B. ENTRETIEN DE LA DÉLÉGATION AVEC DES PERSONNALITÉS PALESTINIENNES
1. Entretien avec M. Yasser Arafat, président de l'Autorité palestinienne
M. Yasser Arafat a d'abord indiqué à M. Maurice
Lombard, qui l'interrogeait sur les perspectives du processus de paix, que le
gouvernement israélien demeurait prisonnier de son programme
électoral. Il a regretté qu'Israël récuse une
intervention internationale, et notamment européenne. Il a
observé que les propos d'ouverture tenus par M. Netanyahou à ses
différents interlocuteurs, MM. Chirac, Moubarak, le roi Hussein de
Jordanie, n'avaient pas été suivis d'effet.
M. Yasser Arafat a relevé que l'Europe, premier partenaire
économique d'Israël, n'utilisait pas la carte économique
pour influencer les Israéliens. Il a souligné à cet
égard que si l'Etat israélien n'avait aucun doute sur la
reconduction des différents accords qui le liaient à l'Europe, il
n'avait aucune raison de prendre en considération les positions
politiques européennes.
A M. Delanoë, qui souhaitait savoir si la solution ne passait pas par la
signature d'accords bilatéraux avec les représentants
palestiniens, comparables à ceux conclus avec Israël, M. Yasser
Arafat a relevé que, pour l'heure, seul un accord intérimaire
était envisagé entre l'Union européenne et les territoires
palestiniens. Il a ajouté que les exportations palestiniennes
demeuraient subordonnées à un passage par les territoires
israéliens ou égyptiens tant que le port de Gaza restait à
l'état de projet faute des autorisations israéliennes
nécessaires. M. Yasser Arafat a précisé que les fleurs
cultivées sur les territoires finissaient en pâture pour les
animaux parce qu'elles ne pouvaient être exportées. Il a
noté que l'économie palestinienne perdait de la sorte plusieurs
millions de dollars par jour, au risque de susciter une explosion sociale dans
les territoires. Il a observé que le calme et la patience auxquels il
appelait les populations rencontreraient bientôt leurs limites.
Le président de l'Autorité palestinienne a indiqué
à M. Maurice Lombard, qui l'interrogeait sur la position des Etats-Unis,
que le président démocrate confronté à un
Congrès dominé par les Républicains, pouvait rencontrer
certaines difficultés à arrêter la position
américaine au Proche-Orient.
M. Bertrand Delanoë a noté qu'une intensification de la
coopération entre l'Union européenne et les territoires
palestiniens pouvait conforter la place de ces derniers dans la région.
M. Yasser Arafat a observé que la Palestine figurait parmi les membres
de plein droit de la Ligue arabe et de la Conférence islamique. Il a
rappelé que le processus de paix avait favorisé la position
diplomatique d'Israël à travers le monde, de la Chine au
Sénégal.
Après que M. Lombard lui ait fait part du souhait manifesté
devant la délégation par M. Dan Meridor, ministre des finances
israélien, de renouer le contact avec la partie palestinienne, le
président de l'Autorité palestinienne a souligné que
beaucoup de rencontres avaient déjà eu lieu sans résultat.
Il a relevé que les difficultés économiques constituaient
un terreau favorable pour le développement de tous les fanatismes, et
rappelé les propos de Henry Kissinger, selon lesquels il ne pouvait y
avoir de paix pour le peuple israélien sans que la paix ait
été faite avec les Palestiniens.
M. Yasser Arafat a précisé, à l'intention de M. Bertrand
Delanoë, qu'Israël souhaitait s'écarter des engagements
contenus dans l'accord initial signé sous le co-parrainage des
Etats-Unis et de la Russie, en présence de M. Felipe Gonzales,
représentant de l'Union européenne, et approuvé par la
Knesset. D'après le président de l'Autorité palestinienne,
cette position s'expliquait par la volonté du gouvernement
israélien de surenchérir sur les concessions déjà
accordées par les Palestiniens. M. Yasser Arafat a cité à
cet égard les positions défendues par Israël dans les
négociations sur Hébron. Les Palestiniens devaient-ils demeurer
désarmés dans le cadre de patrouilles conjointes avec les
Israéliens, s'est interrogé M. Yasser Arafat en affirmant qu'il
voulait éviter les risques d'une humiliation pour les forces
palestiniennes.