CHAPITRE PREMIER
LES ORIGINES DE L'ONAC ET SES MISSIONS
I. LA GESTION DU MONDE DES ANCIENS COMBATTANTS
A. UNE SPÉCIFICITÉ FRANÇAISE
1. Les origines de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre
Le terme
" Office national des anciens combattants et victimes de guerre
(ONAC) " apparaît officiellement pour la première fois dans
le décret du 17 juin 1946 incorporant dans l'Office national des
mutilés, combattants, victimes de guerre et pupilles de la Nation, les
services sociaux du ministère des prisonniers, déportés et
réfugiés.
Toutefois, la création du premier établissement
spécialisé ayant pour mission de développer auprès
de ses ressortissants une action sociale individualisée remonte à
1916. En effet, l'arrêté interministériel du
2 mars 1916 instituait un Office national des mutilés et
réformés de guerre.
Par la suite, les conséquences désastreuses de la " Grande
guerre " ont amené les gouvernements à créer un
Office national des pupilles de la Nation (loi du 29 juillet 1917), un Office
national des mutilés et réformés de guerre (loi du 2
janvier 1918), et un Office national du combattant (loi du
19 décembre 1926).
Ces différents offices ont peu à peu été
fusionnés pour devenir, en 1946, l'Office national des anciens
combattants.
2. Une organisation administrative dédoublée
Les
premières opérations militaires en 1914 (liées à la
guerre de mouvement), puis la longue guerre des tranchées, très
coûteuses en vies humaines, ont conduit à la création des
différents offices précités. Il s'agissait alors
d'apporter une aide aussi bien aux anciens combattants blessés ou
mutilés qu'à leur famille en cas de décès.
Toutefois, l'action des offices ne permettait pas d'apporter une solution
durable au sort des millions d'anciens combattants que la guerre avait rendus
invalides.
En 1919, la France comptait 39 millions d'habitants. La mobilisation a
touché plus de 20 % de la population, pratiquement 41 % des
personnes de sexe masculin et 75 % des hommes de 20 à 35 ans.
La mobilisation a porté sur 33 classes (de 1887 à 1919), les
personnes appelées les plus âgées avaient 47 ans.
Or, les pertes subies ont été à la mesure de l'importance
des forces engagées. Les personnes tuées ou disparues au feu
représentent 1.393.000 morts tandis qu'on évalue le nombre
des blessés à 3.595.000 et que 56.000 personnes furent
amputées.
La population civile souffrit également. On dénombre
110.000 victimes mortes des suites de la guerre. Le conflit a
laissé en outre 600.000 veuves et 986.000 orphelins.
Le caractère extrêmement meurtrier de ce conflit et le devoir de
reconnaissance de la Nation à l'égard des anciens combattants ont
conduit à l'adoption de la loi du 31 mars 1919 sur les pensions
d'invalidité.
Par ailleurs, était créé le 23 janvier 1920 le
ministère des anciens combattants afin de mettre en application la loi
sur les pensions.
L'ONAC aurait pu alors disparaître en tant qu'établissement
public tandis que ses missions auraient été
transférées au nouveau ministère. Telle n'a pas
été la solution retenue.
A l'époque, il a été estimé que la dualité
Ministère-ONAC favorisait une plus grande polarisation des
missions : la réparation et l'indemnisation pour le premier,
l'action sociale pour le second.
Ainsi était né le
dédoublement de l'organisation administrative des anciens combattants
qui a perduré jusqu'à nos jours.
Le
but social
de l'ONAC a été confirmé en 1946 par
l'incorporation dans l'Office des services sociaux du ministère des
prisonniers, déportés et réfugiés.
Par ailleurs, l'existence de services déconcentrés aussi bien au
ministère qu'à l'ONAC a été analysée comme
permettant une adaptation plus fine aux réalités du terrain et
une spécialisation accrue des missions : l'accueil et l'action de
proximité pour les services départementaux de l'ONAC, le
traitement administratif des dossiers et la production des prestations offertes
aux ressortissants pour les directions interdépartementales du
ministère des anciens combattants.
LE
PARTAGE DES MISSIONS ENTRE LES SERVICES DÉCONCENTRÉS
DU
MINISTÈRE ET DE L'ONAC
Le
partage des missions entre le secrétariat d'Etat aux anciens combattants
et l'ONAC n'obéit pas toujours à des critères rigoureux et
a évolué avec le temps.
