Extrait du discours prononcé par Nicolas Sarkozy à Grenoble le 30 juillet 2010

« Je demande à Eric le Douaron, qui connaît bien le sujet en tant qu'ancien directeur de la PAF, de faire preuve d'une fermeté absolue dans la lutte contre l'immigration illégale. La règle générale est claire : les clandestins doivent être reconduits dans leur pays.

« Et c'est dans cet esprit d'ailleurs que j'ai demandé au ministre de l'Intérieur de mettre un terme aux implantations sauvages de campements de Roms. Ce sont des zones de non-droit qu'on ne peut pas tolérer en France. Il ne s'agit pas de stigmatiser les Roms, en aucun cas. Nous avons fait depuis la loi Besson de grands progrès pour les aires mises à leur disposition. Lorsque je suis devenu ministre de l'Intérieur en 2002, moins de 20% des aires de stationnement étaient prévues. J'ai fait le point avec le ministre. Aujourd'hui plus de 60% des aires de stationnement légales sont prévues. Les Roms qui viendraient en France pour s'installer sur des emplacements légaux sont les bienvenus. Mais en tant que chef de l'Etat, puis-je accepter qu'il y ait 539 campements illégaux en 2010 en France ? Qui peut l'accepter ? J'ai vu que tel ou tel responsable politique disait : « mais pourquoi vous vous occupez de cela, le problème ne se pose pas ». Il ne se pose pas pour un responsable politique dont le domicile ne se trouve pas à côté d'un campement. Peut-être son opinion serait-elle différente s'il était lui-même concerné ?

« Nous allons procéder d'ici fin septembre au démantèlement de l'ensemble des camps qui font l'objet d'une décision de justice. Là où cette décision de justice n'a pas encore été prise, nous engagerons des démarches pour qu'elle intervienne le plus rapidement possible. Dans les trois mois, la moitié de ces implantations sauvages auront disparu du territoire français.

« Je souhaite également que dès l'automne prochain, nous réformions la loi applicable à ce type de situations. La décision d'évacuer les campements sera prise sous la seule responsabilité des préfets et leur destruction interviendra par référé du tribunal de grande instance, dans un délai bref. Nos compatriotes attendent que nous assumions nos responsabilités. »

Circulaire interministérielle du 26 août 2012 relative à l'anticipation et à l'accompagnement des opérations d'évacuation des campements illicites

« Le Ministre de l'éducation nationale, la Ministre des affaires sociales et de la santé, la Ministre de l'égalité des territoires et du logement, le Ministre de l'intérieur, le Ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, la Ministre déléguée auprès du ministre de l'éducation nationale, chargée de la réussite éducative, la Ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion,

« à Messieurs les Préfets de région, Mesdames et messieurs les Préfets


Résumé :

La présente circulaire précise le cadre de l'action de l'État dans le cas d'évacuations de campements illicites, ainsi que le dispositif de coordination des acteurs locaux à mettre en oeuvre autour du Préfet.

L'action de l'État relative aux campements illicites s'inscrit dans le respect des principes fondateurs de la République.

En premier lieu le respect des décisions de justice ne saurait être mis en question. Il revient au préfet d'exécuter celles-ci, lorsqu'il est ordonné par le juge qu'il soit mis fin, au besoin avec le concours de la force publique, aux occupations illicites de terrains. Lorsque la sécurité des personnes est mise en cause, cette action doit être immédiate. Dans les deux situations, au-delà de la responsabilité de l'État, il en va des fondements même du contrat social dans notre Nation

Il convient également, au regard de ces principes, d'assurer un traitement égal et digne de toute personne en situation de détresse sociale. Il vous incombe donc, en initiant le travail le plus en amont de la décision de justice qu'il est possible, de proposer des solutions d'accompagnement en mobilisant prioritairement les moyens de droit commun de chacun des partenaires. Cela suppose, dans une logique d'anticipation et d'individualisation, l'établissement, chaque fois que possible, d'un diagnostic et la recherche de solutions d'accompagnement, dans les différents domaines concourant à l'insertion des personnes (scolarisation, santé, emploi, logement/mise à l'abri...).

« Vous pouvez être amenés à intervenir dans des situations d'installations de personnes, réalisées sans droit ni titre, sur des propriétés publiques ou privées, pour y constituer des campements illégaux. La présente circulaire, qui sera votre cadre de référence, a pour objectif de guider votre action. Les dispositions qu'elle recense constituent votre guide de référence. Votre responsabilité est d'apprécier les situations locales pour mettre en oeuvre les principes de dignité et d'humanité en les partageant avec les partenaires.

