ANNEXE V :
LE SYSTÈME UNIVERSITAIRE AMÉRICAIN
par M.
André Maman, sénateur, représentant des Français
établis hors de France, ancien professeur à l'université
de Princeton
Avant de décrire le système universitaire
américain, il faut expliquer comment fonctionne le système
primaire, élémentaire et secondaire aux Etats-Unis. En effet,
sans comprendre cette partie du système éducatif, il serait
difficile de bien appréhender ce qui se passe au niveau universitaire.
Les études commencent assez tard aux Etats-Unis, à l'âge de
cinq ans. Certains experts américains voudraient que les études
commencent plus tôt, comme c'est le cas en Europe et spécialement
en France. Il existe des écoles privées, où les enfants de
moins de cinq ans peuvent être accueillis et ceci dès l'âge
de trois ans.
Il faut également noter que chaque Etat de l'Union est libre de
décider de sa politique éducative. En effet, il n'existe pas de
ministère de l'éducation nationale aux Etats-Unis. De ce fait,
certains Etats sont très avancés du point de vue de
l'enseignement qu'ils offrent, et d'autres très en retard. Cela
dépend de la situation financière de l'Etat. Certains sont
très riches et d'autres très pauvres. De plus, chaque Etat est
divisé en comtés indépendants les uns des autres. Le
système éducatif de chacun de ces comtés est
financé par ce que rapportent les taxes d'habitation et les taxes
locatives. Il existe donc de très grandes différences de niveaux,
entre Etats, selon les moyens financiers dont ils disposent.
Dans cet immense pays, il est facile d'évaluer le niveau des divers
systèmes éducatifs, et l'on sait très bien, sur une
échelle de valeurs de 0 à 100, où chacun se tient.
Comme le système éducatif public s'est rapidement
détérioré, on est en présence d'un système
privé d'une double nature :
1- Le système religieux : en général, c'est un
système catholique qui est de moins en moins important à travers
tout le pays, en raison du manque de personnel. La crise des vocations
religieuses et le manque d'attrait pour ces systèmes ont fait que de
nombreuses écoles ont été obligées de fermer,
d'autant plus que les crédits ont diminué.
Il faut noter en passant que les écoles privées, dites
françaises, c'est-à-dire accréditées par le
Ministère de l'Education Nationale et qui sont maintenant au nombre de
28, ont pu ainsi trouver des locaux disponibles, ce qui leur a permis une
installation plus rapide.
2- L'autre, c'est le système laïc, qui est de plus en plus
répandu. Il est cher, mais de très bonne qualité et nous
trouvons des écoles privées, en général de
très haut niveau, dans tous les Etats de l'Union. Les droits
d'écolage de ces écoles varient de 4.000 à 12.000 dollars
par an, uniquement pour les études. Si l'établissement accepte
des pensionnaires, ce qui est souvent le cas, ceux-ci doivent ajouter les frais
de pension.
Ces écoles privées forment une Association nationale des
écoles secondaires privées. Elles se connaissent bien, leurs
professeurs se réunissent souvent et on peut évaluer leur niveau
très facilement, d'après le succès qu'obtiennent leurs
élèves dans l'admission aux Universités américaines
les plus prestigieuses. Leurs professeurs sont excellents, ils ont souvent des
doctorats. Ils vivent dans le campus de l'établissement et sont sans
arrêt en contact avec les élèves, dont en plus ils dirigent
les activités sportives.
En ce qui concerne les étudiants, ceux-ci sont bien suivis. En
général, ils ont été sélectionnés
à l'entrée, pour être súr qu'ils pourront suivre les
cours offerts par l'établissement. Il est possible que malgré
cela, ils soient faibles dans certaines matières. A ce moment-là,
on leur donnera des cours spéciaux offerts par leurs professeurs, des
cours de soutien. Dans les deux dernières années, ils sont bien
orientés, au moment du choix à faire pour l'entrée
à l'Université.
Il faut remarquer que dans tous les établissements secondaires, publics
ou bien privés, religieux ou laïcs, tout est tourné vers
l'admission à l'Université.
Le problème de discipline, qui se pose surtout dans les
établissements publics urbains, n'existe nullement dans les
écoles privées, où quelles soient, et rarement dans les
établissements publics ruraux. Les couches sociales les plus pauvres, et
notamment les minorités raciales, résident dans les villes,
désertées par les gens ayant les moyens de vivre en dehors des
villes. C'est dans le centre des villes que se trouvent les écoles les
plus difficiles, où sévissent la violence, le crime, la drogue et
l'alcool. Les établissements de banlieue, surtout des grandes banlieues,
sont beaucoup plus súrs que ceux des grandes villes.
Ceci nous amène aux Universités.
Comme il n'y a pas d'examen général, analogue au
baccalauréat français, la comparaison entre les
élèves des différents Etats et des différents
établissements est très difficile. La notation aux Etats-Unis se
fait sur A, B, C, D, et F, qui est un échec. Or, il arrive que
d'établissement en établissement et d'Etat en Etat, un A ou un B
ne représentent pas la même chose. Dans ces conditions, il est
très difficile de faire un classement de valeur entre les divers
élèves posant leur candidature à l'admission dans une
Université. Par conséquent, pour pouvoir les évaluer, on
les oblige à passer des tests objectifs de deux sortes :
1- les SAT (Standardized Aptitude Tests)
2- les AP (Advanced Placements)
Ces tests sont élaborés par une organisation privée
à but non lucratif, qui se trouve à Princeton, mais qui n'a aucun
rapport avec l'Université. Il s'agit de "Educational Testing Service"
(ETS).
