Séance du 28 avril 1999
BASES JURIDIQUES
POUR L'ACQUIS DE SCHENGEN
Adoption d'une résolution d'une commission
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion de la résolution (n° 299, 1998-1999),
adoptée par la commission des lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel, du règlement et d'administration générale en application de
l'article 73
bis
, alinéa 8, du règlement, sur le projet de décision du
Conseil déterminant les bases juridiques pour l'acquis de Schengen qui a été
révisé à la suite de la réunion du groupe « Acquis de Schengen » des 14 et 15
mai (n° E-1219). [Rapport n° 290 (1998-1999).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Patrick Courtois,
rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Monsieur le
président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons
aujourd'hui la résolution adoptée par la commission des lois le 7 avril
dernier, sur l'initiative de M. Paul Masson, présentée en application de
l'article 73
bis
du règlement du Sénat, sur le projet de décision du
Conseil déterminant les bases juridiques pour l'acquis de Schengen.
En premier lieu, il convient de souligner que ce projet de décision du Conseil
de l'Union européenne est le premier projet d'acte de l'Union européenne
transmis au Parlement en application de l'article 88-4 de la Constitution dans
sa rédaction résultant de la loi constitutionnelle du 25 janvier 1999. La
présente résolution est donc la première à intervenir au Parlement dans un
domaine qui ne relève pas du pilier communautaire - premier pilier - de
l'Union.
Cette résolution souligne deux problèmes liés à l'intégration de l'acquis de
Schengen dans le cadre de l'Union européenne : celui de la gestion future du
système d'information Schengen, le SIS, et celui de l'avenir de la clause de
sauvegarde prévue à l'article 2, paragraphe 2, de la convention d'application
des accords de Schengen signée le 19 juin 1990.
Le 14 juin 1985, la France, l'Allemagne et les pays du Benelux décidaient, à
Schengen, de supprimer progressivement les contrôles effectués au passage de
leurs frontières communes.
M. Emmanuel Hamel.
Erreur grave !
M. Jean-Patrick Courtois,
rapporteur.
La convention d'application de cet accord prévoit diverses
mesures visant à compenser la perte de sécurité due à la suppression de ces
contrôles, s'analysant principalement comme des mesures de coopération
policière entre les Etats membres.
Dans le cadre du traité de Maastricht signé le 7 février 1992,...
M. Emmanuel Hamel.
Erreur funeste !
M. Jean-Patrick Courtois,
rapporteur.
... l'Union européenne est également appelée à mener une
politique communautaire de libre circulation à l'intérieur de ses frontières et
à intervenir dans un cadre intergouvernemental dans le domaine de la justice et
des affaires intérieures.
Des risques de chevauchements des compétences sont ainsi apparus, générant de
véritables incohérences juridiques. M. Paul Masson, dans son rapport sur la
convention d'application de l'accord de Schengen remis au Premier ministre en
janvier 1996, constatait, à titre d'exemple, que la liste des pays tiers soumis
à l'obligation de visa était différente dans le cadre de l'Union européenne et
dans celui de l'accord de Schengen. En conséquence, il préconisait, dans un
souci de simplification, l'intégration de Schengen dans la partie
intergouvernementale de l'Union européenne.
Selon des modalités différentes, le traité d'Amsterdam prévoit cette
intégration puisqu'il comporte un protocole annexé qui prévoit l'intégration de
l'acquis de Schengen dans le cadre de l'Union européenne.
Le transfert de cet acquis est réalisé par la détermination, pour chaque
disposition, d'une base juridique appartenant soit à la partie communautaire -
premier pilier - soit à la partie intergouvernementale - troisième pilier - du
traité sur l'Union européenne.
La base juridique applicable pour chacune des dispositions constituant
l'acquis de Schengen est déterminée par le Conseil statuant à l'unanimité. Si
l'unanimité n'est pas dégagée, les dispositions sont considérées comme des
actes relevant du domaine intergouvernemental.
Ce protocole d'intégration entrera en vigueur en même temps que le traité
d'Amsterdam, le 1er mai prochain. A cette date, le Conseil de l'Union
européenne se substituera au Comité exécutif de Schengen.
Dans un premier temps, l'intégration dans l'Union européenne des dispositions
de Schengen et leur ventilation dans le premier ou le troisième pilier n'aura
pas de conséquences directes, le contenu même des dispositions n'étant pas
affecté par ces opérations.
En revanche, les règles applicables pour la modification de ces dispositions
varieront en fonction des bases juridiques retenues et l'intégration conduira à
soumettre l'acquis de Schengen au contrôle de la Cour de justice des
Communautés européennes.
Les dispositions rattachées au troisième pilier le seront sur des articles du
titre VI du traité sur l'Union européenne relatif à la coopération policière et
judiciaire en matière pénale. Les décisions en ces matières seront prises à
l'unanimité sur l'initiative de tout Etat membre ou de la Commission. Le
Parlement européen sera consulté sur les décisions-cadres, les décisions et les
conventions prévues à l'article 34.
Les dispositions rattachées au premier pilier le seront pour la presque
totalité à des articles du nouveau titre IV du traité instituant la Communauté
européenne, créé par le traité d'Amsterdam et relatif aux visas, à l'asile, à
l'immigration et aux autres politiques liées à la libre circulation des
personnes.
En ces matières, les décisions sont prises en application de l'article 67 du
traité sur la Communauté européenne, selon une procédure dérogatoire au droit
communautaire.
Pendant une période de cinq ans après l'entrée en vigueur du traité
d'Amsterdam, le Conseil statue à l'unanimité, après consultation du Parlement
européen, la Commission partageant l'initiative des propositions avec les Etats
membres.
A l'issue de cette période de cinq ans, la Commission acquiert le monopole de
l'initiave. Le Conseil peut, à l'unanimité, décider de passer, dans tout ou
partie des matières concernées, à une procédure impliquant la prise de décision
à la majorité qualifiée et la codécision avec le Parlement européen.
Durant les cinq premières années, le rattachement au titre IV du traité sur la
Communauté européenne - premier pilier - ou au titre VI du traité sur l'Union
européenne - troisième pilier - n'aura donc pas d'incidence sur la procédure de
décision, sauf pour les dispositions concernant les visas.
Le système d'information Schengen est l'élément clé de la coopération
instituée entre les Etats membres par la convention d'application des accords
de Schengen. Il vise la mise en commun, sous forme de base informatisée, de
données policières relatives à des personnes recherchées et à des véhicules ou
objets : armes à feu, documents d'identité, billets de banque, etc. Il comporte
un système central, situé à Strasbourg, dont la France assure la gestion pour
l'ensemble de ses partenaires - C.SIS - et, dans chaque pays, une partie
nationale - N.SIS - assurant la consultation de la copie nationale du fichier
Schengen ainsi qu'une unité de support - SIRENE - répondant aux besoins
d'informations complémentaires pour mener une procédure.
Après un début difficile, la base, devenue opérationnelle en 1995, est
désormais alimentée par les dix pays participant à l'accord. Elle fonctionne de
manière satisfaisante et a démontré qu'elle était un outil performant à l'usage
des services de police, de gendarmerie et de douanes, ainsi que des services
chargés de la délivrance des visas. Elle comprend près de 8 millions de
références, la France, l'Allemagne et l'Italie en ayant chacune intégré plus de
2 millions. En 1997, la France a découvert, sur son territoire, 9 029
signalements intégrés au SIS par nos partenaires, tandis que 3 143 signalements
français étaient découverts par eux.