Par ailleurs, dans certains domaines, leurs compétences se chevauchent.
Pour autant, la répartition des tâches entre les services
départementaux de l'ONAC et les directions interdépartementales
du secrétariat d'Etat aux anciens combattants peut être
établie de la manière suivante.
a) Les activités des directions interdépartementales aux
anciens combattants
Les directions interdépartementales exercent les missions
liées au droit à réparation et au droit de reconnaissance
consacrés par le code des pensions militaires d'invalidité,
à savoir :
- la reconnaissance du droit à pension d'invalidité ou
d'ayant-cause ;
- la reconnaissance du droit à la retraite d'ancien combattant ;
- l'attribution dans le cadre de la procédure centralisée (et le
contrôle d'attribution dans le cadre de la procédure
décentralisée) de l'ensemble des titres et cartes de victime de
guerre ;
- le droit aux soins médicaux gratuits, à l'appareillage et aux
emplois réservés ;
- l'entretien des nécropoles nationales.
b) Les activités des services départementaux de l'Office
Les services départementaux de l'Office national des anciens combattants
et victimes de guerre exécutent quatre sortes de missions :
- l'action sociale individuelle (attribution de secours et de
prêts) ;
- l'instruction des demandes de cartes et de titres ;
- l'information historique ;
- la tutelle des pupilles de la Nation.
c) Les missions conjointes des directions interdépartementales aux
anciens combattants et des services départementaux de l'ONAC
Les directions interdépartementales aux anciens combattants et les
services départementaux de l'ONAC interviennent conjointement dans
certaines missions ou procédures dont les principales sont l'instruction
des cartes et des titres, l'information historique et le fonds de
solidarité pour les anciens d'Afrique du Nord et d'Indochine.
L'instruction des cartes et des titres
Les services départementaux de l'ONAC
assurent l'instruction des
demandes de carte du combattant, de titre de reconnaissance de la Nation,
de carte de combattant volontaire et de la Résistance, de carte de
réfractaire, d'attestation de personne contrainte au travail en pays
ennemi, de carte de Patriote transféré en Allemagne (P.T.A), de
certificat d'incorporé de force dans les formations paramilitaires
allemandes (RAD, KHD) et de carte de Patriote résistant à
l'annexion de fait (P.R.A.F).
La décision d'attribution desdits titres et cartes relève de la
compétence des préfets de département.
Les directions interdépartementales
sont, elles, chargées
de l'instruction des demandes de carte de Patriote résistant à
l'occupation des départements du Rhin et de la Moselle (P.R.O), de titre
de déporté ou d'interné résistant ou politique, de
titre de prisonnier du " Viêt-minh ", de titre de victime de la
captivité en Algérie et de titre d'évadé.
La décision d'attribution desdits cartes et titres relève de la
compétence du secrétaire d'Etat, sauf exceptions prévues
expressément par les textes.
L'information historique
Le décret du 29 décembre 1985 a accordé à l'ONAC
des compétences en matière d'information historique puisqu'il a
été créé dans chaque département une
commission départementale de l'information historique pour la paix.
Celle-ci a pour but de coordonner les actions menées à
l'échelon départemental en faveur de l'information historique
pour la paix. Elle est animée, sous l'autorité du préfet
du département, par le directeur du service départemental de
l'ONAC.
Toutefois, la politique de la mémoire et de l'information historique
reste définie par la Délégation à la mémoire
et à l'information historique (DMIH). Les directeurs des services
départementaux de l'ONAC doivent donc tenir compte des orientations
définies par la DMIH pour mettre en oeuvre sur le terrain les actions
destinées à perpétuer le souvenir des conflits
contemporains. En outre, l'entretien des nécropoles relève
exclusivement des directions interdépartementales.
Le fonds de solidarité pour les anciens combattants d'Afrique du
Nord et d'Indochine
Créé par l'article 125 de la loi de finances pour 1992, le fonds
de solidarité attribue deux catégories d'allocation dont
l'instruction a été répartie entre le secrétaire
d'Etat et l'ONAC.
Ainsi, les directions interdépartementales aux anciens combattants
instruisent et traitent les dossiers d'allocation de préparation
à la retraite.
Les services départementaux de l'ONAC instruisent et liquident les
dossiers d'allocation différentielle.