6. Intervention de M. Jean SALMON, vice-président de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA)
M.
Jean SALMON
. - L'activité agricole est une activité
économique qui s'exerce sur l'ensemble du territoire. Nous sommes
très concernés par tous les problèmes de fiscalité
écologique. La profession agricole a vécu l'annonce de la TGAP au
mois de juillet avec une certaine inquiétude, car depuis plusieurs
années le monde agricole a essayé d'initier un certain nombre de
démarches volontaristes de la part des agriculteurs et a progressivement
intégré la démarche des agences. Depuis plusieurs
années, un certain nombre de secteurs - et je pense à
l'élevage- sont sur la voie de l'intégration au système
des agences.
Nous avons été d'autant plus surpris que, à la suite de la
communication de Mme Dominique VOYNET au conseil des ministres du mois d'avril
1998, un groupe de travail eau-agriculture a été mis en place au
ministère de l'Environnement, avec des sous-groupes ayant pour mission
de réfléchir à l'opportunité d'une taxe de cette
nature. Est-ce là la véritable concertation ?
La profession agricole est implantée sur l'ensemble du territoire, ce
qui renvoie à une gestion des problèmes de l'agriculture par
bassin. De plus en plus, nous nous rendons compte qu'il n'y a pas de solution
nationale parce qu'il n'y a pas une agriculture, mais il faut répondre
dans chaque région et département à des problèmes
particuliers, et cela appelle un rapport de proximité avec les
intervenants.
Bien sûr j'ai entendu pas mal de choses ce matin, et même à
demi mots, j'ai senti que l'on reprochait à l'agriculture de
n'être pas entrée dans le dispositif. Je crois qu'un certain
nombre de dossiers en discussion depuis quelques années font que
progressivement - si les accords sont respectés - une partie de
l'agriculture, notamment l'élevage et les rejets ponctuels, entrera dans
le dispositif des agences. Restent les problèmes des pollutions diffuses
qui sont plus difficiles à traiter. Mais cette approche territoriale
reste pour nous indispensable.
Notre inquiétude principale, c'est qu'à travers cette TGAP, on
abandonne l'idée qu'au delà du principe pollueur-payeur, il
puisse y avoir un principe non payeur-non pollueur qui s'applique à
partir du moment où les agriculteurs ont fait les efforts
nécessaires pour que leur activité ne soit plus polluante. Sans
compter que les agriculteurs continuent à participer à
l'entretien de l'espace à travers leur travail de tous les jours.
Compte tenu de la dispersion des agriculteurs, toute mesure de prise en compte
de l'environnement qui n'aura pas un caractère volontariste de leur part
est vouée à l'échec. Ceux qui ne respectent pas les
règles du jeu doivent être soumis à redevance, mais ceux
qui les respectent ne doivent pas être soumis aux mêmes
contraintes.
C'est dans cet état d'esprit que la profession agricole, à
travers les chambres d'agriculture, s'est engagée dans le suivi du
programme d'action de la directive nitrate en engageant des moyens pour
favoriser l'évolution des pratiques agricoles et permettre aux agences
de bassin et au ministère de faire le point, avec la profession agricole.
Lors du dernier comité de pilotage, nous avons eu un long débat
sur ces orientations. Un représentant du ministère de
l'Environnement a siégé à nos travaux. La démarche
la plus constructive entend mobiliser les agriculteurs, par la voie de la
sensibilisation, pour qu'ils s'approprient les démarches et les actions
volontaires vis-à-vis de l'environnement. Une taxe qui serait
imposée à tous les intrants liés à l'agriculture
présente deux écueils : ou bien elle est à un niveau tout
à fait dissuasif, et elle crée une distorsion de concurrence par
rapport aux autres pays de la communauté européenne, et en tout
cas, par rapport au reste du monde dans le cadre des négociations de
l'Organisation mondiale du commerce (OMC) ; ou bien elle est faible, et elle
constitue un droit à polluer qui ruine tous les efforts faits au sein du
monde agricole.
Face à cette situation, nous restons attachés à un
dispositif favorisant les agents qui travaillent bien, et pénalisant les
autres. C'est à travers le dispositif actuel des agences de l'eau que
nous pourrions le faire de la manière la plus pragmatique qui soit.