Je tiens à souligner toutefois que le SIS devra à court terme subir
d'importantes adaptations pour assurer le passage du système à l'an 2000 et
intégrer les cinq Etats nordiques, le passage à une nouvelle génération du
système, le SIS II, étant envisagé à l'échéance de 2005.
S'agissant de la détermination des bases juridiques du SIS, compte tenu de la
difficulté de la négociation, trois options étaient envisagées voilà encore
quelques jours.
Une première option, défendue par la Commission, la Grande-Bretagne et
l'Irlande, consiste à donner une double base juridique, dans le premier et le
troisième pilier, aux dispositions concernant la gestion, l'accès et la
protection des données et une base du premier ou du troisième pilier aux
dispositions relatives aux signalements en fonction de la nature de ceux-ci.
Une deuxième option, défendue par la France et sept autres pays - la Suède,
l'Italie, l'Espagne, la Grèce, le Danemark, le Portugal et l'Autriche -
consiste à intégrer l'ensemble du dispositif dans le troisième pilier au titre
de la coopération policière et judiciaire en matière pénale.
La troisième option, défendue pour le moment par l'Allemagne, la Belgique, les
Pays-Bas, le Luxembourg et la Finlande, consiste à intégrer les dispositions
concernant la gestion du SIS dans le troisième pilier, à donner une double base
aux dispositions concernant la protection des données et à inclure les
dispositions relatives aux signalements et à l'accès soit dans le premier, soit
dans le troisième pilier.
Rappelons que le Gouvernement français a opté dès l'origine pour le
rattachement de l'intégralité du SIS au troisième pilier. Il est maintenant
soutenu par sept autres pays, comme je l'ai dit voilà un instant. La réponse de
M. le ministre de l'intérieur à une question de notre collègue M. Paul Masson
sur le sujet, publiée au
Journal officiel
du 25 mars 1999, confirme
nettement cette position.
Il est parfaitement logique de rattacher le SIS au troisième pilier, dans la
mesure où il a été conçu avant tout comme un outil de coopération policière et
parce que cette coopération relève elle-même du troisième pilier. De plus, le
système a été organisé pour être intégré étroitement aux systèmes nationaux. Il
serait donc extrêmement difficile de le faire fonctionner selon des règles
communautaires. Une scission du dispositif entre deux ensembles de règles
différentes ou l'attribution d'une double base introduirait une incertitude et
une complexité qui ne pourrait que lui être néfaste.
Il doit donc être considéré, comme l'estime M. Paul Masson, que la France doit
rester ferme sur sa position et n'accepter aucun compromis tendant à remettre
en cause la gestion d'un système qui a prouvé son efficacité et doit, à court
terme, faire l'objet d'importantes adaptations. Cette fermeté se justifie
d'autant plus que, si l'unanimité n'est pas dégagée, ce qui est maintenant le
cas, nous le savons, la position retenue par défaut sera celle d'un maintien de
l'ensemble du dispositif dans le troisième pilier.
En ce qui concerne la clause de sauvegarde de l'article 2, paragraphe 2, de la
convention d'application des accords de Schengen permettant à un Etat de
rétablir librement les contrôles à ses frontières intérieures, elle reste un
outil indispensable pour assurer l'ordre public et la sécurité nationale.
D'ailleurs, la France l'utilise depuis le 1er juillet 1995 aux frontières
terrestres avec la Belgique et le Luxembourg en raison des problèmes de trafic
de drogue en provenance des Pays-Bas.
Elle peut également faciliter la lutte contre l'immigration clandestine en
permettant de prononcer des non-admissions des étrangers aux frontières, plutôt
que de procéder à des procédures plus lourdes de réadmission. Elle peut aussi
être un moyen de pression politique sur des partenaires pour les engager à
prendre des mesures compensatoires à la libre circulation.
S'agissant de la détermination de ses bases juridiques, l'ensemble des Etats
membres semblent avoir accepté son rattachement au premier pilier, considérant
qu'il est préférable de soumettre l'exception au principe de la libre
circulation aux mêmes règles que le principe lui-même.
Toutefois, l'intégration de la clause de sauvegarde dans le cadre de l'Union
européenne ne doit pas aboutir à priver les Etats de la responsabilité de sa
mise en oeuvre. La Commission européenne pourrait être tentée de proposer
l'adoption d'une procédure limitant l'autonomie des Etats dans la mise en
oeuvre de la clause.
La commission des lois souhaite donc que le Gouvernement s'oppose à toute
modification de la clause qui irait dans ce sens, ce qui, tant que les
décisions sont prises à l'unanimité - au moins pendant les cinq premières
années suivant l'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam - garantirait le
maintien de la responsabilité exclusive des Etats en la matière.
Il faut être néanmoins conscient du fait que l'autonomie des Etats pourrait
être limitée par l'intervention de la Cour de justice. En dépit des
dispositions de l'article 68, paragraphe 2, énonçant que « la Cour de justice
n'est pas compétente pour statuer sur les mesures ou décisions prises en
application de l'article 62, point 1, portant sur le maintien de l'ordre public
et la sauvegarde de la sécurité intérieure », la Cour, qui a une conception
extensive de ses compétences, pourrait être conduite à vérifier la réalité de
la menace pour l'ordre public et la sécurité intérieure des Etats membres. La
Cour pourraît ainsi être saisie sur le fondement d'une atteinte à la liberté de
circulation, soit sur saisine de la Commission européenne ou d'un Etat membre,
soit sur renvoi préjudiciel d'une juridiction nationale de dernier ressort
saisie par un particulier.
La commission des lois partage donc les inquiétudes de M. Paul Masson
concernant l'avenir du système SIS et de la clause de sauvegarde. Nous
souhaitons que le système SIS continue, en l'état, à relever entièrement d'une
gestion intergouvernementale.
S'agissant de la clause de sauvegarde, nous considérons que sa mise en oeuvre
doit continuer à relever de la responsabilité exclusive de chaque Etat.
M. Emmanuel Hamel.
Très bien !
M. Jean-Patrick Courtois,
rapporteur.
La commission des lois vous propose en conséquence, mes chers
collègues, d'adopter la résolution qu'elle vous soumet.
Par ailleurs, il semble qu'une réunion du conseil « affaires générales » se
soit tenue lundi dernier. Nous souhaitons connaître les décisions qui ont été
prises concernant la ventilation de l'acquis de Schengen, décisions que M. le
ministre nous indiquera certainement.
Dans le cas où le transfert de la clause de sauvegarde dans le domaine
communautaire aurait été décidé, il conviendrait naturellement de modifier la
résolution pour y supprimer la mention du caractère éventuel de ce
transfert.
Pour le cas où le SIS aurait été laissé par défaut dans le troisième pilier,
la résolution garderait sa valeur, des négociations pouvant se poursuivre après
l'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam.
La commission des lois vous remercie par avance, monsieur le ministre, de bien
vouloir préciser au Sénat les décisions prises en la matière. Elle invite la
Haute Assemblée à adopter cette résolution.
(Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. le président de la délégation du Sénat pour l'Union
européenne.
M. Michel Barnier,
président de la délégation du Sénat pour l'Union européenne.
Monsieur le
président, monsieur le ministre, mes chers collègues, même si ce débat est
tardif, le projet de décision du Conseil sur lequel nous débattons est
extrêmement important, comme l'a souligné à l'instant M. le rapporteur.
Ce débat est tardif, en effet, puisque la négociation de ce projet de
décision, qui a été engagée dès la signature du traité d'Amsterdam, au début du
mois d'octobre 1997, s'achève, qu'un accord politique sur le texte a déjà été
constaté et que la décision sera adoptée par un prochain Conseil dès l'entrée
en vigueur du traité d'Amsterdam. Nous ne pouvons donc pas espérer, mes chers
collègues, que la résolution que nous allons, j'espère, adopter aujourd'hui
puisse réellement influer sur le projet tel qu'il a été négocié depuis un an et
demi.
Nous ne sommes d'ailleurs en rien responsables de ce retard, car il nous était
tout à fait impossible du point de vue juridique d'adopter plus tôt une
résolution. En effet, jusqu'à la toute récente révision constitutionnelle
portant sur l'article 88-4 de la Constitution, les assemblées parlementaires ne
pouvaient pas se prononcer sur cette matière pourtant si sensible de la
sécurité intérieure, même si des progrès - reconnaissons-le - avaient été déjà
réalisés dans l'information de nos assemblées, en particulier à l'issue de la
mission qu'avait effectuée notre collègue Paul Masson, à la demande du Premier
ministre de l'époque, M. Alain Juppé.
Il n'en reste pas moins que le Gouvernement connaissait bien le point de vue
du Sénat puisque M. Paul Masson avait rendu publics, au nom de la délégation
pour l'Union européenne, deux rapports sur le transfert de l'acquis de Schengen
dans l'Union européenne : le premier, quelques jours après le début de la
négociation, en novembre 1997, et le second, au mois de décembre dernier.
Je veux croire, monsieur le ministre, que les appels à la prudence de notre
collègue Paul Masson ont été entendus des négociateurs français et que le
projet de décision du Conseil dont nous débattons aujourd'hui sur la base de la
proposition de résolution retenue par la commission des lois a pris en compte
les préoccupations que nous avions alors exprimées.
Quoique tardif, notre débat d'aujourd'hui demeure - je le dis après vous,
monsieur le rapporteur - important.
Il est important parce qu'il porte sur la matière de la sécurité intérieure,
dont la communautarisation partielle par le traité d'Amsterdam conduira très
certainement notre assemblée à se pencher très souvent, à l'avenir, sur ces
difficiles questions qui étaient traitées jusqu'à présent à l'échelon purement
intergouvernemental et qui concernent notamment les visas, l'asile,
l'immigration, le droit de séjour des réfugiés et la surveillance des
frontières intérieures et exérieures.
Constituant en quelque sorte une première, notre débat d'aujourd'hui témoigne,
s'il en était besoin, que le Sénat exercera sa vigilance sur ce sujet pendant
les cinq ans qui viennent, au cours desquels se mettra en place la nouvelle
politique communautaire en matière de sécurité. Il s'agit bien d'une période
intermédiaire pendant laquelle chaque Etat disposera, je le rappelle, d'un
droit de veto, jusqu'au moment où le conseil des ministres aura décidé à
l'unanimité que la question de la sécurité des citoyens sera gérée à la
majorité qualifiée.
Notre rôle consiste dès maintenant, alors même que le traité d'Amsterdam
n'entrera en vigueur que dans quelques jours, à démontrer au Gouvernement que
nous sommes et que nous resterons vigilants sur cette question et que nous
serons prêts à l'aider, à le conseiller et à appuyer ses positions lorsque
celles-ci nous paraîtront aller dans le bon sens.
C'est ainsi que nous pouvons - que nous devons, me semble-t-il - approuver la
position défendue par la France voilà quelques jours au sein du COREPER, le
comité des représentants permanents, à propos de l'intégration du secrétariat
Schengen au sein du secrétariat général du conseil de l'Union. La France a eu
raison, à mon avis, de se prononcer contre l'intégration sans concours, et en
complète contradiction avec les règles de la fonction publique européenne, des
soixante-deux salariés du secrétariat Schengen, qui avaient d'ailleurs déjà
été, à l'époque, intégrés dans cette dernière structure sans passer le moindre
concours. Je serais heureux, monsieur le ministre, que vous nous disiez si le
Gouvernement a l'intention de porter cette affaire devant la Cour de justice. A
l'évidence, l'Union européenne n'a rien à gagner à de telles pratiques au
moment où les citoyens européens appellent à une gestion rigoureuse.
La proposition de résolution insiste sur deux questions essentielles : la
gestion future du système d'information Schengen, le SIS, et l'avenir de la
clause de sauvegarde.
Concernant la clause de sauvegarde, je ne reviendrai pas sur l'analyse très
pertinente de M. le rapporteur. Je considère comme lui qu'il ne faudrait pas
que son intégration dans le cadre de l'Union aboutisse à priver les Etats de la
responsabilité de sa mise en oeuvre. Je suppose, monsieur le ministre, que le
Gouvernement en est conscient et qu'il s'opposera éventuellement à toute
modification, notamment de procédure, qui conduirait à limiter l'autonomie des
Etats dans son usage, tout au moins pendant la période de cinq ans après la
mise en application du traité d'Amsterdam. J'aimerais que vous nous confirmiez
que tel est bien l'état d'esprit du Gouvernement.
J'insisterai davantage ici sur le point central de la proposition de
résolution qui porte sur les conditions de gestion future du système
d'information Schengen, dont tout le monde sait maintenant le rôle qu'il joue
dans l'efficacité des polices en Europe.
Dois-je rappeler que, de 1996 à 1997, on a constaté une augmentation très
notable des signalements intégrés dans le SIS, c'est-à-dire des renseignements
nominatifs ou des données liées à la sécurité concernant des personnes
recherchées par les polices ? Leur nombre est ainsi passé de 4,5 millions à
plus de 5,5 millions. L'augmentation du nombre global de réponses positives est
tout aussi importante tant à l'intérieur de chaque pays Schengen - plus de 21
000 en 1997 - qu'à l'extérieur de chaque pays Schengen - environ 15 000 en
1997.
La gestion du SIS est un point sensible, et c'est à juste titre que le
Gouvernement français a toujours estimé que cette gestion devait rester de la
seule responsabilité des Etats et ne devait être transférée ni à la Commission
européenne ni à une agence qui aurait été créée par elle. La sensibilité du
fichier Schengen, qui est placé, pour sa partie centrale, à Strasbourg, sous la
responsabilité de la France, est d'ailleurs suffisante pour que notre vigilance
soit grande. Faut-il rappeler que l'arrestation d'un employé en Belgique,
auteur présumé de communication de données fournies par les Etats à des
malfaiteurs néerlandais, a été à l'origine d'un accroissement de la prise de
conscience du danger qui guette constamment les organisations disposant de
données sensibles et a eu pour conséquence « un regain de vigilance et
d'activité des Etats dans le domaine de la protection des données » ?
