II. LA CONFRONTATION DES MOYENS ENGAGÉS AUX RÉSULTATS CONSTATÉS : UN BILAN POUR L'HEURE CONTRASTÉ
A. LES SATT ONT PERMIS D'INDÉNIABLES AVANCÉES...
1. Une réponse à l'objectif principal qui leur était assigné : développer la valorisation de la recherche publique en finançant principalement la maturation
En assurant le financement de la maturation et de la « preuve de concept », les SATT remplissent l'un des principaux objectifs qui leur étaient assignés et comblent un indéniable « vide » du système français de la recherche pour développer de la valeur ajoutée scientifique et technologique.
Le processus de maturation permet ainsi de minimiser le risque pour l'entreprise d'investir dans un projet mais aussi de l'inciter à le faire, en lui fournissant les éléments nécessaires pour comprendre l'intérêt des résultats de recherche et le potentiel de valorisation.
a) 215 millions d'euros de dépenses de maturation et près de 1 400 projets financés
Selon les statistiques recueillies par l'ANR et transmises à votre rapporteur spécial, la maturation de près de 1 400 projets aurait ainsi été décidée dans les SATT entre la création des premières structures et le 31 décembre 2016.
Nombre de projets de maturation décidés par vagues depuis leur création
* Sauf pour la SATT Grand Est dont l'activité a commencé dès le second semestre 2013.
Source : commission des finances d'après les données fournies par le Commissariat général à l'investissement (CGI), la direction générale de la recherche et de l'innovation (DGRI) et de la direction générale des entreprises (DGE)
D'un point de vue financier, les dépenses de maturation, y compris la pré-maturation et la propriété industrielle associée , représenteraient environ 215 millions d'euros depuis la création des premières SATT sur cinq ans (2012-2016), dont 64,3 millions d'euros en 2015 et 78,8 millions d'euros en 2016. Ce montant inclut les coûts directs et indirects, y compris les dépenses des personnels, permanents comme ceux mis sur les projets maturés. Il ne comprend pas, en revanche, les dépenses de support ou autres frais généraux de structure (sauf pour certaines SATT qui ne distinguent que les dépenses de maturation des dépenses de prestations et non celles de support).
Évolution des dépenses de maturation entre 2012 et 2016
(en milliers d'euros)
Source : commission des finances d'après les données fournies par le Commissariat général à l'investissement
D'après les indicateurs de réalisation mis en place par l'ANR, 4 des 9 SATT des vagues A et B avaient quasiment atteint voire dépassé l'objectif initialement fixé en termes de dépenses de maturation pour l'année 2016, avec des montants toutefois très variés s'échelonnant entre 3,2 millions d'euros et 7,2 millions d'euros.
Deux SATT de ces deux vagues ont seulement rempli à peine plus de la moitié de leur objectif, ce qui traduit des difficultés d'exécution mais aussi une manifeste surestimation du budget initial.
Pour la seule année 2016, les projets de maturation d'un montant supérieur à 120 000 euros ont concerné la moitié des projets décidés par les 9 SATT des vagues A et B. Certaines SATT retiennent d'ailleurs à plus de 80 % voire quasi exclusivement des projets relevant de cette catégorie et donc ceux dont les enjeux financiers sont conséquents, tandis que, pour l'une d'entre elles, ils représentent au contraire moins d'un projet sur cinq.
Les projets de maturation de plus de 120 000 euros représentent en moyenne 4,5 millions d'euros d'investissements en 2016 par SATT de la vague A (23 millions d'euros au total), soit environ 220 000 euros par projet financé selon les chiffres transmis par les SATT à l'ANR 23 ( * ) .
À l'occasion de ses auditions et déplacements, votre rapporteur spécial a pu constater que le dispositif des SATT était regardé avec attention par d'autres pays, notamment en raison de son engagement conséquent dans le financement de la maturation . Il s'agit d'un effort considérable au regard des autres exemples étrangers. Ainsi, en Angleterre, les 14 fonds de maturation mis en place par le Gouvernement au début des années 2000 ne représentaient chacun que 4 millions d'euros versés en une seule fois.
