AUDITION DE M. BERNARD TOULEMONDE,
DIRECTEUR DE L'ENSEIGNEMENT
SCOLAIRE
(9 DÉCEMBRE 1998)
M. le
Président
- Monsieur le Directeur, vous avez la charge de
l'enseignement secondaire. Vos responsabilités actuelles sont donc au
coeur de nos préoccupations. Nous connaissons aussi les
responsabilités qui ont été les vôtres
antérieurement, dans le cadre de divers cabinets ministériels, et
auprès d'un Premier ministre.
Le président rappelle le protocole de publicité des travaux de
la commission d'enquête et fait prêter serment à
M. Bernard Toulemonde.
La présente audition n'est pas publique, la commission n'ayant
arrêté sa position qu'en début d'après-midi.
Monsieur le Directeur, vous avez la parole...
M. Bernard Toulemonde
- Monsieur le Président, Messieurs,
c'est un grand honneur pour moi d'être le premier fonctionnaire du
ministère de l'éducation nationale à témoigner
devant votre commission d'enquête.
Je ne sais ce qui me vaut cet honneur ; peut-être est-ce dû au
fait que je pratique effectivement cette maison depuis 1982, et que j'ai fini
par bien la connaître, encore qu'elle conserve quelques secrets pour moi,
précisément sur quelques-unes des questions que vous vous posez
-mais je me suis informé autant que possible pour pouvoir y
répondre.
M. le Président
- Je rappelle que vous êtes l'auteur
d'un livre qui date de 1988 et qu'au début de celui-ci se trouve un
chapitre intitulé : "Le mammouth" !
M. Bernard Toulemonde
- Je n'ai pas demandé de droits
d'auteur !
(Rires)
La direction qui est la mienne depuis mai, la direction de l'enseignement
scolaire, a compétence pour répartir les moyens
budgétaires d'enseignement, de remplacement et de ce qu'on appelle dans
notre jargon "l'espace éducatif", c'est-à-dire les personnels de
direction et d'éducation.
Nous avons en effet du mal à appréhender l'ensemble des moyens
que nous mettons à disposition des académies, et ce que
deviennent ces moyens, ceci pour un certain nombre de raisons.
En premier lieu, les moyens budgétaires votés par le Parlement
font l'objet d'une conversion entre le moment où ils sont votés
par le Parlement et le moment où ils se traduisent, dans les
établissements scolaires, par des postes sur lesquels sont
affectés les enseignants.
J'ai notifié il y a quelques jours aux recteurs d'académie leur
enveloppe globale d'emplois et de crédits du second degré,
à charge pour eux de procéder à une répartition
entre les lycées -dont les recteurs ont la gestion directe- et les
collèges, qui sont en quelque sorte sous-traités aux inspecteurs
d'académie, également directeurs des services
départementaux.
Les autorités académiques -le recteur pour les lycées, les
inspecteurs d'académie pour les collèges- distribuent ensuite un
volant d'heures d'enseignement à chaque collège et lycée.
C'est ce que nous appelons la "dotation horaire globale".
Chaque établissement scolaire est en effet un établissement
public local d'enseignement, qui jouit d'une autonomie, à charge pour
l'établissement de convertir ces heures en groupements horaires qui
correspondent à des postes et qui "colorent" les postes : un
professeur d'anglais, trois professeurs de lettres, un professeur
d'éducation physique et sportive, etc.
Au bout du compte, on évalue le besoin en postes et en disciplines des
établissements scolaires, et on délègue les personnes
correspondantes. La procédure est une procédure quelque peu
compliquée qui, du fait de l'autonomie des établissements
scolaires, connaît certaines incertitudes. Je ne donne qu'une masse
globale, qui se colore en cours de route dans les différentes
disciplines du second degré.
Or, on compte au total, dans l'enseignement du second degré, 350
disciplines de recrutement différentes, depuis le professeur
d'électronique à celui d'esthétique, jusqu'aux professeurs
de lettres, qui sont un peu plus nombreux que les autres...
Vous comprenez immédiatement les difficultés d'ajustement qui se
produisent lorsqu'on procède au recrutement des enseignants : il
faut en effet recruter en fonction de besoins que nous ne connaissons que
partiellement, les établissements scolaires seuls, chaque année,
colorant les postes et les disciplines.
Lorsque nous recrutons des enseignants à l'année n, ils ne sont
disponibles sur le terrain qu'à l'année n + 2. Certes, nous
disposons d'un bon appareil statistique, mais la démographie scolaire
n'est pas précise à 100 %. Une erreur de 1 %, voire de
0,5 %, lorsqu'elle porte sur 3 ou 4 millions d'élèves
-on en compte 3 millions dans les lycées et 4 millions dans
les collèges- est gravissime et entraîne des conséquences
importantes.
Il existe donc des difficultés d'appréhension et de
contrôle de l'emploi des dotations budgétaires qu'il ne faut pas
se cacher.
Celle que je viens d'évoquer est spécifique à
l'enseignement du second degré ; d'autres difficultés
apparaissent et sont communes à l'enseignement du premier et du second
degré. La première réside dans la dissociation entre les
postes et les personnes.
Un poste budgétaire, tel que je le délègue moi-même
aux académies, est un équivalent temps plein -un ETP. Les
recteurs peuvent toutefois y affecter des personnes qui ne seront pas toutes
à temps plein ; on compte par conséquent toujours plus de
personnes que de postes.
