Séance du 1er décembre 1999
M. le président. Par amendement n° I-162 rectifié, MM. Soucaret et Bimbenet proposent d'insérer, après l'article 34, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le premier alinéa de l'article L. 2334-7-2 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque les sommes restant dues par les communes aux départements, en application de l'article 93 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 précitée, correspondent à la totalité du montant du contingent du au titre de 1999, la diminution ne s'applique pas en 2000. Les dispositions du présent alinéa ne sont pas prises en compte pour l'application du premier alinéa de l'article L. 3334-7-1. »
« II. - La dotation globale de fonctionnement est majorée à due concurrence.
« III. - La perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions des I et II ci-dessus est compensée par un relèvement, à due concurrence, des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Soucaret.
M. Raymond Soucaret. A l'occasion de l'examen de l'amendement n° I-70 de M. Diligent, M. le secrétaire d'Etat a évoqué les bienfaits de la loi du 27 juillet 1999 portant sur la création d'une couverture maladie universelle. Or celle-ci a laissé des oubliés sur le bord de la route.
Cet amendement a donc pour objet de remédier à cette situation.
L'article 13 de la loi portant sur la création de la couverture maladie universelle n'a pas pris en compte le cas particulier des départements dans lesquels les communes acquittaient leurs contingents d'aide sociale avec une année entière de décalage.
Dans ces départements, les communes supporteront en 2000 à la fois une baisse de la DGF d'un montant égal au contingent dû au titre de 1999 et l'obligation de rembourser leur dette afférente à 1999.
Il est nécessaire que les départements puissent recouvrer leur dette, mais la charge imposée aux communes est trop lourde. Par conséquent, mon amendement vise à ne pas diminuer en 2000 la DGF correspondant à la dette des communes se trouvant dans cette situation et à pallier cet oubli à l'occasion du vote de ce projet de loi de finances.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission des finances a étudié avec beaucoup d'attention les préoccupations de notre collègue M. Soucaret.
Il est vrai que la mise en oeuvre de la loi instaurant la couverture maladie universelle peut entraîner des effets pervers et d'ailleurs complexes dans les relations financières entre départements et communes. J'ai compris que, dans certains départements, selon les pratiques en vigueur, certaines communes pouvaient se trouver dans des situations extrêmement difficiles, voire dans des impasses financières. C'est bien ce qu'il s'agit de corriger ici, sur l'initiative de notre collègue M. Soucaret.
Après avoir examiné cette question et considérant que cette approche est tout à fait légitime, la commission a toutefois noté qu'il pouvait en résulter un coût immédiat important pour les finances publiques. Aussi, en vue de réduire ce coût, je vais suggérer à notre collègue de bien vouloir accepter une rectification.
A la troisième ligne du troisième alinéa de l'article additionnel, il conviendrait de remplacer le membre de phrase : « la diminution ne s'applique pas en 2000 » par le membre de phrase : « la diminution est réduite des trois quarts en 2000. »
Je pense qu'ainsi on rendrait l'amendement plus supportable en termes de finances publiques, tout en lui permettant d'atteindre son objectif.
Si notre collègue accepte cette rectification, la commission sera favorable à l'amendement.
M. le président. Monsieur Soucaret, acceptez-vous la modification proposée par la commission des finances ?
M. Raymond Soucaret. Lorsque l'on parle de diminution des trois quarts de la dette en 2000, est-ce que cela signifie que les communes se verront attribuer les trois quarts de ce qu'elles ont à rembourser aux départements ?
Pour éviter toute confusion, prenons un exemple concret : des communes doivent un million de francs, dites-moi, monsieur le rapporteur général, combien elles verseront au département.
M. le président. Monsieur le rapporteur général, pouvez-vous rassurer M. Soucaret ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je rassure M. Soucaret : nous nous sommes efforcés de trouver les modalités les meilleures possibles et respectant la loi récemment votée sur la création de la CMU.
