AVANT-PROPOS
Lancé en février 2020 par le comité d'organisation des jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 dans le cadre de son programme « héritage », le dispositif des 30 minutes d'activité physique quotidienne (APQ) vise à lutter contre la sédentarité des enfants. Il s'adressait initialement à des écoles volontaires.
L'année 2022 constitue une année charnière pour celui-ci, en raison d'une part, de sa reprise en main par le ministère de l'éducation nationale et d'autre part, de l'annonce en juin par le Président de la République de sa généralisation dès septembre à l'ensemble des écoles primaires.
Deux ans après celle-ci, alors que la promotion de l'activité physique et sportive a été déclarée grande cause nationale pour 2024 et les 30 minutes d'activité physique quotidienne à l'école présentées par Amélie Oudéa-Castéra, alors ministre des sports, comme « la mesure clé » pour lutter contre la sédentarité et l'inactivité physique des jeunes, la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport a souhaité évaluer la mise en oeuvre territoriale et l'effectivité de ce dispositif.
I. UNE POLITIQUE PUBLIQUE AUX OBJECTIFS FLOUS
A. LA GENÈSE DU DISPOSITIF : LUTTER CONTRE LA SÉDENTARITÉ CROISSANTE DES ENFANTS
La lutte contre la sédentarité constitue un objectif de santé publique majeure : en 2015, un tiers des Français de 18 à 79 ans n'atteignait pas les recommandations de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) en matière d'activités physiques1(*). Les enfants sont particulièrement touchés par ce fléau : à peine 13 % des enfants âgés de 6 à 12 ans pratiquent plus de 60 minutes d'activité physique par jour, soit la recommandation minimale de l'OMS. Leur état de santé général s'est fortement dégradé : en l'espace de 40 ans, ils ont perdu en moyenne 25 % de leurs capacités cardio-vasculaires.
Un enfant français sur trois est en surpoids, cette proportion devrait passer à un sur deux dans les 10 ans à venir sans modification de la tendance actuelle.
Face à ce constat, le comité d'organisation des jeux olympiques et paralympiques (Cojop) de Paris 2024 a fait de la lutte contre la sédentarité2(*) - notamment chez les jeunes - l'un des principaux points de son programme « héritage ». Dans ce contexte, ses représentants ont annoncé, à l'occasion de la semaine olympique et paralympique de février 2020, la mise en place des 30 minutes d'activité physique quotidienne pour les écoles volontaires : comme l'a souligné aux rapporteurs Marie Barsacq, responsable « héritage » de Paris 2024, « c'est entre 8 et 12 ans que le rapport à l'activité physique ainsi qu'aux habiletés motrices se noue et que le corps développe une mémoire des habitudes ». Ce dispositif s'inscrit dans une prise de conscience partagée à l'échelle européenne sur la nécessité de renforcer la lutte contre la sédentarité chez les jeunes.
Lutter contre la sédentarité des jeunes : deux exemples de dispositifs en Europe
Dès 2009 est créé en Finlande le programme « Schools on the move » qui concerne tant les écoles primaires que secondaires, d'abord sous forme expérimentale pour 45 établissements scolaires avant d'être progressivement étendu à partir de 2012. Fin 2018, 90 % des établissements scolaires représentant 92 % des élèves participaient à ce programme. Il vise à renforcer l'activité physique des enfants, à travers la valorisation des transports « actifs » pour se rendre à l'école - vélo et marche - ou encore la mise en place de pauses actives de 15 minutes toutes les 45 minutes de cours. Il conduit également à une évolution des pratiques pédagogiques au sein des classes.
En Écosse, sur la base d'une initiative privée, a été lancé en 2012 le programme « Daily mile ». Il vise à inciter les élèves à se dépenser pendant 15 minutes (soit le temps nécessaire pour parcourir la distance d'un mile - 1,5 km) au moins trois fois par semaine. Aucun équipement ou tenue vestimentaire spécifique n'est nécessaire. Aujourd'hui, des écoles de 99 pays y participent dont 652 en France.
Le dispositif des 30 minutes d'activité physique à l'école dans un contexte marqué par le confinement se concrétise à la rentrée 2020 via un appel à manifestation d'intérêt (AMI) du ministère de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, en collaboration avec Paris 2024 et l'agence nationale du sport : les écoles volontaires ayant répondu à cet AMI s'engagent à organiser 30 minutes d'activité physique les jours sans éducation physique et sportive (EPS). Les modalités de mise en oeuvre sont souples pour répondre aux spécificités de chaque établissement : ces séances peuvent être fractionnées sur la journée ou organisées en une fois, avoir lieu pendant le temps scolaire y compris les récréations ou le temps périscolaire et s'appuient sur l'environnement existant. Aucune tenue sportive n'est nécessaire et la cour d'école, les locaux scolaires (classes notamment) et les abords de l'école sont sollicités « en priorité ».
L'AMI présente plusieurs pistes de mise en oeuvre : par exemple « faire de la récréation un temps propice à la pratique physique des élèves », « développer l'expérimentation “cours le matin, EPS et sport l'après-midi” », « impliquer les écoles labellisées “génération 2024” ou encore « mobiliser le savoir-faire et les moyens du sport scolaire et des fédérations sportives partenaires ».
Afin de faciliter sa mise en oeuvre, chaque école volontaire reçoit un kit sportif cofinancé par le ministère des sports et l'agence nationale du sport contenant du petit matériel sportif.
Le contenu du kit
sportif
(source : Paris 2024)
Le kit sportif contient du petit matériel sportif. Il est conçu pour être facilement utilisable, y compris directement par les élèves en autonomie. Il contient 1 sifflet poire, 1 chronomètre, 20 cônes, 40 coupelles, 15 cerceaux, 20 lattes - bandes de marquage, 3 mini vortex, 1 ballon peau d'éléphant, 3 ballons multi-activités, 1 ballon sonore, 10 balles de tennis, 10 cordes à sauter, 10 mini-haies, 20 chasubles, 15 foulards de jeu.
Des ressources pédagogiques (fiches et vidéos) sont mises à disposition des enseignants et un réseau de « référents 30 minutes APQ » animé par Paris 2024 est déployé sur l'ensemble du territoire.
Les fédérations sportives ainsi que les fédérations de sport scolaire sont également associées via des conventionnements et invitées à proposer des activités adaptées et à accompagner les enseignants et les écoles par des formations, du prêt de matériel ou encore par la mise en place de liens renforcés avec les clubs.
Ce dispositif basé sur le volontariat connait un certain succès : en juin 2021, environ 1 000 écoles y ont adhéré. Un an plus tard, en juin 2022, ce sont 11 000 écoles qui ont rejoint ce dispositif, soit 22 % des écoles primaires.
* 1 Étude INCA3 2014-2015, traitement ANSES.
* 2 Paris 2024 a notamment lancé une campagne intitulée « pour plus de sport au quotidien : avant, pendant et après les Jeux », qui a notamment pour ambition « d'inciter plus de Français à bouger plus afin de lutter contre la sédentarité et l'obésité, un problème de plus en plus préoccupant au sein de la population française ».