Autre difficulté commune au premier et au second degré : les
"pertes en ligne"... Les pertes en ligne ont des sources qui, pour la
plupart, sont réglementaires.
Première perte en ligne : les décharges de service
réglementaires prévues par les textes. Un professeur peut
bénéficier d'une décharge lorsqu'il effectue certaines
activités particulières. C'est ce qu'on appelle les heures de
"première chaire". Un professeur qui enseigne en classe de
première et de terminale bénéficie d'une heure de
décote de son service, du fait qu'il enseigne au moins 6 heures en
classe de première et de terminale. Ce professeur, au lieu d'effectuer
dix-huit heures d'enseignement s'il est certifié, ce qui constitue sa
quotité horaire de service, n'en fera que dix-sept.
Les professeurs en charge des différents "cabinets" d'histoire, de
sciences de la vie et de la terre -les sciences naturelles- de la technologie,
bénéficient également d'une décote horaire d'une
heure.
Seconde source de pertes en ligne : les décharges de service
à mi-temps accordées par les autorités académiques
parce que certains enseignants se consacrent à des tâches
complémentaires à l'enseignement, par exemple des tâches de
formation continue de leurs collègues enseignants, dans le cadre des
missions académiques à la formation.
Il existe ainsi toute une série de décharges de service, les
enseignants partageant leur activité entre une activité
d'enseignement stricto sensu et une activité complémentaire
-inspection, formation, etc.
Troisième source de pertes en ligne : les décharges de
direction des directeurs d'école. Elles représentent une masse
non-négligeable de postes du premier degré. Les directeurs
d'école, dès lors qu'ils sont à la tête
d'établissements comportant plus de cinq classes, consacrent une partie
de leur temps aux activités de direction, au partenariat avec les
collectivités locales, aux parents d'élèves, etc.
Autre source de pertes en ligne : les décharges
syndicales... La réglementation du décret du 28 mai 1982,
que j'ai eu l'honneur de mettre en place au ministère de
l'éducation nationale, fixe des quotités en fonction de la
représentativité de chaque organisation syndicale, qui
bénéficient d'un volume de décharges de service
réparti entre les personnels qui relèvent de cette organisation.
Ceci représente aujourd'hui l'équivalent en temps plein de 1.188
postes d'enseignement. Le nombre de personnes concernées est en fait
plus élevé, les syndicats fractionnant ces décharges.
Enfin, dernière source de pertes en ligne : les mises à
disposition, qui -j'attire votre attention sur ce point- doivent être
soigneusement distinguées des détachements, encore qu'en langage
courant, la distinction n'est pas fréquemment opérée.
Le détachement est une position du fonctionnaire qui exerce ses
fonctions dans une administration autre que son administration d'origine. Il
est rémunéré par l'administration dans laquelle il est
affecté, et non par son administration d'origine.
Nous avons à l'heure actuelle dans l'enseignement second degré
environ 15.000 enseignants détachés, soit auprès du
ministère des affaires étrangères, dans les lycées
français à l'étranger, pour la coopération, etc.,
ou dans d'autres administrations. Je crois même que nous avons quelques
détachés au Sénat...
M. le Président
- Quelques "détachés
parlementaires"...
M. Bernard Toulemonde
- Nous en avons 5 ou 6...
M. le Président
- Les parlementaires fonctionnaires de
l'éducation nationale sont en détachement...
M. Bernard Toulemonde
- En effet, sauf les professeurs
d'université !
On compte également 5.000 instituteurs ou professeurs des écoles
également détachés. Au total, sur 800.000 enseignants, il
existe 20.000 détachés, ce qui, vous en conviendrez, n'est
finalement pas énorme.
La mise à disposition concerne les fonctionnaires qui exercent dans leur
administration d'origine et qui continuent à être
rémunérés par celle-ci mais qui, pour des raisons
diverses, exercent une autre activité.
J'ai été l'artisan de cette mise en ordre. Lorsque Alain Savary
est devenu ministre, en 1981, il n'existait aucun état des mises
à disposition de l'éducation nationale. La gestion en
était donc totalement opaque. On a paraît-il trouvé des
choses assez extraordinaires.
A mon arrivée, en 1982, le ministre m'a demandé de rechercher les
mises à disposition et d'y mettre de l'ordre. Nous avons
opéré un recensement et établi une sorte de
règlement intérieur. A l'époque, la mise à
disposition ne constituait pas une position statutaire de la fonction publique.
A notre grande satisfaction, le ministère de la fonction publique a
publié en 1985 un décret portant sur la mise à
disposition, imitant ce qu'avait fait l'éducation nationale.
Bon an mal an, entre 1.000 et 2.000 fonctionnaires sont mis à
disposition d'organismes divers.
Il en existe trois types. Le premier est constitué par les cabinets
ministériels -c'est une tradition républicaine- qui
représentent un assez petit nombre.
On trouve ensuite divers organismes publics et privés, comme l'Institut
de France, qui compte quatre agrégés mis à sa
disposition.
La troisième catégorie concerne les associations
complémentaires de l'enseignement public et les mutuelles liées
au ministère de l'éducation nationale. C'est là qu'on en
trouve le plus grand nombre.
Ces mises à disposition font, pour une part, l'objet d'un remboursement
au prix coûtant par les bénéficiaires. C'est le cas des
mutuelles, notamment la MGEN, qui bénéficie de plusieurs
centaines de mises à disposition.
Au total, on dénombre à l'heure actuelle 1.115 mises à
disposition qui couvrent les trois catégories dont je viens de parler.
