N°
446
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000
Annexe au procès-verbal de la séance du 28 juin 2000
RAPPORT D'INFORMATION
FAIT
au nom de la délégation du Sénat pour la planification (1) sur les troisièmes contrats de plan Etat-Régions (1994-1999),
Par M.
Pierre ANDRÉ,
Sénateur.
(1)
Cette délégation est composée de
: M. Joël
Bourdin,
président ;
MM. Serge Lepeltier, Marcel Lesbros,
Georges Mouly, Jean-Pierre Plancade,
vice-présidents ;
Mme
Odette Terrade,
secrétaire
; M. Pierre André,
Mme Janine Bardou, MM. Alain Hethener, Patrick Lassourd, Henri Le Breton,
Daniel Percheron, Roger Rinchet, Gérard Roujas, Alain Vasselle,
membres.
Contrats de Plan -
Aménagement du territoire - Concertation -
Conseil Economique et social régional - Contractualisation - Contrats -
Contrats de Ville - Coordination interministérielle - DATAR -
Décentralisation - Déconcentration - Dépenses publiques -
Etat-stratège - Evaluation - Financements croisés -
Investissements publics - Péréquation - Plans - Planification -
Politiques publiques - Prospective - Réforme de l'Etat - Régions
- Transferts de charges.
INTRODUCTION
Aux
termes de l'article 11 alinéa 3 de la
loi du 29 juillet 1982
portant réforme de la planification, "
le contrat de plan conclu
entre l'Etat et la région définit les actions que l'Etat et la
région s'engagent à mener conjointement par voie contractuelle
pendant la durée du plan
".
Les contrats de plan Etat-Région (CPER) constituent ainsi le cadre de
mise en
cohérence
des orientations stratégiques de l'Etat
et des Régions, dans lequel se dessinent de nombreux projets qui
agissent directement sur la qualité de vie de nos concitoyens.
A ce titre, la négociation du contrat de plan est devenu un
événement
essentiel de la vie politique et administrative
locale, d'autant plus que le champ de la contractualisation s'est
progressivement étendu et que les engagements financiers inscrits dans
les contrats de plan se sont accrus d'une génération à
l'autre
1(
*
)
.
Avec l'effacement de la planification nationale, la contractualisation
Etat-Région est aussi l'un des seuls moments où l'Etat engage une
réflexion
prospective
et concertée, de sorte que les
CPER se sont affirmés comme un levier essentiel de la modernisation de
l'Etat et de la
rationalisation
de l'action publique, et qu'ils
"
ont joué un rôle essentiel pour l'aménagement et
le développement de notre territoire
"
2(
*
)
.
Ceci explique que les "
exercices de préparation des
différentes générations de contrats aient fait
naître de grandes attentes
"
3(
*
)
.
Pourtant, la procédure des CPER demeure relativement
méconnue
, tant des élus que des citoyens.
Profondément renouvelée à chaque exercice, la
procédure de CPER est en effet instable et extrêmement complexe,
d'autant plus qu'elle se fonde sur un texte législatif, la loi du 29
juillet 1982, "
contournée dans son principe et obsolète
dans nombre de ses dispositions pratiques
", selon la Cour des
Comptes
4(
*
)
.
Par ailleurs, la procédure de contractualisation Etat-région fait
aujourd'hui l'objet de nombreuses critiques qui en contestent
l'efficacité, sinon l'équité
5(
*
)
.
Enfin, pour la première fois, les contrats de plan prévus pour
1994-1998 n'ont pas été entièrement
exécutés, malgré leur étalement sur une
année supplémentaire (1994-1999). Les contrats de plan
Etat-Région 1994-1998-1999, apparaissent ainsi rétrospectivement
comme une "
ambition collective
"
6(
*
)
inachevée
.
C'est dans ce contexte que la délégation du Sénat pour la
Planification a souhaité ce
rapport d'information
relatif
à la troisième génération de contrats de plan
Etat-Région. Cette démarche s'inscrit dans le cadre de l'article
2 de la loi du 29 juillet 1982, qui dispose que la délégation du
Sénat pour la Planification "
est chargée d'informer [le
Sénat] sur l'élaboration et l'exécution des
plans
", et dans la continuité des rapports d'information
réalisés en 1986 par M. Jacques BRACONNIER sur la première
génération de contrats de plan (1984-1988) et en 1992 par M.
Georges MOULY sur la seconde génération de contrats de plan
(1989-1993).
Compte tenu des spécificités des régions d'outre-mer, ce
rapport s'est restreint aux
régions métropolitaines
.
Il s'efforcera d'examiner les modalités de négociation, de suivi
et d'exécution des contrats de plan Etat-Région 1994-1999, en
exposant les
points de vue
, les objectifs et les stratégies des
acteurs
en présence (administrations centrales, DATAR,
préfectures, Régions, Départements, etc.), et en
s'efforçant, grâce au recul supplémentaire, de
compléter ou de préciser les investigations antérieures
sur la troisième génération de CPER
7(
*
)
.
