VI. LES FLUX FINANCIERS ET BANCAIRES ENTRE LA FRANCE ET L'IRAN

A. ENTRE ÉVICTION ET DÉMISSION : LES BANQUES FRANÇAISES NE SONT PAS AU RENDEZ-VOUS

1. Des banques plus que prudentes, y compris pour les transactions autorisées

La principale conclusion du déplacement de votre délégation est que les flux financiers restent bloqués entre la France et l'Iran, en dépit de la période de six mois de levée partielle des sanctions qu'incarne le JPOA. Aucune banque française n'accepte aujourd'hui d'accompagner nos entreprises dans leurs projets en relation avec l'Iran, y compris pour des opérations parfaitement respectueuses de la légalité internationale et du régime de sanction américain.

La Banque centrale d'Iran a rappelé à votre délégation que la Société Générale avait, par exemple, refusé d'être le canal de paiement entre la France et l'Iran pour les denrées humanitaires autorisées par le JPOA.

Cette situation est loin de ne résulter que d'un phénomène de stratégie de retrait prudent propre aux banques françaises : ces dernières sont évincées sous la pression du droit américain et des menaces qu'il fait planer sur l'avenir des banques européennes.

2. Le cas de l'amende infligée à BNP-Paribas

L'actualité rappelle douloureusement cette réalité difficile et complexe avec le dossier de l'amende infligée à BNP-Paribas .

Accusée d'avoir accompagné des opérations compensées en dollars en lien avec l'Iran, Cuba et le Soudan, ce qui transgressait certaines sanctions américaines , d'avoir délibérément dissimulé ces transactions prohibées , d'en avoir effacé les traces et d'avoir trompé les autorités américaines, cette banque a dû reconnaître publiquement sa culpabilité (elle a donc dû finir par accepter de plaider coupable de deux chefs d'accusation) et licencier plusieurs de ses cadres dirigeants . Elle risquait aussi une suspension partielle de ses activités aux États-Unis et une amende d'un montant de l'ordre de 10 milliards de dollars . Finalement, l'amende a été ramenée à la somme de 8,834 milliards de dollars au terme d'une négociation amiable, ce qui en fait tout de même une amende record. Il convient de rappeler que la banque n'a provisionné à ce titre que 1,1 milliard de dollars et, bien qu'elle ait communiqué sur sa capacité à honorer cette charge, cela pèsera dans son bilan.

Par ailleurs, le discours tenu par les autorités américaines à l'occasion cette amende infligée à BNP-Paribas révèle un ton menaçant et une certaine violence . Le directeur du FBI, M. James Comey, a ainsi affirmé le 1 er juillet 2014 que « les sanctions imposées à BNP-Paribas envoient un message puissant à toutes les entreprises qui font passer leurs profits avant le respect de la loi ». Et le ministre américain de la Justice, M. Eric Holder a affirmé le même jour que « les banques qui pensent faire des affaires en violant les embargos américains feront mieux de réfléchir à deux fois car le ministère de la justice ne lâchera pas prise ».

Alors, bien sûr, la sanction est disproportionnée et injuste mais elle pose un problème plus large et plus grave encore , celui de la tutelle de fait des États-Unis sur notre système bancaire et financier , voire sur le droit français et le droit européen dans leur ensemble.

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