Ce n'est donc pas le pactole qu'on imagine quelquefois !
S'agissant par ailleurs des moyens affectés aux remplacements, on
s'accorde à penser que les personnels de l'éducation nationale ne
sont pas plus malades que les autres, et toutes les statistiques que nous avons
menées depuis vingt ans sur ce sujet montrent que le taux d'absence pour
maladie n'est pas plus élevé qu'ailleurs dans les entreprises
privées ou publiques comparables.
En revanche -et c'est ce à quoi s'est attaqué Claude
Allègre- il existe une perte d'heures d'enseignement qui provient de
l'institution.
La première est consécutive à la fermeture totale des
établissements scolaires. Il existe des périodes où les
cours devraient normalement avoir lieu et durant lesquelles ils n'ont pas lieu
parce que l'établissement est fermé du fait des examens. C'est
une affaire qui dure depuis des années, le baccalauréat, le
brevet des collèges et les examens occupant les enseignants et les
locaux et les établissements en fin d'année scolaire.
Cette perte est grave à mon sens, et il convient de lutter contre cette
tendance à l'étalement et au recul des dates d'examens, laissant
les enfants livrés à eux-mêmes, alors qu'ils devraient
être en classe, sous la houlette de leurs professeurs. Je pense
d'ailleurs que le préjudice est plus préjudiciable pour les
familles défavorisées, qui n'ont pas les moyens de faire garder
leurs enfants.
Il y a là un problème auquel il faut s'attaquer. Cela fait des
dizaines d'années qu'on en parle, mais nous
sommes décidés à prendre quelques mesures
énergiques à ce sujet.
La perte provient également de l'institution, qui convoque les
professeurs soit pour leur formation continue, durant leur temps de service,
soit pour préparer les examens. Plusieurs milliers de sujets doivent en
effet être élaborés chaque année par les enseignants.
Le ministre a toutefois mis un frein à ces convocations et
déclaré qu'il ne devait plus avoir de classes sans enseignant.
Quoi qu'il en soit, nous consacrons une partie de notre potentiel aux moyens de
remplacement. Ils représentent 8 % de la masse des postes
d'enseignant dans le premier degré, et 5 à 6 % dans le
second degré.
Sachez enfin que l'éducation nationale dispose d'un système de
contrôle des emplois, géré par la direction des affaires
financières, qui a pour objet de vérifier, dans les
établissements scolaires, que les dotations budgétaires sont
fidèlement utilisées par le système éducatif.
M. le Président
- Merci.
La parole est au rapporteur...
M. le Rapporteur
- Monsieur le Directeur, vous avez cité un
certain nombre de chiffres. Vous serait-il possible de nous indiquer par
écrit le nombre de personnels enseignants des écoles,
collèges et lycées, en métropole et en outre-mer, pour
l'enseignement public et l'enseignement privé sous contrat, ainsi que
les nombres d'élèves correspondants ?
Quel est le nombre de maîtres auxiliaires non-titulaires, ceux en
surnombre ? A quelles tâches sont-ils affectés ? Quelles
sont les disciplines excédentaires ?
Quel est le nombre de titulaires remplaçants et de titulaires
académiques affectés provisoirement sur des nombres
vacants ? Quel est le nombre d'enseignants en surnombre affectés
par l'éducation nationale n'assurant pas de remplacements ? Quel
est le nombre des mises à disposition qui font l'objet ou non d'un
remboursement budgétaire ? Pouvez-vous préciser les
principales collectivités concernées ?
Quelle est l'importance des décharges d'activités de service pour
tous les mandats que vous avez indiqués et le nombre de demandes
formulées satisfaites au titre du mouvement national des enseignements
du second degré ?
Vous pourrez également nous transmettre toutes les informations qui nous
permettront de dresser le tableau le plus objectif possible de la situation...
N'avez-vous pas l'impression qu'on profite du fait que l'éducation
nationale soit une très grosse entreprise ?
Par ailleurs, tenez-vous à jour un état quantitatif des
dysfonctionnements de chaque rentrée ?
Vous avez en outre évoqué 350 disciplines de recrutement.
Pensez-vous que l'on puisse simplifier ces disciplines et envisager des
professeurs multidisciplinaires ?
Enfin, avez-vous constaté une différence entre l'enseignement
public et l'enseignement privé sous contrat ?
M. le Président
- Vous avez parlé des mises à
disposition officielles ? Qu'en est-il des mises à disposition
clandestines ou que les services centraux ne connaissent pas ?
M. Bernard Toulemonde
- J'ai été recteur
d'académie. Je vais donc répondre tout de suite à votre
question. Il est vrai que les recteurs ou les inspecteurs d'académie
sont l'objet de demandes diverses et variées, qui aboutissent à
des mises à disposition ou des décharges de service
au-delà des textes réglementaires.
Lorsque j'étais recteur, je m'étais aperçu qu'un conseil
général que je connaissais bien disposait d'un nombre
d'enseignants du premier et second degré bien supérieur à
ce que prévoyaient les textes !
Il est vrai qu'il arrive que le recteur où l'inspecteur
d'académie acceptent de le faire -à titre temporaire- lorsqu'ils
estiment en conscience qu'il s'agit d'une tâche d'intérêt
général.
Depuis quelques années, nous disposons d'un système informatique
appelé EPP -emplois-postes-personnels- qui donne la quotité
horaire de service d'enseignement de chaque enseignant, et les activités
qu'il accomplit pendant celle-ci.