C'est ce souci de vigilance qui sous-tend la proposition de résolution que
notre collègue Paul Masson avait déposée avec le soutien unanime de la
délégation pour l'Union européenne.
La question est d'autant plus sensible et délicate que les Etats ont décidé,
le 19 décembre 1996, de lancer une étude technique destinée à définir
l'architecture et les caractéristiques techniques d'un système d'information
Schengen de deuxième génération, baptisé « SIS II ». Ce projet, qui en est
actuellement au stade de l'étude préalable, est destiné à pouvoir prendre en
charge de nouveaux Etats membres - en particulier, comme vous l'avez dit,
monsieur le rapporteur, les pays nordiques - et sa mise en service
n'interviendra au plus tôt qu'en 2003 ou 2004.
Mais, d'ici à cette date, l'actuel système devra évoluer, ne serait-ce que
pour la question du passage à l'an 2000. Dans un souci d'efficacité, il est
évident que la gestion et l'évolution du système informatique doivent relever
d'une seule et même autorité responsable. Ce sont les Etats qui ont créé cet
outil dont personne ne conteste aujourd'hui l'efficacité. Ce sont les Etats, et
donc le Conseil, qui doivent à l'avenir en garder la maîtrise pour la raison
qui tient au choix du traité d'Amsterdam lui-même, lequel a tracé la limite de
la communautarisation au titre de la sécurité intérieure.
Or, l'article 30 du traité sur l'Union européenne mentionne clairement que «
la collecte, le stockage, le traitement, l'analyse et l'échange d'informations,
y compris d'informations détenues par des services répressifs » relèvent bien
de l'action en commun des Etats. J'ajoute que cette position me semble
confortée d'un point de vue pratique par le fait que le budget du SIS
continuera à relever directement des Etats.
Si, comme nous le souhaitons, les dispositions régissant le SIS sont
rattachées au pilier intergouvernemental du traité, il est possible que la
Commission saisisse alors la Cour de justice, dans l'espoir que celle-ci juge
que la partie du SIS relative à l'immigration, en particulier les signalements,
doit être transférée au domaine communautaire du traité qui régit les questions
relatives à l'asile. Pour ma part, je n'imagine pas, mes chers collègues, que
la Cour de justice puisse se prononcer en ce sens, car le traité que j'ai
quelque raison de bien connaître a fait le choix de laisser dans les mains des
Etats la coopération policière.
Mes chers collègues, au moment où le conflit du Kosovo pose avec une acuité
redoublée le problème de la responsabilité des Etats face au problème des
réfugiés, l'heure doit être à la recherche de l'efficacité et non aux querelles
internes. Je forme donc très sincèrement le voeu que ce grand chapitre de la
sécurité des citoyens ouvert par le traité d'Amsterdam soit l'occasion d'un
travail en bonne intelligence entre la Commission, d'une part, et les Etats
membres, d'autre part.
L'intérêt de tous est que la sécurité soit maintenue dans cet esprit de bonne
intelligence pour nos compatriotes, pour les citoyens de l'Europe. L'intérêt
supérieur de nos nations est de vivre en paix et de pouvoir s'organiser face à
toutes les menaces qui pèsent au quotidien sur nos populations.
L'intérêt de tous est que l'Europe soit ressentie comme une grande cause.
C'est pourquoi, au nom de la délégation du Sénat pour l'Union européenne, je
vous invite, mes chers collègues, à adopter la proposition de résolution qui
nous est présentée aujourd'hui par la commission des lois.
(Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Unioncentriste.)
M. le président.
La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la
résolution dont nous débattons aujourd'hui est l'occasion pour nous de faire le
point sur l'accord intervenu, ce lundi, au Conseil Affaires générales sur des
questions importantes que soulève l'intégration de l'acquis de Schengen dans le
cadre juridique de l'Union européenne.
Cette intégration figure parmi les engagements pris par les Etats lors de la
signature du traité d'Amsterdam ; elle nécessite des discussions d'une
complexité technique manifeste et qui renvoient à des décisions qui peuvent
parfois être lourdes de conséquences politiques et sociales.
En effet, depuis plus d'une décennie, deux ordres juridiques parallèles
cohabitent, visant tous deux à construire un espace de libre circulation entre
partenaires européens. Cette architecture devenait, à l'évidence, une source de
confusions pour les citoyens et de difficultés accrues pour les Etats.
Ainsi, alors qu'étaient signés, en 1985 et en 1990, les actes fondamentaux du
système de Schengen, qui allaient recueillir au fil des années les adhésions de
l'ensemble des partenaires européens, à l'exception notable du Royaume-Uni et
de l'Irlande, la Communauté européenne, fortement incitée par le Parlement
européen, prenait l'engagement, lors du sommet de Fontainebleau, de favoriser
la liberté de circulation des personnes.
Le traité de Maastricht consacrait, par la suite, un nouveau domaine de
coopération en créant un troisième pilier de compétences consacré à la justice
et aux affaires intérieures.
Il devenait donc urgent d'assurer une plus grande cohérence et une meilleure
lisibilité des politiques lancées en vue de garantir l'exercice d'une liberté
essentielle au développement d'une citoyenneté européenne.
Le traité d'Amsterdam constitue une étape importante et marque l'aboutissement
des démarches entreprises depuis plus de dix ans ; il fixe comme objectif la
création d'un espace de liberté, de sécurité et de justice.
Comme le rappelle M. Masson, cette entreprise a été particulièrement complexe,
car elle supposait avant tout que les Etats arrêtent ce qu'ils entendaient
transférer dans le cadre juridique de l'Union européenne. Cette question est
désormais réglée.
Demeure la question délicate de la ventilation des différentes mesures de
Schengen dans le corps normatif communautaire, sous deux titres : le nouveau
titre IV, portant sur les visas, l'asile, l'immigration et les autres
politiques liées à la liberté de circulation des personnes, ainsi que la
coopération judiciaire en matière civile, et le titre VI, relatif à la
coopération policière et judiciaire en matière pénale.
Les Etats doivent ici s'accorder sur leur volonté d'aller plus loin - ou non -
dans la mise en commun de certaines de leurs compétences, dont certaines
relèvent de la souveraineté nationale.
Cette question éminemment politique se traduit par l'attribution de nouvelles
bases juridiques qui s'inscrivent dans le premier ou le troisième pilier.
Dans le premier figurent - celà a déjà été dit - les politiques pour
lesquelles le degré de communautarisation est le plus élevé. Il intègre,
rappelons-le, les domaines des visas, de l'asile, de l'immigration et des
autres politiques liées à la libre circulation des personnes.
La coopération policière et judiciaire en matière pénale demeure régie par des
procédures intergouvernementales et est rattachée au troisième pilier.
Or, cette répartition est particulièrement symbolique des tiraillements que
peut susciter la nouvelle configuration institutionnelle de l'Union européenne,
car les procédures qui s'appliqueront aux nouvelles initiatives relatives à
Schengen consacrent, selon qu'il s'agit du premier ou du troisième pilier, un
partage des pouvoirs différent entre le Conseil, la Commission et le Parlement
européen. Cette répartition pourra évoluer à l'issue d'une période transitoire
de cinq ans.
