité du bétail peuvent, sur option, déduire de leur
bénéfice une somme plafonnée soit à 3 000 EUR, soit à 40 % de ce bénéfice dans
la limite de 12 000 EUR. Ce plafond est majoré de 20 % de la fraction de
bénéfice comprise entre 30 000 EUR et 76 000 EUR. L'option est valable pour
l'exercice au titre duquel elle est pratiquée et pour les quatre exercices
suivants. Elle est irrévocable durant cette période et reconductible.
« Pour les exploitations agricoles à responsabilité limitée qui n'ont pas opté
pour le régime fiscal des sociétés de capitaux et qui ont souscrit une
assurance couvrant les dommages aux cultures ou la mortalité du bétail, la
limite de la déduction visée au premier alinéa est multipliée par le nombre des
associés exploitants sans pouvoir excéder trois fois les limites visées au
premier alinéa.
« Cette déduction s'exerce à la condition que, à la clôture de l'exercice,
l'exploitant ait inscrit à un compte d'affectation ouvert auprès d'un
établissement de crédit une somme provenant des recettes de l'exploitation de
cet exercice au moins égale au montant de la déduction. L'épargne
professionnelle ainsi constituée doit être inscrite à l'actif du bilan de
l'exploitation.
« La déduction est pratiquée après application de l'abattement prévu à
l'article 73 B. Les exploitants agricoles qui pratiquent cette déduction
renoncent définitivement aux dispositions prévues à l'article 72 B pour les
stocks qui auraient pu y ouvrir droit. Ils ne peuvent pratiquer la déduction
prévue à l'article 72 D durant la période couverte par l'option prévue au
premier alinéa.
« Les sommes déposées sur le compte peuvent être utilisées au cours des cinq
exercices qui suivent celui de leur versement pour les emplois prévus au
troisième alinéa du I de l'article 72 D ou en cas d'intervention de l'un des
aléas d'exploitation dont la liste est fixée par décret.
« Lorsque les sommes déposées sur le compte sont utilisées pour les emplois
prévus au troisième alinéa du I de l'article 72 D, les dispositions du
cinquième alinéa du I de cet article sont applicables aux déductions
correspondantes. Lorsque les sommes déposées sur le compte sont utilisées en
cas d'intervention de l'un des aléas d'exploitation mentionnés au cinquième
alinéa, la déduction correspondante est rapportée au résultat de l'exercice au
cours duquel le retrait est intervenu. Les sommes retirées sont réputées
correspondre en priorité à la déduction pratiquée au titre de l'année de leur
dépôt.
« Lorsque les sommes déposées sur le compte ne sont pas utilisées au cours des
cinq exercices qui suivent celui de leur versement, la déduction correspondante
est rapportée aux résultats du cinquième exercice suivant celui au titre duquel
elle a été pratiquée.
« Lorsque des sommes déposées sur le compte sont utilisées à des emplois
autres que ceux définis ci-dessus au cours des cinq exercices qui suivent celui
de leur dépôt, l'ensemble des déductions correspondant aux sommes figurant sur
le compte au jour de cette utilisation est rapporté au résultat de l'exercice
au cours duquel cette utilisation a été effectuée.
« II. - L'apport d'une exploitation individuelle dans les conditions visées au
I de l'article 151
octies
à une société civile agricole par un
exploitant agricole qui a pratiqué la déduction au titre d'un exercice
précédant celui de l'apport n'est pas considéré pour l'application du I comme
une cessation d'activité si la société bénéficiaire de l'apport en remplit les
conditions et s'engage à utiliser les sommes déposées sur le compte au cours
des cinq exercices qui suivent celui au titre duquel la déduction
correspondante a été pratiquée dans les conditions et sous les limites définies
au I.
« III. - Le compte ouvert auprès d'un établissement de crédit est un compte
courant qui retrace exclusivement les opérations définies au I. »
« II. - Dans le 4° de l'article 71 du même code, les mots : "la limite de la
déduction prévue au premier alinéa du I de l'article 72 D est multipliée" sont
remplacés par les mots : "les limites des déductions prévues au premier alinéa
des articles 72 D et 72 D
bis
sont multipliées".