On considère toujours -et le ministère de la culture me le fait
souvent valoir- que l'éducation nationale dispose de beaucoup de
personnes et qu'elle peut donc en donner. Hier, le cabinet du ministre de
l'environnement m'a appelé en m'expliquant qu'un enseignant d'un
lycée parisien, spécialiste des sciences de la vie et de la
terre, apportait actuellement son concours à la société
Cofiroute. Or, l'éducation nationale refuse de mettre cette personne
à disposition, et les travaux sont arrêtés. Ayant fait
remarquer à mon interlocutrice que nous pouvions le placer en
disponibilité afin que la société Cofiroute puisse le
rémunérer, celle-ci m'a rétorqué que
l'éducation nationale était riche d'un million de
fonctionnaires et que nous pouvions faire un effort !
On estime donc à l'extérieur que l'éducation nationale
représente une mine d'or dans laquelle on peut puiser. Les pressions
sont très fortes, et nous rappelions à nos autorités
qu'elles ne doivent pas détourner les moyens budgétaires que la
Nation consent à donner à l'éducation nationale.
Je voudrais par ailleurs indiquer à M. le rapporteur que le
directeur des affaires financières, qui est spécialistes de ces
sujets, vous communiquera un dossier complet sur la liste de questions à
propos desquelles vous m'avez interrogé.
Je ne sais si nous disposons du nombre de personnes, mais nous pourrons vous
communiquer les postes budgétaires auxquels correspondent les
professeurs de collèges publics, et le nombre d'ETP pour les
collèges privés...
M. le Rapporteur
- Pourrez-vous nous indiquer la manière
dont est faite la conversion ?
M. Bernard Toulemonde
- Oui, bien sûr...
De même, les maîtres auxiliaires, normalement, ne sont pas en
surnombre. Ils sont rémunérés sur les crédits du
31-97 ; depuis quelques années, le ministère de
l'éducation nationale connaît quelques surnombres. On a trop
recruté d'enseignants, qui se trouvent ne pas avoir d'assise
budgétaire. Nous les rémunérons donc, mais sans assise
budgétaire.
Bien entendu, c'est une situation qui n'est pas saine budgétairement.
M. le Président
- Comment cela se passe-t-il avec les
trésoriers-payeurs généraux ?
M. Bernard Toulemonde
- Le contrôle financier local
n'existait pas jusqu'alors pour l'éducation nationale ; il est en
place depuis octobre...
Comment cette situation a-t-elle pu se produire ? ... Pour des
raisons sociales, on a reconduit des maîtres auxiliaires dont on n'avait
pas nécessairement besoin.
En second lieu, on a calibré les concours très au-delà de
ce que justifiaient les besoins stricts de l'éducation nationale, afin
de ne pas désespérer les étudiants ou du fait des
pressions de telle ou telle discipline. Il existe en effet de petites
disciplines rares -je ne les citerai pas- pour lesquelles on a recruté
des gens dont on ne sait ce qu'on va faire, simplement parce qu'il faut
continuer à en recruter quelques-uns : langues régionales,
langues étrangères rares, etc.
Je me souviens qu'en 1995 par exemple, l'arbitrage du Premier ministre est
allé au-delà même des demandes du ministre de
l'éducation nationale de l'époque !
Depuis deux ou trois ans, on a toutefois fortement diminué le nombre de
postes mis au concours, à tel point que cela nous vaut quelques ennuis
du côté des universités et des étudiants, qui se
plaignent qu'on ne recrute plus suffisamment. Mais faut-il recruter si on n'en
a pas besoin ?
M. le Président
- Est-ce que vous qui êtes responsable
du nombre de postes ?
M. Bernard Toulemonde
- Non, c'est ma collègue directeur du
personnel enseignant. Elle vous indiquera tous les chiffres de recrutement.
Pour 1999, si l'on avait maintenu les chiffres tels qu'ils auraient dû
être afin de pourvoir aux simples besoins de renouvellement des
enseignants partant en retraite, on aurait dû baisser davantage, avec les
risques politiques que cela comporte, que tous les gouvernements, depuis de
nombreuses années, ont assumés.
Cependant, du fait de la situation conjoncturelle, le nombre de départs
en retraite est relativement faible, mais doit s'accélérer de
façon considérable à partir de 2003 ; on estime -de
mémoire- qu'entre 2000 et 2006, 40 % du corps enseignant va nous
quitter. Il vaut donc peut-être mieux prendre quelque avance aujourd'hui
et recruter un peu plus que nécessaire, de façon à ne pas
devoir ensuite gérer la pénurie.
En effet, on va devoir calibrer les concours avec des nombres tellement
élevés qu'on ne trouvera pas le vivier de recrutement
possible !
M. le Rapporteur
- Est-ce vous qui faites la prospective ?
M. Bernard Toulemonde
- Non, il existe une direction de la
prospective appelée direction de la programmation et du
développement.
M. le Président
- Vous avez, au début de votre
propos, décrit la répartition des moyens entre les
académies, la coloration des emplois par discipline, etc. Combien de
temps ce mouvement nécessite-t-il ?
M. Bernard Toulemonde
- Il est extrêmement rapide. Pour le
second degré, la répartition des moyens entre les
académies a été préparée depuis le mois
d'août ; le ministre a rendu ses arbitrages dimanche et j'ai donc
procédé à l'attribution aux académies lundi.