Si le pouvoir d'initiative est partagé entre le Conseil et la Commission dans
le premier et le troisième pilier, la Commission détiendra dans cinq ans le
monopole de l'initiative dans le cadre du premier pilier.
La prise de décision au sein du Conseil demeure subordonnée à l'unanimité
pendant cinq ans, mais le Conseil pourra décider, toujours à l'unanimité,
d'adopter certaines mesures du premier pilier à la majorité qualifiée.
Enfin, le Parlement européen serait mieux associé à la prise de décision.
Alors qu'il n'était qu'informé, il sera consulté sur les différents projets de
règlement ou de décision du Conseil. A l'issue de cette période transitoire, ce
dernier pourra décider à l'unanimité d'en faire un véritable colégislateur dans
le cadre de la procédure de codécision.
Cette intervention du Parlement européen contribue donc à combler le déficit
démocratique qui caractérisait, par essence, le système Schengen. En tant que
socialistes, nous ne pouvons que nous en féliciter.
Enfin, l'intégration de l'acquis de Schengen dans le traité d'Amsterdam permet
d'associer la Cour de justice des Communautés européennes à la mise en oeuvre
des droits et devoirs qui résultent des réglementations édictées en matière de
franchissement des frontières intérieures et extérieures.
Nous pensons que cette nouvelle intervention est le corollaire indispensable
de l'affirmation de ce nouvel espace de liberté, de sécurité, de justice que
nous avons placé au centre des priorités de l'Union européenne.
La proposition de résolution dont nous débattons ce soir met l'accent sur deux
questions sensibles et révélatrices des difficultés que soulève la ventilation
des acquis de Schengen.
Quelles seront les nouvelles modalités de gestion du système d'information
Schengen ?
Quelles seront les conditions d'utilisation de la clause de sauvegarde ?
S'agissant du réseau informatisé d'échange de données, il avait été envisagé
de le doter d'une double base juridique relevant à la fois du premier et du
troisième pilier puisque certains outils qu'il met en place peuvent être
utilisés à des fins à la fois policières et administratives par les autorités
consulaires, par exemple. Je pense ici au fichier des étrangers signalés aux
fins de non-admission sur le territoire d'un Etat membre.
Or, sur le plan politique, il est difficile d'envisager que les actions des
forces de police et de gendarmerie soient encadrées par une réglementation
communautaire, même s'il est important de développer des synergies entre les
différents services européens, au travers d'EUROPOL, par exemple.
Sur le plan juridique, cette architecture impliquerait pour un même dispositif
une double procédure de décision au Conseil, à la majorité qualifiée et à
l'unanimité, et supposerait que le Parlement européen soit associé dans le
cadre d'une procédure de consultation et de codécision.
Pour ces raisons, le Gouvernement français a défendu l'intégration du SIS dans
le troisième pilier. A l'issue des négociations, c'est cette option qui semble
avoir été retenue.
J'en viens maintenant à la question du recours à la clause de sauvegarde. Elle
est d'autant plus importante que toutes les politiques relatives à la libre
circulation sont désormais intégrées dans le premier pilier.
La convention de 1990 énonce qu'un Etat peut décider « que durant une période
limitée des contrôles frontaliers soient effectués lorsque l'ordre public ou la
sécurité nationale l'exige ».
La France en fait un usage qu'il est difficile de qualifier de temporaire
puisque cette clause fonde les contrôles qui s'opèrent, par exemple, dans les
trains en provenance des Pays-Bas et de la Belgique depuis maintenant plus de
trois ans.
Dans quelle mesure le rattachement de cette clause au premier ou au troisième
pilier peut-il conditionner le régime juridique plus ou moins restrictif de son
fonctionnement ?
Nous pensons que la clause de sauvegarde, énoncée au paragraphe 2 de l'article
2 de la convention de 1990, doit connaître le même régime juridique que le
principe d'absence de contrôle au franchissement des frontières intérieures
auquel elle déroge, tel qu'il est reconnu à l'article 62 du traité des
Communautés européennes.
Cette solution permet d'assurer une cohérence dans la mise en oeuvre de la
liberté de circulation, qui, malgré des proclamations solennelles, rencontre
encore des difficultés dans sa concrétisation.
D'ailleurs, n'est-ce pas cette préoccupation de cohérence qui a inspiré la
volonté de la France de ne pas accepter la logique de la double base juridique
pour les mesures relevant du SIS ?
Nous sommes conscients que le rattachement de la clause de sauvegarde au
premier pilier peut susciter des interrogations quant à la marge de manoeuvre
que pourront préserver les Etats dans l'usage de cette dérogation.
Quelles en seront les incidences au regard de leurs rapports avec les
institutions communautaires, en particulier la Cour de justice des Communautés
européennes ?
Les précisions apportées par les dispositions des traités encadrent clairement
les compétences de la Cour. En effet, le recours préjudiciel que peuvent
introduire le Conseil, un Etat, la Commission ou une juridiction nationale de
dernier ressort reste limité et conditionné : le traité des Communautés
européennes ainsi que le protocole intégrant l'acquis de Schengen excluent que
la Cour se prononce sur des décisions relatives au maintien de l'ordre public
ou à la sauvegarde de la sécurité intérieure. La Cour ne peut, dès lors, juger
ni de l'opportunité ni de la proportionnalité des mesures prises par les Etats
dans le cadre de la clause de sauvegarde.
Nous estimons donc que cette dérogation ne sera pas remise en cause par son
intégration dans le premier pilier.
Cette restriction est d'ailleurs critiquée par certains juristes, qui estiment
qu'elle crée « une zone d'impunité ou d'immunité juridictionnelle ».
Les appréhensions que suscitent les évolutions du processus décisionnel dans
l'Union, l'extension de la compétence de la Cour de justice, illustrent
parfaitement les ambiguïtés qu'a engendrées l'édification du système de
Schengen.
Celui-ci fut conçu à l'origine comme un espace d'émancipation, destiné à
assurer la libre circulation de ses ressortissants. Or, en pratique, les
mesures compensatoires permettant de garantir la sécurité du territoire et des
populations sont devenues tout aussi prépondérantes.
Implicitement, Schengen s'est construit autour de l'idée que l'ouverture des
frontières intérieures induisait un déficit en termes de sécurité. Les retards
enregistrés dans la mise en oeuvre de la liberté de circulation des personnes,
le contraste avec les avancées réalisées en termes de liberté de circulation
des biens et des capitaux, sont à cet égard éloquents.
En signant le traité d'Amsterdam, les Etats européens font de la construction
d'un espace de liberté, de sécurité et de justice un des grands chantiers de
l'Europe du xxie siècle.
L'Europe est donc bien le cadre pertinent pour appréhender les nouvelles
dimensions de politiques jusqu'ici cantonnées à la seule sphère nationale.
Ainsi, la gestion des flux migratoires est un défi que doivent relever
l'ensemble des Etats membres qui sont des territoires attractifs pour des
ressortissants de pays en voie de développement ou d'Europe centrale et
orientale.
S'il n'est pas question d'aligner nos politiques nationales sur un modèle
commun tant nos histoires, nos situations politiques, nos modèles d'intégration
sont différents, leur coordination est toutefois indispensable.
Elle l'est d'autant plus que l'Union européenne reconnaît des droits aux
ressortissants de pays tiers séjournant régulièrement sur le territoire
européen.