« Il est rappelé au préalable que, dans certains cas, la situation au regard de la sécurité des personnes, y compris d'un point de vue sanitaire, peut imposer une action immédiate. Plus fréquemment, lorsque le propriétaire a obtenu une décision de justice prononçant l'expulsion des occupants sans titre, il vous appartient, lorsque cela est nécessaire, d'accorder le concours de la force publique en vue de l'exécution de cette décision juridictionnelle. De même, s'il apparaît à l'occasion de ces opérations que certaines personnes ne se trouvent pas dans une situation régulière au regard des règles régissant le droit de séjour en France, il vous appartient d'en tirer toutes les conséquences, selon le droit commun. Enfin, le présent cadre de référence ne peut en aucune manière être interprété comme faisant obstacle à l'application de la loi pénale.

« Il appartient à l'ensemble des pouvoirs publics, et en particulier à l'État, de se mobiliser de manière ciblée et efficace pour que la réponse la plus adaptée soit apportée aux situations humaines souvent très difficiles qui se retrouvent dans ces campements.

« Les différents services placés sous votre autorité doivent pour cela anticiper les éventuelles évacuations et mobiliser l'ensemble de leurs partenaires, collectivités territoriales et associations. Les difficultés sociales, sanitaires, scolaires, ou liées au logement doivent être systématiquement examinées le plus en amont possible et des solutions, temporaires ou durables, doivent être recherchées, selon les modalités explicitées dans le présent texte et dans le respect du droit commun.

« 1. Mobiliser les services de l'État et les acteurs locaux concernés

Dans les situations dans lesquelles une évacuation d'urgence n'est pas engagée, le délai entre l'installation des personnes, la décision de justice et l'octroi du concours de la force publique doit être mis à profit, pour engager, dès l'installation du campement, et chaque fois que les circonstances locales le permettent, un travail coopératif afin de dégager pour les personnes présentes dans ces campements des solutions alternatives.

« Dès que vous aurez connaissance de l'installation d'un campement, vous procèderez à une première évaluation de la situation au regard de la sécurité des personnes et mettrez en place avec le concours des partenaires un suivi des personnes présentes sur le campement.

« A cette fin, vous mobiliserez les services de l'État et de ses opérateurs.

« Vous veillerez également à associer étroitement les collectivités territoriales concernées (communes, intercommunalités, conseil général et conseil régional), ainsi que les associations susceptibles d'apporter un concours de toute nature dans l'accompagnement des personnes, les bailleurs sociaux et tout autre opérateur dont la participation vous semblera pertinente.

« Vous pourrez mettre en place un comité de suivi associant notamment les collectivités territoriales concernées ainsi que les associations engagées dans les actions d'insertion.

« Vous serez également vigilant au dialogue, avec les personnes présentes dans le campement comme avec les riverains du camp, et plus généralement à l'information du public sur les mesures mises en place.

« 2. Établir un diagnostic

« Vous veillerez à faire établir aussi rapidement que possible un diagnostic de la situation de chacune des familles ou personnes isolées. Il devra être global pour prendre en compte l'ensemble des problématiques (situation administrative, état de santé, logement, emploi, scolarisation,...) et individualisé afin de prendre en compte les spécificités de chacune des familles et de leur projet.

« Une attention particulière devra être apportée au repérage des personnes les plus fragiles (personnes malades, jeunes enfants, ...).

« Pour établir ce diagnostic, vous vous appuierez sur les services de l'État et de ses opérateurs et rechercherez, en fonction des besoins et du contexte local, le concours des services de collectivités territoriales (conseil général, centre communal d'action social -CCAS-, aide sociale à l'enfance -ASE...). Ce diagnostic pourra également être confié à une association.

« Lorsque ce diagnostic permettra d'envisager pour certains étrangers une aide au retour volontaire, vous vous appuierez sur l'office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), ainsi que sur les projets d'insertion existants dans le pays d'origine.

« 3. Mettre en place un accompagnement

« Après l'établissement du diagnostic, qui pourra être plus ou moins complet en fonction du temps et des ressources disponibles, vous identifierez les dispositifs d'insertion à organiser, en mobilisant prioritairement les moyens de droit commun. Vous veillerez également à la continuité de l'accès aux droits des personnes, notamment en matière de prise en charge scolaire et de parcours de soins, afin de maintenir, autant que possible, un suivi des actions collectives et individuelles d'insertion des personnes.

« En matière de scolarisation, le principe de l'obligation scolaire s'applique. Sa mise en oeuvre repose à la fois sur les maires, l'État et les familles. En relation avec les maires et les associations, les services de l'Éducation nationale, plus particulièrement ceux chargés de la scolarisation des nouveaux arrivants et des enfants du voyage, conduiront les actions permettant de prendre en charge sans délai et avec un souci de continuité les enfants présents dans les campements.