Cette loi a fait l'objet de négociations relativement complexes avec l'association des départements de France. Il ne faut pas porter atteinte aux résultats de cette négociation ; mais, dans le même temps, il faut trouver des modalités qui puissent vous permettre de gérer sur le plan départemental un problème que vous nous avez décrit à juste titre, monsieur Soucaret, comme difficile et conflictuel.
Je crois donc que notre proposition traduit notre bonne volonté et constitue un compromis raisonnable qui montrera que nous avons vraiment essayé de seconder l'intérêt que vous portez à la bonne santé financière des collectivités de votre département.
M. le président. Monsieur Soucaret, après ces explications acceptez-vous la proposition de M. le rapporteur général ?
M. Raymond Soucaret. J'accepte la modification proposée par M. le rapporteur général.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° I-162 rectifié bis , présenté par MM. Soucaret et Bimbenet, et tendant, après l'article 34, à insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le premier alinéa de l'article L. 2334-7-2 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque les sommes restant dues par les communes aux départements, en application de l'article 93 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 précitée, correspondent à la totalité du montant du contingent dû au titre de 1999, la diminution est réduite des trois quarts en 2000. Les dispositions du présent alinéa ne sont pas prises en compte pour l'application du premier alinéa de l'article L. 3334-7-1.
« II. - La dotation globale de fonctionnement est majorée à due concurrence.
« III. - La perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions des I et II ci-dessus est compensée par un relèvement, à due concurrence, des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement.
Celui-ci est certes amélioré par la rectification apportée par M. le rapporteur général : nous passons ainsi d'un coût de 1,7 milliard de francs à la charge de l'Etat, à 1,2 milliard de francs toujours à la charge de l'Etat ... !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Vous avez la cagnotte !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Il est vrai que l'on constate des décalages budgétaires dans quelques départements. Ces décalages pourraient conduire à ce qu'en 2000 des communes subissent tout à la fois un abattement de leur DGF et le règlement des contingents d'aide sociale. C'est à cela que vous vous attaquez, au titre de 1999 et des années précédentes. Mais l'Etat n'a pas à être l'arbitre des différences d'appréciation éventuelles entre les communes et les départements.
Ces situations doivent pouvoir être réglées, monsieur le sénateur, en recourant au dispositif conventionnel d'entente entre départements et communes, dispositif prévu par l'article 13-X de la loi de 1999, qui permet d'étaler la charge des communes concernées.
Votre amendement reviendrait à faire payer en 2000 à l'Etat, compte tenu de la majoration de la DGF que vous proposez, des accords intervenus localement entre communes et départements pour décaler le paiement des contingents d'aide sociale. Ce n'est pas le travail de l'Etat de se substituer ainsi à la liberté des départements et des communes de conventionner leurs relations. Ce serait peu cohérent avec le principe d'autonomie des collectivités locales, et encore moins avec le principe de responsabilité des collectivités locales.
Toutes ces raisons emportent, je crois, la conviction. Ce sont des raisons de bon sens, et je demande au Sénat de repousser l'amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-162 rectifié bis.
M. Daniel Hoeffel. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Hoeffel.
M. Daniel Hoeffel. Il y a effectivement un nombre relativement important de départements où le problème soulevé par cet amendement se pose.
Si les communes devaient régler le contingent d'aide sociale dans l'année, la charge qui pèserait sur elles serait importante. En conséquence, on ne peut que recommander la conclusion d'un accord entre les associations départementales des maires et le conseil général pour convenir d'un étalement sur un nombre raisonnable d'années.
C'est parfaitement réalisable. Je l'ai pratiqué et je ne puis qu'inciter les départements qui ne l'ont pas encore fait à s'engager dans cette voie conventionnelle. La libre administration des collectivités locales, c'est aussi cela ! (Très bien ! sur diverses travées.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-162 rectifié bis, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 34.