« III. - Les dispositions du I et II s'appliquent pour la détermination des
résultats des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2002. »
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° II-77, présenté par M. Soulage, est ainsi libellé :
« I. - Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le I de
l'article 52
bis
pour l'article 72 D
bis
du code général des
impôts, supprimer les mots : "et qui ont souscrit une assurance couvrant les
dommages aux cultures ou la mortalité du bétail".
« B. - En conséquence, dans le deuxième alinéa dudit texte, supprimer les mots
: "et qui ont souscrit une assurance couvrant les dommages aux cultures ou la
mortalité du bétail". »
L'amendement n° II-96, présenté par M. Marini, au nom de la commission des
finances, est ainsi libellé :
« I. - Dans la première phrase du premier alinéa et dans le deuxième alinéa du
I du texte proposé par le I de l'article 52
bis
pour l'article 72 D
bis
du code général des impôts, après les mots : "qui ont souscrit une
assurance couvrant", insérer les mots : "pour l'ensemble de l'exploitation".
« II. - Dans la première phrase du premier alinéa et dans le deuxième alinéa
du I dudit texte, après les mots : "mortalité du bétail", insérer les mots :
"dans la mesure où ces risques ne sont pas considérés comme non assurables".
»
L'amendement n° II-154, présenté par MM. du Luart, Bourdin, Clouet, Lachenaud,
Trucy et les membres du groupe des Républicains et Indépendants, est ainsi
libellé :
« I. - Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le I de
l'article 52
bis
pour l'article 72 D
bis
du code général des
impôts, après les mots : "les dommages aux cultures", insérer les mots : "de
toute l'exploitation", et remplacer les mots : "la mortalité du bétail" par les
mots : "la mortalité de tout le bétail présent sur l'exploitation dans la
mesure où ces risques sont assurables".
« II. - Dans le deuxième alinéa dudit texte, après les mots : "les dommages
aux cultures", insérer les mots : "de toute l'exploitation" et remplacer les
mots : "la mortalité du bétail" par les mots : "la mortalité de tout le bétail
présent sur l'exploitation dans la mesure où ces risques sont assurables". »
L'amendement n° II-77 n'est pas soutenu.
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n°
II-96.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Mes chers collègues, il convient de rappeler que cet
article 52
bis
nouveau crée une déduction fiscale pour aléas
d'exploitation. Ce régime coexistera avec la déduction pour investissement. Il
aura pour vocation d'encourager les exploitants agricoles à ses constituer une
épargne de précaution en cas d'aléas d'exploitation d'ordre climatique,
sanitaire, économique ou familial.
Pour bénéficier de cette déduction pour aléas, différentes conditions doivent
être remplies, en particulier celle qui est relative à l'assurance de
l'exploitant agricole.
Par cet amendement n° II-96, nous proposons que l'obligation d'assurance
s'applique bien à l'ensemble de l'exploitation agricole. En effet, nous
souhaitons éviter que seule une partie de l'exploitation ne fasse l'objet d'un
contrat d'assurance, ce qui, bien entendu, pourrait se retourner, dans
certaines circonstances, contre les intérêts mêmes des agriculteurs dont il
s'agit et contreviendrait, en tout cas, aux objectifs que se sont fixés les
auteurs de la mesure. Il est donc souhaitable que l'assurance souscrite couvre
bien l'ensemble de l'exploitation agricole.
En outre, il convient de préciser que les risques ainsi visés doivent être
considérés comme assurables.
M. le président.
La parole est à M. Trucy, pour défendre l'amendement n° II-154.
