4. Les usages industriels des OGM37( * )
Avec
l'émergence d'OGM de plus en plus nombreux, la palette des utilisations
industrielles des matières premières végétales
s'élargit.
La modification des peupliers destinés à l'industrie
papetière
Les "
lignines
" sont des polymères présents
chez certains végétaux qui, déposés sur les parois
de leurs cellules, renforcent la solidité de ces dernières, mais
constituent un handicap à l'utilisation industrielle de la biomasse
végétale. Par exemple, la qualité d'une pâte
à papier dépend en grande partie de l'élimination des
lignines qui, particulièrement coûteuse, est en outre une source
non négligeable de pollution des cours d'eau.
Les enzymes impliquées dans la formation des lignines ont
été identifiées et des peupliers transgéniques ont
été obtenus
38(
*
)
,
permettant de fabriquer expérimentalement du papier présentant
une quantité de lignine résiduelle très faible. Les
avantages attendus sont les suivants :
- augmentation de la capacité de production avec le même
volume d'intrants ;
- économie de produits chimiques d'extraction ;
- baisse des quantités de réactifs chimiques de blanchiment
du papier ;
- baisse de la pollution des eaux.
Si la diffusion de ce procédé aux espèces
forestières majeures s'opère, l'impact à l'échelle
de l'industrie papetière mondiale pourrait être
considérable.
La modification de la qualité des amidons
L'optimisation des qualités des amidons en vue de leur utilisation
industrielle est une autre perspective d'utilisation importante des OGM. Les
travaux dans cette direction sont déjà avancés, en ce qui
concerne, notamment, le maïs. En effet, l'amidon du grain de maïs
" normal " contient 25% d'amylose et 75% d'amylopectine. Les
modifications génétiques permettent de modifier ces proportions
(soit en augmentant la teneur en amylose, soit, au contraire, en amylopectine)
et donc de contrôler la qualité de l'amidon (taille des
granulés, viscosité, liant, notamment) et de le rendre le plus
proche possible des caractéristiques requises par ses applications
industrielles, ce qui diminue d'autant les traitements intermédiaires de
l'amidon, coûteux et polluants.
Rappelons que l'amidon de maïs est utilisé, en tant qu'agent de
texture, tant dans l'alimentation humaine, que dans la chimie, la pharmacie, la
papeterie, la cartonnerie, l'industrie des colles et adhésifs, le
textile, le bâtiment, la fonderie...
L'optimisation des oléagineux pour l'industrie
La transgénèse des oléagineux est une source potentielle
de
fabrication de lipides " sur mesure " pour diverses
industries
: cosmétiques, agro-alimentaire, carburants,
lipochimie.
Il s'agit d'induire dans la plante une " surexpression " ou une
" extinction " de certaines synthèses lipidiques. L'acide
éructique, par exemple, est un enjeu de taille, puisque ce corps gras
utilisé notamment pour la fabrication des lubrifiants, des
matières plastiques et des films, représente un marché
annuel de 150 millions de dollars aux Etats-Unis.
Mentionnons, par exemple, une transformation génétique
déjà réalisée du soja qui a permis d'obtenir une
plante riche à 85 % d'acide oléique, contre 15 % pour
la lignée parentale, grâce à la maîtrise des
gènes gouvernant le métabolisme lipidique de la plante (la
transformation génétique a permis d'éteindre l'expression
de l'enzyme qui " déssature " l'acide oléique en acide
linoléique). La conséquence industrielle de cette modification
est une production facilitée de l'huile de soja (meilleure
résistance à l'oxygénation, propriétés
émulsifiantes et gélifiantes améliorées) sans
parler de l'amélioration des qualités nutritionnelles (notamment
au regard des problèmes cardio-vasculaires).
La production de matières plastiques biodégradables par les
plantes
Il serait désormais possible de faire fabriquer des plastiques
biodégradables par les végétaux.
D'après l'article précité du n° 70 de la lettre
des départements scientifiques du CNRS : "
Parmi les
quelques polymères biodégradables, les polyhydroxyalkanoates
(PHAs) sont des polyesters qui s'accumulent sous forme d'inclusions chez des
espèces bactériennes. L'introduction chez Arabidopsis thaliana de
deux gènes importants pour la synthèse de cette molécule a
permis de démontrer
la possibilité de leur production par la
plante
(dont le développement est cependant affecté). Ces
travaux n'en sont qu'à leur début. Ils requièrent un
approfondissement des problèmes de compétition entre voies
métaboliques, de compartimentation, d'extraction... mais ils
ouvrent
une voie originale de production de nouveaux biopolymères par la
plante
. "
Les potentialités de développement des organismes
génétiquement modifiés sont donc très nombreuses,
même s'il est aujourd'hui difficile de recenser toutes les
possibilités offertes par cette technologie, ainsi que de prédire
quelles sont celles des applications du génie génétique
qui dépasseront le stade expérimental.
L'analyse des dossiers d'OGM déjà autorisés montre en
effet que le champ des applications qui se sont, pour l'instant,
concrétisées, est moins large que le tableau qui vient
d'être fait.