II. LE MÉCANISME DE COOPÉRATION ET DE VÉRIFICATION DOIT-IL DURER ?
Les deux rapports de la Commission du 8 février 2012 sur les efforts accomplis par la Bulgarie et la Roumanie en matière de réforme judiciaire et de lutte contre la corruption sont peut-être un peu plus contrastés qu'à l'habitude puisque, selon la Commission européenne, la Bulgarie s'est résolument employée à faire progresser ses réformes et a obtenu d'importants résultats tandis que la Roumanie, bien que plus volontaire au départ, s'est quelque peu relâchée et accuse quelques faiblesses. Il s'agit de rapports intermédiaires ; les rapports récapitulatifs des progrès réalisés depuis l'adhésion viennent seulement d'être publiés.
A. LE CONTEXTE POLITIQUE BULGARE
La Bulgarie a adopté en 1991 une constitution établissant un régime parlementaire. Ainsi le président de la République élu pour cinq ans au suffrage universel direct a des pouvoirs moindres que le Premier ministre. Le parlement est composé d'une Chambre de 240 députés.
Aujourd'hui, l'ancien maire de Sofia, M. Boïko Borissov, Premier ministre, est l'homme fort du régime. Il a fondé le parti GERB (Citoyens pour le développement européen de la Bulgarie), parti de centre doit affilié au PPE au Parlement européen. En 2009, il a remporté les élections législatives avec 177 sièges (contre 76 au Parti socialiste bulgare). M. Borissov a formé un gouvernement minoritaire. Il s'est fait élire sur son image d'homme nouveau et grâce à un discours sans concession sur les effets dévastateurs du communisme et la fermeté face à la corruption et au crime organisé. Il a entrepris la mise en oeuvre des réformes exigées par l'Union européenne dans le domaine de la justice et des affaires intérieures. M. Borissov est secondé par le ministre de l'Intérieur, M. Tsvetan Tsvetanov, autre personnalité que votre commission a rencontrée.
En octobre 2011, l'élection présidentielle a conforté le GERB puisque son candidat, M. R. Pievneliev, a été élu contre le candidat socialiste.
Le climat politique semble stable et cohérent et la scène publique ne donne plus le spectacle de querelles incessantes ni de majorités fluctuantes.
B. LE CONTEXTE POLITIQUE ROUMAIN
La Roumanie a adopté en 1991 une constitution qui présente de nombreuses analogies avec la constitution française de 1958. Même si les pouvoirs du Président de la République, élu pour cinq ans au suffrage universel, sont moins étendus que ceux du président français, le régime roumain est un régime semi-présidentiel dans lequel les deux chambres (Députés et Sénat) sont sur un pied d'égalité puisqu'elles sont élues selon le même mode de scrutin et pour la même durée. Une loi doit naturellement être votée par les deux chambres dans les mêmes termes.
L'actuel Président de la République, Traian Basescu, a été élu en 2009 pour un second mandat de cinq ans au moment même où une politique d'austérité a dû être mise en place pour lutter contre la crise. En 2012, cette politique a provoqué des manifestations importantes exigeant sa démission et la fin de l'austérité, mais aussi le renforcement de la lutte contre la corruption. Il semble que l'ensemble de la classe politique soit prise pour cible et il est possible qu'elle ait perdu la confiance d'une parie notable de l'opinion publique. Toutefois, des élections générales sont prévues à l'automne, ce qui explique que la vie politique roumaine soit en prise à la fièvre qui précède toujours les grands choix politiques.
Les protestations de la rue ont amené le Président Basescu à révoquer, en février 2012, le Premier ministre Emil Boc et il a confié son poste à Mihai Ungureanu du même parti de centre droit (PDL - Parti démocrate libéral de centre droit) qui a formé un gouvernement plus jeune. Le gouvernement Ungureanu n'a pu que confirmer qu'il poursuivrait la politique engagée. L'opposition parlementaire est alors composée essentiellement du PSD (Parti social démocrate de centre gauche) et du PNL (Parti national libéral de droite).
Deux mois plus tard, le gouvernement Ungureanu a été renversé par une motion de censure à quatre voix près ; ces quatre voix jointes à l'opposition provenaient de son propre parti. Le Président Basescu a été contraint de nommer Victor Ponta Premier ministre lequel s'appuie désormais sur une coalition qui rassemble son parti, le PSD (Parti social démocrate, issu du Parti communiste), le PNL (Parti national libéral) de Crin Antonescu et le PC (Parti conservateur) de Daniel Constantin. Ces trois partis se regroupent dans l'USL (Union sociale libérale), mais ils restent minoritaires au Parlement et l'USL a conclu des accords ponctuels avec les partis représentant certaines minorités et avec l'Union pour le Progrès de la Roumanie.
La situation politique en Roumanie a ému la Commission européenne qui a déclaré qu'il y avait atteinte au bon fonctionnement constitutionnel du pays et que son prochain rapport dans le cadre du MCV ne pourrait que refléter cette préoccupation. De même, l'entrée dans l'espace Schengen pourrait s'en trouver remise en cause, selon la Commission.
Toutefois, vos rapporteurs ne partagent pas l'ensemble de l'analyse et des conclusions de la Commission européenne, et souhaitent ne pas anticiper sur l'évolution de la situation qui pourrait s'avérer plus positive que ne le croient certains observateurs.