M. François Trucy.
Cet amendement va dans le même sens que celui de la commission. Les
modifications proposées visent en effet à préciser que les assurances au titre
des dommages aux cultures, qui concernent également l'arboriculture et les
vignes, ainsi que la mortalité du bétail, souscrites pour bénéficier de la
déduction pour aléas, doivent couvrir l'ensemble des risques concernés de
l'exploitation et non pas une partie de ceux-ci.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° II-154 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission des finances est tout à fait favorable
à cet amendement, car il est très proche de son amendement n° II-96. Je suppose
que nos collègues accepteront de voter l'amendement de la commission des
finances et de retirer le leur.
M. le président.
Monsieur Trucy, l'amendement n° II-154 est-il maintenu ?
M. François Trucy.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° II-154 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° II-96 ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Je souhaite d'abord apporter quelques précisions pour
tenter de répondre aux préoccupations légitimes exprimées par le rapporteur
général.
En premier lieu, j'indiquerai que tous les risques, quels qu'ils soient, sont
assurables, à condition, bien évidemment, d'y mettre le prix. On ne peut donc
pas considérer comme juridiquement exact le fait que certains risques puissent
être considérés comme non assurables. Bien entendu, il n'est pas question de
demander aux exploitants de souscrire des contrats d'assurances dont le montant
des primes serait prohibitif.
L'exposé des motifs de l'amendement qui a été adopté par l'Assemblée nationale
précisait déjà que l'exploitant agricole devrait souscrire une assurance
couvrant les dommages aux cultures ou la mortalité du bétail pour la totalité
de son exploitation, mais dans la mesure, bien sûr, où ces risques sont
raisonnablement assurables.
Aujourd'hui, l'offre des compagnies d'assurances n'est pas suffisamment
développée. L'un des objets de cette nouvelle mesure fiscale est précisément de
rendre possible le développement de l'assurance des exploitants agricoles
contre les risques de grande ampleur.
Pour que tout soit clair et qu'aucune ambiguïté ne subsiste, je m'engage à ce
que l'instruction administrative qui commentera ce nouveau dispositif précise
que l'obligation d'assurance ne sera exigée que lorsque l'exploitant est en
mesure de satisfaire, dans des conditions normales, à cette obligation.
En second lieu, vous m'avez interrogée sur l'obligation d'assurer l'ensemble
de l'exploitation agricole. Il me semble que cette question est déjà réglée. En
effet, dès lors que la loi prévoit une obligation d'assurance, il est bien
évident que cette obligation s'applique à la totalité de l'exploitation
agricole.
Je crois donc que nous sommes d'accord sur le fond et que ces précisions
pourront aisément être apportées par l'instruction administrative.
En revanche, je crois qu'il ne faut rien ajouter à la loi, d'autant qu'avec la
rédaction proposée on risquerait, je le crains, d'aboutir à l'inverse de ce qui
est recherché ici, soit à une mesure qui serait défavorable aux agriculteurs.
En effet, tout risque étant, par nature, assurable, l'agriculteur se verrait
refuser le bénéfice de la déduction pour aléas, même lorsqu'il n'existe pas
d'offre d'assurance sur le marché.
Par conséquent, je souhaite le retrait de cet amendement n° II-96.
M. le président.
Monsieur le rapporteur général, l'amendement est-il maintenu ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je remercie Mme le secrétaire d'Etat des précisions
qu'elle a apportées, qui vont dans le sens des préocupations de la
commission.
Nous avons donc compris que l'instruction administrative permettrait de
répondre de manière technique et détaillée aux problèmes soulevés. Dans ces
conditions, je retire l'amendement n° II-96.
M. le président.
L'amendement n° II-96 est retiré.
L'amendement n° II-153, présenté par MM. du Luart, Bourdin, Clouet, Lachenaud,
Trucy et les membres du groupe des Républicains et Indépendants, est ainsi
libellé :
« I. - Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le I de
l'article 52
bis
pour l'article 72 D
bis
du code général des
impôts, après le mot : "déduire", insérer les mots : "chaque année".