Votre rapporteur s'est ainsi donné pour objectif de rechercher dans
quelle mesure la procédure des troisièmes contrats de plan a
infléchi les modalités et la nature de la décision
publique, et plus particulièrement dans quelle mesure elle a
amélioré la transparence et l'efficacité de la
dépense publique
.
Il ne s'agit bien sûr aucunement d'examiner la pertinence des milliers de
projets inscrits dans les CPER 1994-1999 : matériellement
impossible, cette tâche sortirait par surcroît des
compétences de notre délégation. Il s'agit plutôt de
proposer des éléments de réponse à la
question
suivante : dès lors que la plupart des projets
inscrits dans les CPER auraient été réalisés en
l'absence même de contrat entre l'Etat et la Région, que change
cette procédure complexe, qui mobilise longuement plusieurs milliers de
personnes (élus, fonctionnaires, acteurs économiques et
associatifs) ?
Comme le souligne le Commissaire général du Plan, en
réponse aux questions de votre rapporteur, " [cette]
évaluation de la procédure de contrats de plan
Etat-Région n'a, à ce stade,
jamais été
entreprise
et aucun crédit n'a d'ailleurs été
affecté pour conduire cet exercice
". Toute évaluation
globale de la procédure de CPER avait même été
expressément écartée par la circulaire
8(
*
)
du ministre de l'Intérieur, de
l'Aménagement du territoire et des collectivités locales en date
du 9 décembre 1993, relative à la mise en oeuvre de la
démarche d'évaluation dans les procédures contractuelles.
L'intérêt de cette démarche est pourtant largement
reconnu
9(
*
)
, à l'heure
où s'engage une nouvelle génération de CPER (2000-2006).
A cet effet, votre rapporteur a élaboré, à partir des
rapports antérieurs sur les contrats de plan, des
questionnaires
miroirs
adressés à 16 ministères concernés par
la contractualisation
10(
*
)
,
à la DATAR, et au Commissariat général du Plan, d'une
part ; aux 22 Régions métropolitaines, d'autre part.
Ces questionnaires, qui déclinaient de manière
détaillée l'interrogation "
que change la
procédure de CPER
? ", se faisaient très largement
écho, de sorte que les réponses des unes et des autres puissent
être efficacement confrontées. A titre d'exemple, les
questionnaires adressés respectivement aux Régions, à la
DATAR, au ministère de l'Equipement, du Transport et du Logement et au
secrétariat d'Etat au Budget sont reproduits en
annexe 1
.
Conformément à l'article 2 de la loi du 29 juillet 1982, qui
dispose que "
le gouvernement transmet
[aux
délégations parlementaires à la planification]
tout
document nécessaire à l'accomplissement de leur
mission
",
tous les
ministères
ont
répondu
de manière détaillée dans un
délai raisonnable, à l'exception notable du ministère de
l'Education nationale, de la Recherche et de la Technologie, pourtant l'un des
principaux acteurs de la contractualisation, qui n'aura jamais envoyé
ses réponses, malgré des relances répétées.
Aux exceptions notables du ministère de l'Emploi et de la
Solidarité, du ministère de la Ville, du Commissariat
Général du Plan, et, dans une moindre mesure, de la Direction du
Budget, la plupart des observations des ministères sont excessivement
prudentes
, de sorte que les réponses les plus
intéressantes sont souvent celles à l'avant dernière
question ("
Dans quelle mesure la procédure d'élaboration
de la quatrième génération de CPER répond-elle aux
observations précédentes sur la troisième
génération de CPER
? "), qui dessinent en creux un
bilan critique moins convenu des troisièmes contrats de plan
Etat-Région.
Il n'en est pas de même des
17
Régions
11(
*
)
métropolitaines (sur 22) qui
ont également répondu : qu'elles trouvent ici l'expression
renouvelée de la gratitude de votre rapporteur pour la franchise et la
qualité de leurs contributions.
Cette abondante documentation - plus de
600 pages de réponses
,
des milliers de pages d'annexes, dont ce rapport s'efforce de publier les
extraits
les plus significatifs
12(
*
)
- a été
complétée par de nombreux entretiens téléphoniques.
Au total, votre rapporteur dispose ainsi d'un matériau inédit
pour engager une première évaluation de la procédure des
troisièmes contrats de plan Etat-Région, et proposer des
éléments de réponse aux quatre questions suivantes :
- La procédure des troisièmes contrats de plan (1994-1999)
marque-t-elle un
progrès
par rapport à celle des
deuxièmes contrats de plan (1989-1993) ?
- La procédure des troisièmes contrats de plan a-t-elle atteint
ses
objectifs
, tels que définis par les circulaires de 1992 et
1993 ?
- Plus spécifiquement, la procédure des troisièmes
contrats de plan a-t-elle contribué à améliorer la
lisibilité, la légitimité, l'efficacité et
l'efficience
des
politiques publiques
?
- Enfin, quels
enseignements
peut-on aujourd'hui en tirer pour le suivi
et l'exécution des nouveaux contrats de plan (2000-2006) ?