Dans toutes les matières enseignées dans les lycées, il
existe un test. Ces tests sont semblables dans tout le pays. Ils sont
passés dans les établissements scolaires, sous des
contrôles extrêmement sévères, à des dates
fixées nationalement.
Les SAT sont de deux ordres :
1- Verbal
2- Mathématique
Les scores obtenus dans ces tests, allant de 200 à 800, permettent de
situer les divers candidats, grâce à une évaluation qui
correspond en gros au QI du candidat. Si celui-ci n'est pas content de ses
résultats, il peut d'ailleurs repasser ces tests, qui ne seront
évidemment pas exactement les mêmes, mais qui donneront, de toute
façon, la même possibilité d'évaluation.
En ce qui concerne les AP, il existe plusieurs tests couvrant toutes les
matières importantes, comme par exemple anglais, langues
étrangères, histoire, mathématiques, physique, chimie,
biologie, etc... Là aussi, les scores vont de 200 à 800 et
permettent d'identifier les forces et les faiblesses des candidats.
On peut noter ici que, malgré le retard en âge pris au
départ, les étudiants arrivent à l'Université
à peu près au même âge qu'en Europe, à 17 ou
18 ans. Les systèmes universitaires européens pensent que les
Américains ont deux ans de retard sur leurs étudiants. Autrefois
le baccalauréat français donnait automatiquement deux ans de
crédit universitaire à l'étudiant qui l'avait. Depuis
1968, les diverses instances américaines ont considéré que
le baccalauréat français, ainsi que les diplômes
européens, avaient perdu une certaine partie de leur valeur et
aujourd'hui, le baccalauréat français ne donne qu'un an de
crédit universitaire, et ceci sous certaines réserves.
Les étudiants qui ont passé des tests d'aptitude (AP), et qui ont
eu des scores élevés dans trois de ces tests,
bénéficieront des mêmes avantages qu'un bachelier. De plus
en plus les étudiants américains les mieux qualifiés
arrivent, à la fin de leurs études secondaires, au niveau des
bacheliers français.
Le lycéen commence à s'intéresser à
l'Université deux à trois ans avant de finir ses études.
Dans le choix des Universités, où il fera une demande
d'admission, il sera aidé par un de ses professeurs, qui sera son
orienteur-guide, et ceci est vrai aussi bien dans le système
privé que public.
Comme l'élève conna»t très bien son niveau, par les
divers classements qu'il a obtenus dans les cours qu'il a suivis pendant ses
trois dernières années de lycée, ainsi que par les scores
obtenus dans les tests objectifs, il saura à peu près à
quelles Universités il doit faire une demande d'admission.
Le classement des Universités, par ordre de valeur, est transparent et
connu de tout le monde. Ceci facilitera la tâche de l'orienteur et celle
de l'élève, en lui permettant de savoir où il peut faire
une demande avec une chance d'être accepté. En raison des notes
qu'il a obtenues, il sera apte à faire une comparaison avec ses
camarades. Comme on les classe sans arrêt, par ordre de valeur, dans
toutes les matières, chacun sait exactement à quel niveau il se
trouve.
Des tests objectifs sont d'ailleurs obligatoires, si on veut entrer dans les
200 meilleures Universités américaines. Parmi les 3.000
Universités, réparties dans tous les Etats-Unis, l'on sait
exactement à quel niveau d'excellence se trouve chacune d'entre elles et
les 9 millions d'étudiants, qui vont fréquenter les
Universités américaines, connaissent bien leur classement.
Comment l'élève, en dernière année de
lycée, va-t-il se décider à propos des Universités,
où il fera une demande d'admission ?
A partir de septembre, l'élève demande à chaque
Université qui l'intéresse de lui envoyer des brochures, ainsi
qu'un dossier d'admission. A ce moment-là, il visite les campus, pour
juger de l'ambiance qui y règne, ce qui l'aidera à
déterminer ses choix.
Chaque Etat a un système universitaire public, qui comprend en
général plusieurs campus. Certaines de ces Universités
sont excellentes et peuvent être comparées aux meilleures
Universités privées. Je pense à l'Université
d'Indiana, à l'Université du Wisconsin, à
l'Université de Californie, par exemple, qui peuvent être
comparées à Harvard, Princeton, Stanford ou M.I.T.
A côté de ces Universités, il existe des Universités
privées, dont on sait exactement à quel niveau elles se trouvent
sur une échelle de 0 à 100. Ceci va faciliter l'admission des
étudiants qui feront, en général, une demande dans les
Universités qui correspondent à leur niveau. Les
Universités privées sont, sans arrêt, en contact avec les
candidats potentiels, à travers tout le pays: de septembre à
février, des "officiers d'admission", qui sont parfois
accompagnés de professeurs, se déplacent dans la zone
géographique qui leur a été désignée.
Ces "officiers d'admission" sont aidés par les nombreux réseaux
d'Associations d'Anciens Elèves, qui existent dans tout le pays et qui
sont en contact avec les lycées locaux. Ils se rendent
régulièrement dans ces écoles, pour vanter auprès
des élèves les mérites de leur "Alma Mater".
Ne sachant jamais les réponses qu'il obtiendra, un élève
fait, en général, des demandes dans 4 à 8
Universités, qu'il a choisies avec l'aide de ses professeurs, de son
orienteur, de sa famille et de ce qu'il a appris des "officiers
d'admission".
Les études de base (undergraduates) durent 4 ans et mènent au
diplôme de "Bachelor".
Il existe également des centaines de "Community College" de deux ans,
en
général proches de la résidence de l'étudiant, pas
chers et où l'on peut faire des études raisonnables. A la fin de
ces deux ans, l'étudiant peut s'arrêter ou bien continuer, en
entrant dans une Université de 4 ans, dans laquelle il ne fera que les
deux dernières années.
