D. L'ORIGINE PREMIERE DE LA DÉFAILLANCE DE L'ETAT : DES ENGAGEMENTS FINANCIERS INSOUTENABLES
Il existe plusieurs faisceaux d'explications à l'inexécution partielle des troisièmes contrats de plan.
1. Des difficultés techniques pour l'exécution de certaines actions
Un
premier faisceau d'explications se rattachent au détail des programmes
contractualisés.
• En effet, l'inexécution budgétaire de certains
programmes trouve parfois son origine dans la
nature
des
actions
prévues :
- il est logique que certains programmes
d'aides
ne soient pas
intégralement consommés : le secrétariat d'Etat
à l'industrie estime ainsi que, "
là où les
chiffres des contrats de plan sont respectés, cela est du à
l'absence de projets industriels
". De même, certains
dispositifs d'appui à la formation et au reclassement des
salariés n'ont pas connu le succès escompté ;
- par nature, la montée en charge des
actions nouvelles
, comme
les partenariats lycées-entreprises dans certaines régions, est
lente
;
- certaines de ces actions ne rencontrent d'ailleurs pas de maîtres
d'ouvrage potentiels, comme le programme de soutien d'un secteur salmonicole en
Basse-Normandie ;
- plus généralement, les
porteurs
associatifs ou
privés de certaines actions peuvent disparaître ou se
rétracter ;
- la mise en oeuvre de certaines actions, par exemple en matière
portuaire, nécessitait des procédures d'instruction
réglementaire
dont la longueur avait été
sous-estimée ;
- plus généralement, les écarts de taux d'exécution
peuvent résulter
d'erreurs
dans les estimations des besoins ou
des projets, de
l'insuccès
d'une politique ou du manque de moyens
humains pour la mettre en oeuvre.
• Par ailleurs, l'inexécution des contrats s'explique parfois par
les
défauts
des actions contractualisées, voire de la
procédure elle-même :
- ainsi, selon le ministère du Tourisme, "
les contretemps pris
par certains contrats de plan s'expliquent en partie par la
complexité
de la mise en oeuvre d'une démarche
contractualisée lourde
". Il faut parfois un ou deux ans de
développement et des compétences techniques, juridiques et
financières étendues pour monter un projet de quelques millions
de francs. Sans appui extérieur, certaines collectivités n'y
parviennent pas ;
- par ailleurs, certains projets ont été inscrits dans les
contrats de plan sans expertise préalable, ni objectif clair, ni projet
identifié, ni maîtres d'ouvrages potentiels. Par exemple, les
actions, souvent impulsées par l'Etat, "
en faveur des
réseaux de ville
" ou "
d'ingénierie au
rapprochement
[entre villes]", dont les objectifs étaient flous
et les moyens étiques, n'ont souvent rencontré presque aucune
demande : dans certaines régions, les premiers crédits ne
seront donc mobilisés qu'en 1998 ;
- de même, lorsque les programmes étaient
flous
, la
préparation des protocoles d'exécution ou des projets
précis a pu donner lieu à des
mésententes
entre les
partenaires ;
- l'inexécution des contrats de plan a pu aussi résulter de
mésententes entre les SGAR, qui avaient négocié les
contrats, et les préfets de département chargés de les
exécuter. Comme le souligne une Région, "
la signature de
l'Etat recouvre [en effet] plusieurs réalités, certaines
procédures financières et l'interprétation de certaines
actions relevant des préfets de département ou des services
départementaux de l'Etat, qui ne sont pas toujours en phase avec les
SGAR ou avec leurs directions régionales ".
- enfin, nombre de retards s'expliquent par le
manque de maturité
de certains projets inscrits dans les contrats. En particulier le
ministère de la Culture estime "
que l'inscription
prématurée de certains projets de musées, souvent à
la demande des collectivités territoriales lors de la négociation
des contrats, a eu pour conséquence de nombreux retards dus à
l'absence de projets scientifiques et des études de
programmation
".
S'agissant plus particulièrement des
musées
, il semble
toutefois que l'Etat s'en soit en fait servi de monnaie d'échange en fin
de négociation avec les Régions, au grand dam du ministère
de la Culture, ce qui a sans doute concouru à l'inscription de projets
peu avancés, d'une part ; que la mise en oeuvre des projets
muséographiques se soit ensuite heurtée à l'organisation
complexe du ministère de la Culture, où trois directions
étaient concernées, d'autre part.
Plus généralement, il pourrait s'agir là selon certaines
Régions d'un
biais inhérent
à l'exercice
contractuel, dès lors que "
le contrat de plan, outre son
caractère de document de programmation est également un acte
politique et doit, en tant que tel traduire le respect d'un certain nombre
d'équilibres, ce qui explique l'inscription [
symbolique
? ]
de projets qui ne sont pas mûrs politiquement, et donc rarement au point
techniquement
".
• Outre ces aspects techniques, la DATAR indique que les écarts
de taux d'exécution peuvent également résulter
"
d'une modification des
priorités
locales
en
cours de contrats ",
mais qu'ils
" n'ont jamais eu pour cause
une inflexion politique d'un ministère, sauf dans un seul cas (celui de
l'hydraulique agricole sur laquelle les ministères de l'Agriculture et
de l'Environnement ont évolué à partir de 1993)
".
• Ces facteurs cumulés expliquent certainement que les contrats de
plan ne soient pas intégralement exécutés, mais ils
n'expliquent aucunement une défaillance de l'Etat de l'ampleur de celle
constatée pour les troisièmes contrats de plan.
En effet, l'Etat avait pu globalement respecter ses engagements pour les
contrats précédents, et les Régions ont pu honorer les
leurs pour les troisièmes contrats de plan.