4. Un sentiment de méfiance à l'égard des « institutions »
Sans vouloir généraliser une attitude, qui dépend de chaque individualité, il semble que les personnes prostituées, compte tenu du climat de stigmatisation dans lequel elles vivent, tendent à développer ce que l'Igas appelle « un comportement d'évitement » vis-à-vis des structures publiques (administrations, services de police, structures sanitaires et médico-sociales, etc.). Cette méfiance est particulièrement manifeste chez les personnes en situation irrégulière, qui doivent en plus subir la crainte des reconduites à la frontière.
D'une manière générale, tous les acteurs de terrain observent une nette détérioration des relations avec les services de police depuis la mise en oeuvre de la LSI de 2003 . Selon le rapport « Geoffroy-Bouquet » précité, « les relations avec la police sont souvent devenues plus difficiles, l'incrimination de racolage passif donnant parfois l'impression d'un arbitraire policier » . Les gardes à vue, qui se sont multipliées dans les premières années de mise en oeuvre de la loi, ont souvent été vécues comme des humiliations. De plus, des témoignages concordants recueillis par vos rapporteurs indiquent que les préservatifs détenus par les personnes prostituées ont constitué des éléments de preuve du racolage pour la police, ce qui a pu avoir des conséquences négatives sur leur niveau de protection.
Plus surprenant, le sentiment de méfiance des personnes prostituées peut aussi parfois s'exprimer à l'égard d'acteurs censés leur venir en aide (professionnels de santé, assistants sociaux, personnels associatifs). Sont alors en cause la barrière linguistique, les différences culturelles, l'histoire personnelle, etc. Avant toute prise en charge, la mise en confiance peut donc prendre du temps .