« II. - Dans la même phrase, remplacer les mots : "une somme plafonnée soit à
3 000 euros, soit à 40 % de ce bénéfice dans la limite de 12 000 euros" par les
mots : "une somme plafonnée soit à 6 000 euros, soit à 40 % de ce bénéfice dans
la limite de 18 000 euros". »
La parole est à M. Trucy.
M. François Trucy.
Cet amendement a un double objet.
Premièrement, il vise à préciser que le mécanisme à bien un caractère
annuel.
Deuxièmement, il tend à majorer le plafond de la somme que peuvent déduire de
leur revenu les exploitants agricoles qui ont opté pour le mécanisme de la
déduction pour aléas.
Si cette mesure était adoptée, l'effet du relèvement de plafond apporterait
aux exploitants une épargne de précaution supplémentaire et leur permettrait,
par voie de conséquence, une meilleure capacité de résistance aux sinistres,
notamment d'origine climatique.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Nos collègues voudraient préciser que la DPA, la
déduction pour aléas, s'applique chaque année. D'autre part, ils voudraient
relever les plafonds de la déduction.
Nous manquons naturellement d'éléments d'appréciation pour formuler une
opinion à ce sujet. Nous avons noté que les organisations professionnelles
agricoles se sont déclarées, sauf erreur de ma part, satisfaites par le
dispositif de la DPA tel qu'il a été mis en place, et la commission prend acte
de ces positions.
Permettez-moi cependant, mes chers collègues, puisque nous avons abordé la
fiscalité agricole, de profiter de l'occasion pour faire un commentaire de
portée plus générale qui vaudra pour d'assez nombreux amendements à venir.
La fiscalité agricole est un domaine très précis, très concret et très
spécialisé. Pour en traiter, il faut connaître les entreprises agricoles qui,
elles-mêmes, sont très diversifiées, et avoir une pratique de leur gestion et
de leur comptabilité. Car la fiscalité n'est qu'un reflet de la comptabilité et
de la gestion, plus particulièrement encore pour ce qui est de
l'agriculture.
Certes, rien n'est indéfiniment gravé dans le marbre en ces matières, et la
fiscalité agricole, comme tout, doit évoluer, en l'occurrence pour tenir compte
des réalités des marchés et de la situation économique du moment. Cependant,
mes chers collègues, pour faire une bonne fiscalité agricole, nous devons
préparer suffisamment à l'avance les positions que nous pouvons être appelés à
prendre les uns et les autres. Les hasards, notamment les hasards du
calendrier, font que, bien souvent, dans cet hémicycle, nous sommes amenés à
examiner, à l'occasion de la discussion du projet de loi de finances, voire du
collectif budgétaire, beaucoup de propositions « hypertechniques », «
hyperspécialisées » de fiscalité agricole. Nous aurions grand avantage,
collectivement, à examiner tout cela en amont et dans le cadre d'une approche
un peu plus globale des enjeux de l'agriculture française d'aujourd'hui, pris
sous l'angle économique, l'angle social, l'angle de l'aménagement du
territoire, aussi.
M. Paul Blanc.
Tout à fait !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Souvent, nous restons quelque peu incertains face à
des propositions d'amendement très sympathiques, certes, mais tellement
ciblées, spécifiques et techniques que la commission ne saurait les examiner de
manière suffisamment détaillée en un samedi et un dimanche. Nous préférerions,
dans certains cas, que nos réponses soient beaucoup plus argumentées, beaucoup
plus précises et beaucoup plus positives.
A cet égard, mes chers collègues, il serait certainement très utile et
constructif qu'à l'avenir les sénateurs intéressés par les questions de
fiscalité agricole prennent contact avec la commission des finances pour
avancer en cours d'année leurs idées et leurs projets, et il serait
intéressant, utile, voire nécessaire, que les organisations professionnelles
fassent de même.
Ainsi, nous ne serions pas contraints de traiter ces questions dans le corset
d'un délai constitutionnel strict qui ne nous permet pas d'émettre des avis
suffisamment motivés.