Les recteurs, courant décembre, vont tenir leur comité technique
paritaire académique et préparer la répartition de
l'enveloppe entre les collèges et les lycées. Cette
répartition sera effectuée en décembre ; début
janvier, chaque établissement scolaire recevra sa dotation horaire
globale, à charge pour eux de la colorer en poste suivant les
disciplines. Ces opérations seront terminées le 15 février
pour la rentrée scolaire de 1999.
M. le président
- Les mouvements et les affectations peuvent
dès lors commencer...
M. Bernard Toulemonde
- En effet. Il permettra l'ajustement de la
coloration des postes bien après le 15 février, date-butoir
initiale, les recteurs devant terminer le mouvement des personnels aux environs
du 15 juin, d'après le calendrier arrêté par le ministre.
M. Claude Domeizel
- Quelle a été l'évolution
des mises à disposition au fil des années ? Les
sommes correspondant au remboursement de ces postes sont-elles
réaffectées aux effectifs ou rentrent-ils dans la masse ?
M. Bernard Toulemonde
- C'est une question technique à
laquelle je ne suis pas en mesure de répondre. Vous songez là
à un système de postes gagés qui, grâce aux recettes
réalisées, permettrait de recruter un autre enseignant.
Je ne suis pas sûr que les choses se passent ainsi, mais je poserai la
question, et une réponse vous sera apportée.
La MGEN rembourse ainsi les 400 postes dont elle dispose. Je pense que l'argent
est réinjecté dans le système d'enseignement, mais je ne
sais pas à quel endroit précis...
M. Jean Bernadaux
- Parmi les 1.115 postes mis à disposition
des associations et des mutuelles, avez-vous comptabilisé la
fédération des oeuvres laïques, etc. ?
M. Bernard Toulemonde
- Absolument.
M. Jacques Legendre
- Vous avez rappelé qu'un certain nombre
d'organismes remboursent la valeur des postes qui leur sont attribués.
J'ai souvenir d'un débat entre M. Bayrou et les organismes en
question, auxquels il avait été envisagé un moment de
retirer ces postes. Je ne me souviens plus très bien de la façon
dont cela s'est terminé, mais il me semble que le ministère
accordait une subvention aux dits organismes ! Il serait peut-être
bon de le préciser...
M. Bernard Toulemonde
- J'ai vécu cette période, car
j'étais à l'époque directeur des affaires
générales à l'éducation nationale, en charge de
différents dossiers.
Lorsque M. Monory est devenu ministre de l'éducation nationale, en
1986, il s'est inquiété du volume des mises à disposition,
qui équivalaient à l'époque à 2.200 emplois.
M. Monory a alors supprimé la plupart des mises à disposition,
suscitant la colère des associations concernées, par ailleurs
assez puissantes. M. Monory a finalement remplacé les mises
à disposition par des détachements payés par les
organismes destinataires, qui bénéficiaient en contrepartie d'une
subvention de l'éducation nationale.
J'ai quitté le ministère en juillet 1987, et je ne sais pas si ce
système de subventionnement des associations subsiste encore.
M. le Président
- S'il subsiste, cela relève-t-il de
votre direction ?
M. Bernard Toulemonde
- Non. C'est la direction des affaires
juridiques qui gèrent la plus grande partie des mises à
disposition.
M. Jacques Legendre
- Le ministère subventionne-t-il les
organismes afin qu'ils lui remboursent les enseignants qui leur sont
fournis ?
M. le Président
- Je suppose que le ministère assume
la rémunération de certains des 1.115 enseignants mis à
disposition sans percevoir de compensation de l'association ou de l'organisme
auprès desquels ils se trouvent...
M. Bernard Toulemonde
- Absolument...
M. le Président
- Peut-on en connaître la
répartition ?
M. Bernard Toulemonde
- Actuellement, ces mises à
disposition font l'objet de deux réserves au sein du ministère de
l'éducation nationale : une réserve de postes
gérés par la direction des affaires juridiques et une autre
auprès de ma propre direction. Il existe donc une division. Quand
j'étais directeur, j'étais le seul à gérer les
mises à disposition...
Je ne dispose pas de tableau complet, mais vous en aurez un mentionnant le
remboursement éventuel des organismes bénéficiaires.
La Cité des sciences et de l'industrie bénéficie ainsi de
19 mises à disposition, qu'elle rembourse à l'éducation
nationale, mais je suis persuadé qu'elle ne perçoit pas de
subvention en échange. On trouve également les
collectivités territoriales, les mutuelles comme la MAIF ou la MGEN,
l'Association générale des instituteurs et institutrices des
écoles maternelles, etc...
M. Claude Domeizel
- Quel est le régime indemnitaire des
personnels ? Qui le gère et quelle place tient-il dans le
budget ?
Quelle est par ailleurs la place tenue par les crédits d'action sociale
en faveur du personnel ?
M. Bernard Toulemonde
- La direction dont j'ai la
responsabilité gère les heures supplémentaires. Les
enseignants ne perçoivent quasiment pas d'indemnités.
Ils touchent des indemnités de professeurs principaux, qui remontent -si
je ne m'abuse- à plusieurs dizaines d'années, des
indemnités de suivi et d'orientation qui ont été
revalorisées au moment du plan Jospin, en 1989, des indemnités
d'affectation dans les ZEP, ainsi que des indemnités d'aide au logement
pour les instituteurs, celles-ci remplaçant le logement qui leur
était autrefois attribué.