Le fonds de maturation University Challenge Seed Fund à Oxford Au Royaume-Uni, le gouvernement a consacré des fonds publics au début des années 2000 à la maturation des projets de recherche susceptibles d'être valorisés dans le secteur économique. D'après les informations recueillies lors d'un déplacement à Oxford, 14 fonds avaient initialement été créés, chacun pour un montant de 4 millions de livres. Ils couvraient, selon les cas, une ou plusieurs universités. Trois fonds seraient encore actifs, dont celui destiné à l'Université d'Oxford, le University Challenge Seed Fund . Il est géré par Oxford University Innovation (OUI), entité dédiée à la valorisation de la recherche pour le compte de l'université. Ayant par ailleurs bénéficié de l'aide d'un autre fonds, OUI a disposé de 5,5 millions d'euros pour soutenir les projets dans la « preuve de concept ». Il a permis de soutenir 260 projets sur l'ensemble de la période, avec 1,5 million de livres déployés chaque année. Les « tickets » par projets peuvent s'élever de 2 500 à 250 000 livres mais OUI évite d'aller en-deçà de 50 000 livres pour avoir un réel impact et réduire le risque technologique. L'enveloppe octroyée a vocation à : - développer les compétences managériales ; - sécuriser ou améliorer la propriété intellectuelle ; - prendre en charge un complément de « recherche et développement » ; - financer la construction d'un prototype ; - élargir le champ des applications possibles ; - préparer un business plan ; - couvrir des frais juridiques ou d'expertise. Elle peut permettre de financer l'achat de matériel ou encore le recrutement de personnels dans le laboratoire. Le comité qui décide du versement ou non du financement de la maturation pour le projet proposé, est composé de 11 membres, dont 30 % sont des experts extérieurs à OUI. Passé un certain niveau de retours financiers, le fonds bénéficie de rétributions, permettant ainsi de maintenir ses capacités d'engagement sur de nouveaux projets sans moyen supplémentaire depuis sa création. Source : commission des finances, d'après les éléments recueillis dans le cadre de son déplacement à Oxford et le site Internet de l'OUI |
b) Des projets qui n'auraient probablement pas pu être valorisés sans l'intervention financière des SATT au stade de la maturation
Le financement assuré par les SATT permet de répondre à des besoins jusqu'à présent non couverts , tandis que le nombre de laboratoires et de chercheurs présents sur le territoire offre un important vivier de projets potentiellement valorisables. Les dispositifs précédents étaient concentrés sur quelques territoires et établissements, avec des crédits de maturation et des moyens (notamment en personnels) nettement plus limités pour développer le transfert de technologies. Pour mémoire, même des organismes comme le CNRS ne disposaient pas à proprement parler de budget consacré à la maturation auparavant.
Les auditions et les déplacements de votre rapporteur spécial ont été l'occasion de constater que le financement de la maturation et l'appui offert par les personnels des SATT étaient considérés comme un atout indéniable pour un certain nombre de chercheurs.
Des projets actuellement en cours de transfert ne l'auraient probablement jamais été en l'absence de moyens dédiés à cette étape décisive pour valoriser des travaux de recherche. Plusieurs exemples ont ainsi été présentés à votre rapporteur spécial, ayant abouti à la signature de licences ou à la création de start-ups en cours de développement.
Même pour une université de renommée mondiale comme Oxford, et ayant des moyens particulièrement importants, le fonds de maturation « UCSF » (cf. supra ) a été essentiel pour permettre l'essor de certains projets. Dans plusieurs secteurs, les chercheurs auraient pu (voire peuvent) s'en passer, en trouvant, très tôt, le financement avec les entreprises. Dans d'autres, en revanche, le risque aurait été trop important et l'absence de fonds publics aurait empêché tout développement.
En outre, la phase de maturation permet de définir plus précisément les potentiels de valorisation des projets , y compris en présentant des débouchés industriels ou commerciaux radicalement différents de ceux imaginés par les chercheurs eux-mêmes dans le cadre de leurs travaux. Cette réorientation est parfois déterminante pour l'avenir d'un projet.
La réalisation d'études de marché et l'établissement d'une « preuve de concept » solide permettent ainsi de faciliter le transfert, en réduisant d'autant le risque pour l'entrepreneur dès lors davantage enclin à s'engager dans l'innovation proposée.
c) La nécessité d'une sélection rigoureuse des projets soutenus
Concernant la sélection des projets présentés devant le comité d'investissement, il convient de s'assurer que le choix repose sur des critères objectifs et justifiés . Pour cela, la qualité des experts recrutés est essentielle et a été rappelée à l'occasion de nombreuses auditions.
