CHAPITRE II -
LES TENSIONS AU SEIN DES ESPACES
PÉRIURBAINS
Les espaces périurbains concentrent les tensions qui
résultent des transformations rapides de la société
française. Zones floues, sans identité propre, manteau d'Arlequin
composé d'un damier de zones industrielles, de quartiers d'habitation et
d'exploitations agricoles, ils échappent au modèle traditionnel
de la ville européenne.
Aujourd'hui,
la ville sort de ses murs et dépasse ses faubourgs et
ses banlieues
. Le modèle de la cité radiale centrée
sur le forum, protégée par son rempart ou ses boulevards, a
volé en éclats. Dans ce mouvement de recomposition, ses marges
elles-mêmes cherchent une nouvelle identité. Le faubourg,
naguère quartier, bâti autour ou en prolongation des murs de la
cité, puis progressivement intégré à la ville,
recevant un nom (qui ne connaît, à Paris, le faubourg
Saint-Germain ou le faubourg Saint-Antoine) se dissout également pour
constituer un espace partiellement ouvert, une zone sans limite aux confins de
la ville et de l'espace agricole ou naturel. L'espace rural n'est pas moins mis
à mal : ce qui était naguère " la nature ", ses
bois, ses champs, ses cours d'eau, est peu à peu gagné par
l'offensive urbaine qui, malgré son avancée
désordonnée, le conquiert peu à peu.
Trop souvent,
l'espace non urbanisé situé autour des villes n'est que le
" supplétif " de leur futur développement, un espace
" d'attente " dont l'identité spécifique
disparaît.
Espace colonisé et dévolu à la construction de centres
commerciaux, de lotissements pavillonnaires, de concessions automobiles et
d'hôtels à bon marché, sillonné de rocades et de
pénétrantes, défiguré par une accumulation de
panneaux publicitaires et de feux tricolores ou de ronds points, il perd peu
à peu son identité rurale sans parvenir à trouver un
visage proprement urbain.
Le manque d'unité, l'absence de réflexion paysagère et,
parfois, la laideur des zones périurbaines, le sentiment
d'inachèvement qu'elles inspirent résultent des tensions
humaines, foncières et paysagères qui s'y exacerbent, et qui ont
détruit l'équilibre prévalant initialement aux abords des
villes.