5. Entretien avec M. Nissim Zvili, secrétaire général du parti travailliste israélien
Evoquant en premier lieu les retards dans la mise en oeuvre
du
processus de paix, M. Nissim Zvili a d'abord souligné que la situation
commençait à devenir dangereuse et qu'elle plaçait, en
particulier, M. Arafat dans une position délicate vis-à-vis des
Palestiniens.
En l'absence de résultats préalables obtenus par la
négociation, une rencontre entre M. Netanyahou et le président de
l'Autorité palestinienne ne lui paraissait pas souhaitable pour ne pas
courir le risque d'afficher un échec.
Le secrétaire général du Parti travailliste a fait part de
son optimisme sur deux des prochaines étapes du processus de paix : le
redéploiement militaire israélien dont l'ampleur restait à
négocier, et l'ouverture de discussions sur le statut permanent. Il a
souligné que les implantations, constituaient en revanche, à
l'heure actuelle, un problème très difficile. Il a observé
que, dans l'esprit de M. Netanyahou, le statut permanent des territoires
palestiniens ne se distinguait pas de l'autonomie déjà
accordée et il a souhaité que la droite évolue en faveur
d'une véritable séparation entre Israël et les territoires
palestiniens.
Revenant sur la fermeture des territoires, M. Zvili a précisé que
cette politique visait à rassurer la population israélienne mais
qu'elle ne saurait être, ni pour la droite ni pour la gauche, une
solution. Il a relevé que la main-d'oeuvre palestinienne employée
en Israël constituait une ressource de grande qualité et que le
recours aux travailleurs immigrés pourrait soulever, à terme, des
problèmes pour l'Etat hébreu.
M. Zvili a souligné l'importance qu'il convenait d'accorder à
l'aide au développement économique des territoires palestiniens.
Il a insisté en particulier sur le dynamisme et la qualité des
chefs d'entreprise palestiniens. La construction d'un port à Gaza
pouvait cependant, d'après lui, fournir aux Palestiniens la tentation
d'accroître leur capacité militaire. Il ne répondait pas,
en outre, à un réel besoin économique dans la
région, même s'il satisfaisait à l'aspiration d'une
autonomie économique.
Evoquant une rencontre entre des délégations de la Knesset et du
conseil législatif palestinien, M. Zvili a précisé que la
classe politique de son pays commençait à s'habituer à la
nouvelle donne introduite par le processus de paix. De son point de vue, les
avancées du processus de paix n'apparaissaient pas irréversibles.
Toutefois, si le gouvernement actuel d'Israël s'engageait
réellement en faveur du processus de paix, le Parti travailliste serait
prêt à le soutenir. M. Zvili a rappelé à cet
égard le précédent constitué par le soutien
apporté par les travaillistes au gouvernement, minoritaire, de M. Begin
en 1978. En revanche, tout recul du gouvernement sur le processus en cours
entraînerait l'opposition du Parti travailliste.
M. Zvili a souligné qu'une crise serait inévitable si le
gouvernement devait continuer à baser son action sur son
idéologie ou sa plate-forme politique. La négociation supposait
un accord politique avec les Palestiniens et le Likoud devrait prendre une plus
juste mesure des marges de manoeuvre don il disposait vis-à-vis des
Palestiniens.
Abordant ensuite la situation du Parti travailliste, M. Zvili, a relevé
que si le Parti travailliste parvenait à unifier les différentes
sensibilités politiques qui le composaient et réussissait
à proposer une réelle alternative, il pouvait espérer
revenir au pouvoir dans un délai rapide
M. Zvili a précisé la position de M. Shimon Pérès
en indiquant que le président du Parti travailliste pensait parvenir,
dans le cadre d'un gouvernement d'union nationale, à former une
majorité en faveur du processus de paix. M. Zvili a noté que,
pour sa part, il ne croyait pas à cette formule : la marge de manoeuvre
laissée à M. Pérès serait nécessairement
plus étroite que celle dont il disposait avec M. Rabin. D'après
lui, les travaillistes seraient obligés de quitter le gouvernement
d'Union nationale quelques mois après sa formation.
M. Zvili a relevé que M. Barak représentait, au sein du Parti
travailliste, la tendance d'Itzhak Rabin et qu'il se situait plutôt
" à droite " vis-à-vis du processus de paix. Les
travaillistes demeuraient toutefois pragmatiques : l'évolution du parti
sur la formation, désormais admise, d'un Etat palestinien ainsi que son
évolution sur le plateau du Golan en témoignait. M. Barak pouvait
également évoluer, tout en donnant peut-être plus de poids
aux éléments de sécurité.
M. Zvili a ensuite évoqué l'impact du voyage du Président
de la République française en Israël, en soulignant que les
déclarations de M. Chirac ne permettaient pas de penser qu'il
observait une position de neutralité dans le processus de paix. Il a
regretté cette situation en faisant valoir que la France pouvait jouer
un rôle très utile dans la région, notamment
vis-à-vis de l'Irak, de la Syrie et du Liban. Il s'est
référé à la position des Etats-Unis soucieux, avant
tout, de soutenir les positions acceptées par les parties
israéliennes et palestiniennes. Il a précisé que l'Europe
avait un rôle important à jouer en faveur du développement
économique des territoires palestiniens. Il a relevé que les pays
arabes avaient implicitement décidé de geler les relations
économiques avec Israël tant qu'aucune avancée n'avait
été enregistrée sur le processus de paix. Les Etats
arabes, a-t-il rappelé, ont toujours établi un lien entre la
sphère économique et politique, même si les
Israéliens récusent cette relation.
Il a relevé, pour conclure, que dans la vie politique israélienne
et notamment les élections, les facteurs économiques jouaient un
rôle beaucoup moins important que les enjeux liés à la
sécurité et à la paix.