L'impact économique
S'agissant de l'impact économique de cette
politique
du ni-ni
(ni tarification - ni rémunération), plusieurs
observations s'imposent.
En premier lieu, il est évident qu'
une situation qui repose sur
"
l'échange de gratuités
" n'est pas économiquement
propice aux évolutions.
Imagine-t-on une autre industrie où
les producteurs ne pourraient ajuster en rien l'évolution de leurs
coûts sur les prix de leurs services ? Or , la gestion de moyens de
paiements s'assimile véritablement à une activité
industrielle. Avec 10,3 milliards de transactions à traiter par an et
des taux de croissance annuelle de l'ordre de 4%, elle absorbe en moyenne
35 % des frais généraux des établissements et se
traduit pour les établissements de crédit par un déficit
de plusieurs milliards de francs. Du reste, le Conseil national du
crédit, dans son rapport précité, a
considéré que "
si la productivité économique et
l'adaptation sociale de la gestion de moyens de paiement dans notre pays sont
unanimement reconnues, il n'en demeure pas moins que
cette gestion reste
très déséquilibrée pour le système
bancaire
.
"
Par ailleurs, les distorsions dans la facturation des
moyens de paiement
restent à l'origine d'une
utilisation inefficiente desdits moyens
par la clientèle (50 % de chèques de petit montant).
Ensuite, la non tarification est source d'
importantes
péréquations entre produits et entre clients
, qui
correspondent de moins en moins aux réalités économiques
actuelles, tant du côté des banques que du côté des
clients. Elle est
source d'opacité
et donne lieu à des
tarifications occultes, dont la pratique des dates de valeur, qui est sans
doute la plus connue
54(
*
)
et la
plus irritante pour les clients des banques, n'est malheureusement pas la seule
(Certaines banques se sont fait une spécialité de
"
prélèvements pour frais de gestion
", ou
"
participations à la gestion des comptes
" soudainement
imposés aux clients, en marge des "
conditions
générales
"
d'ouverture et de tenue des comptes).
Une enquête réalisée auprès de quinze grands
établissements de la place et publiée par l'Institut national de
la consommation en mars dernier confirme cette péréquation des
produits. Cette enquête a montré que les prix des services
bancaires aux particuliers ont progressé en moyenne de 89 % entre 1986
et 1995, quand l'ensemble des prix à la consommation n'augmentait que de
27 %.
Dans le même ordre d'idées une étude publiée dans
la revue d'économie financière de l'hiver 1995 semble montrer
qu'il existe "
une péréquation forte
"
entre produits
de dépôts (surfacturés) et produits de crédits
(sous-facturés).
55(
*
)
Enfin,
la non tarification constitue un frein à la baisse des taux
bancaires
. Ce phénomène s'explique par la structure
particulière du PNB des banques françaises. Celui-ci comporte en
effet une part assez faible de commissions (22,5 % en 1994), comparée
aux PNB des banques américaines (34,3 %) et britanniques (43,2 %),
qui rend les banques françaises particulièrement
vulnérables à la baisse des taux d'intérêt.
Selon certains analystes
56(
*
)
,
une baisse des taux de 1 % conduirait, pour les "
très grands
établissements à vocation générale
"
(nomenclature 100 de la Commission bancaire), et sur la base des
résultats de 1994, à une baisse du PNB de 6 % et, par l'effet
d'inertie des frais généraux et du poids du réseau,
à une baisse d'un tiers du résultat d'exploitation. Selon ces
mêmes analystes, la désensibilisation des résultats des
banques aux variations des taux d'intérêt exige d'accroître
la part des commissions dans le PNB. Or cet accroissement passe par une
tarification de l'ensemble des services bancaires, sans exception, sur la base
de leurs prix de revient, et non, comme c'est le cas actuellement, en fonction
du degré d'acceptation, réel ou supposé, du client face
à des hausses de tarifs.
Le tableau ci-dessous met en évidence la faible
élasticité du taux de base bancaire par rapport à un taux
de marché.
On observera encore que le démarrage de la
troisième phase de l'Union économique et monétaire, au
1
er
janvier 1999, va immanquablement confronter les
établissements français à l'arrivée de concurrents
étrangers, où la rémunération des comptes courants
est classique. La France restant avec la Grèce et la
Nouvelle-Zélande, l'un des derniers pays de l'OCDE où une telle
pratique est interdite.
Toutes ces raisons ont conduit le Conseil national du Crédit, à
émettre le souhait que soient trouvés "
les principes d'un
meilleur équilibre économique pour la gestion des moyens de
paiement, que celui mis en place dans le milieu des années soixante."
Réponses des conseillers financiers des ambassades de France à Rome, Londres et Bonn
Existe-t-il, en matière de protection des consommateurs,
des dispositions aussi rigides que celles de la législation
française (modalités de renégociation des taux
d'intérêt des prêts en cours en cas de baisse des taux, lois
sur le surendettement ?
1. Grande-Bretagne
"Les britanniques ont des dispositions similaires à celles de la
France, une période d'attente (
cooling period
) pendant laquelle
le contrat peut être résilié sans frais."
2. Allemagne
"La protection du consommateur existe naturellement en Allemagne pour les
opérations financières, mais relève pour l'essentiel de
dispositions juridiques de niveau législatif et relativement succinctes
(interdiction de l'usure, faculté de renégociation des
prêts bancaire, etc.) et de la jurisprudence.
"Par comparaison avec la situation qui prévaut en France, les
dispositions juridiques de nature réglementaire sont sans doute
nettement moins nombreuses en Allemagne."
3. Italie
Il semblerait qu'il n'y ait pas en Italie de législation sur la
renégociation des prêts, dans la mesure où certaines
associations de consommateurs ont demandé au gouvernement d'imposer aux
banques cette faculté.