B. LES RENCONTRES DE LA DÉLÉGATION FRANÇAISE
1. Un entretien, dans les bureaux de la délégation au Palais de l'Europe, avec Mme Amélie de Montchalin, Secrétaire d'État chargée des Affaires européennes
Le 24 juin 2019 au matin, Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d'État chargée des affaires européennes a rencontré, avant de prononcer sa communication en plénière en sa qualité de présidente en exercice du Comité des Ministres, les parlementaires de la délégation française pour évoquer les différents sujets à l'ordre du jour de la session d'été de l'APCE.
Participaient à cette rencontre informelle, outre Mme Nicole Trisse (Moselle - La République en Marche), présidente de la délégation, Mme Nicole Duranton (Eure - La République en Marche), Mme Jennifer De Temmerman (Nord - La République en Marche), M. Claude Kern (Bas-Rhin - Union Centriste), M. Sylvain Waserman (Bas-Rhin - Mouvement démocrate et apparentés), Mme Yolaine de Courson (Côte d'or - La République en Marche), Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas (Tarn - La République en Marche), Mme Martine Wonner (Bas-Rhin - La République en Marche), M. Bertrand Bouyx (Calvados - La République en Marche), M. Bernard Fournier (Loire - Les Républicains), M. Jacques Maire (Hauts-de-Seine - La République en Marche), M. Jacques Le Nay (Morbihan - Union Centriste) et M. André Reichardt (Bas-Rhin - Les Républicains) .
De son côté, la Secrétaire d'Etat était notamment accompagnée par MM. Jean-Baptiste Mattei, Ambassadeur représentant permanent de la France au Conseil de l'Europe, Jean-Marc Séré-Charlet, directeur adjoint des Nations Unies et des organisations internationales et Aurel Treizenem, rédacteur à la sous-direction des droits de l'Homme.
2. L'audition informelle de M. Didier Reynders, Vice-Premier ministre du Royaume de Belgique, Ministre des Affaires étrangères et européennes et de la défense
Les membres de la délégation française à l'APCE ont reçu, la veille de l'élection de la personnalité appelée à succéder à M. Thorbjørn Jagland comme Secrétaire général du Conseil de l'Europe, M. Didier Reynders, VicePremier ministre, Ministre des Affaires étrangèreset européennes et de la défense du Royaume de Belgique, alors candidat en lice. Cette audition informelle faisait suite à l'annulation d'une audition initialement programmée le 12 juin 2019, du fait de l'inscription à l'ordre du jour des deux assemblées de la seconde déclaration de politique générale du Premier ministre Edouard Philippe et du vote sur celle-ci, en application de l'article 49 de la Constitution.
Participaient à cette rencontre, outre Mme Nicole Trisse (Moselle - La République en Marche), présidente de la délégation, Mmes Jennifer De Temmerman (Nord - La République en Marche), Alexandra Louis (Bouches-du-Rhône - La République en Marche), Martine Leguille-Balloy (Vendée - La République en Marche), Marie-Christine Verdier-Jouclas (Tarn - La République en Marche), Martine Wonner (Bas-Rhin - La République en Marche), ainsi que MM. Fabien Gouttefarde (Eure - La République en Marche), Jacques Maire (Hauts-de-Seine - La République en Marche), André Gattolin (Hauts-de-Seine - La République en Marche) et Dimitri Houbron (Nord - La République en Marche) . Le Ministre, quant à lui, était accompagné de Mme Roxane de Bilderling, directrice de son cabinet, et de M. Gilles Heyvaert, Ambassadeur représentant permanent de la Belgique au Conseil de l'Europe.
Au cours des échanges, destinés à permettre aux membres de la délégation française à se faire leur opinion sur les candidats soumis à leurs suffrages, M. Didier Reynders a indiqué qu'il travaillait à sa candidature depuis plusieurs années, rappelant qu'il avait siègé au Comité des Ministres depuis 2011 et en avait été le Président en 2015.
Pour présenter son projet, il a tout d'abord exprimé sa volonté que le continent européen devienne le premier continent au monde « sans peine de mort ». Il a notamment plaidé pour la tenue d'un débat sur l'adhésion de la Biélorussie au Conseil de l'Europe, soulignant qu'il avait obtenu qu'une délégation de ce pays vienne à Strasbourg.
Par ailleurs, il s'est dit convaincu de la nécessité de « centraliser la réflexion à Strasbourg, plutôt qu'à Bruxelles, sur l'État de droit et les droits de l'Homme ». Pour cela, il a souhaité que l'Union européenne devienne membre du Conseil de l'Europe et que, de ce fait, les décisions de la Cour européenne des droits de l'Homme s'appliquent de façon uniforme dans l'ensemble des États membres de l'Union.
Évoquant le financement des activités du Conseil de l'Europe, il a estimé que tous ceux qui y recourent devraient contribuer à en supporter les coûts. C'est le cas par exemple de l'Union européenne, qui s'appuie sur les analyses de la Commission de Venise, ou des entreprises privées qui utilisent des normes définies par le Conseil de l'Europe.
Concernant le fonctionnement de l'Organisation, M. Didier Reynders a souligné que plusieurs organes planifiaient, dans certains États membres, les mêmes visites aux mêmes endroits et qu'il serait plus judicieux de les mutualiser afin d'en réduire les coûts. De plus, il a souhaité renforcer la cohésion entre l'Assemblée parlementaire et le Comité des Ministres ainsi que la lutte contre la corruptionEn outre, il a estimé que le Conseil de l'Europe avait un problème d'image, une véritable confusion s'étant installée dans l'esprit des citoyens entre l'Union européenne et l'Organisation. Il lui a donc semblé nécessaire de travailler davantage avec les Parlements nationaux afin de mieux démontrer la valeur ajoutée du Conseil de l'Europe et d'améliorer ainsi sa visibilité.