« Dans ce cadre, vous veillerez également à prévoir des actions portant sur les conditions matérielles de scolarisation dans la mesure où elles ont une incidence forte sur la fréquentation scolaire (à titre d'illustration, le transport, la cantine, les fournitures scolaires).

« En matière sanitaire, vous vous appuierez sur les agences régionales de santé (ARS), chargées de mettre en place les actions permettant de favoriser l'accès aux droits, à la prévention et aux soins, avec une vigilance particulière concernant l'accès à la vaccination et à la santé materno-infantile. Les ARS solliciteront, à cette fin, le concours des services des collectivités territoriales, notamment des CCAS et des services de protection maternelle et infantile, et assureront le lien avec les associations susceptibles d'intervenir auprès de ces populations en matière de santé.

« En matière d'hébergement et d'accueil, les solutions doivent être envisagées sur la base des situations particulières des personnes concernées, constatées au moment du diagnostic. Ces situations pouvant être très différentes, l'ensemble des dispositifs mobilisables par les partenaires publics doit être considéré. Il s'agit d'abord de rechercher des réponses aux urgences que vous avez constatées. Il s'agit ensuite de favoriser les parcours d'insertion qui, pour être efficaces, doivent être présentés et expliqués aux intéressés puis, nécessitent que les ménages adhérent pleinement à ce type de projet et qu'ils soient stabilisés dans des conditions décentes, et accompagnés sur une période temporelle compatible avec l'accès à l'emploi et, in fine, à un logement pérenne.

« A court terme donc, préalablement à l'évacuation, le recours à l'hébergement d'urgence doit être recherché lorsque cela est nécessaire, adapté aux situations personnelles et possibles en fonction des disponibilités de places que vous recenserez. Une attention particulière doit être portée aux personnes les plus vulnérables.

« Dans une action plus suivie, l'aménagement d'un site d'accueil provisoire ou d'autres solutions d'hébergement adapté peuvent être envisagés dans certains cas, dans l'objectif de stabiliser transitoirement les personnes concernées pour favoriser leur insertion. Des solutions de ce type ne peuvent se concevoir que dans un partenariat étroit entre l'État et les collectivités territoriales.

« Lorsque le partenariat local est suffisamment construit, il peut être utile de recourir à la mise en place d'une maîtrise d'oeuvre urbaine et sociale (MOUS) pour déterminer et mettre en oeuvre les solutions appropriées en matière d'habitat.

« Enfin, il est utile de signaler que certains bailleurs sociaux ont pu porter des initiatives adaptées aux personnes concernées par des évacuations de campement, en lien avec des associations.

« En matière d'insertion professionnelle, vous disposez désormais d'un nouveau cadre.

« Le Gouvernement a, en effet, décidé de faciliter les conditions d'accès au marché de l'emploi pour les ressortissants roumains et bulgares, pour les rapprocher des conditions applicables à l'ensemble des ressortissants communautaires.

« Ainsi, pour les personnes présentes dans les campements qui relèveraient de ces deux nationalités, la liste des métiers qui leur sont ouverts sans que la situation de l'emploi ne leur soit opposable sera prochainement élargie, après mise en oeuvre des procédures de consultation des partenaires sociaux.

« Les taxes dues par l'employeur et le ressortissant lui-même à l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) lors de la délivrance du titre de séjour ou de son renouvellement sont supprimées. Vous recevrez très prochainement une instruction conjointe du ministre de l'intérieur et du ministre délégué chargé du budget en ce sens. Toutefois il sera fait application dès maintenant de ces nouvelles dispositions. L'entrée en vigueur de cette mesure est, en effet, immédiate.

« En dehors de ces dispositions nouvelles, qui concernent les seuls ressortissants roumains et bulgares, votre action doit s'inscrire dans les mesures engagées par le service public de l'emploi.

« Elle nécessite au préalable une analyse qualitative de la situation des personnes concernées afin de déterminer leur distance à l'emploi et au marché du travail. Cette analyse sera conduite par Pôle emploi, et l'unité territoriale de la DIRECCTE, avec l'appui des autres administrations compétentes et des autres partenaires, notamment des collectivités territoriales. Cette phase a aussi pour objet d'informer les personnes sans emploi qui entendent se mettre en situation active d'en rechercher, de s'inscrire à Pôle emploi.

« Les mesures de droit commun de l'emploi peuvent être engagées pour les personnes éloignées de l'emploi : formations, orientation vers les structures d'insertion par l'économique comme des chantiers d'insertion, contrats aidés et notamment le contrat d'accès à l'emploi (CAE).

