CONCLUSION
Au terme de ce travail d'évaluation, trois types de remarques nous paraissent pouvoir être présentés.
o La tonalité nécessairement critique des observations développées dans le corps de notre rapport ne saurait affecter le jugement positif qui peut être porté sur la loi, dans son ensemble : l'effort de clarification, de rationalisation et d'encadrement entrepris en 1994 a, sur beaucoup de points, porté ses fruits. Les difficultés d'application que nous avons relevées n'étaient pas toutes inévitables. Le législateur devra en tirer la leçon et tenir compte, dans son travail de révision, des souhaits exprimés par les professionnels sans sacrifier le respect des principes aux commodités de la pratique.
o Dans les domaines les plus sensibles qui touchent à la conciliation du respect de la vie et du développement de la recherche indispensable au progrès thérapeutique, le législateur n'avait pas pu, ou n'avait pas voulu, apporter de réponses définitives. De nouvelles solutions devront être recherchées, sachant qu'elles n'auront qu'un caractère provisoire, eu égard aux changements incessants qu'impose à la réflexion la progression continue de la science.
o Les problèmes que pose le développement de la biomédecine ne peuvent se satisfaire d'une approche purement nationale. Cette constatation, énoncée dans l'introduction du rapport, s'est vérifiée tout au long de notre étude. Dans le domaine des greffes comme dans celui de l'assistance médicale à la procréation, les exigences de la sécurité sanitaire et le développement de la recherche commandent une coopération entre Etats qui passe par une unification des principes et des pratiques.
Une fois posée cette affirmation, force est de constater que la réalité juridique est encore très en deçà de ces exigences.
La Convention européenne de biomédecine constitue, certes, un progrès non négligeable vers l'harmonisation des législations nationales adoptées par les Etats membres du Conseil de l'Europe mais les réserves dont certaines parties signataires assortiront leur adhésion ne résoudront pas les divergences qui subsistent en matière, notamment, de recherche sur l'embryon. De la même façon, la position nuancée et, en fin de compte, très respectueuse des particularismes nationaux qu'a récemment adoptée le Groupe européen d'éthique tend à accréditer la prévalence du principe de subsidiarité dans un domaine où l'intégration devrait être fortement encouragée par la création d'organismes communautaires inspirés, par exemple, de l'Agence européenne du médicament.
A l'échelon mondial, la situation est plus préoccupante encore puisque l'accord des Etats membres de l'ONU sur un texte purement proclamatoire -la Déclaration universelle sur le génome humain et les droits de l'homme- n'a pu être obtenu qu'au prix d'un silence sur l'expérimentation embryonnaire.
L'instauration d'une charte bioéthique mondiale dont le non-respect pourrait fonder un droit d'ingérence et le prononcé de sanctions par une juridiction internationale relève assurément, pour l'heure, de l'utopie. On nous pardonnera de céder un court instant à cette tentation dans la conclusion de ce rapport.