Par amendement n° I-206, M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 34, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - La dernière phrase du premier alinéa de l'article L. 134-1 du code de la sécurité sociale est abrogée.
« II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant du I ci-dessus, l'impôt sur les sociétés est relevé à due concurrence. »
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Nous souhaitons que le problème global de la solidarité entre les régimes spéciaux soit réglé à la base et nous considérons qu'il ne revient pas aux contribuables locaux de financer les régimes spéciaux, lesquels relèvent à l'évidence de la solidarité nationale.
Nous notons également que le Gouvernement de la majorité plurielle a fait des propositions pour rééquilibrer la CNRACL. Le taux de la surcompensation va être réduit de 38 % à 30 % sur deux ans, alors que l'Etat augmentera les ressources de la caisse de 1 milliard de francs en 2000 et de 2 milliards de francs en 2001.
Ces mesures sont à la fois satisfaisantes, car elles constituent un mieux, et - excusez-moi, monsieur le secrétaire d'Etat ! - insuffisantes, car elles ne permettent pas, pour autant, la stagnation de la cotisation employeur. Effectivement, celle-ci va augmenter de 0,5 %, ce qui équivaut à 500 millions de francs. Cette augmentation reste à nos yeux aussi inadmissible pour les collectivités locales, même si elle est moindre que si la surcompensation était restée au même niveau.
Je ne pouvais manquer de rappeler qu'entre 1985 et 1997 la CNRACL a contribué pour 83,5 milliards de francs à l'équilibre des régimes spéciaux déficitaires.
Soucieux de ne pas proposer que des solutions d'attente, les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen souhaitent mettre fin au mécanisme de surcompensation.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission souhaite que le Gouvernement s'exprime, donne les garanties nécessaires et nous dise s'il entend enfin prendre des mesures structurelles en faveur de la CNRACL. C'est un sujet qui préoccupe tous les élus locaux.
M. Roland du Luart. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. M. le Premier ministre, lors du récent congrès de l'Association des maires de France, s'est engagé très clairement sur un effort de l'Etat de 3 milliards de francs au total sur les années 2000 et 2001 et - au nom du principe d'égalité de l'effort en faveur de la surcompensation -, il a demandé aux collectivités locales, après concertation avec celles-ci et leurs associations, un effort équivalent à 3 milliards de francs sur 2000 et 2001.
L'effort de l'Etat et des collectivités locales est donc équilibré.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-206.
M. Gérard Miquel. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Miquel.
M. Gérard Miquel. Cet amendement de nos collègues du groupe communiste républicain et citoyen est intéressant, car il nous permet de débattre de la CNRACL. Il me semble cependant qu'il s'insérerait mieux dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Les difficultés financières de la CNRACL sont croissantes, du fait de la surcompensation et de la dégradation naturelle du ratio démographique. Le rapport entre les cotisants et les retraités devrait en effet passer de 3,3 cotisants par retraité en 1995, à 1,4 en 2015. Le déficit prévu pour 2000 est de 2 milliards de francs et de 6 milliards de francs cumulés à la fin de 2001.
Deux mesures ont cependant été prises : le taux de cotisation des employeurs sera augmenté de 0,5 point en 2000 et en 2001 ; il sera ainsi porté de 25,1 % à 26,1 %. Cela représente un abondement de 3 milliards de francs, dont 550 millions de francs l'an prochain pour les collectivités locales. Mais, en contrepartie, le Gouvernement a décidé de baisser le taux de surcompensation de 38 % à 34 % en 2000 et de 34 % à 30 % en 2001.
Cette demande, formulée depuis plusieurs années par le groupe socialiste, a été entendue, et nous ne pouvons qu'apprécier cette répartition des efforts et cette prise en compte des équilibres financiers des collectivités. Tel n'avait pas été le cas voilà cinq ans. Le dispositif paraît ainsi équilibré et la suppression totale de la surcompensation semble par conséquent prématurée.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix de l'amendement n° I-206, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 34 bis