Des étapes ont déjà été franchies dans la définition d'une politique de visas
ou de demandes d'asile. Reste à entrer dans la phase opérationnelle.
De nouvelles coopérations policières et judiciaires doivent permettre
d'améliorer la lutte contre une criminalité qui, depuis longtemps déjà, se joue
de la matérialité des frontières et sait parfaitement exploiter les limites de
la territorialité des compétences policières et judiciaires.
D'autres affaires, plus personnelles, comme les conflits opposant des parents
divorcés de nationalités différentes, mériteraient une simplification des
procédures et une meilleure coordination entre magistrats afin de ne pas
aggraver des conflits suffisamment douloureux.
J'en terminerai en rappelant que la liberté de circulation des personnes est
la pierre angulaire de l'édification d'une citoyenneté européenne qui, peu à
peu, s'esquisse.
Les principes sont acquis au travers, notamment, du droit de séjour reconnu au
profit des étudiants européens et de leurs conjoints ou de la liberté
d'établissement. Un pas décisif a été accompli avec la reconnaissance du droit
de vote des ressortissants communautaires aux élections européennes et aux
élections locales.
Mais des obstacles subsistent, à commencer par le septicisme que peut inspirer
une telle mobilité dans un environnement social dominé par la précarité de
l'emploi.
Cette « révolution » repose pourtant sur la conviction désormais ancrée, en
particulier chez les jeunes générations, que nos sociétés se conçoivent autant
dans l'interdépendance que dans la souveraineté, et qu'elles évoluent et
s'enrichissent non pas en se repliant sur les fondements de leur identité
nationale mais à la faveur des liens tissés entre elles.
(Applaudissements
sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Machet.
M. Jacques Machet.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'un des
résultats majeurs du traité d'Amsterdam consiste à avoir intégré les questions
relatives à la libre circulation des personnes dans le traité communautaire.
L'objectif de l'Union européenne est désormais de constituer un « espace de
liberté, de sécurité et de justice ».
Le traité a d'abord inséré au coeur « des politiques de la communauté » du
traité de Rome, un titre IV relatif aux « visas, asile, immigration et autres
politiques liées à la libre circulation des personnes ». C'est une véritable
révolution, dans la mesure où les Etats ont toujours considéré que ces
questions relevaient de leur propre souveraineté, un traitement
intergouvernemental préservant cette dernière.
Cependant, il a fallu régler au préalable le sort de l'action entreprise dans
le cadre des accords de Schengen, rendue inutile en vertu de cette
redistribution des responsabilités au sein du traité sur l'Union. Cette
clarification passait inévitablement par l'intégration des mesures prises au
titre des accords de Schengen. C'est ce qu'il a été convenu d'appeler «
l'acquis Schengen ».
De multiples difficultés, en effet, auraient résulté de la survie de ces
mécanismes concernant les mêmes Etats et le même objectif, celui du
franchissement libre des frontières intérieures et du franchissement coordonné
des frontières extérieures de l'Union. La solution de l'intégration était donc
la plus rationnelle, sur le plan politique comme sur le plan technique.
Toutefois, toutes les difficultés ne sont pas réglées, loin s'en faut, et
l'une des plus complexes tient dans la ventilation qui doit être opérée, au
sein de cet acquis, entre les questions relevant du premier pilier,
c'est-à-dire le pilier communautaire, et le troisième pilier, soit le pilier
intergouvernemental.
La gestion future du système d'information Schengen, le SIS, est le premier
point envisagé par la résolution. Ce système fonctionne aujourd'hui de façon
très satisfaisante et il apparaît comme la pierre angulaire des accords de
Schengen. La France souhaite qu'il continue à relever d'une gestion entre
Etats. Mais il est légitime de s'interroger sur le fondement de cette position.
S'il est vrai qu'il fut conçu comme un outil de coopération, est-il pour autant
raisonnable de le maintenir en dehors de la Communauté ?
Même si nous comprenons la position du Gouvernement, il nous semble que ce
n'est pas une bonne méthode car elle risque d'aboutir à une Europe à
intégration variable, ce dont, bien sûr, nous ne voulons pas.
La communautarisation du SIS nous paraît donc préférable, car l'incorporation
de l'acquis Schengen apparaît bien comme la preuve du caractère attractif du
modèle communautaire. Elle donne raison à ceux qui présentaient Schengen comme
un laboratoire préparant la voie à une démarche plus intégrée. C'est - faut-il
le rappeler ? - un résultat majeur du traité d'Amsterdam.
Le second point envisagé par la résolution est consacré à l'avenir de la
clause de sauvegarde. Elle trouve actuellement sa place dans le traité révisé
et sera probablement intégrée dans le pilier communautaire.
La réaffirmation de la compétence exclusive des Etats membres pour ce qui
relève « du maintien de l'ordre public et la sauvegarde de la sécurité
intérieure » est effectivement reproduite dans le premier paragraphe de
l'article 64 du traité sur l'Union européenne.
De plus, à l'inscription explicite de la clause de sauvegarde dans le traité
s'ajoute une réserve apportée à la compétence préjudicielle de la Cour de
justice, par l'article 68, paragraphe 2. Cette dernière ne pourra statuer sur
les mesures ou décisions communautaires portant sur la clause d'ordre public et
de sécurité intérieure. Autrement dit, le contrôle juridictionnel de la clause
de sauvegarde de l'article 2 de la convention d'application des accords de
Schengen était, à l'évidence, un enjeu important, et l'exclusion explicite de
l'intervention de la Cour de justice à son sujet est un acquis sur lequel
personne ne souhaite revenir.
L'autonomie des Etats dans la mise en oeuvre de cette clause ne nous paraît
donc pas pouvoir être entravée par la cour.
Enfin, si la démarche d'intégration est un mouvement capital et irréversible,
largement approuvé par le Parlement, il nous semble que les modalités de sa
mise en oeuvre concernent le pouvoir exécutif, la marge d'appréciation et
d'influence des parlementaires à ce niveau étant très limitée.
Estimant que le système d'information Schengen devrait plutôt relever du
pilier communautaire et que la clause de sauvegarde est garantie par le traité
lui-même, traité que le Sénat a ratifié il y a peu, le groupe de l'Union
centriste, fidèle à sa conception de l'Europe, est conduit à s'abstenir sur le
vote de cette résolution.
M. le président.
La parole est à M. Duffour.
M. Michel Duffour.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant toute
chose, je tiens à souligner notre satisfaction - mais une satisfaction mitigée
parce que ce débat est tout de même tardif - de la mise en oeuvre jusqu'à son
terme, c'est-à-dire la séance publique, de la procédure de l'article 88-4 de la
Constitution qui permet au Parlement de voter des résolutions demandant au
Gouvernement d'adopter telle ou telle attitude au sujet d'une proposition
d'acte communautaire.
Il faut toutefois rappeler que cette procédure se résume à un simple avis et
n'engage en rien le Gouvernement, ce qui ne permet pas au Parlement national
d'exercer un contrôle réel et efficace sur l'activité européenne. Le contenu de
la révision constitutionnelle préalable à la ratification du traité est en
deçà, à notre avis, de ce qui est pourtant nécessaire à l'activité
parlementaire sur ce plan.
