B....MAIS QUI LAISSE PLACE AU SCEPTICISME
1. L'opposition à l'Europe
L'adhésion à l'Union européenne reste, pour l'opinion publique suédoise, une question controversée.
L'opposition à l'Europe est surtout sensible chez les jeunes et les femmes, les uns craignant pour le principe de neutralité, les autres redoutant un nivellement par le bas du système de protection sociale et un démantèlement partiel du service public où elles travaillent dans leur grande majorité.
En outre, le référendum a fait apparaître des résultats contrastés, en fonction des régions géographiques : une nette majorité en faveur de l'adhésion s'est dégagée dans le sud du pays et notamment dans les grandes villes, le NON prédominant, en revanche, dans les régions agricoles du nord.
Pour leur part, les responsables politiques et économiques considèrent qu'un taux de croissance suffisant pour réduire le chômage (au moins 3 %) ne pourra être atteint que dans le seul cadre européen. En revanche, si un chômage croissant est le prix à payer pour l'Union européenne, les sociaux-démocrates ne pourront pas manquer de réagir.
À l'heure actuelle, l'érosion monétaire et la croissance du chômage, dues aux gestions antérieures un peu trop généreuses en matière de « Welfare State », restent mises au débit de l'adhésion par l'opinion publique, dont « l'euro-scepticisme » et les réactions « anti-establishment » tendent à s'exacerber. Une enquête réalisée en juin 1995 a montré que les Suédois étaient déçus par l'Union européenne à 61 %.
En fait, nombreux sont ceux qui. en raison de la faiblesse des gains de productivité et de surcapacités, doutent de la possibilité de rétablir durablement une croissance soutenue, du moins avant l'an 2000. C'est donc l'un des piliers du « modèle suédois » qui pourrait s'effondrer.
2. La tentation libre-échangiste
La Suède conserve de son passé une tradition libre-échangiste bien établie. L'érosion accélérée de la couronne suédoise dans les années récentes a favorisé les exportations suédoises et, à l'inverse, enchéri les importations.
Une intensification du besoin en échanges commerciaux est aisée à distinguer, notamment dans le secteur de l'armement maritime ou de l'agro-alimentaire.
La Suède, qui réalise près de 10 % de son commerce extérieur avec les États-Unis et dont la marine marchande a un besoin vital de connexions en Extrême-Orient, est portée à souhaiter que le commerce puisse s'effectuer librement au niveau mondial.
À plusieurs reprises, au cours des entretiens qu'elle a eus à Stockholm et mis à part les dirigeants de la centrale syndicale ALO, votre Mission a eu le sentiment que la vocation libre-échangiste suédoise l'emportait sur la conviction européenne.
Pour grossir le trait, mis à part l'intérêt politique de la manifestation d'appartenance à l'Europe occidentale, la Suède semble, avant tout, désireuse de disposer, avec l'Union européenne, d'un grand marché ouvert. Elle récuse, au moins sur le long terme, les velléités protectionnistes qu'elle croit discerner chez certains de ses partenaires, et notamment en France. La Suède semble, ainsi, voir avant tout dans l'Union européenne une « super AELE ».