Je me permets donc de lancer un appel à mes collègues, ainsi qu'aux
responsables des organisations professionnelles agricoles. Si la commission des
finances a pour mission d'étudier leurs problèmes et leurs préoccupations,
comme ceux des autres professions, d'ailleurs, encore faut-il que l'on veuille
bien venir la trouver à temps pour qu'elle sache de quoi il retourne et que
l'on ne nous impose pas de voter ceci ou cela en fonction des demandes de la
profession concernée. Ce n'est pas une bonne façon de procéder ; ce n'est pas
efficace ; cela ne peut pas nous permettre de faire du bon travail et cela ne
peut pas assurer un sort favorable aux amendements qui procèdent d'une telle
méthode.
Mes chers collègues, nous avons fait de notre mieux en ce qui concerne les
amendements traitant de fiscalité agricole qui vont à présent être examinés,
mais, j'en ai bien conscience, cela n'est pas très satisfaisant. J'espère que,
les années prochaines, la commission des finances pourra travailler dans de
meilleures conditions dans ce domaine, ce qui vaut d'ailleurs aussi bien pour
les articles que nous avons vus lors de l'examen de la première partie de la
loi de finances que pour ceux dont nous entreprenons actuellement l'examen en
deuxième partie.
Pour revenir à l'amendement n° II-153, excellemment présenté par M. François
Trucy, j'entendrai le Gouvernement avec intérêt, mais, en l'état, compte tenu
de son coût et de l'articulation un peu complexe des régimes respectifs de la
DPI et de la DPA, je ne pense pas qu'il puisse être adopté. Il faudrait
examiner ce dispositif de manière plus approfondie.
Dans l'immédiat, sachant ce que le Gouvernement propose et ce à quoi les
organisations professionnelles agricoles ont, semble-t-il, souscrit, je crois
qu'il est préférable de retirer cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le sénateur, je vous le confirme, la
déduction est bien annuelle et sera donc possible à chaque clôture
d'exercice.
Sur le relèvement du plafond je vous renverrai, pour ma part, aux observations
de méthode qui ont été faites par M. le rapporteur général.
Sur le fond, je ne vois pas de raison d'aller au-delà, s'agissant d'un
dispositif qui, je crois, a été salué par l'ensemble des organisations
professionnelles agricoles.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-153.
M. Paul Blanc.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Paul Blanc.
M. Paul Blanc.
J'ai écouté avec beaucoup d'attention les propos de notre rapporteur général
concernant la fiscalité agricole. Je partage totalement son point de vue.
Chaque année, en effet, nous nous trouvons confrontés à des situations de crise
que nous devons régler dans l'urgence. Dans mon département, je connais
particulièrement les problèmes causés par la mévente de la salade, de la tomate
ou de la pêche, en raison desquels, chaque année ou presque, les agriculteurs
manifestent et les préfets ont droit à l'épandage de produits les plus divers,
avec tous les inconvénients que cela entraîne, et pour tout le monde.
La solution consisterait sans doute à lisser la fiscalité sur deux ou trois
ans, de façon à donner aux agriculteurs la possibilité de faire des provisions
en année faste pour compenser les années de mévente. On éviterait ainsi,
peut-être, les débordements que nous connaissons chaque année ou presque à
l'occasion de telle ou telle crise, l'été, de la pêche, l'hiver, de la salade !
(Sourires.)
Je suis donc tout à fait réceptif aux propos de notre rapporteur général et je
souhaiterais qu'un débat puisse bel et bien s'engager sur la fiscalité
agricole.
M. Yann Gaillard.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Gaillard.
M. Yann Gaillard.
M. le rapporteur général a ouvert une sorte d'examen de conscience collectif ;
il ne va sans doute pas durer bien longtemps, mais je profite de cette minute
de vérité dont l'emprise plane sur nous.
Comme vous tous, mes chers collègues, je reçois chaque année des brassées
d'amendements « agricoles » que nous envoient les organisations
professionnelles.