Par contre, je gère, au titre du chapitre 31-95, une masse de
5 milliards de francs d'heures supplémentaires
effectuées par les enseignants, de façon plus ou moins volontaire
selon les cas, un enseignant pouvant être contraint à effectuer
deux heures supplémentaires. Il s'agit là d'une variable
d'ajustement...
M. le Rapporteur
- A combien de personnes cela
équivaut-il ?
M. Bernard Toulemonde
- Cela représente 38.744 postes.
M. le Rapporteur
- ... J'ai également posé une
question relative aux dysfonctionnements, afin d'en tirer des enseignements
d'une année sur l'autre, mais je pense que ceci ne relève pas de
votre direction...
Je vous ai en outre interrogé à propos du nombre important de
disciplines, ainsi que sur les différences de gestion qui existent de
votre point de vue entre l'enseignement privé sous contrat et
l'enseignement public...
M. Bernard Toulemonde
- En effet... Parmi les 350 disciplines
que j'ai évoquées, le gros du bataillon est constitué par
les lettres, qui constitue une matière multidisciplinaire : un
professeur de lettres classiques enseigne en effet le français, le grec
et le latin.
En économie et en gestion, on trouve des professeurs qui enseignent
plusieurs matières, mais la tendance générale est à
une très forte spécialisation, à la mesure de
l'avancée de la science ; au fur à mesure que les sciences
se sont complexifiées, on a assisté à une
scissiparité des disciplines. Aujourd'hui, il existe des professeurs
d'histoire et de géographie, mais ce corps connaît quelques
tensions, certains s'estimant capables d'enseigner une des deux disciplines,
mais non l'autre.
Personnellement, je pense que la finesse des disciplines est excessive. Je suis
moi-même professeur de droit. Dans les facultés, un professeur de
droit public doit être capable d'enseigner à la fois le droit
constitutionnel, les finances publiques et le droit international. Le spectre
des cours qu'on peut lui confier est donc relativement large. Aujourd'hui, on
ne peut confier à un professeur de russe qu'un enseignement de russe.
S'il n'y a pas d'élèves, que faire ? C'est là tout le
problème...
Je sais qu'il existe des querelles à propos des PEGC. Elles existaient
déjà dans le passé et ressurgissent de temps à
autre à propos de professeurs bivalents qui dispensaient deux
disciplines.
Il est évident que ceci facilite très nettement la gestion. Dans
les petits collèges ruraux, la disparition des PEGC, du fait de
l'extinction progressive du corps, va poser des problèmes dramatiques,
car on ne trouvera personne pour assurer un bloc horaire de 5 heures pour telle
ou telle langue vivante.
On est allé très loin dans la finesse des disciplines, et il
convient peut-être de ne pas poursuivre dans cette voie...
M. le Président
- Vous avez évoqué les
lettres, mais n'est-ce pas également vrai pour les disciplines
techniques ? N'a-t-on pas développé une
spécialisation de plus en plus importante, qui a favorisé des
disciplines extrêmement pointues ?
M. Bernard Toulemonde
- Absolument. On a aujourd'hui des
spécialités extraordinaires en plasturgie, en
électromécanique. On trouve à Paris des sections
professionnelles de tailleurs, de bottiers, de bijoutiers, dont les professeurs
sont extrêmement spécialisés. Il n'en existe que cinq sur
l'ensemble du territoire national !
S'agissant des dysfonctionnements, le ministre m'a donné mandat à
mon arrivée pour modifier les rapports entre l'administration centrale
et les académies, et nous sommes actuellement engagés dans
une procédure de contractualisation. Nous demandons aujourd'hui aux
académies de mobiliser l'ensemble des acteurs internes et externes
autour d'un projet -qui doit bien entendu s'inscrire dans la politique
nationale de l'éducation- l'administration centrale devant y affecter
les moyens financiers nécessaires à sa réalisation.
Nous passons en ce moment tous nos après-midi avec le recteur et les
inspecteurs d'académie d'Amiens, afin d'échanger nos points de
vue sur les problèmes rencontrés par cette académie et
étudier les moyens de l'aider à obtenir de meilleures
performances scolaires.
Concernant l'enseignement public et l'enseignement privé, je dois
très honnêtement reconnaître que l'enseignement privé
bénéficie d'une souplesse de gestion que ne connaît pas
l'enseignement public. Dans le privé, la notion de poste n'existe pas
budgétairement. On raisonne en heures, et non en postes. Ces postes sont
fongibles et peuvent être affectés au premier ou au second
degré, jusqu'au BTS.
Lorsqu'on retire un poste dans l'enseignement primaire privé, celui-ci
peut être affecté à un BTS, ce qui n'est évidemment
pas possible dans l'enseignement public, les postes étant
spécialisés par chapitre.
Autre souplesse, celle concernant les personnels, qui s'en plaignent
d'ailleurs : les chefs d'établissement peuvent attribuer des
services incomplets aux personnels. Dans l'enseignement privé, les
personnels disposent d'un contrat signé par l'autorité
académique avec l'établissement. Le professeur est contractuel de
droit public jusqu'à un certain seuil, qui est celui du demi-service, et
bénéficie de la Sécurité sociale, etc.
Au-delà, c'est le chef d'établissement qui fixe la quotité
horaire de cette personne. D'une année sur l'autre, en fonction des
besoins, telle personne qui faisait 18 heures peut ne plus en faire que 16 ou
17, avec un plancher de 9 heures.
Les chefs d'établissement n'abusent toutefois pas trop de cette
souplesse, même si, comme dans toute collectivité humaine,
certains peuvent parfois trop en user.