L'objet de l'acte communautaire sur lequel porte la proposition de M. Paul
Masson est l'intégration de la convention de Schengen dans les traités
organisant l'Union européenne.
Avant de donner une appréciation sur le texte qui nous est soumis aujourd'hui,
je souhaite rappeler le point de vue des sénateurs du groupe communiste
républicain et citoyen sur la convention de Schengen qui, bien entendu, est en
toile de fond du débat.
Nous avions, dès 1990, date à laquelle a été signée la convention
d'application de l'accord établi le 14 juin 1985, marqué notre opposition à
l'égard du dispositif de Schengen. Notre hostilité était notamment fondée sur
la démarche beaucoup trop sécuritaire du dispositif. Nous avions alors souligné
la tendance à amalgamer terrorisme, criminalité, drogue et immigration
extra-communautaire.
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen se sont, à plusieurs
reprises, élevés contre une conception de l'Europe forteresse, refermée sur
elle-même.
Sur le plan institutionnel, nous avions mis en évidence la perte de contrôle
démocratique et de transparence sur les mesures de sécurité dites «
compensatoires ». Il nous apparaît en effet toujours que, au-delà de la
nécessaire coopération judiciaire et policière entre Etats européens, le cadre
national demeure aujourd'hui, par la cohérence qu'il affiche, et en raison du
manque de transparence des institutions communautaires, le plus ouvert au
contrôle démocratique des mesures nécessaires au maintien de la sécurité.
Pour quelles raisons avons-nous critiqué le système d'information Schengen
?
D'après les informations connues, les données transmises au SIS concernent
essentiellement l'immigration. L'Union européenne se doit, de par sa culture et
sa richesse - c'est du moins ainsi que mon groupe conçoit la construction
européenne - de permettre l'intégration des étrangers présents sur son sol en
situation régulière. La réponse du fichier Schengen, malheureusement, est
quelque peu différente.
L'objet de notre débat d'aujourd'hui est l'intégration de Schengen au traité
sur l'Union européenne. Cette intégration est la conséquence logique de
l'adoption du traité d'Amsterdam et de sa ratification par notre pays.
Notre groupe est attaché au maintien dans le troisième pilier de la
construction européenne des questions relatives à la coopération policière et
judiciaire en matière pénale.
Le rattachement au premier pilier des questions relatives aux visas, à
l'asile, à l'immigration et aux autres politiques liées à la libre circulation
des personnes peut, nous semble-t-il, sur certains points, être examiné très
favorablement.
Mais, en l'état actuel d'une Europe dépourvue de contrôle démocratique réel
et approfondi, il nous apparaît en tout cas hâtif de passer à la règle de la
majorité qualifiée dans ces domaines, d'ici à cinq années.
Sur le contenu même de la proposition de résolution, les sénateurs communistes
avaient souhaité un vote par division et voici pourquoi.
Le premier point qui vise à maintenir le système d'information Schengen dans
le domaine intergouvernemental pourrait entraîner, suite à ce que j'ai dit
précédemment, notre approbation.
Mais nos attendus ne sont pas les mêmes que ceux de l'auteur de la résolution.
M. Masson a déclaré par exemple, lors du débat de la délégation du Sénat pour
l'Union européenne sans d'ailleurs être contredit par les orateurs prenant la
parole après lui : « Je suis très réservé sur le transfert du système
d'information Schengen à la Commission, car le système intergouvernemental
fonctionne ; pour le reste, nous assisterons alors à des débats philosophiques,
qui ne seront certes pas sans intérêt, mais qui seront en plus aggravés par les
discussions au Parlement européen, où on évoquera la question des droits de
l'homme ou même on remettra en question la raison d'être du système lui-même.
»
Pour ma part, je souhaite l'extension du droit de contrôle du Parlement
européen, une écoute attentive et un lien fort entre les parlementaires
siégeant à Strasbourg et les représentants des associations des droits de
l'homme de l'ensemble du continent, ainsi - c'est la règle du débat
démocratique - que des modifications éventuelles d'orientation de certains
acquis de Schengen, si l'opinion européenne le souhaite.
Notre abstention porte donc sur ce point, et nous l'avions indiqué au sein de
la délégation du Sénat pour l'Union européenne, laquelle n'avait pas adopté une
position unanime, contrairement à ce qu'affirmait tout à l'heure M. Barnier.
Sur le second point, qui vise à maintenir intégralement la clause de
sauvegrade qui permet à un Etat de rétablir le contrôle aux frontières «
lorsque l'ordre public ou la sécurité nationale l'exige », notre appréciation
sur les termes de la résolution est positive, car le contrôle de la mise en
oeuvre de cette clause doit rester, selon nous, de la compétence exclusive des
Etats.
Nous nous abstiendrons, puisque le vote est global, sur l'ensemble de la
proposition de résolution.
(Applaudissements sur les travées du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Pierre Moscovici,
ministre délégué chargé des affaires européennes.
Monsieur le président,
mesdames, messieurs les sénateurs, je me réjouis que vous ayez souhaité
maintenir ce débat, bien que, entre-temps, le conseil des ministres de l'Union
européenne, conformément au calendrier fixé, ait achevé l'examen du projet de
décision relatif à l'intégration de Schengen dans l'Union. Il s'inscrit - M.
Duffour l'a rappelé - dans le cadre des nouvelles dispositions
constitutionnelles qui étendent le champ du contrôle parlementaire sur les
questions européennes, et il était normal que la Haute Assemblée tienne à les
appliquer pleinement.
Il importait de réaliser cette intégration avant le 1er mai, date d'entrée en
vigueur du traité d'Amsterdam, afin de faciliter l'établissement d'un cadre
juridique clair. Il n'y avait, il est vrai, aucun risque de solution de
continuité, puisqu'en l'absence de décision sur la ventilation, c'est le droit
antérieur qui aurait continué de prévaloir. Mais, dès lors que le traité
d'Amsterdam prévoyait l'intégration de Schengen dans le cadre institutionnel de
l'Union, il était logique de veiller à une parfaite cohérence des différentes
formes de coopération existantes.
La décision du Conseil « Affaires générales » du 26 avril fera l'objet d'une
nouvelle adoption formelle le 10 mai, par ce même Conseil « Affaires générales
».
Un seul cadre institutionnel prévaut désormais : celui de l'Union. Dans ce
cadre, le traité d'Amsterdam prévoit la communautarisation des dispositions
relatives aux visas, à l'asile et à l'immigration. Les dispositions relatives à
ces questions figurant dans Schengen doivent donc désormais suivre le même
régime juridique.
Schengen, comme vous l'avez rappelé, monsieur le rapporteur, ne concerne pas
encore tous les Etats membres. C'est donc, comme la monnaie unique, une forme
de coopération renforcée. Et, comme pour la monnaie unique, je pense que nous
verrons petit à petit l'ensemble des Etats membres s'y rallier, parce que cette
coopération a fait la preuve de son utilité et, je dirais même, de son
caractère indispensable. Nos amis britanniques ont d'ailleurs déjà fait un pas
en ce sens et j'ai le sentiment que nous sommes sur la bonne voie, celle de la
généralisation.