Concernant sa vision des relations que le Secrétaire général du Conseil de l'Europe doit entretenir avec l'APCE, M. Didier Reynders a formé le voeu de dialoguer davantage et plus régulièrement avec les groupes politiques et les délégations nationales, envisageant notamment de présenter, lors de la session d'automne, un programme plus détaillé comportant une feuille de route sur laquelle l'Assemblée parlementaire pourrait débattre. Il a estimé que d'autres débats pourraient avoir lieu au cours du prochain mandat et que l'APCE pourrait ainsi contrôler la mise en oeuvre de cette feuille de route.
M. Didier Reynders s'est enfin dit favorable au retour de la délégation russe au sein de l'Assemblée parlementaire. Néanmoins, il a fait valoir que ce retour impliquerait que la Russie accepte l'application des décisions de la Cour européenne des droits de l'Homme, accueille la Commissaire aux droits de l'Homme en Crimée et s'acquitte du paiement de ses contributions. Il a précisé qu'il s'était rendu à Kiev pour rencontrer la délégation ukrainienne à l'APCE et convaincre ses membres de la nécessité d'un dialogue avec la Russie, concluant que le Conseil de l'Europe doit être un lieu de dialogue tout en restant extrêmement ferme en cas de violation de ses principes.
À la suite à cette présentation, Mme Nicole Trisse lui a demandé quels moyens mettre en oeuvre pour qu'un État applique les décisions de la Cour européenne des droits de l'Homme. Elle a également souhaité savoir si, de son point de vue, le Conseil de l'Europe avait vocation à oeuvrer en dehors du ressort géographique européen.
M. Didier Reynders a répondu qu'à l'évidence une meilleure coordination s'impose entre le Comité des Ministres, l'APCE et la Cour européenne des droits de l'Homme pour utiliser à bon escient tout moyen de pression. La mise en oeuvre d'une procédure conjointe en cas de manquement d'un État membre à ses obligations lui a semblé pertinente. Les difficultés actuelles avec la Russie sont liées au fait que l'APCE a sanctionné la délégation russe sans concertation préalable avec le Comité des Ministres
Pour ce qui concerne le champ d'action du Conseil de l'Europe, M. Didier Reynders a défendu l'idée d'une discussion avec la Biélorussie et l'Union européenne pour que l'ensemble du continent soit partie à la convention européenne des droits de l'Homme. Ensuite, il a plaidé pour continuer le travail avec plusieurs États voisins des États membres, notamment la Tunisie.
Mme Martine Leguille-Balloy s'est interrogée sur la compétence du Conseil de l'Europe en matière de bien-être animal. M. Didier Reynders a estimé que la fonction du Conseil de l'Europe était de fixer des normes et de les contrôler. C'est le cas notamment en matière de dopage. Dès lors, le bien-être animal concentre suffisamment d'intérêts et de questions pour ouvrir un débat au Conseil de l'Europe.
En conclusion, M. Didier Reynders a rappelé la nécessité d'un véritable travail avec les Parlements nationaux et les citoyens afin de mieux faire comprendre le rôle du Conseil de l'Europe.
3. La rencontre avec des responsables de l'ONG « Portes ouvertes »
Plusieurs parlementaires de la délégation française ont rencontré, le 26 juin, MM. Michael Wharton et Guillaume Guennezec, deux responsables de l'association « Portes ouvertes » qui milite pour la protection des chrétiens à travers le monde. Etaient présents, au titre de la délégation française : Mme Nicole Trisse (Moselle - La République en Marche), présidente de la délégation, Mme Nicole Duranton (Eure - Les Républicains) , M. Jérôme Lambert (Charente - Socialistes et apparentés), Mme Martine Wonner (Bas-Rhin - La République en Marche), M. Fabien Gouttefarde (Eure - La République en Marche) et M. Bernard Fournier (Loire - Les Républicains) .
S'appuyant sur les données regroupées au sein de leur Index Mondial de Persécution des Chrétiens en 2019, les représentants de « Portes ouvertes » ont expliqué que si les chrétiens d'Orient restent menacés, notamment en Irak où les milices chiites stationnent dans leurs villages, certains groupes terroristes se sont désormais délocalisés vers l'Afrique où le danger est de plus en plus prégnant. Ils ont également évoqué les persécutions en Amérique centrale et en Amérique du Sud où les églises font l'objet d'un racket organisé par des organisations criminelles. Concernant les États membres du Conseil de l'Europe, trois sont plus particulièrement mis en cause pour leurs agissements à l'encontre des minorités chrétiennes : la Turquie, la Russie et l'Azerbaïdjan. En Turquie, les persécutions font suite à la tentative de coup d'État manqué en 2016, les chrétiens étant dénoncés comme des agents de l'étranger qui ont contribué à monter cette opération. En Russie, l'église orthodoxe est généralement considérée comme la seule église et les autres comme des sectes ; de même, en Tchétchénie, les convertis sont particulièrement menacés. Enfin, en Azerbaïdjan, on tente de discréditer les pasteurs en leur offrant des cadeaux de l'État ou en les convoquant régulièrement dans les commissariats.