B. LA COMMUNAUTARISATION DE L'ACQUIS DE SCHENGEN

Comme il a été dit plus haut, le dispositif Schengen originel était de nature purement intergouvernementale .

Lors des négociations du traité de Maastricht, l'Allemagne, qui connaissait alors un afflux important de réfugiés en lien avec le conflit des Balkans, soutenue par la Belgique et les Pays-Bas, avait plaidé pour une communautarisation des politiques d'asile et d'immigration. La France et le Royaume-Uni étaient restés un certain temps opposés à cette orientation. Finalement, un compromis a été trouvé par l'instauration d'une compétence communautaire dans le domaine de la politique des visas et par la création d'un pilier intergouvernemental, à côté du pilier communautaire, traitant spécifiquement des questions d'asile et d'immigration. Néanmoins, le bilan de la coopération intergouvernementale sur le fondement du traité de Maastricht, entré en vigueur le 1 er novembre 1993, est apparu moins bon que celui obtenu dans le cadre extracommunautaire du système Schengen.

La véritable communautarisation de Schengen a été réalisée par le traité d'Amsterdam , signé le 2 octobre 1997 et entré en vigueur le 1 er mai 1999. Ce traité a marqué la fin de la nature intergouvernementale de Schengen et a intégré son acquis dans l'Union en en communautarisant une partie. Cet acquis comprend :

- les textes de l'accord de Schengen de 1985, de ses protocoles et des traités d'adhésion de ses États membres, ainsi que de sa convention d'application de 1990 ;

- et le droit dérivé afférent tel que défini par une décision du Conseil de 1999 19 ( * ) , en particulier les mesures de mise en oeuvre prises en matière d'harmonisation des contrôles aux frontières extérieures et de renforcement de la coopération policière et judiciaire.

Cet acquis a été intégré dans le droit de l'Union conformément à une autre décision du Conseil du même jour 20 ( * ) , prise en vertu de l'article 2 du protocole intégrant l'acquis de Schengen dans le cadre de l'Union européenne, annexé au traité. L'article 8 de ce protocole prévoyait que l'acquis devait être intégralement appliqué par tous les États candidats à l'adhésion, indépendamment des domaines restant directement liés à la participation effective à Schengen (contrôles aux frontières extérieures, politique commune en matière de visas et de retour, SIS, protection des données et coopération policière et judiciaire).

Ainsi, le traité d'Amsterdam, qui visait notamment à la réalisation progressive d'un espace de liberté, de sécurité et de justice, a fait entrer les questions relatives aux visas, à l'asile et à l'immigration dans le premier pilier communautaire, contribuant ainsi à une rationalisation et à une intégration de l'acquis de Schengen dans les traités.

Le rôle du comité exécutif a été transféré au Conseil, mais dans une formation spécifique, dite comité mixte, qui permet d'y faire participer les États associés.

Cette intégration a été confirmée dans le traité de Lisbonne , dont le titre V de la troisième partie porte sur l'espace de liberté, de sécurité et de justice et dont le protocole n° 19 , annexé au traité sur l'Union européenne et au traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, est spécifiquement consacré à l'acquis de Schengen 21 ( * ) .

Les articles 67 et 77 du traité portent plus spécifiquement, pour le premier, sur l'espace de liberté, de sécurité et de justice et, pour le second, sur la politique relative aux contrôles aux frontières. L'article 78 est relatif à la politique commune en matière d'asile et l'article 79 concerne la politique commune d'immigration.

LES ARTICLES 67 ET 77 DU TRAITÉ SUR LE FONCTIONNEMENT DE L'UNION EUROPÉENNE

Article 67

1. L'Union constitue un espace de liberté, de sécurité et de justice dans le respect des droits fondamentaux et des différents systèmes et traditions juridiques des États membres.

2. Elle assure l'absence de contrôles des personnes aux frontières intérieures et développe une politique commune en matière d'asile, d'immigration et de contrôle des frontières extérieures qui est fondée sur la solidarité entre États membres et qui est équitable à l'égard des ressortissants des pays tiers. Aux fins du présent titre, les apatrides sont assimilés aux ressortissants des pays tiers.

3. L'Union oeuvre pour assurer un niveau élevé de sécurité par des mesures de prévention de la criminalité, du racisme et de la xénophobie, ainsi que de lutte contre ceux-ci, par des mesures de coordination et de coopération entre autorités policières et judiciaires et autres autorités compétentes, ainsi que par la reconnaissance mutuelle des décisions judiciaires en matière pénale et, si nécessaire, par le rapprochement des législations pénales.

4. L'Union facilite l'accès à la justice, notamment par le principe de reconnaissance mutuelle des décisions judiciaires et extrajudiciaires en matière civile.

Article 77

1. L'Union développe une politique visant :

a) à assurer l'absence de tout contrôle des personnes, quelle que soit leur nationalité, lorsqu'elles franchissent les frontières intérieures ;

b) à assurer le contrôle des personnes et la surveillance efficace du franchissement des frontières extérieures ;

c) à mettre en place progressivement un système intégré de gestion des frontières extérieures.

2. Aux fins du paragraphe 1, le Parlement européen et le Conseil, statuant conformément à la procédure législative ordinaire, adoptent les mesures portant sur :

a) la politique commune de visas et d'autres titres de séjour de courte durée ;

b) les contrôles auxquels sont soumises les personnes franchissant les frontières extérieures ;

c) les conditions dans lesquelles les ressortissants des pays tiers peuvent circuler librement dans l'Union pendant une courte durée ;

d) toute mesure nécessaire pour l'établissement progressif d'un système intégré de gestion des frontières extérieures ;

e) l'absence de tout contrôle des personnes, quelle que soit leur nationalité, lorsqu'elles franchissent les frontières intérieures.

3. Si une action de l'Union apparaît nécessaire pour faciliter l'exercice du droit, visé à l'article 20, paragraphe 2, point a), et sauf si les traités ont prévu des pouvoirs d'action à cet effet, le Conseil, statuant conformément à une procédure législative spéciale, peut arrêter des dispositions concernant les passeports, les cartes d'identité, les titres de séjour ou tout autre document assimilé. Le Conseil statue à l'unanimité, après consultation du Parlement européen.

4. Le présent article n'affecte pas la compétence des États membres concernant la délimitation géographique de leurs frontières, conformément au droit international.


* 19 Décision 1999/435/CE du Conseil du 20 mai 1999 relative à la définition de l'acquis de Schengen en vue de déterminer, conformément aux dispositions pertinentes du traité instituant la Communauté européenne et du traité sur l'Union européenne, la base juridique de chacune des dispositions ou décisions qui constituent l'acquis.

* 20 Décision 1999/436/CE du Conseil du 20 mai 1999 déterminant, conformément aux dispositions pertinentes du traité instituant la Communauté européenne et du traité sur l'Union européenne, la base juridique de chacune des dispositions ou décisions constituant l'acquis de Schengen.

* 21 Le protocole n° 19 est annexé au présent rapport.

Page mise à jour le

Partager cette page