Les demandes d'admission se présentent sous la forme d'un dossier
complet de tout ce que l'élève a fait pendant ses quatre
dernières années de lycée.
Ce dossier est double :
1- académique : il comprend toutes les notes obtenues dans les divers
cours suivis et plusieurs lettres de recommandation, soit d'enseignants, soit
de personnes qui ont connu le candidat dans un autre cadre que le lycée.
Ce dossier comprend également toutes les notes des tests objectifs, SAT
et AP, que l'étudiant aura passés. De plus, l'élève
s'auto-évalue, il parle de lui-même, de ses plans d'avenir, de sa
motivation, etc...
2- Le dossier des activités extra-curriculaires, où
l'élève prouve qu'il a montré certaines qualités
personnelles :
a- le coeur : il doit avoir aidé des personnes handicapées, avoir
servi dans un hôpital, avoir aidé des élèves plus
jeunes, avoir participé aux oeuvres de sociétés de
bienfaisance, etc.
b- l'esprit d'équipe : il faut avoir fait des sports, avoir gagné
et avoir su perdre, avoir lutté pour l'équipe. Le candidat
indique tous les trophées qu'il a obtenus.
c- l'esprit d'initiative : c'est là qu'on peut évaluer le
potentiel du candidat, on note ce qu'il a créé, ce qu'il a
organisé, sa motivation...
d- l'esprit d'indépendance : notamment par rapport aux parents, pour
être súr que le candidat saura survivre dans un campus où,
les étudiants, venant d'un peu partout aux Etats-Unis et dans le monde,
se trouveront mêlés les uns aux autres.
Ces deux dossiers sont examinés par les "officiers d'admission", qui
les
évaluent. De septembre à février, ces administrateurs ont
voyagé dans tout le pays, pour prendre contact avec le plus grand nombre
d'établissements secondaires possible. A partir de février, ils
cessent de se déplacer pour s'enfermer dans leurs bureaux et
étudier les dossiers d'admission. Les candidats seront prévenus,
en avril, des résultats.
Autrefois, ces officiers faisaient passer aux candidats des interviews
personnelles, mais le nombre de ceux-ci augmentant sans cesse, ces interviews
sont devenues impossibles. Pour donner une idée, à
l'Université de Princeton, où l'on admet 1100 étudiants
par an, on compte environ 15.000 candidats, ce qui rend la sélection
extrêmement difficile. Le but est de choisir les élèves,
dont les deux dossiers, académique et extra-curriculaire, sont de haut
niveau.
Il est bien connu qu'il existe quatre catégories de candidats
bénéficiant de faveurs spéciales :
La première, c'est celle des étudiants de minorités
raciales, surtout les Noirs, considérés comme faisant partie
d'une catégorie spéciale, qui doit être favorisée.
Le but est d'essayer d'en admettre environ 10%. Dans cette catégorie
spéciale, on compte également les Hispaniques, les Chicanos et
les Indiens américains. Par contre, les élèves d'origine
asiatique se sentent brimés, car ils pourraient être admis en plus
grand nombre. Les Universités répondent qu'il est important que
les étudiants viennent de milieux variés et qu'il serait
innoportun d'admettre trop d'étudiants de la même origine raciale.
La seconde, les enfants des Anciens Elèves de l'Université, pour
lesquels on est plus indulgent. Les raisons qu'on invoque pour cela sont la
continuité, et le fait que ces étudiants s'adapteront, en
principe, mieux à l'Université, dont ils connaissent les
traditions. En réalité, c'est un moyen de remercier les Anciens
de tout ce qu'ils ont fait et continuent à faire pour aider
l'Université.
La troisième catégorie est celle des athlètes de haut
niveau qui, au moment de l'admission, auront été signalés
par les entra»neurs des divers sports, dont chacun aura droit à un
certain quota, selon le sport pratiqué.
Enfin, la quatrième catégorie, est celle de ce qu'on appelle "les
talents inhabituels", c'est-à-dire par exemple un acteur
déjà connu, un danseur, un sculpteur, une personne qui se soit
fait remarquer dans sa communauté et qui ait montré un certain
potentiel. Ce sont des qualités difficiles à évaluer par
des tests objectifs.
Les grandes Universités privées opèrent toutes selon ce
système, mais les Universités des Etats, qui acceptent souvent
des dizaines de milliers d'étudiants, ne peuvent agir de cette
façon. Par exemple, dans certains Etats, tous les élèves
résidant dans l'Etat, qui ont obtenu de bonnes notes et qui sont
classés parmi les meilleurs étudiants de leur
établissement, seront admis automatiquement. Quant aux
élèves venant d'autres Etats, leur admission sera plus dure et
leurs frais d'études plus élevés.
Chaque élève dans le pays trouvera toujours une Université
qui soit à son niveau, s'il veut poursuivre ses études.
Les Universités étant ma»tresses de leurs décisions,
l'élève fait, en général, de 4 à 8 demandes,
ne sachant jamais quelles seront les réponses qu'il obtiendra. Les
dossiers doivent être terminés au 15 janvier au plus tard, et au
mois d'avril suivant, arriveront les diverses réponses des
Universités. A ce moment-là, le candidat aura un mois pour
décider où aller, s'il a plusieurs réponses positives. Si
par contre il n'en a aucune, il va falloir qu'il se rabatte sur des
Universités de moindre niveau, qui sont prêtes à accepter
des candidats, même tardivement.