L'année passée, ou bien la précédente, je me souviens en avoir signé certains
que j'ai d'ailleurs défendus sans aucun succès. A chaque fois, le ministre
présent répondait qu'il fallait attendre le rapport de Mme Béatrice Marre sur
la fiscalité de l'agriculture.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
En effet !
M. Yann Gaillard.
Le dépôt de ce rapport aurait pu être, effectivement, l'occasion d'un examen
général du type de celui qu'appelle de ses voeux M. Philippe Marini.
Il est vrai que l'on voit ressurgir d'année en année les mêmes idées, les
stocks à rotation lente pour la viticulture, par exemple. On est un peu
embarrassé et on a le sentiment de faire un assez mauvais travail.
Madame le secrétaire d'Etat, que doit-on retirer du rapport Marre ? Pourquoi
n'a-t-on pas eu un grand débat sur la fiscalité agricole à l'occasion du dépôt
de ce rapport ?
Sur l'amendement dont il s'agit, je n'ai rien à ajouter aux propos de M. le
rapporteur général, et je suivrai la commission, dont je comprends le sentiment
d'aller, dans cette affaire, un peu à l'aveuglette.
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Comme toujours en matière de fiscalité, il y a les
tenants du grand soir et les tenants de la réforme méthodique, patiente et
progressive. Certes, je constate comme vous qu'il n'y a pas eu de débat général
autour d'un texte de loi uniquement consacré à la fiscalité agricole, mais je
dois rappeler, car cela vous a visiblement échappé, que, depuis le dépôt du
rapport de Mme Marre, ce sont plus de dix mesures qui ont été mises en oeuvre
dans le cadre de la loi de finances pour 2001.
Donc, le chantier de la fiscalité agricole progresse. L'article que nous
venons d'examiner en est l'illustration, avec cette déduction pour aléas qui
nous fait franchir un grand pas.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
On a évoqué le nom d'une brillante consoeur, députée
de l'Oise, qui a certainement fait un excellent travail de clarification, même
si je ne suis pas d'accord avec toutes ses propositions.
Madame le secrétaire d'Etat, très sincèrement, si ce travail avait abouti à un
document global permettant de mettre en perspective l'agriculture, son
évolution économique et sa fiscalité, le bénéfice aurait été considérable pour
l'agriculture, et pour le Gouvernement auquel vous appartenez, et, peut-être,
pour Mme Marre.
Politiquement, je me réjouis que vous n'ayez pas élaboré un tel document.
Mesure par mesure, mesurette par mesurette, nous avons effectivement parsemé
les textes de toutes sortes de détails plus ou moins importants qui n'ont pas
été valorisés comme ils auraient pu l'être dans une approche beaucoup plus
globale, dont vous aviez les moyens.
Il n'est plus temps maintenant de le regretter. Mais, très sincèrement, nous
ne pouvons que faire ensemble, chacun avec ses défauts et ses imperfections,
dans la suite des propos tenus par nos collègues MM. Paul Blanc et Yann
Gaillard, l'autocritique de la manière dont, collectivement, nous traitons ces
questions de fiscalité agricole.
Elles sont très complexes et peu compréhensibles, et nous pouvons avoir
parfois le sentiment d'approuver des dispositifs pour la simple raison qu'ils
nous sont proposés par des gens sympathiques ou dont nous nous sentons proches.
Pour autant, comprenons-nous toujours réellement ce dont il s'agit ?
Savons-nous remettre les choses en perspective ? Nous pouvons nous poser de
sérieuses questions, d'un côté de l'hémicycle comme de l'autre.
M. le président.
Monsieur Trucy, l'amendement n° II-153 est-il maintenu ?
M. François Trucy.
Le groupe des Républicains et Indépendants est très satisfait d'avoir été en
quelque sorte le catalyseur de cette réflexion. Faut-il rappeler que le
catalyseur est, dans une réaction chimique, un corps certes indispensable, mais
qui sort parfaitement intact de la réaction qu'il provoque ?
