C. LES EFFETS THÉORIQUES D'UNE BAISSE DU COÛT DU TRAVAIL SUR L'EMPLOI
1. Des effets favorables au niveau des entreprises et des choix de consommation des ménages
•
Toutes choses égales par ailleurs, la baisse du coût du travail
incite les entreprises à privilégier des modes d'organisation et
de fabrication comportant une plus grande part de travail, et une moindre part
d'équipement ou d'investissements immatériels. La baisse du
coût du travail par rapport à celui du capital tend donc à
ralentir la " substitution du capital au travail " dans les
entreprises, c'est-à-dire leurs investissements de rationalisation et de
modernisation. Il en résulte un ralentissement des gains de
productivité, donc un
enrichissement du contenu en emplois de la
croissance
: à croissance du PIB égale,
l'économie crée plus d'emplois.
Cet effet est relativement
lent
. Il n'intervient en effet qu'au fur et
à mesure que les entreprises modifient leur organisation ou renouvellent
leur outil de production. Il est de ce fait difficile à mesurer.
Cet effet est vraisemblablement d'autant plus important que la baisse du
coût du travail apparaît
pérenne
: en effet, les
entreprises ne modifieront pas leurs modes de production pour
bénéficier d'aides qui leur semblent transitoires.
Cet effet d'enrichissement du contenu en emplois de la croissance est
symétriquement défavorable à l'
investissement
, et
de ce fait
ambigu
pour la
croissance
à long terme. En
effet, il ralentit la modernisation de l'économie et la diffusion du
progrès technique, ce qui peut freiner la croissance et repousser
certains ajustements. Cependant, en période de chômage durable, la
réinsertion dans l'emploi de personnes éloignées du
marché du travail prévient la dégradation de leur
"
capital humain
", et accroît donc le potentiel de
croissance de l'économie à long terme.
• Par ailleurs, la baisse du coût du travail, toutes choses
égales par ailleurs, se traduit immédiatement ou bien par une
baisse des
prix
des biens et services si les entreprises maintiennent
leurs marges, ou bien par une hausse des
profits
des entreprises, si
celles-ci maintiennent leurs prix de vente
24(
*
)
.
La baisse des prix nationaux est favorable aux consommateurs, et tend
à stimuler la
demande
intérieure. En outre, elle
accroît la compétitivité de la production nationale tant
sur le marché intérieur qu'à l'exportation, ce qui tend
à augmenter la production, donc l'
emploi
. Par ailleurs, la hausse
des profits favorise le désendettement des entreprises et leurs
investissements.
• Parallèlement, si les entreprises répercutent la baisse
du coût du travail sur leurs prix, il en résulte un changement de
la hiérarchie des
prix relatifs
, en faveur des biens et services
" intensifs en main-d'oeuvre ". L'altération des prix relatifs
entraîne en théorie une
modification
progressive des
choix des consommateurs
, au profit des biens et services intensifs en
main-d'oeuvre (en particulier les services à la personne), et au
détriment des biens intensifs en capital (en particulier les biens de
haute technologie). Cet
effet de " substitution
macroéconomique "
, qui favorise notamment l'émergence de
nouvelles activités de proximité, accélère le
développement de la " société de services ",
freine les importations (proportionnellement moins riches en services) et se
combine à l'effet de substitution microéconomique décrit
plus haut pour enrichir le contenu en emplois de la croissance.
2. Des effets favorables atténués par les effets récessifs du financement de la baisse du coût du travail
La
baisse du coût du travail peut trouver son origine :
- ou bien dans une
baisse
des
salaires nets,
qui risque
d'entraîner, d'une part un fléchissement de la consommation des
ménages, d'autre part une démotivation des salariés, donc
une dégradation de leur productivité ;
- ou bien dans une baisse des
charges sociales
assises sur les salaires.
A déficit public constant, cet allégement doit être
compensé
par une contraction des dépenses publiques ou par
une augmentation d'autres prélèvements, ces deux mesures
présentant également des effets récessifs à
court-moyen terme.
Donc, dans tous les cas, le financement de la baisse du coût du travail
en atténue fortement les effets favorables sur l'emploi, dans une
proportion qui dépend des
modalités
de ce financement (cf.
annexe 3
).