C'est au moment où il sait qu'il a été admis que le
candidat se préoccupera du côté financier de ses
études universitaires. Elles coútent très cher : pour
donner un exemple, à Princeton, les frais d'études sont de 28.000
dollars par an (148.000 francs), pour les études et la pension
complète du début septembre à fin mai. Cela ne comprend
pas les livres, les faux frais, les loisirs... Aucune Université,
qu'elle soit Université d'un Etat ou Université privée,
n'est gratuite. Les frais d'écolage, selon les Universités,
varient de 5 ou 6.000 dollars à 30.000 dollars.
Chaque Université est susceptible d'accorder une aide financière
aux étudiants qu'elle a admis. Cette aide dépendra de
l'importance des revenus de la famille, tels qu'ils appara»tront sur la
feuille d'impôts de l'année précédente, fournie par
les parents du candidat, à laquelle ils auront ajouté quelques
renseignements personnels supplémentaires, notamment le nombre
d'étudiants, dans la famille, qui vont fréquenter des
Universités en même temps.
Pour aider financièrement leurs étudiants à s'acquitter de
tous leurs frais, scolarité, pension, etc, les Universités
peuvent offrir trois possibilités d'aide :
1- Une Bourse, qui peut être complète ou partielle, selon les
revenus de la famille. Souvent, les fonds de bourses sont alimentés par
la générosité des Anciens Elèves.
2- Un travail dans le campus, avec des horaires variables, et qui peut
s'effectuer dans une bibliothèque, un dortoir, une
cafétéria, etc.
3- Enfin, l'étudiant peut obtenir de la part de l'Université un
prêt garanti par le Gouvernement fédéral ou par une banque
locale, prêt à 7% d'intérêt, dont le remboursement ne
commence à courir que six mois après la fin des études. A
noter que si l'étudiant poursuit des études avancées de
Ma»trise ou de Doctorat, le début du remboursement de ce prêt
sera reculé d'autant d'années qu'il restera étudiant. Il
n'est pas rare que l'on ait à rembourser ses prêts, la quarantaine
passée, surtout si l'on a fait des études de Ma»trise et de
Doctorat.
Un sentiment courant aux Etats-Unis est que les études universitaires ne
sont pas quelque chose de dú à l'étudiant, mais qu'il doit
les mériter. Si un étudiant a les qualités requises, il
trouvera toujours un moyen d'aider à financer ses études.
Depuis quelques années, pour éviter d'éliminer de
l'enseignement supérieur les étudiants des classes moyennes, il
arrive que certaines Universités prêtent à leur personnel
à bas intérêt de l'argent, pour le financement des
études de leurs enfants.
En ce qui concerne le fonctionnement des Universités américaines,
on doit dire qu'elles opèrent presque toutes sur le système de
deux semestres. Le semestre d'automne va de septembre à janvier et le
semestre de printemps, de février à fin mai. Fréquemment
dans le Sud des Etats-Unis, les Universités commencent plus tôt,
au mois d'aoút, pour terminer également plus tôt, en avril
ou au début de mai.
Certaines Universités, mais de nombre réduit, voulant utiliser au
maximum leur personnel et leurs locaux opèrent sur un système de
quatre trimestres. Les étudiants peuvent choisir les trimestres qui leur
conviennent, s'arrangeant en général pour en garder un par an,
pour leurs vacances qui peuvent être à n'importe quelle
période de l'année. C'est moins facile pour les membres du
personnel, notamment pour les enseignants, dont les vacances dépendront
de la décision du Département, de façon à
être súr qu'un certain nombre de cours sera offert à chaque
trimestre. Régulièrement, un très grand nombre
d'Universités offrent des cours d'été, que peuvent suivre
les étudiants inscrits à l'Université, ou bien des
étudiants venant d'ailleurs.
Ces cours, notamment en langues vivantes et en sciences, ne sont pas du
même niveau que ceux offerts pendant l'année
régulière, ne serait-ce que parce qu'il faut faire en six
à huit semaines, ce que l'on fait en un semestre.
La question des deux premières années à
l'Université se pose avec acuité, exactement comme en France.
Rappelons que pour éviter de prendre des étudiants qui ne soient
pas d'un niveau convenable, les Universités opèrent toutes par
sélection.
A l'Université de Princeton, par exemple, à son arrivée
dans le campus, en septembre, chaque étudiant de première
année se voit désigner un professeur conseiller. C'est un
professeur de l'Université, qui a volontairement accepté de
conseiller de 15 à 20 étudiants pendant leurs deux
premières années, et qui sera rétribué pour ce
service.
Pendant une semaine, à la rentrée, toute l'Université ne
s'occupe que des étudiants de première année. Avant le
début des cours, ils choisissent, avec l'aide de leur conseiller, les
cours qu'ils vont suivre, pendant le semestre. Un étudiant doit suivre
quatre cours par semestre, mais il peut en suivre un cinquième s'il le
veut, et être auditeur d'un sixième.
Pendant l'été précédant leur venue, des professeurs
du campus appelés "officiers de placement" ont étudié tous
les dossiers des étudiants admis pour les placer dans les diverses
matières, selon les cours suivis au lycée, les notes obtenues et
les scores des tests objectifs. A son arrivée, en septembre, quand
l'étudiant va décider du choix de ses cours, on sait donc
à quel niveau il a été placé dans toutes les
matières principales. Il doit suivre obligatoirement deux cours dans
diverses matières, sciences, langues étrangères, anglais,
sciences humaines, etc. et ceci pendant ses deux premières
années. L'étudiant américain n'a pas travaillé
autant que l'étudiant français pendant ses études
secondaires, aussi ses deux premières années d'Université
très intensives vont-elles lui permettre de rattraper son retard.
