c) Le champ des réglementations prudentielles

Le champ des règles prudentielles constitue une autre faiblesse du monde financier contemporain.

Il ne s'agit pas ici non plus d'évoquer le problème particulier des places off-shore traité par ailleurs. Hormis la question des banques centrales qui sont affranchies du respect des réglementations prudentielles au vu d'une réputation que certains événements récents - l'implication d'une banque centrale de l'Union européenne dans le naufrage de LTCM, les circuits financiers mobilisés par la Banque de Russie - pourraient conduire à réestimer, un problème majeur concerne les conglomérats financiers.

L'essor d'entités exerçant concourramment plusieurs métiers, la banque, le titre mais aussi l'assurance, ne s'est pas accompagné d'un effort conceptuel et normatif suffisant pour donner naissance à des règles prudentielles adaptées à ces nouveaux intervenants. Les réglementations prudentielles propres à chacune de ces activités se sont développées dans le cadre d'enceintes qui leur sont propres avec, au niveau international : l' International Organisation of Securities Commissions (IOSCO) pour les contrôleurs des marchés financiers, le Comité de Bâle pour les banques et l' International Association of Insurance Supervisors (IAIS) pour les assurances.

La compatibilité et la cohérence des différentes normes n'ont pas été suffisamment vérifiées et le besoin d'une intégration existe.

De nombreux autres intervenants financiers apparaissent en outre mal - voire nullement - couverts : les hedge funds et les transactions sur Internet en constituent deux illustrations importantes.

Enfin, et surtout, le champ géographique de la réglementation prudentielle pose le problème crucial de son harmonisation internationale.

En l'état, les enceintes internationales - BRI, Union européenne... - où sont élaborées les règles prudentielles regroupent un petit nombre de pays développés, ce qui facilite la formation des règles mais limite probablement leur rayonnement, l'acceptation de ces règles par les pays tiers étant d'autant moins acquise qu'ils ne participent pas à leur définition.

A cela s'ajoute le fait que, construites sur la base du consensus, lesdites règles représentent le plus souvent des compromis minimaux qui ne sont probablement pas adaptés à la variété des situations locales. Il est certes loisible à chacun de mettre en place des règles prudentielles plus strictes mais cette latitude n'est que fort peu séduisante pour les autorités nationales.

La rigueur plus ou moins grande des règles prudentielles est en effet considérée comme constitutive d'un enjeu de concurrence.

Cette situation se vérifie avec une particulière acuité dans les zones économiques homogènes. Le marché unique européen en fournit un bon exemple.

La législation prudentielle européenne qui s'est développée au fil des différentes directives intervenues dans le but spécifique de construire le marché financier unique, objectif différent de celui qui consisterait à bâtir des règles prudentielles uniformes, a débouché sur l'édiction d'obligations prudentielles minimales. Plusieurs sujets importants comme une législation européenne sur la liquidation des établissements bancaires sont en chantier depuis longtemps sans progresser réellement.

Cette situation est, selon M. Tommaso Padoa-Schioppa, membre du Directoire de la Banque centrale européenne, susceptible d'enclencher un processus de dérégulation dans les différents espaces nationaux de l'Union européenne qui s'explique par les compétences limitées de celle-ci et la dimension concurrentielle des règles prudentielles.

Cette situation mérite d'être corrigée d'autant qu'elle concerne une zone monétaire unifiée.

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