Ainsi, les projets ne doivent pas être retenus pour que soit garantie une répartition nécessairement équilibrée des financements en fonction des établissements et organismes actionnaires de la SATT . Certaines statistiques présentées à votre rapporteur ont pu laisser croire que l'origine du projet pouvait ainsi entrer en ligne de compte. Les personnes qui ont pu être interrogées sur ce point ont toutefois affirmé qu'il s'agissait d'un simple hasard et que l'équilibre entre les actionnaires ne constituait pas un élément guidant leur activité. À l'inverse, il ne serait pas non plus bénéfique qu'un actionnaire soit surreprésenté dans les projets maturés au point de déséquilibrer la structure.
De même, la sélection doit être réalisée après une analyse approfondie du potentiel de valorisation de la recherche, de ses perspectives de transfert et du marché potentiel . Or, le risque d'un choix de projets peu sélectif était bien réel lors de la création des SATT puisqu'une importante enveloppe financière issue du PIA a été mise à disposition et pour une période limitée. Les SATT disposant de plus grandes difficultés pour détecter des projets à maturer peuvent ainsi être tentées d'être moins sélectives. Là encore, la qualité d'analyse et d'expertise du comité d'investissement est essentielle.
Il ne peut être exclu qu'une sélection trop large des projets se soit même concrétisée dans certaines structures souhaitant disposer rapidement d'un nombre conséquent de projets en maturation . Pour autant, la nécessité d'obtenir ensuite des résultats en termes de valorisation devrait finalement permettre de limiter ces cas et de garantir une sélection active et sérieuse des projets.
À l'inverse, il est également possible que des SATT aient pu écarter des projets prometteurs mais nécessitant un engagement de long terme et potentiellement plus risqués (notamment dans le domaine de la santé), compte tenu des contraintes pesant sur elles en termes de retour financier et de recherche d'un équilibre financier rapide.
À l'occasion des auditions et des déplacements, le caractère souvent trop long et complexe des procédures mises en place a également été souligné à plusieurs reprises. Le présent rapport y reviendra pour aborder les difficultés que les SATT continuent à rencontrer sur ce point.
Il est aussi important que les projets soient bien en phase de maturation et que les crédits du PIA consacrés à la valorisation et au transfert de technologies ne puissent servir à assurer le financement de projets de recherche non aboutis. La tentation des chercheurs, souvent confrontés à des difficultés de financement dans leurs laboratoires, a pu être de solliciter les SATT (notamment lors de leur installation), afin de couvrir des besoins non financés à la fin de leurs travaux de recherche.
À ce titre, votre rapporteur spécial est réservé sur le développement dans les SATT de dispositifs de pré-maturation . S'il comprend l'utilité de pouvoir disposer de premières études de marché ou encore de renforcer le projet par un prototype plus abouti ou l'obtention de résultats complémentaires, la frontière paraît toutefois relativement ténue avec le financement de la recherche proprement dite , ce qu'il convient, encore une fois, d'éviter.
2. Des efforts de professionnalisation des équipes de la valorisation et du processus de transfert
En atteignant une certaine masse critique en termes de nombre d'établissements, de laboratoires et de chercheurs couverts et compte tenu des moyens octroyés dans le cadre du PIA, les SATT devaient permettre une professionnalisation croissante des acteurs de la valorisation . L'appel à projets de l'ANR ouvrant à la candidature des SATT mentionnait ainsi qu'« elles [devraient] conduire à une plus forte professionnalisation de la valorisation de la recherche et renforcer les compétences ».
En effet, sans remettre en cause la qualité des personnels présents dans chacun des services de valorisation existant auparavant - lorsqu'ils existaient -, toutes les universités ne pouvaient être en mesure de disposer des compétences les plus poussées dans l'ensemble des domaines concernés et la détection puis le transfert des projets valorisables ne pouvaient toujours être réalisés efficacement et de façon optimale.
Cet objectif fixé aux SATT semble globalement atteint , d'après les différentes personnes entendues et les éléments mis à la disposition du rapporteur spécial. Les chercheurs et les entreprises reconnaissent en particulier une compétence accrue et spécialisée des équipes par rapport à certains des services qui lui préexistaient. La mutualisation des emplois et des moyens pour plusieurs établissements a notamment permis de développer des qualifications et une spécialisation des intervenants.
De véritables équipes chargées d'accompagner les chercheurs dans la maturation de leur projet puis dans la recherche de commercialisation se sont mises en place, offrant ainsi une force d'intervention jusqu'ici bien moins importante sur certains territoires.