(Sourires.)
Je vous remercie de vos propos, madame la secrétaire d'Etat, car ils
répondent à la première question sur l'annualité ; quant à la seconde question,
la qualité de l'exposé de M. le rapporteur général et les réactions de certains
de nos collègues incitent le groupe des Républicains et Indépendants à retirer
cet amendement.
M. le président.
L'amendement n° II-153 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° II-110, présenté par MM. Adnot et Sido, est ainsi libellé :
« I. - Dans le quatrième alinéa du I du texte proposé par le I de l'article 52
bis
pour l'article 72 D
bis
du code général des impôts, supprimer
la dernière phrase.
« II. - Dans le cinquième alinéa du I dudit texte, supprimer les mots : "pour
les emplois prévus au troisième alinéa du I de l'article 72 D ou".
« III. - Dans le sixième alinéa du I dudit texte, supprimer la première
phrase. »
L'amendement n° II-167, présenté par MM. César, Leclerc, Joyandet, Cazalet,
Del Picchia, Duvernois, Schosteck, Gérard, Pierre André, Gournac, Calmejane et
Braye, est ainsi libellé :
« I. - Supprimer la dernière phrase du quatrième alinéa du I du texte proposé
par le I de l'article 52
bis
pour l'article 72 D
bis
du code
général des impôts.
« II. - Dans la première phrase du sixième alinéa dudit texte, supprimer les
mots : "pour les emplois prévus au troisième alinéa du I de l'article 72 D
ou".
« III. - Supprimer la première phrase du septième alinéa dudit texte.
« IV. - Pour compenser la perte de recettes résultant des I à III ci-dessus,
compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Les pertes résultant pour l'Etat de la modification de la déduction
pour aléas sont compensées à due concurrence par la création de taxes
additionnelles aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
L'amendement n° II-110 n'est pas soutenu.
La parole est à M. Del Picchia, pour défendre l'amendement n° II-167.
M. Robert-Denis Del Picchia.
Je suis très gêné, après tout ce qui vient d'être dit, de présenter un
amendement qui va dans un sens comparable !
(Sourires.)
Je le défendrai cependant, car je m'y étais engagé auprès de M. César.
La déduction pour aléas qui est proposée ne pourra pas être mise en oeuvre,
car certains éléments techniques contenus dans le dispositif laissent à penser
que l'option ne sera levée que par un nombre très réduit d'exploitants
agricoles, lesquels risquent, à terme, d'être pénalisés.
En effet, le dispositif prévoit pour les personnes levant l'option
l'impossibilité de pratiquer dans le même temps des déductions pour
investissement. Or cette « fusion » des deux mécanismes au sein de la DPA ne se
justifie pas.
Cet amendement vise donc, en clair, à restreindre le champ d'application de la
DPA à la seule couverture d'un risque d'exploitation.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il serait utile de connaître l'avis du
Gouvernement.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Défavorable.
M. le président.
Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il est difficile, comme je l'indiquais tout à
l'heure, d'expertiser correctement des mesures aussi intéressantes et aussi
techniques que celles-ci, et nous ne sommes réellement pas en mesure de porter
un jugement suffisamment étayé sur cette proposition. Nous serons susceptibles
de le faire, bien entendu, lors de l'examen d'un texte ultérieur.
Dans l'immédiat, la commission ne disposant pas de plus d'éléments pour aller
dans le sens des signataires de l'amendement que pour aller dans celui de Mme
le secrétaire d'Etat, qui a formulé un avis défavorable, elle se voit
contrainte de demander aux auteurs de bien vouloir retirer l'amendement.
M. le président.
Monsieur Del Picchia, l'amendement est-il maintenu ?
M. Robert-Denis Del Picchia.
Nous le retirons.
M. le président.
L'amendement n° II-167 est retiré.
Je mets aux voix l'article 52
bis
.
(L'article 52
bis
est adopté.)
Articles additionnels après l'article 52 bis