CONCLUSION
La publication d'un premier rapport public représente toujours une étape majeure dans la vie d'une instance de contrôle, surtout lorsque celle-ci existe depuis quatorze ans et a toujours fonctionné dans la plus parfaite discrétion. Mais, comme évoqué précédemment, le regard du public n'est pas incompatible avec la préservation du secret de la défense nationale. L'existence de ce dernier n'a d'ailleurs de sens que si le premier peut aller aussi loin que possible. Car les services de renseignement agissent pour la sécurité de nos concitoyens et la préservation du cadre démocratique de notre régime. Loin d'être un instrument de la Raison d'État ou d'un quelconque « État profond », ils incarnent un outil de souveraineté soumis à une pluralité de contrôles complémentaires et rigoureux.
En ce sens, le présent rapport a formulé 22 recommandations dont la mise en oeuvre paraît nécessaire à la poursuite d'un contrôle efficace et d'une utilisation optimale des fonds spéciaux. Elles viennent compléter la centaine de recommandations formulées dans les procès-verbaux adressés aux services de renseignement et à l'exécutif. La CVFS sera attentive à leur prise en compte et en effectuera un suivi minutieux.
En effet, les objectifs poursuivis par le contrôleur et le contrôlé coïncident parfaitement dans la mesure où ils s'inscrivent au service de la Nation. Il importe dès lors que le dialogue se poursuive pour tendre vers un perfectionnement continu.
La modernité et les exigences de nos concitoyens imposent un cadre d'action étroit et exigeant pour nos services. La noblesse de leur métier découle de cette tension qui nécessite également une meilleure connaissance de cette sphère d'action trop souvent caricaturée ou objet de phantasmes. Or contrôler et comprendre le contrôle supposent de connaître. Pour ce faire, oeuvrer à la diffusion d'une culture française du renseignement s'impose comme un absolu. La Commission de vérification des fonds spéciaux a souhaité apporter sa pierre à un édifice dont les fondations ne sont pas achevées.
RELEVÉ DES RECOMMANDATIONS DE LA CVFS
Recommandation n°1 : Consacrer dans la loi la fonction de contrôle et d'évaluation des fonds spéciaux conférée à la CVFS ;
Recommandation n°2 : Inciter les directeurs de service à formaliser par une décision signée de leur main ou de la main de leurs (sous-)directeurs le déclenchement et l'achèvement d'une opération ;
Recommandation n°3 et 5 : Abolir, pour la CVFS et la DPR, la restriction des « opérations en cours » au regard des évolutions constitutionnelles survenues en 2008 ;
Recommandation n°4 : Exclure du champ des enquêtes sur pièces et sur place les opérations en cours ;
Recommandation n°6 : Modifier en profondeur les dispositions législatives relatives à la CVFS (missions, moyens, période de contrôle, publication d'un rapport) ;
Recommandation n°7 : Affecter à la CVFS un administrateur des services de l'Assemblée nationale et/ou du Sénat à temps plein ;
Recommandation n°8 : Solliciter le concours de la Cour des comptes ;
Recommandation n°9 : Conduire une réflexion sur le budget de fonctionnement de la CVFS ;
Recommandation n°10 : Revaloriser au moins à hauteur de 50% la dotation en fonds spéciaux octroyée aux services de renseignement ;
Recommandation n°11 : Anticiper les menaces à venir et dégager les moyens financiers nécessaires pour les entraver ;
Recommandation n°12 : Octroyer une dotation en fonds spéciaux à certains services du deuxième cercle de la communauté du renseignement ;
Recommandation n°13 : N'octroyer une dotation en fonds spéciaux qu'en réponse à une expression de besoins détaillée et budgétée ;
Recommandation n°14 : Prévoir dans la loi une dérogation au principe d'annualité budgétaire ;
Recommandation n°15 : Limiter le reliquat conservé par les services destinataires au strict nécessaire ;
Recommandation n°16 : Verser la première tranche de la dotation en fonds spéciaux dès le mois de janvier ;
Recommandation n°17 : Constituer une enveloppe de précaution afin de faire face à des sollicitations imprévues ;
Recommandation n°17 bis : Permettre un recours plus aisé aux décrets de dépenses accidentelles et imprévisibles (DDAI) au profit de tous les services de la communauté du renseignement lorsqu'ils sont confrontés à des impératifs opérationnels soudains ;
Recommandation n°18 : Limiter le recours aux DDAI au profit d'un accroissement pérenne des dotations en fonds spéciaux ;
Recommandation n°19 : Modifier le code de la défense afin de consacrer un rattachement du Coordonnateur national du renseignement à la fois au Président de la République et au Premier ministre afin de lui permettre notamment de réaliser des arbitrages budgétaires ;
Recommandation n°20 : Promouvoir une nomenclature unique des pièces justificatives et modes de comptabilité afin de faciliter et d'unifier le contrôle mais également la gestion interne ;
Recommandation n°21 : OEuvrer à la diffusion des bonnes pratiques et à la sensibilisation des acteurs (y compris par la diffusion d'une directive du CNR s'inspirant des préconisations de la CVFS) ;
Recommandation n°22 : Renforcer les mécanismes de contrôle interne au sein des services de renseignement.