II. LUTTER EN URGENCE CONTRE LES PÉNURIES
A. MIEUX ANTICIPER ET PRÉVENIR LES RISQUES DE PÉNURIE
1. L'hiver 2022-2023 : un contre-exemple
Les situations épidémiques exceptionnelles sont insuffisamment anticipées. L'hiver 2022-2023 en est l'illustration : la triple épidémie de covid-19, de grippe et de bronchiolite, dans un contexte de relative dette immunitaire liée aux confinements successifs, a accru la demande de certains traitements et, faute d'anticipation, favorisé l'apparition de tensions importantes sur certains antipyrétiques ou anti-infectieux d'usage courant, tels que l'amoxicilline et le paracétamol.
La réponse à cette situation épidémique n'avait été préparée :
- ni par les industriels, qui ont fondé à tort leurs prévisions sur les hivers précédents ;
- ni par les pouvoirs publics, dont l'essentiel de l'action a consisté à limiter l'effet des tensions une fois celles-ci apparues et dont la communication s'est avérée particulièrement brouillée.
Il est indispensable de contrôler davantage, en amont des prochaines saisons hivernales, les anticipations des industriels, de fiabiliser l'information fournie aux citoyennes et aux citoyens, et de renforcer les capacités de détection des risques de pénurie fondées sur les données de ventes et épidémiologiques.
L'amoxicilline,
une
communication erratique du ministre de la santé
20 novembre 2022 : il indique qu'un retour
à la normale est possible
« dans les semaines ou
les mois qui viennent » ;
5 janvier 2023 : il fait état d'un mois de
stock supplémentaire
« dans les deux semaines qui
viennent ».
En juin 2023, les stocks d'amoxicilline demeurent insuffisants.
2. Mieux hiérarchiser les risques de rupture
La catégorie des MITM, introduite en 2016, est utile pour appliquer aux industriels un socle commun d'obligations. Mais l'identification des MITM relevant de la responsabilité des industriels, des médicaments peuvent être oubliés ou recevoir un traitement contradictoire de la part des différents exploitants. En outre, ces difficultés sont d'autant plus importantes que la liste n'est ni publiée ni, en conséquence, contrôlable. Enfin, trop large - elle comprend 6 000 médicaments, soit la moitié des spécialités commercialisées en France -, la catégorie ne permet pas de concentrer les efforts de sécurisation sur les médicaments les plus indispensables.
Pour remédier à ces défauts,
le Gouvernement a publié, en juin 2023, une
liste
- attendue de longue date - de
454 médicaments essentiels. Celle-ci doit
désormais être assortie de mesures renforcées
permettant de sécuriser l'approvisionnement de ces
médicaments et conduire, le plus rapidement possible, à
l'identification de médicaments stratégiques sur les
plans industriels et sanitaires (MSIS). Les conditions
d'établissement et de révision de la liste doivent
également être rendues transparentes.
3. Mieux anticiper et cartographier les risques de rupture
Enfin, et sur la base de la liste établie, d'importants efforts doivent être fournis pour assurer un contrôle effectif et hiérarchisé des PGP, dont la commission d'enquête a pu vérifier l'inégalité sur la base d'un contrôle par échantillon. Les informations transmises par les industriels doivent permettre de développer la cartographie des principes actifs et des intrants et d'identifier précisément les risques de rupture en amont de leur réalisation.