Certains chercheurs et entrepreneurs entendus par votre rapporteur spécial ont estimé que les SATT étaient davantage en quête de projets à valoriser , faisant des efforts de détection jusqu'à présent peu développés par les établissements universitaires et les organismes de recherche. Ils ont indiqué que la valorisation des résultats de leurs travaux n'était auparavant envisagée que si eux-mêmes actionnaient les services compétents au sein des établissements et organismes de recherche.
Un chercheur a même affirmé que, sans la SATT, il n'aurait probablement pas eu l'idée de valoriser plusieurs de ses travaux qui, achevés ou presque, pouvaient pourtant manifestement l'être puisqu'il est à l'origine de trois projets actuellement en phase de maturation ou de transfert. C'est à l'occasion d'une présentation par un membre de la SATT qu'il a identifié ce potentiel et décidé de présenter ses résultats de recherche.
Les équipes jusqu'alors consacrées à la valorisation étaient insuffisamment nombreuses, y compris probablement au sein des principaux organismes de recherche et des plus grandes universités.
Avant les SATT, des chercheurs n'avaient apparemment même jamais été sollicités dans leurs laboratoires pour envisager de valoriser leurs travaux de recherche. L'un d'entre eux, rencontré par votre rapporteur spécial, a indiqué être passé, sous leur impulsion, des sciences fondamentales (dans le cadre desquelles il avait jusqu'alors effectué toute sa carrière) à une « discipline plus appliquée ». L'importance de la détection et de l'accompagnement proposé a été très largement soulignée.
D'autres ont également mis en avant un engagement réel des équipes de la SATT pour parvenir à transférer la technologie proposée , tandis qu'auparavant les organismes de recherche concernés pouvaient être davantage intéressés pour breveter les résultats, moins pour les valoriser d'un point de vue commercial. La capacité de certains business developers à comprendre l'activité des entreprises et leurs besoins face aux projets qui leur sont présentés a également pu être mise en avant.
La professionnalisation de la valorisation de la recherche a également été soulignée s'agissant de la protection et de la gestion de la propriété intellectuelle . Des juristes spécialisés ont ainsi été recrutés et ont pu développer des compétences très poussées dans certains secteurs au sein des SATT. Des métiers spécifiques et potentiellement assez rares jusqu'à présent sur l'ensemble du territoire, tels que celui d'ingénieur « brevet », ont ainsi été créés.
Indépendamment du nombre de titres de propriété déposés par ces structures, les brevets issus des SATT devraient également s'avérer plus solides juridiquement , permettant de mieux protéger les droits des chercheurs.
La reconnaissance des compétences développées par certaines SATT se concrétise aussi par le fait qu'elles récupèrent la gestion d'autres titres de propriété , au-delà même de ceux pour lesquels elles ont l'exclusivité de la gestion une fois les projets maturés. Ainsi en est-il notamment des cas où une SATT est mandatée par un établissement pour établir le brevet à la suite d'un contrat de collaboration. Cette activité est alors facturée à l'établissement au titre de prestations.
Bien entendu, cette professionnalisation accrue n'est pas constatée dans toutes les SATT , ou à tout le moins peut l'être à des degrés très divers . En outre, certains établissements et organismes de recherche ne constatent pas de réels changements car ils disposaient déjà, auparavant, d'équipes étoffées et chevronnées.
Un organisme de recherche ayant sa propre structure de valorisation s'est même montré particulièrement critique quant aux compétences déployées par les SATT lors de son audition, affirmant que leur stratégie en propriété intellectuelle privilégierait l'aspect quantitatif, focalisé sur le nombre de brevets, plutôt que sur sa qualité. Il a également évoqué le fait que certaines SATT sous-traiteraient une partie de l'écriture de ses brevets, compromettant ainsi leur qualité.
Une analyse plus poussée de la qualité de la protection de la propriété intellectuelle serait probablement utile , d'ici quelques années.
Une professionnalisation encore accrue des SATT pourrait aussi résulter du recrutement de profils plus expérimentés . Certaines difficultés ont pu être relevées par les représentants des SATT rencontrés, notamment pour proposer des conditions de rémunération suffisamment attractives.
