B. L'AMÉLIORATION DES STATISTIQUES
La
mission de contrôle menée par votre rapporteur a
révélé les
défaillances de l'outil statistique
à la disposition de la Chancellerie
, aussi bien en ce qui concerne
la
gestion du personnel
qu'en ce qui concerne la
délinquance
et les motifs de classement sans suite
.
Les statistiques relatives à la délinquance sont ainsi
incapables de fournir un véritable tableau de bord sur
l'évolution de cette dernière, si bien que les Parquets sont
contraints de travailler sur les résultats obtenus par les policiers et
les gendarmes. A cet égard, certains Parquets ont fait remarquer
à votre rapporteur que les statistiques policières connaissent
chaque année des modifications dans leurs définitions sans
concertation avec la Chancellerie, ce qui rend difficile le suivi de
l'évolution de la délinquance d'une année sur l'autre dans
certains domaines.
Par ailleurs, il serait indispensable d'améliorer la grille des motifs
de classement sans suite en la complétant et en l'harmonisant. La
recherche précitée sur l'abandon des poursuites constate que
"
le motif du classement est invoqué de façon parfois
étrange par rapport au circuit de traitement ou au contenu du dossier.
L'obligation (pour des besoins informatiques) de cocher un motif de classement
sur un imprimé rend cette opération quelquefois artificielle,
voire dénuée de tout fondement
. " A cet égard,
votre rapporteur tient à signaler que certains procureurs de la
République demandent à leurs substituts de ne pas utiliser
certains codes de la Chancellerie qui leur semblent trop vagues ou
ambigüs, comme " laissé à suivre " ou
" divers ".
L'étude poursuit : "
l'impression globale tirée de
l'étude du fonctionnement du Parquet se confirme : les pratiques en
matière de classement ne correspondent pas à un traitement
standardisé mais à des habitudes propres à chaque section,
voire à chaque substitut ou greffier
. "
Selon le procureur de la République du Tribunal de grande instance de
Colmar,
M. René Pech
, la nouvelle grille des motifs de
classements sans suite mise en place par la Chancellerie en décembre
1997 constitue une avancée très importante. Elle ne permet
cependant pas de rajouter des sous catégories pour avoir une vision plus
fine des classements. Ainsi, cette nomenclature nationale ne permet pas de
distinguer suffisamment toutes les procédures qui relèvent du
domaine des alternatives aux classements. C'est pourquoi ce procureur a
ajouté aux 20 codes existants, définis par la Chancellerie,
12 codes additionnels.
Liste des codes de classemen t
Codes existants |
Codes additionnels |
||
1. |
Auteur inconnu |
51. |
Obligation de faire par OPJ |
2. |
Pas d'infraction |
52. |
Obligation de faire par délégué du PR ou PR |
3. |
Non caractérisé |
53. |
Classement malgré échec de l'obligation |
4. |
Poursuite innoportune |
54. |
Avertissement par lettre |
5. |
Laissé à suivre |
55. |
Admonestation verbale par OPJ |
6. |
Carence du plaignant |
56. |
Admonestation verbale par délégué PR |
7. |
Amnistie |
57. |
Sanction non judiciaire |
8. |
Retrait de plainte |
58. |
Eloignement administratif |
9. |
Action publique éteinte |
59. |
Régularisation : arrangement spontané |
10. |
Plaignant désintéressé |
60. |
Autre classement nécessaire |
11. |
Transaction administrative |
62. |
Obligation de faire par substitut |
12. |
Affaire purement civile |
63. |
Admonestation verbale |
13. |
Immunité |
|
|
14. |
Classement sous condition |
|
|
15. |
Médiation pénale |
|
|
16. |
Injonction thérapeutique |
|
|
17. |
Diffamation et injure |
|
|
18. |
Recherches infructueuses |
|
|
19. |
Etat mental de l'auteur |
|
|
20. |
Divers |
|
|
En
outre, les motifs définis nationalement par la Chancellerie appellent
certains commentaires :
- le motif n °5 " laissé à suivre "
paraît particulièrement ambigu et guère différent du
motif n °4 " poursuites inopportunes ";
- le motif n °20 " divers " paraît très
critiquable en tant qu'il risque de donner matière à toutes les
imprécisions possibles ;
- le motif n °3 " non caractérisé "
s'avère également très vague.
