3. Deux rapports remis en 2011 ont confirmé le peu de place laissé aux femmes dans les institutions publiques du spectacle vivant et dans les médias

Cheffe d'orchestre, travaillant étroitement avec deux compagnies - Accentus et Insula - et régulièrement avec les opéras et les orchestres français, notamment celui de Rouen, Laurence Equilbey 7 ( * ) en est venue à prendre conscience de l'ampleur du problème dans le secteur par le biais du mémoire consacré par l'un de ses étudiants à la place des femmes dans le spectacle vivant.

« Je n'aurais jamais imaginé que les statistiques obtenues seraient aussi désastreuses concernant les métiers relevant de l'artistique » a-t-elle confié à la délégation, lors de la table ronde du 25 avril 2013.

L'étude réalisée par Mikaël Loup, étudiant en master 2 « administration de la musique et du spectacle vivant » et Anne-Sophie Bach-Toussaint et publiée en février 2012, fournit des tableaux exhaustifs et nominatifs des responsables de l'administration actuelle, des établissements publics, des théâtres nationaux et de l'ensemble des structures culturelles labellisées.

Comme le faisait remarquer Muriel Couton lors de son audition, la partie de la brochure consacrée à la musique, qui a été rédigée par Laurence Equilbey, est la plus éloquente : une seule femme directrice de maison d'opéra (Caroline Sonrier à Lille), des chefs d'orchestres majoritairement masculins...

Et, contrairement à ce qu'on aurait pu penser, la situation est la même, que l'on observe la musique classique ou contemporaine.

Parallèlement, en 2008 et 2011, Michèle Reiser et Brigitte Grésy rendaient un rapport sur l'image des femmes dans les médias, au nom de la commission du même nom 8 ( * ) .

Elles constataient, malgré une progression continue de la place des femmes dans les médias (télévision, radio, presse écrite...), une pléthore d'archaïsmes et d'atteintes à la valeur des femmes, soulignant un « conformisme général qui perpétue les stéréotypes de genre ».

Auditionnées par la délégation le 18 novembre 2010 9 ( * ) , Michèle Reiser et Brigitte Grésy attiraient l'attention des membres de la délégation sur deux points particuliers, à savoir :

- la sous-représentation des femmes à la télévision, puisqu'on compte un tiers de femmes pour deux tiers d'hommes ;

- le cantonnement de la parole des femmes aux problématiques du foyer, puisque 80 % du temps de parole des femmes est dédié aux témoignages alors que 80 % de celui des hommes est relié au « savoir ».

Ceci revient à dire que, dans les médias, « l'expert » est un homme, le « témoin » de la rue est une femme.

C'est cette « assignation genrée » qu'il s'agissait de dépasser. C'est ce à quoi se sont engagés la plupart des grands médias en signant, le 13 octobre 2010, un acte d'engagement d'autorégulation.

Un an après, tirant le bilan d'une année d'application, Michèle Reiser et Brigitte Grésy produisaient un nouveau rapport sur « les experts » et reconnaissaient que les résultats n'étaient pas bons. Si l'on s'en tient aux chiffres seuls, ils traduisent une permanence : tous médias confondus, toujours 20 % d'expertes pour 80 % d'experts.

Ces différentes actions de sensibilisation et la publication de ces documents ne pouvaient laisser le ministère en charge de la politique culturelle indifférent.


* 7 Laurence Equilbey, cheffe d'orchestre, auditionnée dans le cadre d'une table ronde publique réunissant des directrices d'événements et d'établissements artistiques nationaux, le 25 avril 2013.

* 8 Michèle Reiser et Brigitte Grésy, Rapport 2011, « Les expertes : Bilan d'une année d'autorégulation » , Commission sur l'image des femmes dans les médias, ministère des solidarités et de la cohésion sociale, décembre 2011, rapport consultable à l'adresse : www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/114000703/0000.pdf

* 9 L'intégralité de cette audition est consultable à l'adresse : www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20101115/femmes.html

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