3. Un objectif de mutualisation des services préexistants partiellement atteint, ne permettant qu'imparfaitement aux SATT de jouer leur rôle de « guichet unique » pour les chercheurs et les entreprises
a) Une mutualisation des services inachevée
Comme indiqué précédemment, l'un des objectifs de la mise en place des SATT était de les constituer en « guichet unique » de la valorisation. L'appel à projets de l'ANR précisait même que « la création de la SATT s'accompagne de la suppression des structures dont les missions lui ont été transférées (SAIC, incubateur, filiale de valorisation, association, ADER) » 24 ( * ) .
D'après le rapport de Suzanne Berger sur les réformes dans l'écosystème industriel français, remis en janvier 2016 à Thierry Mandon, alors secrétaire d'État à l'enseignement supérieur et à la recherche, et Emmanuel Macron, alors ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, cette fonction de « guichet unique » constituait, pour les industriels rencontrés, « un des atouts des SATT », voire le seul.
Si elles ont indéniablement développé des compétences jusqu'alors inégalement présentes sur le territoire qu'elles couvrent et disposent de capacités d'action souvent plus importantes, elles n'ont pas vraiment permis un regroupement des équipes de valorisation , en mettant fin au morcellement des structures existantes, en particulier sur les sites universitaires.
Ainsi, les DMTT ont bien, pour leur part, tous été remplacés là où une SATT s'est implantée. Toutefois, le transfert des effectifs de ces directions vers la SATT n'a pas toujours eu lieu. Or cela a pu être préjudiciable au démarrage des sociétés d'accélération.
Au-delà des DMTT et avec le recul de cinq années après le lancement de la vague A, il s'avère qu'un nombre important de structures de valorisation liées aux établissements a, par ailleurs, été maintenu, qu'il s'agisse de SAIC, de filiales ou de cellules de valorisation des universités, avec des effectifs s'échelonnant de 0,5 à 75 personnes.
Toutefois, ces reliquats de personnels s'expliquent en grande partie, non pas par un doublonnement des compétences entre la SATT et ces équipes, mais par l'absence de transfert de certaines activités aux SATT , notamment la gestion des contrats de recherche. Ainsi en est-il par exemple pour l'Université d'Aix-Marseille.
Par ailleurs, la suppression totale de certaines SAIC ne pouvait être raisonnablement imaginée dès lors que d'autres fonctions leur avaient été confiées et n'entraient pas dans le champ de la valorisation de la recherche (et donc dans celui des compétences des SATT). Ainsi en était-il, par exemple, de la gestion du patrimoine immobilier de certaines universités.
Le maintien de services de valorisation au sein des établissements peut aussi résulter, ce qui est plus contestable du point de vue de la mutualisation et du gain d'échelle attendu, du choix opéré par certains établissements de ne pas transférer l'intégralité de la gestion de leur propriété intellectuelle aux SATT et du transfert des résultats issus des travaux de leurs laboratoires, qu'il s'agisse du stock ou du flux.
En effet, selon les territoires et les établissements actionnaires, certains laboratoires sont partiellement voire totalement exclus du champ d'intervention des SATT. Par ailleurs, même lorsque la compétence de la SATT est en principe prévue, il semblerait qu'en pratique, certains projets leur échappent encore.
Ainsi, comme le mentionnait le Gouvernement dans le rapport annexé au projet de loi de finances pour 2016, sur la mise en oeuvre et le suivi des investissements d'avenir, « les SATT ont donc intégré les compétences préexistantes à des degrés variables. En moyenne, 22 % des effectifs présents dans les services valorisation préexistants ont été recrutés par les SATT de la vague A ».
S'agissant des filiales chargées du transfert des organismes de recherche, la création des SATT ne semble pas avoir réellement conduit à la réduction des effectifs. D'ailleurs, il est même clairement établi que, dans certains cas, leurs services de valorisation n'avaient pas vocation à disparaître, notamment pour gérer les contrats de recherche mais aussi les transferts de projets ayant un intérêt national voire international, qui dépassent le champ d'action d'une SATT (voir supra le cas du CNRS).
Impact des SATT de la vague A sur les services valorisation des établissements actionnaires
Source : rapport annexé au projet de loi de finances pour 2016, sur la mise en oeuvre et le suivi des investissements d'avenir
À partir des données transmises par 10 des 14 SATT à votre rapporteur spécial, il semblerait qu'une SATT ait recruté en moyenne 8 employés parmi le DMTT et les services de valorisation existants, ces derniers représentant encore en moyenne un effectif de 24 employés au niveau de chaque SATT.