« Vous vous appuierez sur les prestations de Pôle emploi prévues pour une démarche d'accompagnement personnalisé vers l'emploi, renforcé en fonction des situations.

« Pour certaines personnes, la question de la maîtrise du français et des savoirs de base pourra se poser. A ce titre, il conviendra d'associer Pôle Emploi, les services et les opérateurs en charge de la mise en oeuvre du dispositif des « compétences-clés » et de l'apprentissage des savoirs de base afin de proposer une formule adaptée aux besoins des personnes.

« Pour les ressortissants étrangers accédant à l'emploi, vous veillerez à ce que l'instruction des demandes d'autorisation de travail soit menée par les unités territoriales des DIRECCTE dans les délais les plus courts possibles, afin de donner à ce dispositif d'appui à l'insertion professionnelle sa pleine dynamique.

« 4. Mobiliser les moyens disponibles

« Le dispositif mis en place vise à mobiliser les moyens humains et financiers disponibles, en veillant à la coopération des différents partenaires et en utilisant prioritairement les moyens de droit commun, qui, pour l'État, sont les crédits affectés aux politiques d'hébergement et de logement, de l'immigration (dispositif du Fond européen d'intégration), les mesures des politiques de l'emploi et de l'éducation nationale, et celles en faveur de l'accompagnement sanitaire et social.

« En complément, une attention particulière devra être portée à la mobilisation des fonds européens (FEDER et FSE), dans la mesure de l'état actuel des programmations et des consommations. Pour ce qui relève du financement des opérations d'investissement (structures d'hébergement notamment), il est rappelé que les mesures des Programmes opérationnels régionaux FEDER prévues en faveur des communautés marginalisées sont mobilisables.

« La mise en place des mesures d'accompagnement, d'insertion et d'hébergement doit conduire à faire participer largement les acteurs locaux, au premier rang desquels les collectivités territoriales, sans lesquelles aucune solution efficace ne peut être construite.

***

« Bien évidemment, l'action qui vous est demandée au profit de populations qui n'ont pas, naguère, bénéficié du respect républicain, prend place, avec ses spécificités, dans l'ensemble des politiques que vous conduisez pour les différentes catégories de populations en situation de fragilité. Les partenaires, les personnels mobilisés doivent être bien informés qu'il s'agit là de l'application légitime du principe d'égalité républicaine et non d'une discrimination, fût-elle positive. Nous vous demandons donc d'accompagner d'ores et déjà cette mobilisation de l'assurance, pour les structures et fonctionnaires qui y concourent, de la pleine reconnaissance de l'effort demandé et de l'engagement qui en résulte pour eux. Vous veillerez à la communication sur ces divers aspects.

« Par ailleurs, cette indispensable mobilisation a un coût budgétaire et en ressources humaines. Vos rapports en suite des présentes instructions, les évalueront avec réalisme. Vous ferez connaître sans retard les éventuelles difficultés administratives qui apparaîtraient.

« Pour faciliter vos contacts avec les collectivités territoriales et les grandes associations, le gouvernement sensibilisera les structures qui les représentent ou les regroupent au niveau national, pour obtenir un engagement en commun sur le terrain où il vous est demandé de développer votre action.

***

« Afin de vous assister dans la mise en oeuvre des actions mentionnées dans la présente instruction et d'animer au niveau central les travaux interministériels, une mission spécifique est confiée au Préfet Alain Régnier, délégué interministériel à l'hébergement et à l'accès au logement (DIHAL). Il sera chargé de vous fournir un appui méthodologique et, plus largement, de diffuser différents éléments utiles à la progression des actions engagées. Il sera également attentif aux réalités locales que vous pourrez porter à sa connaissance, notamment en vue des éventuelles évolutions des textes et dispositifs nationaux, auxquelles il contribuera.

« Par ailleurs, une mission va être confiée à plusieurs inspections générales pour évaluer les dispositifs d'insertion et d'accompagnement des personnes présentes dans ces campements. Elles seront chargées de procéder à l'état des lieux des dispositifs existants et au recensement des expérimentations en cours et des bonnes pratiques. Vous serez tenus informés du mandat et des travaux de cette mission qui pourront donner lieu, en fonction des initiatives relevées, à une évolution des dispositifs.

***

« C'est la mobilisation de l'ensemble des partenaires, et des moyens de chacun, intervenant le plus en amont possible, qui permettra d'identifier et de mettre en oeuvre les solutions d'insertion les plus adéquates, dans un double objectif de fermeté en matière de sécurité et d'humanité dans la prise en charge des personnes. »

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