C. LES EFFETS PERVERS DES SYSTÈMES DE TARIFICATION
a) L'inadaptation du PMSI au cancer
Les
modalités de tarification actuellement en pratique dans le
système de soins sont inadaptées aux spécificités
de la lutte contre le cancer, et peuvent produire des effets pervers sur les
décisions thérapeutiques.
Ces insuffisances sont d'abord celles du PMSI. La concertation indispensable
à une réelle pluridisciplinarité est consommatrice de
temps. Or, elle n'est pas prise en compte par le PMSI. Le coût
additionnel de la concertation est évalué à 1,5 point ISA
pour les CLCC.
Par ailleurs, 4 GHM (Groupes Homogènes de Malades) seulement sont
sensés décrire toutes la cancérologie, à la
différence de la chirurgie qui est finement décrite et
cotée par le PMSI.
Le point ISA en cancérologie n'est de ce
fait pas très pertinent.
b) L'obsolescence de la nomenclature
Dans le
secteur privé à tarification, les prix sont fixés à
l'acte par l'Etat (K pour chirurgie, Z pour radiothérapie), sans rapport
avec les coûts réels. La nomenclature en cancérologie date
de vingt ans et est complètement dépassée.
Cette obsolescence est particulièrement marquée pour la
nomenclature en radiothérapie.
Les actes sont tarifés de
manière homogène, alors qu'une radiothérapie peut durer de
dix minutes à une demi-journée.
Globalement, la radiothérapie française s'estime en perte de
vitesse techniquement en raison de la contrainte financière, les
établissements n'ayant plus les moyens de s'offrir les appareils de la
dernière génération. Le tarif moyen d'une
radiothérapie est de 11.000 francs par patient, alors que son coût
réel est de 15.000 à 16.000 francs.
Or, les nouvelles techniques sont beaucoup moins nocives pour le patient. Les
traitements par radiothérapie peuvent devenir curateurs, et non plus
seulement palliatifs, grâce aux nouveaux appareils plus
précis.
c) Les aberrations de la tarification des médicaments
La
tarification des médicaments anticancéreux apparaît
particulièrement aberrante. Trois systèmes de remboursement des
mêmes médicaments coexistent : facturation à coût
réel avec marge bénéficiaire pour la chimiothérapie
ambulatoire délivrée dans des structures privées à
but lucratif, budget global pour l'hôpital public et privé
participant au service public, forfait pour la chimiothérapie en
hospitalisation privée à but lucratif.
Les déterminants implicites de l'orientation des malades à
l'intérieur du système de soins obéissent alors à
des déterminants plus financiers que médicaux.
Ainsi, les médicaments les plus chers ont été sortis du
secteur hospitalier, qui en avait auparavant l'exclusivité, dans le seul
but de contourner la contrainte du budget global. Mais les
chimiothérapies à domicile sont plus coûteuses pour
l'assurance maladie, et l'intérêt véritable du malade n'est
pas toujours respecté.
A l'inverse, des établissements sous budget global demandent parfois au
malade hospitalisé d'apporter ses propres médicaments
achetés dans le secteur ambulatoire.
Autre exemple d'aberration, le même traitement chimiothérapique
qui revient à 9.000 francs à un CLCC, dans le cadre d'appels
d'offres groupés, peut être facturé 13.000 francs à
l'assurance maladie par un établissement privé. Structurellement,
le CLCC a intérêt à hospitaliser, tandis que la clinique
privée a intérêt à traiter en ambulatoire.