B. UN MANQUE CRIANT DE DONNÉES ÉTAYÉES ET PARTAGÉES PAR L'ENSEMBLE DES ACTEURS

1. Sur les personnes prostituées

L'action des pouvoirs publics auprès des personnes qui se prostituent ne peut être efficace que si les caractéristiques de ce public sont suffisamment connues. Or le manque de données étayées et partagées sur le sujet est criant.

Cette situation peut ne pas surprendre s'agissant d'une activité licite, pratiquée de façon discrète voire secrète et en mutation perpétuelle. Les observations de la police ne peuvent ainsi se fonder que sur la base des procédures mises en oeuvre pour proxénétisme ou racolage et sur les remontées effectuées par les associations.

Les rapports d'activité de ces dernières fournissent à ce titre des informations précieuses pour avoir connaissance des profils des personnes prostituées. Mais les associations sont elles-mêmes démunies face à l'évolution constante des formes de prostitution. Elles tentent malgré tout de s'adapter.

Ainsi, les tournées virtuelles effectuées par Grisélidis afin d'entrer en contact avec les personnes qui se prostituent sur internet lui ont permis de fournir des données chiffrées sur le profil de cette population dans son rapport d'activité pour 2012.

Mais le manque d'expertise sur le sujet a bien souvent pour conséquence d'empêcher tout diagnostic unanimement partagé par les acteurs publics et associatifs, par exemple sur des enjeux tels que la prostitution des mineurs ou celle des étudiants. Sans véritable impulsion à l'échelle nationale, les initiatives qui sont menées pour mieux connaître ces publics, si elles traduisent une prise de conscience utiles, demeurent isolées.

La France a en outre accumulé un retard important par rapport à ses voisins européens concernant la connaissance de l'état de santé des personnes prostituées. C'est ce que montre la revue de littérature étrangère effectuée par l'Igas en annexe de son rapport de 2012 11 ( * ) .

Seule l'étude Prosanté réalisée entre 2010 et 2011 sous la responsabilité de la Fnars et de l'Institut de veille sanitaire (InVS), permet aujourd'hui de disposer d'un aperçu relativement global de l'état de santé des personnes qui se prostituent 12 ( * ) .

L'article 52 de la loi pour la sécurité intérieure du 18 mars 2003 demande au Gouvernement de publier chaque année un rapport sur la situation démographique, sanitaire et sociale des personnes prostituées . Ainsi que l'a souligné le Conseil national du Sida (CNS) 13 ( * ) , un seul rapport a été communiqué à ce jour qui, faute de pouvoir s'appuyer sur une expertise partagée et actualisée, n'a pu proposer qu'une analyse de portée limitée.

Propositions

Assurer la mise en place d'un dispositif de remontée des informations recueillies sur le terrain, structuré et partagé par l'ensemble des acteurs.

Développer, sur la base de ces informations, une véritable expertise publique qui permette de mieux connaître les profils des personnes qui se prostituent, leurs modes d'exercice et leur situation sanitaire et sociale. Accorder une attention particulière à la prostitution sur internet, encore peu connue mais en fort développement.

Une fois ces préalables acquis, rendre effective la publication annuelle du rapport sur la situation démographique, sanitaire et sociale des personnes prostituées.


* 11 L'Igas dénombre dix études effectuées en Espagne et au Royaume-Uni, cinq en Italie, trois en Suisse, aux Pays-Bas et en Belgique.

* 12 InVS-Fnars, « Etude sur l'état de santé, l'accès aux soins et l'accès aux droits des personnes en situation de prostitution rencontrées dans des structures sociales et médicales », 2010-2011.

* 13 Conseil national du Sida, « VIH et commerce du sexe : garantir l'accès universel à la prévention et aux soins », septembre 2010.

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