Autoriser la rémunération des dépôts à vue
Corrélativement, l'interdiction de
rémunérer les dépôts à vue devra être
supprimée.
Il est souvent objecté, par les organisations de consommateurs
notamment, que la rémunération des dépôts ne
compensera pas la tarification du chèque pour les titulaires de petits
comptes. Mais la réalité est aujourd'hui inverse pour les
titulaires de gros comptes qui peuvent faire rémunérer leurs
liquidités en attente d'emploi sans pour autant voir leurs
chèques être facturés. En effet, le règlement 92-09
du 15 octobre 1992 du comité de la réglementation bancaire
autorise les banques à signer avec leurs clients des conventions aux
termes desquelles un prélèvement permanent peut être
opéré sur leur compte à vue au profit d'un placement
rémunéré (compte à terme, livret d'épargne,
OPCVM monétaires...). Ceci autorise les diverses formules de
prélèvement ou d'écrémage existant sur le
marché
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*
)
. En
réalité, ce système permet la rémunération
des disponibilités des comptes à vue, créditeurs en
permanence d'une somme relativement élevée (plus de
15.000 francs en général), ce dont les titulaires de petits
comptes ne peuvent bénéficier.
Il n'est donc pas établi que la tarification des chèques en
contrepartie de la rémunération des dépôts à
vue soit plus défavorable aux petits qu'aux gros comptes. Elle sera
surtout défavorable aux gros émetteurs de chèques, que ne
sont pas en général les titulaires de petits comptes. Ceux-ci
bénéficieront en revanche d'une rémunération de
leurs disponibilités à laquelle ils ne peuvent avoir accès
aujourd'hui.
Une fois ces deux interdictions levées, il appartiendra aux
établissements teneurs de comptes de dépôts de
définir la tarification adaptée. Il est improbable que celle-ci
soit d'emblée massive comme chez nos partenaires, puisque les services
tarifés aujourd'hui librement ne le sont que faiblement.
Prévoir des mesures d'accompagnement en faveur des consommateurs
Trois mesures de tempérament peuvent être
prévues en faveur des consommateurs.
La première consisterait à interdire explicitement
l'utilisation des dates de valeur à des fins de
rémunération des mouvements de fonds.
Dès lors que
tous ces mouvement peuvent être tarifés, cette utilisation n'aura
plus lieu d'être.
La deuxième aurait pour but de préserver les clients
modestes. Pour éviter de léser les petits comptes, il est
possible d'imaginer que la tarification des chèques n'intervienne
qu'au-delà d'un certain nombre de chèques émis
. La
concurrence, plus que la réglementation, devrait y pourvoir.
La troisième mesure serait inspirée du même souci de
justice sociale. Il s'agirait de faire en sorte
que les
différents frais de tenue de compte et d'émissions de
chèques puissent s'imputer fiscalement sur la rémunération
du compte courant
, de la même façon que les droits de garde
sur valeurs mobilières viennent en déduction des revenus
générés par celles-ci. Compte tenu de la
progressivité de l'impôt sur le revenu, les titulaires de gros
comptes fortement rémunérés seraient relativement moins
bien traités que les titulaires de petits comptes.
En tout état de cause, le statu quo actuel ne paraît pas tenable
à l'horizon 2002, lorsque l'ensemble des moyens de paiement aura
été converti en euros. D'ores et déjà, la libre
prestation de services permet à des banques européennes n'ayant
pas leur siège en France d'intervenir sur notre sol et de faire de la
publicité sur ce point. Mais ce sera encore plus facile pour les banques
de nos partenaires participant à la monnaie unique, qui pourront sans
entrave offrir des services comparables à ceux des banques
françaises, et il ne sera pas possible de leur interdire la
rémunération des dépôts et la tarification des
chèques.