Pour cela, l'étudiant de première année sera suivi de
très près par son conseiller et par ses professeurs. Il est
important d'être súr qu'il se trouve placé dans les cours
qui lui conviennent. Pendant les deux premières semaines du semestre, il
peut d'ailleurs être autorisé à changer de cours, avec
l'accord de son conseiller, jusqu'au moment où il sera pleinement
satisfait des cours dans lesquels il se trouve. On doit remarquer qu'un
étudiant de première année peut être autorisé
à suivre des cours avec des étudiants de deuxième ou
troisième et parfois même quatrième année, selon le
niveau où il a été placé.
Le nombre d'enseignants par étudiant est de un pour sept. Souvent, ce
sont les professeurs les plus expérimentés qui enseignent aux
étudiants de première et deuxième années. Les
étudiants sont très souvent notés, et au milieu du
semestre, ils passent un examen dans chacun de leurs cours. Nous avons donc un
contrôle continu et minutieux, qui permet rapidement de se rendre compte
du travail des étudiants. Celui qui perd pied est aidé et peut
être autorisé par un doyen à suivre des leçons
particulières, spécialement en langues vivantes, en sciences et
en mathématiques.
S'il ne travaille pas bien, son professeur le recevra dans son bureau et, au
besoin, l'enverra voir un doyen. De plus, un service très important de
médecins et de psychiatres, dans le campus, peut aider ceux qui en ont
besoin.
Les professeurs, à tous les niveaux, font de nombreuses heures de
bureau, dont l'horaire est obligatoirement affiché sur les portes des
bureaux. Chaque étudiant sait donc très bien à quel moment
il pourra voir, s'il le veut, ses professeurs et recevoir leurs conseils.
Dès leur première année, les étudiants sont
très proches de leurs professeurs, qu'ils viennent souvent voir dans
leur bureau. C'est un moyen pour eux de parler de leurs cours, mais aussi de
leurs études futures et de leur plan de carrière. Ils savent que,
plus tard, pour accéder aux études de Ma»trise et de
Doctorat, ils auront besoin de lettres de recommandation de la part de leurs
professeurs, aussi tiennent-ils à bien les conna»tre.
Les professeurs des divers Départements travaillent en étroite
collaboration entre eux et les études interdépartementales sont
encouragées. Dans un campus, les professeurs se connaissent bien, ne
serait-ce que par le fait qu'ils font partie de nombreux comités
universitaires où siègent ensemble des professeurs venant de tous
les Départements.
Si un étudiant échoue dans un de ses cours, il ne perd pas le
bénéfice du semestre. Certes, sa moyenne pour le semestre
diminuera, mais il continuera normalement ses études.
La sélection à l'entrée ayant été bien
faite, le nombre d'échecs est assez faible. Pratiquement, tout ceux qui
ont commencé leurs études les terminent en quatre ans. Il arrive,
toutefois, que certains d'entre eux, pour des raisons personnelles ou par
manque de motivation, demandent à prendre un an ou deux de congé
au milieu de leurs études, mais ils reviennent presque toujours terminer
leur quatre années. Leur Université les reprend sans aucune
difficulté. Ceux d'entre eux, qui voudraient faire un transfert dans une
autre Université, peuvent le faire pendant leurs deux premières
années d'études. Il s'agit d'étudiants mal adaptés
à leur Université ou bien d'étudiants qui veulent
accéder à une Université d'un niveau plus
élevé.
Comme les Universités sont en majorité résidentielles, les
étudiants ne perdent pas de temps en transports. Ils trouvent tout dans
le campus où ils logent. Leur chambre est souvent à quelques
minutes à pied de leurs salles de cours, ainsi que des divers
restaurants et des magasins où ils peuvent acheter tout ce qui est
nécessaire pour leurs études. Et surtout de la
Bibliothèque centrale du campus, qui contient souvent des centaines de
milliers de livres, sinon des millions. Cette Bibliothèque est, la
plupart du temps, à rayons ouverts et ce sont les étudiants qui
vont eux-mêmes chercher les livres demandés. Tous les moyens sont
mis en oeuvre pour faciliter lectures et recherches.
Dans un campus américain, tout est organisé de telle façon
que les étudiants puissent faire leur travail ou pratiquer les sports
dans les meilleures conditions. Les installations sportives sont superbes,
financées par les Anciens Elèves, qui tiennent à voir
leurs équipes gagner, pour la plus grande gloire de leur "Alma
Mater". A
l'Université, les sports sont obligatoires pour tous les
étudiants. Pratiquement, tous les athlètes américains de
haut niveau, dans tous les sports, ont été formés dans les
Universités.
Arrivés en troisième année, les étudiants sont
largement au niveau de leurs camarades européens. Ils ont
rattrapé le retard qu'ils avaient : autrefois, il était
estimé à deux ans et il est maintenant d'un an. C'est en
troisième année qu'ils se spécialisent, en entrant dans le
Département de leur choix, où ils vont faire des recherches
intensives, conseillés par les professeurs du Département, qui se
partagent la responsabilité de guider les recherches de chaque
étudiant. Ceux-ci sont suivis de très près parce que
chaque professeur a, au maximum, une quinzaine d'étudiants à
conseiller. Les meilleurs des étudiants de troisième et
quatrième années peuvent être autorisés à
suivre des cours de Ma»trise ou de Doctorat, ce qui sera bien vu dans
leurs relevés de notes, au moment où ils décideront de
faire des études avancées, notamment dans les Ecoles
professionnelles comme le Droit, la Médecine, la Pharmacie, le
Management, etc...
La compétition est rigoureuse bien qu'il y ait très peu
d'échecs : en effet, le classement par ordre de valeur des
étudiants pour leurs quatre années d'études va être
important pour leur permettre d'accéder aux meilleurs emplois ou bien
aux meilleures Universités pour leurs études ultérieures.
