b) L'aquaculture
L'aquaculture de crevettes tropicales, inexistante voici
encore quinze ans, a fait l'objet d'importants investissements publics et
privés, en particulier dans la province Nord qui offre les meilleurs
sites naturels.
La production a atteint
878 tonnes en 1995
et la filière est
devenue
la seconde activité exportatrice du territoire
.
Toutefois, l'aquaculture calédonienne souffre de la saturation du
marché local et d'une concurrence très dure sur les
marchés à l'exportation.
Le marché intérieur est, en effet, aujourd'hui stabilisé
aux alentours de 350 tonnes, ce qui a contraint les producteurs du
territoire à se tourner vers l'exportation pour écouler le reste
de leur production (481 tonnes en 1995).
Les exportations de crevettes calédoniennes
|
Tonnage exporté (en tonnes) |
|
Prix moyen de vente (en F CFP/kg) |
||||||
|
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
|
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
Japon |
46 |
45 |
- |
- |
|
1.182 |
1.250 |
- |
- |
France |
237 |
92 |
221 |
338 |
|
1.118 |
1.113 |
1.061 |
1.063 |
Australie |
147 |
152 |
110 |
143 |
|
|
1.140 |
1.102 |
928 |
Divers |
16 |
7 |
2 |
- |
|
841 |
1.176 |
1.569 |
- |
Total |
446 |
296 |
333 |
481 |
Moyenne générale |
1.060 |
1.093 |
1.077 |
1.022 |
Sources : IFREMER, Sopac et Sodacal.
L'aquaculture néo-calédonienne souffre de
prix de revient trop
élevés
: non seulement les coûts de production
sont naturellement élevés sur le territoire et aggravés
par la distance séparant la Nouvelle-Calédonie des centres de
consommation, mais, en outre, la production de ses concurrents (Chine,
Thaïlande, Indonésie et Equateur) se mesure en centaines de
milliers de tonnes auxquelles sont attachés des coûts
salariés plus faibles et d'importantes économies d'échelle.
Dès lors, le produit calédonien pour se démarquer doit
être différent (espèce de Pénéide
stylirostris peu répandue et de calibre supérieur) et de
qualité irréprochable (contrôle de la qualité, label
unique).
Deux marchés à l'exportation ont particulièrement bien
répondu à l'argument de la qualité : le Japon et
l'Australie. Il est toutefois apparu très vite que les producteurs
calédoniens ne pouvaient pas faire "l'impasse" sur leurs deux points
faibles, les quantités produites et les prix :
- La percée réalisée au début des
années 1990 sur le marché japonais a été remise en
cause en grande partie avec l'apparition du "syndrome 93" qui a
entraîné une chute de la production, empêchant celle-ci de
répondre aux attentes quantitatives de cette clientèle.
Le "syndrome 93" qui affecte les élevages dans leur phase de
grossissement et se traduit par des taux de survie inférieurs aux seuils
de rentabilité des fermes, n'a pas à ce jour trouvé de
solution.
- L'argument des prix a acquis une importance toute particulière
aux yeux de la clientèle australienne, même
fidélisée par la qualité de la crevette
calédonienne, du fait de la dépréciation du dollar tout au
long de l'année 1995.
Quant au marché métropolitain, de loin le premier
débouché à l'exportation, ses exigences sont à
contre-courant du segment sur lequel est positionnée la crevette
calédonienne. Relativement indifférent à la qualité
du produit offert, il est demandeur de volume et exige des concessions
importantes en termes de prix. Face à la très forte concurrence
des crustacés d'origine africaine ou sud-américaine, les
entreprises aquacoles de Nouvelle-Calédonie ne parviennent à
rivaliser qu'à la faveur de l'exonération douanière dont
ils bénéficient, d'un fret préférentiel et de la
fréquence de la desserte.
Maintien de la qualité, augmentation des quantités produites
et réduction des coûts de revient : tel est le triptyque que
l'aquaculture calédonienne ne parvient que difficilement à mettre
en oeuvre.
La persistance du "syndrome 93", sans empêcher la progression de la
production, constitue cependant incontestablement un frein.
Les aléas climatiques en sont un autre. Votre rapporteur a ainsi pu
visiter la Blue Lagoon farm, ferme aquacole, doublée d'une
écloserie, tout juste entrée en activité au premier
semestre 1996 dans la province Nord, à Koné. A court terme, ce
projet doit constituer une installation de sept bassins répartis sur
80 hectares. Il pouvait permettre de porter, dès 1997, à
1.300 tonnes le niveau des exportations de crevettes calédoniennes.
Or, d'après les renseignements fournis par le Haut-commissariat,
l'intégralité de cette toute nouvelle production a
été détruite par le cyclone Dréna qui s'est abattu
sur la Nouvelle-Calédonie au mois de janvier 1997.
Enfin, en matière de prix, les producteurs calédoniens restent
confrontés à un problème conjoncturel : la SOPAC
(Société des producteurs aquacoles calédoniens), qui a
pour rôle de centraliser le conditionnement et la commercialisation des
crevettes tant sur le plan local qu'à l'exportation, ne regroupe qu'une
partie des fermes productrices, ce qui entraîne des
déséconomies d'échelle. Elle subissait en outre des
difficultés financières à la date de la présence de
votre rapporteur sur le territoire.
Ces mêmes producteurs restent toutefois surtout confrontés au
problème structurel du coût trop élevé des facteurs
de production sur le territoire.