Votre rapporteur doit toutefois reconnaître que la Chancellerie a
tenu compte des remarques des Parquets et qu'elle a récemment
engagé une réforme de la statistique pénale. Cette
réforme a pour objectif de permettre à l'institution judiciaire
de produire des données quantitatives, mais également
qualitatives afin d'analyser l'évolution de la délinquance, les
réponses judiciaires et les manières d'opérer des
tribunaux.
S'agissant de la phase "Parquet", il sera possible de connaître :
•
l'origine de la saisine
(police, gendarmerie,
autres administrations, particuliers...) permettant ainsi de faire le lien avec
les statistiques des autres partenaires et renseigner plus aisément ces
derniers sur la suite réservée à leurs
procédures ;
•
la nature des affaires reçues par les
Parquets
afin d'évaluer le volume des affaires non pénales.
Jusqu'à présent, ces dernières qui n'étaient pas
identifiables et qui ne pouvaient juridiquement faire l'objet de poursuite
valable, étaient nécessairement classées sans suite et
venaient artificiellement s'ajouter aux procédures de nature
pénale classées sans suite ;
•
les motifs de classement
afin de quantifier les
affaires classées sans suite par grande catégorie :
classement pour motifs juridiques (absence d'infraction, infraction
insuffisamment caractérisée, prescription, amnistie...),
classement pour poursuite inopportune (désistement du plaignant,
préjudice ou trouble peu important...), classement après
réussite d'une procédure alternative (médiation, rappel
à la loi...) et, enfin, classement pour non-identification de l'auteur.
Il sera donc possible de calculer, au plan national mais également
tribunal par tribunal, des taux :
•
d'infractions juridiquement constituées dans
les procédures
•
de classement des infractions pour défaut
d'élucidation
•
de classement sur les infractions poursuivables
•
de réponse judiciaire sur les infractions
poursuivables
Par ailleurs, on pourra croiser la nature des affaires avec le type de motif
de classement sans suite.
Il faut également préciser que
deux nouveaux domaines seront
couverts par le champ de la statistique : l'exécution des peines et
les délais de traitement.
En ce qui concerne l'exécution des peines
, il sera possible
d'évaluer des taux de mise à exécution selon le type de
peine prononcée (amende, emprisonnement ferme, emprisonnement avec
sursis...) ; la nature de la condamnation (contradictoire, contradictoire
à signifier, défaut...) ainsi que le type d'infraction.
En ce qui concerne les délais de traitement
, les informations
disponibles à ce jour sont quasi inexistantes, alors que l'institution
judiciaire est très souvent interpellée sur cette question. C'est
pourquoi il est prévu que pour les affaires terminées et quel que
soit le type de procédure choisi, on pourra calculer un délai
moyen de traitement et de réponse par le Parquet en utilisant les dates
des faits, du procès-verbal, de l'enregistrement de la procédure
et des principales décisions prises.
Votre rapporteur ne peut qu'approuver cette réforme qui devrait
contribuer à une meilleure information sur l'activité des
Parquets. Cette plus grande transparence devrait en outre
accélérer la réforme des modes de travail dans les
Parquets .
En effet, les statistiques devraient révéler de grandes
disparités aussi bien dans le taux de classement sans suite que dans les
délais de traitement des affaires. Les Parquets les moins productifs
seront donc incités à s'inspirer des méthodes de travail
des Parquets les plus performants. La réforme des statistiques devrait
donc conduire à une plus grande circulation des informations, notamment
sur les initiatives locales et, à moyen terme, à
une
uniformisation des méthodes de travail dans le sens d'un meilleur
traitement de la délinquance.