Après quatre ans d'études de base, l'étudiant sait
très bien ce qu'il veut faire, car il est très motivé pour
entreprendre des études plus avancées.
Le service militaire obligatoire n'existant pas aux Etats-Unis, le brassage de
la jeunesse américaine se fait dans les Universités. En effet, il
n'est pas rare pour les jeunes gens d'aller étudier dans des
régions du pays, éloignées de celles où ils
résident, ce qui leur permet de mieux se conna»tre.
De plus, il est très rare qu'un étudiant fasse ses études
avancées, Ma»trise ou Doctorat, ou Ecoles professionnelles, dans la
même Université que celle où il a commencé ses
études. En même temps qu'ils font leurs études, les
étudiants sont évidemment concernés par leur futur emploi.
Dans les campus, existe un "Bureau des Carrières" où se trouvent
affichées toutes les offres d'emploi possibles. C'est un bâtiment
qui se trouve au milieu du campus, ouvert à tout le monde.
Les recruteurs, de toutes les entreprises qui veulent embaucher du personnel,
viendront interviewer les candidats potentiels, en cherchant à attirer
les meilleurs. La liste des interviews est affichée, longtemps à
l'avance, à travers le campus et ceux qui s'intéressent à
une certaine compagnie s'inscrivent à l'avance pour passer l'interview.
Souvent, ces compagnies offriront des postes d'été aux candidats
pour mieux apprécier leurs qualités et, au besoin, leur offrir
plus tard un poste permanent, à la sortie de l'Université.
Les Associations d'Anciens Elèves aident beaucoup les nouveaux
diplômés, grâce aux contacts établis dans les
diverses régions où ils résident. On ne saurait trop
insister sur le rôle capital que jouent les Anciens Elèves. Comme
cela a déjà été mentionné, ils financent, en
grande partie, l'Université ; ils participent au recrutement des
nouveaux étudiants ; ils aident les étudiants par des fonds de
Bourses ; ils peuvent aider les diplômés à trouver un
emploi par les relations qu'ils ont su établir là où ils
résident.
Dans les Conseils d'Administration des Universités, siègent des
Anciens Elèves élus, qui sont en contact permanent avec les
administrateurs principaux de l'Université, le président, le
prévôt, les doyens, etc. Il faut mentionner que le corps
professoral est également constamment consulté sur la marche de
l'Université, à travers des comités très nombreux,
qui permettent à l'Université de fonctionner et qui gèrent
tous les aspects académiques, financiers, économiques et
prospectifs de l'Université.
Aux Etats-Unis, il n'existe pas de diplômes qui soient nationaux. La
valeur des diplômes dépend de l'Université où on les
a obtenus, de sa réputation, de la place qu'elle occupe dans la
hiérarchie universitaire et du rôle qu'elle joue dans les
progrès de la recherche, à tous les niveaux. Evidemment, les
diplômés des Universités les plus prestigieuses
bénéficient, dès le départ, de
préjugés favorables. Néanmoins, il n'existe pas de
carrière assurée et il appartiendra à ces
diplômés de prouver leur valeur, dans la carrière qu'ils
auront choisie, et de se montrer dignes de ce que leurs diplômes
permettent d'attendre d'eux. Ils seront sans arrêt remis en question.
On sait exactement à quel niveau se trouve chacune des 3.000
Universités du pays et sur une échelle de 0 à 100, on peut
placer, avec beaucoup de súreté, chacune d'entre elles. Un
classement, fait régulièrement tous les trois ou cinq ans, par
des organisations neutres, permet d'établir une hiérarchie entre
elles, par ordre de valeur.
On les juge grâce au renom national et international de leurs
professeurs-chercheurs, à la valeur des recherches entreprises et des
publications, à la qualité de l'enseignement et, enfin, à
la carrière des étudiants qui en sont sortis.
L'attraction que les Universités américaines exercent sur les
étudiants étrangers est bien connue. En général,
ces étudiants sont en Ma»trise ou en Doctorat. Ils viennent de tous
les pays du monde et les plus nombreux sont originaires, dans cet ordre,
d'Asie, d'Afrique, du Moyen-Orient et d'Amérique Latine. On commence
maintenant à voir arriver, en grand nombre, les étudiants
d'Europe de l'Est, très compétitifs et montrant un féroce
appétit de succès.
Comme les étudiants étrangers n'ont pas en général
de moyens financiers suffisants pour payer leurs études, les
Universités qui les accueillent leur offrent la possibilité
d'enseigner aux jeunes gens de première et deuxième
années. Leur horaire hebdomadaire est, en général, de six
heures. Un étudiant étranger, nouvellement arrivé aux
Etats-Unis, ne sera évidemment jamais chargé d'un cours magistral
qui sera toujours fait par un professeur titulaire. Il aidera les professeurs
chargés de cours, en menant des travaux pratiques, des travaux
dirigés ou bien en donnant des heures de soutien aux étudiants en
difficulté.
On les voit souvent aider les professeurs-chercheurs dans les nombreux
laboratoires du campus. Ces six heures d'enseignement ou de soutien couvriront
complètement leurs frais d'études. Quant à leur pension,
l'Université peut les aider en leur permettant de travailler dans le
campus, en leur fournissant divers emplois assez bien
rémunérés.
Il n'est pas rare, s'ils sont en sciences ou en mathématiques, de les
voir s'intégrer dans un groupe de recherches, où ils sont
également rétribués.
