D. DES INITIATIVES CONCERNANT L'ACCÈS À L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR QUI DOIVENT ÊTRE ENCOURAGÉES ET ÉTENDUES
a) Une ouverture des grandes écoles progressivement élargie mais qui demeure insuffisante
Depuis la création il y a vingt ans des conventions éducation prioritaire de l'école supérieure de sciences politiques de Paris , qui ont permis à 2 300 étudiants, soit 170 par an, d'intégrer l'école, la plupart des classes préparatoires et des grandes écoles ont mis en place des politiques d'égalité des chances, afin de diversifier socialement et géographiquement leur recrutement. L'Essec intègre actuellement 22 % d'étudiants répondant aux critères sociaux (dont 15 % de boursiers) grâce au programme « une grande école pourquoi pas moi » à partir de 2003, puis Cap'Essec en 2010. L'École normale supérieure de Paris a créé en 2015 une filière de recrutement dédiée aux candidats venant de l'université, comportant 10 points de plus de boursiers que le concours traditionnel en classes préparatoires.
En conséquence, l'ouverture sociale des grandes écoles s'améliore sur le long terme. La conférence des grandes écoles établit un baromètre régulier 129 ( * ) : en 2019, 30 % des étudiants des grandes écoles répondent aux critères sociaux, en hausse de 3 points par rapport à 2015 et 80 % des écoles recrutent leurs étudiants dans plus de 21 académies, dont trois ultramarines . Le taux de boursiers CROUS s'échelonne toutefois de 8 % à 49 % selon les écoles et concerne 12,7 % des effectifs inscrits dans une école de commerce et 28,8 % des effectifs en classe préparatoire.
Plus de la moitié des écoles sont engagées dans des programmes favorisant la diversité sociale des étudiants lors du recrutement et de l'admission et 81 % dans des dispositifs d'accompagnement des étudiants issus des milieux populaires . Au total, 300 000 euros sont alloués par école aux programmes dédiés à l'ouverture sociale, soit un 100 000 euros de plus qu'en 2015.
Toutefois, les filières dites « d'excellence » demeurent insuffisamment ouvertes aux profils diversifiés . Ainsi, selon la Cour des comptes, les élèves de Paris et des villes de plus de 100 000 habitants sont par exemple deux fois plus nombreux à postuler en classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE) que les élèves de communes de moins de 2 000 habitants.
Les programmes d'ouverture des grandes écoles se construisent en effet sur le temps long, du fait d'un décalage entre l'entrée dans un programme de mentorat ou une cordée de la réussite et l'entrée dans une grande école. En conséquence, ces efforts doivent être pérennisés afin de garantir la poursuite de la dynamique actuelle d'ouverture.
b) Des mesures d'ouverture qui doivent être renforcées et ne pas laisser de côté l'université
Plusieurs grandes écoles, et en particulier les écoles normales supérieures 130 ( * ) , ont proposé d' attribuer aux étudiants issus de milieux défavorisés des points de bonification proportionnellement à l'échelon de bourse lors des épreuves écrites du concours d'entrée . Le jury d'admission n'aurait pas connaissance, lors des épreuves orales, des candidats bénéficiant de ces points bonus.
Le Gouvernement a commandé un rapport 131 ( * ) sur les possibilités d'amélioration concernant la mixité sociale dans l'enseignement supérieur. Celui-ci considère « qu'il serait une erreur de faire reposer la politique d'égalité des chances uniquement sur un mécanisme de bonification des boursiers ». Le comité recommande d'allier cette bonification à une diversification des possibilités d'intégration dans les écoles, au-delà des seules classes préparatoires et notamment à destination des étudiants à l'université .
Au-delà de la seule question de l'accès, il importe d'accompagner les élèves après leur intégration, sous peine de conditionner celle-ci à la maîtrise de codes sociaux et culturels qui ne sont pas universellement partagés. Des programmes de tutorat internes à l'école sont par exemple de nature à permettre à chacun de bénéficier d'une scolarité identique.
Enfin, l'égalité des chances dans l'enseignement supérieur doit tout autant concerner les grandes écoles que l'université . Le rapport de 2019 incite ainsi à « construire davantage de cursus mixtes entre universités et grandes écoles ». Il est également envisageable de réserver un certain nombre de places aux élèves boursiers dans les cursus universitaires les plus sélectifs.
* 129 Baromètre Ouverture sociale dans les Grandes écoles , conférence des grandes écoles, décembre 2019.
* 130 Diversité sociale dans les écoles normales supérieures, octobre 2019.
* 131 Rapport du Comité stratégique, Diversité sociale et territoriale dans l'enseignement supérieur , décembre 2020.