Pour le reste, les décharges syndicales existent dans le privé
comme dans le public, selon le même système, depuis 1976. Je ne
dispose pas du nombre de déchargés syndicaux de l'enseignement
privé. C'est la direction des affaires juridiques qui le gère. En
dehors de ces souplesses, les modes de gestion sont à peu près
les mêmes...
M. le Président
- La conversion de la masse horaire
attribuée aux inspections académiques en équivalent temps
plein donne-t-elle lieu à consultation des personnels par
l'intermédiaire de leurs représentants ? Les comités
techniques paritaires sont-elles consultés ?
M. Bernard Toulemonde
- La réponse est affirmative, mais pas
nécessairement dans le détail de la dotation horaire globale de
chaque établissement.
En revanche, la structure pédagogique finale de chaque
établissement fait l'objet d'un examen en comité technique
paritaire académique -ou départemental en ce qui concerne les
collèges...
M. le Président
- A quel moment ?
M. Bernard Toulemonde
- L'examen de la structure pédagogique
des établissements -académique pour les lycées,
départemental pour les collèges- interviendra le 15 janvier.
M. le Rapporteur
- Recourez-vous au monde économique -chefs
d'entreprise, artisans pour répondre à des besoins ponctuels et
limités dans le temps ?
Quelle est la part de cette sous-traitance dans le budget ?
M. Bernard Toulemonde
- Cela me paraît une très bonne
question... Il existe dans l'enseignement supérieur un
système de professeurs associés, professionnels qui, durant
quelques semaines, apportent leur concours à l'enseignement
supérieur. Ceci est très bénéfique à
l'ensemble du système comme aux étudiants. C'est en particulier
vrai pour les IUT, qui bénéficient de personnels
extérieurs.
Le même système a été créé par
décret début 1993 pour l'enseignement supérieur, en
particulier technologique et professionnel.
Malheureusement, ce décret n'a jamais fait l'objet de la moindre mesure
d'application, ce qui me paraît extrêmement fâcheux. C'est
une voie dans laquelle on pourrait encourager l'éducation
nationale !
M. le Président
- Qui était alors ministre ?
M. Bernard Toulemonde
- Le décret a été pris
sous Jack Lang. J'étais au cabinet à ce moment-là...
M. le Président
- Je me rappelle des discussions que l'on
avait eues à ce sujet, en particulier au Parlement.
Vous avez évoqué les décharges de service des directeurs.
Ce système n'est pas très ancien. Il a été
amélioré par étape, au bénéfice des
personnels. Selon vous, certaines décharges de service
correspondent-elles à des arrangements entre les inspecteurs
d'académie et les organisations syndicales ?
M. Bernard Toulemonde
- Les décharges de directeurs
d'école représentent actuellement 6.797 postes, auxquels il faut
ajouter 110 pour les directeurs d'établissements
spécialisés. Les maîtres des classes d'application des
écoles normales bénéficient en plus d'une décharge
de service réglementaire qui équivaut à 1.868 postes.
M. le Président
- Mais ils doivent disparaître...
M. Bernard Toulemonde
- Non, car ces classes d'application sont
aujourd'hui rattachées aux IUFM.
M. le Président
- Portent-elles toujours le même
nom ?
M. Bernard Toulemonde
- Il faut que je vérifie. Je pourrais
peut-être demander au ministre si le maintien de cette situation, qui se
perd dans la nuit des temps, est justifié...
Vous avez fait allusion à certains arrangements. J'ai été
recteur d'académie et inspecteur général de
l'éducation nationale. On achète ça et là la paix
sociale, cela me paraît évident. J'ai découvert pour ma
part une situation et, avec l'inspecteur qui m'accompagnait, nous avons
alerté le ministre.
Ces représentants syndicaux, qui ne bénéficient que d'une
décharge partielle de service, sont censés enseigner une partie
de leurs temps. Or, dès qu'ils atteignent une certaine
responsabilité, ils sont dans l'impossibilité matérielle
d'assurer les quelques heures qu'ils doivent effectuer.
J'ai ainsi découvert qu'un chef d'établissement avait
transformé une décharge partielle de service d'un
représentant syndical en décharge totale. Nous lui avons fait
remarquer que c'était totalement irrégulier et qu'il n'en avait
pas le droit. Il nous a expliqué que, cette personne étant
fréquemment absente du fait de son mandat, il lui avait accordé
une décharge totale dans l'intérêt des élèves.
Nous avons fait un rapport spécial au ministre pour lui signaler ce
fait, qui n'était peut-être pas complètement isolé.
M. Claude Domeizel
- On n'a aucune idée du nombre de fois
où cela peut se produire ?
M. Bernard Toulemonde
- Non, c'est impossible. Il faudrait envoyer
des inspecteurs dans chaque établissement pour le vérifier -et
encore, cela peut être masqué aisément.
M. Jean Bernadaux
- Les directeurs d'école, à Paris,
sont-ils complètement déchargés ?
M. Bernard Toulemonde
- La situation parisienne est très
particulière. Elle remonte à plusieurs dizaines d'années...
M. le Président
- Ils avaient un statut particulier.
L'ont-ils toujours ?
M. Bernard Toulemonde
- Tout à fait. Tous les directeurs
d'école parisiens sont totalement déchargés de service,
quel que soit l'effectif. Ceci fait d'ailleurs l'objet d'un remboursement par
la Ville de Paris au ministère de l'éducation nationale.