Deux considérations peuvent toutefois nuancer ce constat de relatif échec de la mutualisation des services de valorisation dans les SATT.
D'une part, votre rapporteur spécial a tout de même pu recueillir des témoignages plutôt favorables aux SATT dans leur positionnement de « guichet unique » de la valorisation, à l'occasion de ses déplacements. Les chercheurs et les représentants d'établissement rencontrés se disent plutôt satisfaits de l'émergence d'une structure intégrée qui concentre plusieurs activités de la chaîne de la valorisation (détection, maturation, transfert...), même si elle n'a pas nécessairement récupéré toutes les compétences en termes de valorisation, laissant ainsi subsister d'autres entités.
D'autre part, certaines SATT de la vague A ont, du fait de la forte adhésion de leurs actionnaires, pu mutualiser efficacement leurs moyens et intégrer une part significative des effectifs des anciennes cellules de valorisation , contribuant dès lors à rationaliser le paysage de la valorisation de la recherche dans leur territoire d'implantation.
Il serait tentant de croire qu'il en ira de même pour les autres SATT mais cette évolution positive n'est pas garantie, d'autant plus que plusieurs d'entre elles rencontrent des difficultés incontestables en termes d' affectio societatis et d'insertion dans l'écosystème qui l'environne.
En tout état de cause, votre rapporteur spécial a été frappé par le fait que les services de l'État étaient, en réalité, dans l'impossibilité de définir précisément, au niveau national comme au niveau de chaque SATT, le nombre de dispositifs de valorisation préexistants et de personnels dédiés à cette activité dans l'ensemble des établissements et organismes de recherche actionnaires. Ils n'étaient pas non plus en capacité d'indiquer précisément les dispositifs restants actifs et les moyens qui leur étaient accordés (tant d'un point de vue financier qu'en termes de ressources humaines).
Il n'existe actuellement aucun bilan chiffré de ce qui existait antérieurement aux SATT et la cartographie des services et filiales de valorisation, réalisée au moment de la création de ces structures, ne pouvait être présentée comme exhaustive. Finalement, seules les évaluations individuelles de chaque SATT pourraient éventuellement fournir certaines indications concernant la mutualisation des moyens et le recrutement des personnels.
Si le principe d'autonomie des universités peut en partie expliquer cette situation, il n'a toutefois pas vocation à empêcher la collecte d'informations essentielles pour l'État : celles-ci doivent ainsi permettre de s'assurer de la pertinence des politiques publiques menées (en l'occurrence la valorisation de la recherche publique) et des outils mis en place à cet effet (les SATT, destinées à mutualiser les moyens en faveur de cette politique publique).
b) Un maintien de dispositifs préexistants qui peut parfois s'avérer justifié
Le maintien de personnels dans les services de valorisation des établissements de recherche, en particulier les universités, peut parfaitement s'entendre lorsqu'il a vocation à compléter l'action de la SATT et à assurer une présence effective d'acteurs de la valorisation au plus près des laboratoires et des chercheurs .
Certaines SATT s'appuient ainsi encore sur les services préexistants et maintenus dans leurs établissements actionnaires pour participer à la détection et au suivi des projets de maturation.
Comme le présent rapport aura l'occasion d'y revenir, il est essentiel, pour que le processus de transfert de technologies soit efficace, notamment la détection des projets, que le travail des services de valorisation s'effectue au plus près des chercheurs, par une présence effective dans les laboratoires.
Une telle organisation suppose toutefois une activité coordonnée entre la SATT et les services universitaires ainsi qu'une parfaite communication entre l'ensemble des équipes.
Par ailleurs, comme votre rapporteur spécial aura également l'occasion d'y revenir, on peut comprendre que les établissements universitaires aient pu choisir de conserver certaines compétences , notamment lorsque celles-ci étaient déjà bien développées et reposaient sur des services ou filiales pleinement opérationnelles. Ainsi en est-il en particulier de la gestion des contrats de recherche partenariale, d'autant plus que cette activité génère d'importants revenus. Toutefois, il est important, encore une fois, que les SATT et ces autres équipes de valorisation échangent entre elles et s'informent des relations développées avec les entreprises.
* 23 ANR, Rapport-évaluation d'impact 2016 de l'action « FNV ».
* 24 Appel à projets de l'ANR, édition de 2010, dans le cadre des investissements d'avenirs - fonds national de valorisation - sociétés d'accélération du transfert de technologies.