Ces étudiants, dont la sélection a été très
dure, sont souvent de très haut niveau. C'est alors
l'intérêt des Universités et de leurs
professeurs-chercheurs de les retenir, de façon à les garder aux
Etats-Unis. Cela pose des problèmes de visas que les Universités
arrivent à résoudre, grâce aux contacts qu'elles ont
établis dans les plus hautes sphères du Gouvernement. Si ce n'est
pas possible, on aide ceux qui doivent retourner chez eux à trouver un
poste dans une entreprise américaine, qui s'est installée dans
leur pays d'origine, quitte à les faire revenir ensuite aux Etats-Unis
pour les employer de façon permanente. On estime que la proportion des
étudiants étrangers, en Ma»trise et en Doctorat, approche
des 40%, dans les meilleures Universités.
En ce qui concerne maintenant le corps professoral, chaque Université,
qu'elle soit privée ou d'un Etat, se charge elle-même du
recrutement de ses professeurs. Selon les possibilités
financières de l'Université, chaque Département choisit
les nouveaux professeurs dont il a besoin. Chaque année, à
travers tout le pays, sont publiées régulièrement les
listes des postes offerts, spécifiant les titres universitaires
exigés, l'expérience pédagogique demandée et les
publications souhaitées de la part des candidats. Pour postuler, chaque
candidat doit écrire lui-même aux Universités, où il
a noté qu'il y avait un poste libre dans sa discipline et pour lequel il
pense avoir rempli les conditions requises. Il va donc constituer un dossier
complet, qui est conservé par l'Université qu'il a
fréquentée et qui va être envoyé, sur demande,
à chaque Université s'intéressant à lui.
La situation de l'emploi dans l'enseignement supérieur s'est durcie ces
dernières années, dú au fait qu'il n'y a plus d'âge
de la retraite. Pendant longtemps, cet âge avait été de 65
ans, puis de 68 ans, enfin de 70 ans, et depuis 1994, il n'y a plus d'âge
de la retraite. Tout laisse penser que les professeurs, âgés de
plus de 70 ans, resteront en fonction le plus longtemps possible, surtout si
l'on considère la faiblesse des retraites des professeurs aux
Etats-Unis. Pour donner une idée du montant de ces retraites, disons
qu'il représente en général 50% à 60% du dernier
salaire de l'enseignant.
Le postulant ne sera jamais choisi sans avoir été reçu
dans le campus où il espère avoir un poste. Ceux, invités
à venir dans le campus, font en général partie d'une
Ò liste courte Ó de 4 ou 5 candidats. Ce sont ceux qui
ont été choisis parmi les centaines de demandeurs d'emploi, par
un Comité de sélection composé de quelques professeurs du
Département. Le candidat, venant dans un campus, aura auparavant
été interviewé par ses futurs collègues potentiels,
qui ont fait un classement par ordre de valeur. Dans le campus, il sera
reçu par les professeurs du Département, par les administrateurs
de l'Université et il sera obligé de faire une conférence
devant les professeurs et les étudiants. C'est après sa visite,
qui dure en général une journée, que le choix sera fait
par le Département concerné.
Si ce candidat convient, on peut lui offrir, soit un contrat d'un an
renouvelable ou non, soit un contrat de trois ans comme professeur assistant
s'il a déjà son doctorat, et s'il a acquis de l'expérience
et qu'il a déjà publié. De plus en plus, on note
malheureusement que les candidats sont engagés pour un an, non
renouvelable, ce qui les oblige à changer de postes d'année en
année. On les appelle les
Ò professeurs-bohêmes Ó.
S'il est engagé pour trois ans, son contrat peut être
renouvelé pour trois autres années, à la fin desquelles il
peut, soit être remercié, parce que n'ayant pas satisfait ses
supérieurs dans le Département, ou bien promu au rang de
professeur associé, ce qui lui donne la
Ò tenure Ó, c'est-à-dire qu'il
Ò tient Ó son poste et qu'on ne peut plus le renvoyer.
Il bénéficiera alors d'une grande sécurité,
puisqu'il aura la garantie de l'emploi et plus tard, s'il justifie les espoirs
placés en lui, il sera promu au rang de professeur, rang le plus
élevé dans la hiérarchie académique.
La situation des femmes professeurs dans l'enseignement supérieur est
telle qu'elles sont nombreuses dans les rangs les plus bas, mais leur nombre
diminue rapidement au fur et à mesure que l'on monte. En ce moment, nous
constatons de fortes pressions de la part des femmes professeurs pour
être promues, dans un contexte de ce qui est Ò politiquement
correct Ó, et dans plusieurs campus, elles ont engagé des
procès pour obtenir satisfaction.
Pour enseigner aux Etats-Unis, il n'est pas nécessaire d'avoir la
citoyenneté américaine. Les Universités recrutent des
professeurs de toutes nationalités, qu'ils aient étudié
aux Etats-Unis, ou qu'ils aient des diplômes étrangers. En dehors
de toutes conditions de nationalité, l'Université gardera, parmi
les professeurs en compétition, celui qui lui para»t le mieux
convenir au Département.
En vue d'une promotion possible, les jeunes professeurs sont sans cesse
évalués dans trois domaines. D'abord, par l'importance et la
qualité de leurs publications; ensuite, par la valeur de leur
enseignement, tel qu'il est jugé par les étudiants; finalement,
par ce qu'on appelle la bonne citoyenneté, c'est-à-dire avoir
fait partie de comités inter-universitaires, avoir servi dans
l'administration comme chef de Département ou doyen par exemple, avoir
été très présent dans le campus, avoir
été Ò visible Ó, en dehors du campus.
On a dit que les professeurs étaient enfermés dans des
Ò cages de verre Ó, où ils sont sans arrêt
observés par ceux qui les entourent.
Le jugement sur les publications s'appuiera sur les commentaires, faits par
écrit ou oralement, par les professeurs chargés de juger de leur
valeur.
Quant à l'enseignement, une trentaine de questions, semblables pour tous
les cours, permettent aux étudiants, à la fin du semestre, de
juger leurs professeurs, en les notant de 0 à 5. Une fois que ces notes
auront été traitées par ordinateur, ces réponses,
mises ensemble pour former Ò le guide de
l'étudiant Ó, pourront être consultées dans
plusieurs bureaux du campus. Elles permettront aux étudiants de mieux
choisir les cours qu'ils comptent suivre les semestres suivants.
En ce qui concerne la bonne citoyenneté, le troisième volet,
chaque année, tous les enseignants doivent faire, au président de
leur Université, un rapport obligatoire donnant la liste de toutes leurs
activités, dans le campus et hors du campus.
On voit donc que le jeune professeur, arrivant dans un campus, sera
obligé de travailler énormément pour satisfaire à
toutes ces conditions requises, qui lui laissent très peu de temps libre
pour sa vie personnelle. Evidemment, une fois qu'il aura obtenu la
Ò tenure Ó, il sera plus libre puisqu'aucune contrainte
de temps ne pèsera plus sur lui, sauf s'il veut accéder
rapidement au rang de professeur le plus élevé. Les congés
sabbatiques, en principe un an tous les sept ans, aident les professeurs
à poursuivre leurs recherches, sans autre contrainte, mais en raison des
restrictions budgétaires, ils sont de plus en plus difficiles à
obtenir.
Il arrive que les Universités soient en compétition pour attirer
un professeur important, bien connu, un prix Nobel par exemple, qui pourrait
ajouter au renom de l'établissement. A ce moment-là, ce
professeur se verra offrir une Chaire particulière, à un salaire
très élevé, et dans des conditions de travail
exceptionnelles.
Pendant longtemps, les professeurs étaient tenus de vivre dans le
campus, où ils avaient des appartements qui leur étaient
réservés, ou bien ils pouvaient s'installer tout près du
campus. A partir de la guerre du Vietnam, où beaucoup de restrictions
anciennes ont disparu, les professeurs ont pu résider là
où ils le voulaient, mais à condition d'être disponibles
facilement pour remplir toutes leurs fonctions.
Chaque Université à ses caractéristiques propres, son
histoire, ses traditions, son esprit. On mettra le jeune professeur à
l'épreuve pour savoir s'il a compris cela et s'il est prêt
à perpétuer les traditions de l'établissement.
Les salaires des professeurs sont décidés par le Conseil
d'Administration de l'Université. Dans les Universités qui
dépendent des Etats, les augmentations sont uniformes et l'on sait
qu'elles seront d'un certain pourcentage, 2, 3, ou 4%, pour chaque enseignant.
En plus, il y aura des fonds spéciaux pour récompenser le
mérite, justifié par les diverses activités de
l'enseignant.
Dans les Universités privées, chaque Département a une
enveloppe financière représentant les sommes qui seront
allouées, pour l'année suivante, aux professeurs des trois rangs
les plus bas. Ce sont les professeurs de rang le plus élevé qui
sont chargés de distribuer ces augmentations, selon ce qu'ils pensent
des divers bénéficiaires. Les salaires des professeurs de rang le
plus élevé sont décidés par le Chef du
Département et par un Comité interdépartemental.
Les Universités entretiennent des liens très étroits avec
leurs Anciens Elèves, en adressant à chacun d'entre eux une revue
hebdomadaire ou mensuelle, selon les cas, les mettant au courant de ce qui se
passe dans le campus et donnant des renseignements sur eux, tels que les ont
fournis les responsables de chacun des groupes d'Anciens Elèves
répartis, à travers tout le pays.
Ceci permet de garder des contacts nationalement et de pouvoir utiliser toute
l'aide que, selon les besoins, ils sont prêts à fournir à
leur "Alma Mater ". Les Universités privées ne vivent que
grâce à la générosité de leurs Anciens, qui
sont sollicités par le Bureau du Développement, comprenant des
spécialistes qui, pour trouver des fonds, ne font que prospecter dans la
région qui leur a été assignée.
Pour donner une idée de l'optimisme qui règne en ce moment aux
Etats-Unis, les grandes Universités font des levées de fonds pour
les cinq ou dix ans à venir qui atteignent, pour les plus riches, le
milliard de dollars, c'est-à-dire 5 milliards de francs.
Aux Etats-Unis, tout passe par les Universités, associées aux
grands centres de recherches privées, notamment en ce qui concerne les
sciences, les mathématiques et l'ingénierie. Elles obtiennent des
contrats provenant, soit du Gouvernement fédéral, soit du secteur
privé. Il n'est pas rare qu'un grand chercheur, par exemple un prix
Nobel, travaille pour une entreprise privée et enseigne aussi, à
temps partiel, dans une Université.
De plus, les Universités sont des centres d'activités culturelles
de toutes sortes, où les étudiants sont encouragés
à créer. Elles attirent des artistes, peintres, sculpteurs,
musiciens célèbres, ainsi que des écrivains, qui y
viennent enseigner. Souvent, une Université, dont le campus est en
dehors d'une grande ville, sera le centre d'attraction culturelle de toute la
région.
On peut voir, en conclusion, que les Universités américaines ont
une vision de l'avenir tout à fait positive. Grâce à la
souplesse de leur fonctionnement et aux facilités qu'elles ont de
pouvoir innover dans tous les domaines, elles préparent une jeunesse qui
va pouvoir assumer les nombreuses responsabilités dont elle sera
chargée.