En 1982, Alain Savary a abaissé le service des PEGC de 21 à 18
heures. Les professeurs parisiens, quant à eux, effectuaient
déjà 18 heures depuis longtemps, la Ville de Paris prenant
à sa charge le remboursement de la différence. La Ville de Paris
finance également certains intervenants extérieurs ;
l'instituteur se trouve ainsi déchargé de fait d'une partie de
son service en matière de sport, de musique, de dessin, etc...
M. Jean Bernadaux
- ... Avec présence obligatoire de
l'enseignant.
M. Bernard Toulemonde
- Théoriquement. Il faudrait un
inspecteur derrière chaque enseignant. Je préfère donc ne
pas faire de commentaires...
M. le Rapporteur
- De combien de personnes s'agit-il ?
Quelques milliers ? Quelques centaines de milliers ? On peut les
déduire par différence ?
M. Bernard Toulemonde
- Cela ne concerne sûrement pas
quelques milliers de postes !
Mme Vuaillat -pour prendre un exemple que vous connaissez tous, et sans vouloir
personnaliser le débat- est secrétaire générale du
SNES et, théoriquement, continue à enseigner. Elle
bénéficie une décharge partielle de service mais, de fait,
comment voulez-vous qu'elle assure les heures qui lui incombent ? Je ne
remets pas en cause sa conscience professionnelle, car je suis persuadé
qu'elle tient à effectuer les heures en question, mais il existe des cas
de figure où elle ne le peut pas !
Cette décharge partielle de service est donc une décharge totale,
et j'imagine que le chef d'établissement, sous les cris des parents
d'élèves, réclame que cette personne soit remplacée
définitivement.
Il s'agit là d'une situation tout à fait marginale. Contrairement
à ce qu'on pense, le système n'est pas si mal géré
que cela !
M. le Président
- Les directeurs d'école
privée bénéficie-t-il des mêmes
décharges ?
M. Bernard Toulemonde
- Tout à fait. L'accord Lang-Cloupet
de 1992, que j'ai préparé auprès du ministre, a
aligné les directeurs d'école de l'enseignement privé sur
ceux du public.
M. le Président
- S'agit-il du même
barème ?
M. Bernard Toulemonde
- Absolument.
M. Claude Domeizel
- Vous avez indiqué que les directeurs
d'école de la Ville de Paris étaient déchargés et
que la Ville de Paris remboursait la totalité...
M. Bernard Toulemonde
- Non : la Ville de Paris paye la
différence par rapport au système de droit commun...
M. Claude Domeizel
- Il existe donc une convention entre la Ville
de Paris et l'éducation nationale.
M. Bernard Toulemonde
- En effet.
M. le Président
- C'est une vieille affaire...
Un intervenant
- Combien cela représente-t-il de
postes ?
M. Bernard Toulemonde
- Je n'en sais rien. Je poserai la question
au directeur des affaires financières. On devrait le retrouver en tout
état de cause dans le budget de la Ville de Paris.
Un intervenant
- Même les écoles maternelles ?
M. Bernard Toulemonde
- Oui.
M. le Président
- C'était déjà le cas
bien avant que la Ville de Paris ait un maire...
M. Bernard Toulemonde
- Cela remonte au temps de l'ancien
département de la Seine. D'ailleurs, certaines parties des
départements de la couronne connaissent la même situation, et le
conseil général rembourse le ministère de
l'éducation nationale.
M. Claude Domeizel
- La Ville de Paris attribue donc des fonds qui
sont affectés ?
M. Bernard Toulemonde
- Oui.
M. le Président
- On n'a pas abordé le sujet des
classes préparatoires ou après le baccalauréat...
M. Bernard Toulemonde
- Les professeurs de classes
préparatoires ont une quotité de service bien inférieure
à celles des autres professeurs. Les professeurs de classes
préparatoires -qui sont bien entendu tous agrégés- sont
tenus, si je ne m'abuse, à 8 heures d'enseignement par semaine au lieu
de 15 heures.
Ces professeurs, en dépit du fait qu'ils ne dispensent que 8 heures
d'enseignement par semaine -ce qui est fort prenant compte tenu du niveau des
élèves- remplissent tout de même des obligations de service
analogues à celles de leurs collègues, dans la mesure où
ils effectuent beaucoup d'heures supplémentaires et d'heures "de colle",
qui sont au fond une préparation intensive des élèves aux
concours.
M. le Président
- C'est vous qui en avez également la
responsabilité ?
M. Bernard Toulemonde
- Absolument.
M. le Président
- Il s'agit d'un mouvement spécial.
Ce n'est pas le même dispositif que celui que vous avez décrit
tout à l'heure...
M. Bernard Toulemonde
- C'est l'inspection générale
qui choisit les professeurs.
M. le Président
- Merci, Monsieur le Directeur.
Si nous avons besoin d'autres informations, nous vous les demanderont.
M. Bernard Toulemonde
- Je reste à votre disposition,
Monsieur le Président.
M. le Président
- Nous poursuivrons notre enquête en
essayant d'y voir le plus claire possible dans un ensemble qui est très
complexe...
M. Bernard Toulemonde
- Je pense très honnêtement que
les dérives ne sont pas celles que l'on croit !
M. le Président
- Vous ne nous avez pas donné les
évolutions d'une année sur l'autre, ni précisé vos
objectifs pour réduire les pertes en ligne dont vous avez fait
état. Pourriez-vous nous les indiquer ?
M. Bernard Toulemonde
- C'est entendu, Monsieur le Président.