Schengen, et c'est son mérite, a permis de créer et de développer des
habitudes de travail en commun, notamment un réflexe d'échanges systématiques
d'informations dont les services de police, de gendarmerie, des douanes et de
la justice ne peuvent plus désormais se passer, parce qu'ils mesurent
aujourd'hui à quel point leur efficacité s'en trouve accrue. Comme l'a
justement indiqué M. Machet, Schengen - on peut le dire au moment où la
communautarisation se réalise - a pleinement joué son rôle de laboratoire.
Je ne reviendrai pas sur tous les points qui ont été mentionnés pendant le
débat, qui a été très riche, sur un sujet, il est vrai très technique, comme
l'intervention de Mme Dieulangard l'a justement rappelé. Ce serait long et je
crois que, sur nombre de ces points, j'ai déjà eu l'occasion de donner ici ou
là, et surtout devant la Haute Assemblée, la position du Gouvernement, en
particulier lors des débats de révision constitutionnelle et de
ratification.
Deux points ont retenu plus particulièrement votre attention, puisqu'ils ont
fait l'objet de recommandations : le système d'information Schengen, le SIS, et
la clause de sauvegarde.
Les préoccupations exprimées, il y a plusieurs mois déjà, par M. Paul Masson -
dont chacun connaît la passion qu'il voue depuis l'origine à Schengen -
étaient, comme vous le savez, bien connues du Gouvernement, qui en a largement
tenu compte. Je ne serai pas long, puisqu'encore une fois la décision est
désormais acquise, le Conseil « Affaires générales » s'étant prononcé sur ce
dossier.
En premier lieu, s'agissant du système d'information Schengen qui est, pour
reprendre une expression de M. Masson, la pierre angulaire des accords de
Schengen, le maintien de ce système dans le troisième pilier est acquis par
défaut.
C'est donc une victoire provisoire, dirai-je, de notre position puisque cette
solution par défaut traduit le fait que les Etats membres n'ont pu se mettre
tous d'accord sur ce point.
Certes, nous avons pu rallier une majorité à nos thèses, mais cela n'a pas
suffit. Il est vraisemblable que la discussion reprendra ultérieurement, une
fois le traité d'Amsterdam entré en vigueur. Attendons donc de voir ce que la
présidence va faire.
Il n'est pas certain que la présidence allemande ait le temps de reprendre au
fond cette discussion. Cela nous mènera dès lors à la présidence finlandaise,
dont, pour être très honnêtes, nous ne connaissons pas encore les
intentions.
Nous verrons ce qui adviendra. Quoi qu'il en soit, nous continuerons,
soyons-en certain, monsieur Courtois, à faire valoir notre point de vue en
faveur du maintien dans le troisième pilier.
A cet égard, et M. Barnier le sait, nous avons tenu compte des préoccupations
exprimées par M. Masson. D'une manière générale, nous écoutons toujours très
attentivement le Sénat, notamment sur ces questions qui lui sont
particulièrement chères.
En deuxième lieu, s'agissant de la clause de sauvegarde, c'est-à-dire de la
faculté pour tout Etat partie à Schengen de rétablir temporairement des
contrôles à ses frontières pour des raisons d'ordre public ou de sécurité
nationale, je sais que M. Paul Masson et nombre d'autres parmi vous
s'inquiétaient d'une possible ventilation dans le pilier communautaire, option
qui a été finalement retenue par le Conseil et que nous avons d'ailleurs
défendue.
Je ne reviens pas sur tous les arguments qui plaidaient en faveur de cette
option. Je rappelle simplement, d'abord, que ce transfert dans le pilier
communautaire ne dépossédera nullement la France de sa compétence exclusive
dans la mise en oeuvre de cette clause. Le mécanisme de déclenchement de la
clause de sauvegarde prévu par la convention Schengen, qui relève de
l'appréciation souveraine des Etats, n'est pas remis en cause.
Je rappelle, ensuite, que l'article 64 du traité précise que la
communautarisation des règles relatives au franchissement des frontières ne
porte pas atteinte à l'exercice des responsabilités qui incombent aux Etats
membres pour le maintien de l'ordre public et la sauvegarde de la sécurité
intérieure.
Enfin, le traité instituant la Communauté européenne, tout comme le protocole
intégrant l'acquis de Schengen posent le principe de l'incompétence de la Cour
pour statuer sur les mesures ou décisions portant sur le maintien de l'ordre
public et la sauvegarde de la sécurité intérieure. Donc, même en cas de
contentieux, la possibilité de voir la Cour de justice apprécier le bien-fondé
de l'application de la clause de sauvegarde par un Etat membre paraît très peu
vraisemblable. Et je vous confirme, monsieur Barnier, que le Gouvernement sera
très vigilant sur ce point.
Il est un troisième point que M. Barnier a mentionné et sur lequel il a
souhaité connaître la position du Gouvernement, il s'agit de la délicate
question de l'intégration du « personnel Schengen » dans le secrétariat général
du Conseil.
Cela a donné lieu à une proposition de création de postes qui, de toute
évidence, excède - il s'agit d'une litote - les besoins du secrétariat. Nous
avons clairement manifesté notre ferme opposition à ce projet. La procédure de
décision est en cours et nous n'envisageons pas, à ce stade, d'intenter un
recours. Nous avons fait une déclaration écrite et cela nous paraît
suffisamment clair.
Le débat sur cette « ventilation de l'acquis Schengen » est désormais derrière
nous. Il faut nous concentrer maintenant sur l'application qui sera faite des
décisions et du nouveau traité qui va entrer en vigueur.
Je répondrai toutefois à M. Duffour, qui rappelait les réserves du groupe
communiste républicain et citoyen à l'égard d'un dispositif d'abord sécuritaire
: il faut désormais voir ce dispositif dans le cadre plus général du traité
d'Amsterdam, où cet aspect sécuritaire est indissociable d'une mesure positive
en faveur de la libre circulation, de l'accueil et de l'intégration des
étrangers, bref, de la mise en place d'un espace de liberté, de sécurité et de
justice, cette dernière dimension étant, comme vous l'avez dit, essentielle
pour les citoyens de l'Union.
Je souhaite, encore une fois, que nous voyions d'abord des aspects positifs,
concrets et opérationnels, plutôt que de nous livrer à des exercices théoriques
- et, à vrai dire, un peu rétrospectifs - sur les conséquences hypothétiques de
la ventilation de telle ou telle disposition dans le premier ou le troisième
pilier.
Nous disposons aujourd'hui d'instruments efficaces qui vont nous permettre de
construire des politiques communes dans des domaines essentiels : la libre
circulation, le contrôle des flux migratoires, la sécurité, c'est-à-dire -
comme le rappelait avec justesse Mme Dieulangard - des sujets essentiels pour
nos concitoyens.
En intégrant Schengen dans l'Union, nous renforçons la cohérence du cadre
juridique dans lequel nous construisons l'Europe de demain. Pensons aux
nouveaux partenaires que nous voulons accueillir, demain, dans cette Europe -
l'actualité au Kosovo nous rappelle qu'il y a un avenir à la grande Europe
au-delà même, peut-être, un jour, des pays actuellement candidats - et
présentons-leur l'image d'une Europe lisible, en état de marche, solidaire,
soucieuse d'être à la hauteur de ses responsabilités nouvelles.
(Applaudissements.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de la résolution de la commission des lois
constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale.