Audition de M. Gilles-Pierre Lévy, président de la deuxième chambre de la Cour des comptes, et de Mme Michèle Pappalardo, conseillère-maître à la Cour des comptes
(20 mars 2012)
M. Ladislas Poniatowski , président. - Monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous allons procéder à l'audition de M. Gilles-Pierre Lévy, président de la deuxième chambre de la Cour des comptes, et de Mme Michèle Pappalardo, conseillère-maître à la Cour des comptes.
Notre commission d'enquête a été créée sur l'initiative du groupe écologiste - qui a ainsi fait usage de son « droit de tirage annuel » - afin de déterminer le coût réel de l'électricité. L'excellent récent rapport de la Cour des comptes intitulé « Les coûts de la filière électronucléaire » constitue évidemment un élément fondamental d'information sur le sujet, c'est pourquoi il nous a paru utile d'entendre M. Lévy et Mme Pappalardo, afin qu'ils puissent nous apporter un éclairage supplémentaire.
Je rappelle que les informations relatives aux travaux non publics d'une commission d'enquête ne peuvent être divulguées ou publiées, et qu'un faux témoignage devant notre commission serait passible des peines prévues aux articles 434-13, 434-14 et 434-15 du code pénal. En ce qui concerne la présente audition, la commission d'enquête a souhaité qu'elle soit publique, et un compte rendu intégral en sera publié.
Monsieur Lévy, madame Pappalardo, je vais maintenant vous faire prêter serment, conformément à la procédure applicable aux commissions d'enquête, sachant que je suis bien conscient du caractère particulier de cette procédure s'agissant de magistrats s'exprimant, de surcroît, au nom d'une institution collégiale :
Prêtez serment de dire toute la vérité, rien que la vérité, levez la main droite et dites : « Je le jure. »
( M. Gilles-Pierre Lévy prête serment.)
( Mme Michèle Pappalardo prête serment.)
Je vous donne la parole, monsieur Lévy, pour nous présenter le rapport de la Cour des comptes. M. le rapporteur vous posera ensuite quelques questions complémentaires, qui vous ont été communiquées à l'avance afin que cette audition puisse être fructueuse.
M. Gilles-Pierre Lévy, président de la deuxième chambre de la Cour des comptes. - Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vais vous présenter brièvement le rapport public thématique de la Cour des comptes sur les coûts de la filière électronucléaire, en m'appuyant sur la projection de documents Powerpoint. Mme Michèle Pappalardo et moi-même répondrons avec plaisir aux questions que vous nous poserez ; si nous ne sommes pas en mesure de le faire sur-le-champ, nous nous efforcerons de vous fournir les réponses ultérieurement.
Après avoir dressé un panorama global des dépenses prises en compte, j'évoquerai les incertitudes pesant sur les charges futures, les méthodes d'évaluation des coûts complets de production, la question stratégique de la durée de fonctionnement des centrales, les actifs dédiés et les perspectives de coût à court et à moyen terme. Je conclurai sur quelques éléments difficilement chiffrables.
L'élaboration du rapport de la Cour des comptes répond à une demande du Premier ministre en date du 17 mai 2011, faisant suite à un entretien entre le Président de la République et un groupe de représentants d'organisations non gouvernementales. Il s'agissait en particulier de déterminer si la production d'électricité nucléaire comportait des coûts cachés.
Le rapport a donc pour objet d'analyser les éléments constitutifs du coût de production - et non du prix - de l'électricité nucléaire en France. Le coût que nous avons étudié représente environ 40 % du prix, le reste étant constitué des coûts de distribution, à hauteur de 33 %, et des impôts et taxes, dont la contribution au service public de l'électricité, la CSPE.
Nous avons essayé de ramener tous les paramètres à l'année 2010, dernier exercice pour lequel nous disposons d'éléments factuels. La vocation de la Cour des comptes est d'abord d'essayer de cerner au maximum ce qui est, avant de s'interroger sur ce qui pourrait être. Nous avons ainsi étudié le parc actuel - et non le parc de réacteurs EPR, à supposer qu'il voie le jour -, composé de réacteurs PWR.
Il nous était par ailleurs demandé d'examiner la prise en compte des charges futures, les dépenses assumées par d'autres acteurs que les opérateurs - existe-t-il des dépenses qui ne sont pas intégrées dans les coûts ? -, ainsi que la question des assurances - quelle est la réalité de l'assurance implicite apportée par l'État en cas de catastrophe ? - et celle des actifs dédiés - tels qu'ils sont constitués, répondent-ils aux exigences des textes législatifs qui les définissent ?
Le délai qui nous était imparti était anormalement bref pour un travail aussi lourd. Nous avons constitué une formation réunissant des représentants des principales chambres de la Cour des comptes concernées, spécialistes de l'énergie, de l'environnement, de la recherche, du calcul économique, etc. Nous nous sommes fait assister par un groupe d'experts, en ayant soin de recruter des personnalités indépendantes. Cela s'est révélé très difficile, dans la mesure où, en pratique, la plupart des experts travaillent pour les acteurs du nucléaire ou sont fondamentalement hostiles à celui-ci. Nous sommes néanmoins parvenus à constituer ce groupe, qui nous a beaucoup apporté. Je précise que ces experts étaient de différentes sensibilités et de profils variés : pro- et anti-nucléaires, Français et étrangers - deux Belges et un Américain, ce dernier nous ayant malheureusement quittés à mi-parcours -, spécialistes de diverses disciplines, y compris du calcul économique, dans la mesure où nous cherchions notamment à apprécier des décisions de dépenses à très long terme : je pense en particulier à M. Grollier, directeur de recherche à l'Institut d'économie industrielle de Toulouse et éminent spécialiste de l'actualisation.
Les membres de ce comité nous ont aidés à « caler » le questionnement puis nous ont donné leur avis sur chaque partie du rapport avant sa présentation devant la formation concernée.
Nous avons par ailleurs demandé à une quinzaine de rapporteurs de travailler sur ces sujets dans le cadre de cinq sous-rapports. Bien entendu, nous avons appliqué les règles de contradiction inhérentes à la Cour des comptes : une première contradiction sur les sous-rapports, puis une contradiction finale.
Enfin, nous avons effectué de vingt-cinq à trente auditions et visites de sites, en nous efforçant d'entendre les principaux représentants du métier et des diverses sensibilités, c'est-à-dire les responsables des grands organismes travaillant dans le domaine de l'électricité nucléaire tels que EDF, Areva, le CEA, etc., d'organisations non gouvernementales, pour la plupart hostiles ou réservées à l'égard de l'industrie nucléaire, des syndicats, de la Commission de régulation de l'énergie, de l'Autorité de sûreté nucléaire, de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, de la direction générale de l'énergie et du climat.
Nous avons pris en compte trois catégories de dépenses : les dépenses passées, les coûts intégrés dans les comptes des exploitants ou les coûts de fonctionnement, les coûts supportés par les crédits publics.
En ce qui concerne tout d'abord les dépenses passées, la construction du parc électronucléaire a coûté au total - ce montant a été ramené à sa valeur en euros de 2010 - 188 milliards d'euros : 6 milliards d'euros pour le parc de première génération, qui n'est plus en fonction, 96 milliards d'euros pour les cinquante-huit réacteurs en activité, 19 milliards d'euros pour le cycle du combustible, 55 milliards d'euros pour la recherche. Il est étonnant de constater que la recherche coûte environ 1 milliard d'euros par an depuis cinquante ans, de manière constante. On peut en déduire que c'est plutôt la taille des équipes qui commande l'effort de recherche que le budget qui commande la taille des équipes. Enfin, il convient d'ajouter une dépense de 12 milliards d'euros pour Superphénix, située à mi-chemin entre recherche et industrie, même si elle est théoriquement industrielle. Réalisé par EDF, Superphénix n'a en pratique guère fonctionné - huit mois, si mes souvenirs sont bons - et a joué autant un rôle d'instrument de recherche que d'instrument de production - il consommait d'ailleurs autant, sinon plus, que ce qu'il produisait.
Cette dépense de 188 milliards d'euros permet d'assurer 70 % de l'approvisionnement en électricité d'un pays de 65 millions d'habitants. Ce montant n'est pas totalement disproportionné si on le compare au coût d'un réseau d'autoroutes ou de TGV, mais il reste considérable : le nucléaire est d'abord une industrie d'investissements.
En ce qui concerne ensuite les coûts d'exploitation d'EDF, ils s'élèvent à 8,95 milliards d'euros en « valeur 2010 », dont 2,68 milliards d'euros de dépenses de personnel, 2,13 milliards d'euros de combustible, 2,01 milliards d'euros de consommations externes. Nous avons expertisé ces coûts, qui ont été validés par les commissaires aux comptes. Globalement, en dépit de quelques retraitements, nous confirmons le chiffre annoncé par EDF, à savoir 9 milliards d'euros.
En ce qui concerne enfin les charges et provisions futures, ces deux catégories sont séparées par l'actualisation.
Les charges brutes, c'est-à-dire les dépenses totales, s'étalent sur des durées très longues, dépassant parfois le siècle pour la gestion des déchets ultimes. Elles doivent donc être actualisées. Nous avons constaté que les taux d'actualisation employés en France étaient dans la moyenne des autres pays, à savoir 5 %, inflation comprise.
Le démantèlement coûte 31,9 milliards d'euros en charges brutes et 17,3 milliards d'euros en charges actualisées. La gestion du combustible usé coûte 14,8 milliards d'euros et le dernier coeur 3,8 milliards d'euros bruts, soit respectivement 9,1 milliards d'euros et 1,9 milliard d'euros actualisés. Enfin, la gestion des déchets ultimes coûte 28,4 milliards d'euros bruts, soit 9,8 milliards d'euros actualisés. L'écart est d'autant plus grand que les dépenses s'étalent sur une longue période.
Au total, les charges brutes s'élèvent à 79,4 milliards d'euros et les provisions à 38,4 milliards d'euros.
M. Jean Desessard, rapporteur . - Pourriez-vous nous préciser davantage la différence entre les charges brutes et les provisions ?
M. Gilles-Pierre Lévy. - La différence tient à l'actualisation. Les charges brutes correspondant à des dépenses étalées sur plusieurs années, elles doivent être actualisées. Le taux d'actualisation, dont la détermination n'est pas purement mathématique, fait l'objet de débats parmi les experts. C'est la raison pour laquelle siégeait, au sein du comité d'experts, un spécialiste de la question, qui vient de publier un ouvrage de 400 pages sur l'actualisation. En tout état de cause, nous avons vérifié que les méthodes employées étaient analogues à celles qui ont cours dans les autres pays. On peut certes discuter de ce qu'est un bon taux d'actualisation. On peut notamment se demander si cela a un sens d'actualiser de la même façon des dépenses très lointaines, qui reposeront sur les générations futures.
M. Ronan Dantec. - Un taux d'actualisation de 5 %, par définition, tend vers zéro sur des échéances longues, ce qui pose tout de même un problème fondamental.
M. Jean Desessard, rapporteur . - Nous reviendrons ultérieurement sur ce point.
M. Gilles-Pierre Lévy. - C'est l'une des vraies questions qui se posent. Dans la mesure où nous ne disposons pas de méthode absolue, nous avons beaucoup observé ce qui se pratiquait dans les sept principaux pays nucléaires autres que la France. Globalement, le taux retenu est dans la moyenne des taux employés par ces pays, à savoir 5 %, dont 2 % d'inflation.
Les dépenses telles qu'elles sont constatées sont d'abord celles qui sont prises en charge par les exploitants. Il convient à cet égard d'éviter les doubles comptes. En particulier, comment faut-il compter les dépenses prises en charge par EDF lorsqu'il s'agit d'achats de combustible ou de retraitement de combustible à Areva ? Nous avons vérifié, en sachant que le marché n'est pas pur et parfait dans ce domaine, qu'il n'y avait pas d'anomalie. Nous sommes arrivés à la conclusion que, globalement, les prix appliqués étaient conformes à ce qui se pouvait se pratiquer sur un marché normal, et qu'il ne fallait pas les compter deux fois. Nous avons estimé, après avoir vérifié l'absence de subventions déguisées, que ces dépenses étaient bien prises en compte dans les comptes d'EDF.
J'en viens aux coûts supportés par les crédits publics.
Il existe deux types principaux de dépenses financées sur crédits publics : les dépenses de recherche et celles qui ont trait à la sécurité, à la sûreté et à la transparence.
Les dépenses de recherche, précédemment évoquées, s'élèvent à un peu plus de 1 milliard d'euros par an. Aujourd'hui, la majeure partie de ces dépenses est financée par les exploitants eux-mêmes ; nous ne devons pas les compter deux fois. Restent financés sur crédits publics 414 millions d'euros par an en 2010. À l'inverse, voilà dix ou quinze ans, la majorité des dépenses de recherche était financée sur crédits publics.
En ce qui concerne les dépenses relatives à la sécurité, à la sûreté et à la transparence, les principaux postes sont l'ASN et l'IRSN, pour la part de leurs activités concernant la production d'électricité nucléaire. Elles comprennent également les dépenses de gendarmerie, de transports, les subventions aux commissions de suivi de la transparence. Au total, 230 millions d'euros sont financés sur crédits publics dans ce cadre.
Par conséquent, s'ajoutent aux dépenses d'exploitation d'EDF et à l'ensemble des dépenses prises en compte par les exploitants 414 millions d'euros au titre de la recherche et 230 millions d'euros au titre des dépenses de sécurité, de sûreté et de transparence, soit au total, en 2010, 644 millions d'euros. Je ferai observer que ce montant est à peu près du même ordre de grandeur que le produit de la taxe sur les installations nucléaires de base pour 2010, à savoir 580 millions d'euros. L'écart était beaucoup plus marqué voilà dix ou vingt ans.
En résumé, les dépenses de fonctionnement à la charge de l'exploitant s'élèvent à quelque 9 milliards d'euros en supprimant les doubles comptes ; il convient d'y ajouter 644 millions d'euros de dépenses financées par la puissance publique.
S'agissant d'une activité fortement consommatrice de capital, il convient ensuite de s'interroger sur la prise en compte des coûts du capital. Les méthodes employées font l'objet d'intenses débats parmi les experts ; j'en citerai cinq.
La première consiste à prendre en compte l'annuité d'amortissement telle qu'elle est constatée. La deuxième considère l'amortissement linéaire sur quarante ans. Trois autres méthodes appliquent un loyer à un capital : l'approche selon le coût comptable complet de production, dite C3P, où l'on réévalue le capital en fonction de l'inflation ; celle de la commission Champsaur, qui applique un loyer au capital réévalué, en cherchant à amortir le capital restant dû pour la période 2011-2025 ; enfin, la méthode du coût courant économique, qui repose sur le calcul d'un loyer par application d'un taux constant équivalant au coût moyen pondéré du capital - les capitaux d'emprunt et les capitaux propres utilisés pour financer les opérateurs - sur une base d'investissement réévaluée de l'inflation.
L'application des trois principales méthodes pour le calcul du coût total donne les résultats suivants, sensiblement différents : 1,8 milliard d'euros pour la C3P; 2,4 milliards d'euros pour la méthode Champsaur, 8,3 milliards d'euros pour celle du coût courant économique. Il faut ajouter à ces chiffres, en 2010, des investissements de maintenance de 1,7 milliard d'euros et des dépenses d'exploitation de l'ordre de 10 milliards d'euros selon la méthode employée.
Au total, quand on rapporte ces montants aux 407 térawattheures produits en 2010, on obtient un coût de 33,4 euros ou de 33,1 euros par mégawattheure selon les deux premières méthodes, mais de 49,5 euros par mégawattheure selon la dernière méthode. L'écart est donc très significatif.
En réalité, une méthode n'est ni bonne ni mauvaise, tout dépend de ce que l'on en attend. Si l'on cherche une méthode pour comparer différentes énergies, celle du coût courant économique est probablement la plus adaptée. Si l'on souhaite définir un prix en permettant au consommateur de bénéficier des amortissements qui ont déjà été réalisés, la méthode Champsaur sera privilégiée. EDF préfère clairement la méthode du coût courant économique. Chacun peut adopter, en fonction de ce qu'il souhaite calculer, une méthode différente. Voilà ce que l'on peut constater sur ce sujet.
M. Ronan Dantec. - Quel pourcentage la rémunération du capital représente-t-elle dans ces évaluations ?
Mme Michèle Pappalardo, conseillère-maître à la Cour des comptes . - Le calcul a été fait avec un taux de 7,8 % pour le coût courant économique et de 8,4 % pour la méthode Champsaur.
M. Jean Desessard, rapporteur . - Le coût du démantèlement est-il compris ?
M. Gilles-Pierre Lévy. - Oui.
Mme Michèle Pappalardo . - Toutes les provisions que nous avons évoquées tout à l'heure sont incluses dans ces coûts. Elles sont réparties différemment selon leur type. Les provisions pour gestion des déchets et des combustibles usés sont inscrites à la ligne « dépenses d'exploitation ». Nous sommes capables de calculer, pour chaque année, la partie des provisions correspondant à la production. En revanche, pour le démantèlement, qui concerne plutôt le capital et l'investissement, les provisions sont inscrites à la ligne « coût du capital ». Nous avons fait le calcul que vient d'exposer M. Lévy et nous avons ajouté le montant du coût de démantèlement calculé chaque année. Toutes les provisions sont donc intégrées dans ces coûts.
M. Jean Desessard, rapporteur . - C'est un autre sujet, mais l'assurance est-elle comprise ?
M. Gilles-Pierre Lévy. - Aujourd'hui, l'assurance représente une petite dépense pour les exploitants, moins de 100 millions d'euros par an. Elle est prise en compte, mais à un niveau dont on peut débattre, et figure dans les dépenses d'exploitation. Nous y reviendrons ultérieurement.
J'en viens à la question des coûts futurs, lesquels peuvent être discutés.
S'agissant des coûts de démantèlement, aucun opérateur, à ce jour, n'a démantelé un parc de plusieurs dizaines de réacteurs du même type. Aujourd'hui, trois méthodes peuvent être envisagées pour évaluer ces coûts.
L'ancienne méthode des coûts de référence, dite PEON, consistait à appliquer un pourcentage au coût complet des investissements. Le montant des charges ainsi calculées représentait 16 % du coût, puis 15 %. On ne comprend pas très bien sur quoi elle était fondée.
Une deuxième méthode, appliquée par EDF, la méthode dite Dampierre, consistait à analyser, à partir du cas d'une centrale type, ce que coûterait chacune des opérations de démantèlement. Cette méthode nous a paru solide. Elle a déjà été actualisée, mais elle gagnerait à l'être une nouvelle fois, car les paramètres varient dans le temps. Sur le fond, c'est en tout cas une approche cohérente, contrairement à la précédente.
Enfin, comme personne ne sait réellement comment de telles opérations se dérouleraient dans la réalité, nous nous sommes penchés sur les études menées dans les autres pays.
L'extrapolation des études internationales au coût du démantèlement du parc d'EDF amène à situer l'évaluation d'EDF, soit 18,4 milliards d'euros, tout en bas de la fourchette. L'un des opérateurs allemands estime le coût du démantèlement à 62 milliards d'euros. D'autres évaluations sont proches de celle d'EDF, comme celle de la Suède -20 milliards d'euros -, qui est probablement l'un des pays ayant le plus exploré ce sujet. D'autres encore avancent des chiffres plus de deux fois supérieurs, soit 44 milliards d'euros ou 46 milliards d'euros.
Nous avons donc étudié, à titre indicatif, quel serait l'impact du doublement des charges de démantèlement sur le coût : il entraînerait une augmentation de 5 % de celui-ci.
Le stockage profond des déchets représente une deuxième source d'incertitudes.
Il existe des désaccords importants à ce sujet entre les exploitants, qui estiment le coût de ce stockage à une quinzaine de milliards d'euros, et l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs, l'ANDRA, en principe seul expert en la matière, qui l'évalue à quelque 35 milliards d'euros. Cet écart provient de différences d'appréciation de chaque coût, mais également d'une diversité d'approches, s'agissant notamment de la réversibilité.
La Cour des comptes n'est pas compétente pour donner un avis sur ce point. Elle évalue la sensibilité du coût à un doublement du devis du stockage profond des déchets à 1 %. En effet, la période considérée étant extrêmement longue, l'actualisation ramène le coût à un niveau peu élevé.
Enfin, nous nous sommes interrogés sur le taux d'actualisation. Si nous avons constaté que le taux retenu par EDF était dans la moyenne des autres opérateurs, cette moyenne n'est pas mathématique. Un point de variation du taux d'actualisation aurait un impact de 0,8 % sur les coûts.
Voilà ce que l'on peut dire, au total, sur les coûts futurs et leur sensibilité à une variation des paramètres.
Je voudrais à présent aborder la question importante de la durée de fonctionnement des réacteurs.
C'est l'un des sujets qui nous a le plus interpellés. En pratique, la décision de l'Autorité de sûreté nucléaire d'autoriser la prolongation de trente à quarante ans de la durée de vie de deux réacteurs nucléaires a donné lieu à de vifs débats. L'âge moyen du parc actuel est de vingt-cinq ans ; vingt-deux réacteurs, soit 30 % de la puissance installée, auront quarante ans de fonctionnement avant la fin de 2022.
Si, juridiquement, les réacteurs, à deux exceptions près, ont une autorisation de fonctionnement pour trente ans, l'amortissement comptable que pratique EDF porte sur quarante ans, conformément aux règles de la comptabilité qui préconisent, à tort ou à raison, de retenir la durée de vie la plus probable. En réalité, EDF table, comme en témoignent des déclarations aux analystes financiers et certains articles parus récemment dans le quotidien Le Monde sous la signature d'Henri Proglio, sur une durée de vie de cinquante à soixante ans. À titre indicatif, aux États-Unis, le fonctionnement de ce type de réacteurs est autorisé pour soixante ans ; cela ne signifie pas que les Américains ont raison : c'est un constat.
Quoi qu'il en soit, si l'on devait remplacer les vingt-deux réacteurs que j'évoquais à l'instant avant la fin de 2022, compte tenu des délais de mise en oeuvre de sources d'énergie alternatives ou de réalisation d'économies d'énergie correspondantes, l'effort à fournir serait comparable à un effort de guerre. À supposer que l'on continue à recourir à l'énergie nucléaire, une dizaine d'années séparent la décision de construire un réacteur EPR de l'entrée en service de celui-ci. Nous sommes en 2012 : il faudrait donc construire une douzaine de réacteurs EPR - leur puissance étant plus élevée que celle des réacteurs actuels - d'ici à 2022. Cela me paraît hautement improbable, mais vous êtes mieux placés que moi pour en juger.
La mise en oeuvre de sources d'énergie alternative n'est pas non plus immédiate. C'est un élément important à garder à l'esprit.
Par conséquent, il est vraisemblable - mais pas certain : les Japonais ont arrêté l'essentiel de leur parc nucléaire sans préavis - que les dépenses de maintenance, qui s'assimileront à des dépenses de prolongation de la durée de vie, vont fortement augmenter. Leur incidence est supérieure à celle des dépenses futures.
Les dépenses pour investissements de maintenance d'EDF étaient en moyenne de 800 millions d'euros par an entre 2003 et 2008. En 2010, elles atteignaient 1,75 milliard d'euros. Le programme d'EDF, avant l'audit réalisé par l'ASN à la suite de l'accident de Fukushima, prévoyait un budget de 50 milliards d'euros à ce titre pour la période 2011-2025, soit 3,4 milliards d'euros par an. Je précise que les dépenses mises en oeuvre aboutissent à la fois à maintenir les équipements en bon état de fonctionnement et à prolonger de vingt ans leur durée de vie.
En même temps que le Gouvernement demandait à la Cour des comptes un rapport sur les coûts de l'électricité nucléaire, il chargeait l'Autorité de sûreté nucléaire d'étudier les précautions supplémentaires à prendre après l'accident de Fukushima. Le programme de l'ASN n'a pas été formellement chiffré. L'ordre de grandeur avancé par l'ASN comme par EDF est de 10 milliards d'euros. J'ai été frappé par leur convergence de vues au cours des auditions que nous avons menées. Ils s'accordent également sur le fait que la moitié de ces dépenses sont déjà plus ou moins prises en compte dans le programme de maintenance d'EDF. Le surcoût est donc de l'ordre de 5 milliards d'euros pour la période 2011-2025, sachant que ces dépenses seront concentrées en début de période.
M. Jean Desessard, rapporteur . - S'agissant du chiffrage du programme de l'ASN, vous avez recoupé les chiffres fournis par EDF avec d'autres, mais vous n'avez pas procédé à vos propres calculs ?
M. Gilles-Pierre Lévy. - La Cour des comptes n'a pas pu effectuer de tels calculs. Les conclusions de l'ASN ont été remises au mois de janvier 2012, en même temps que notre rapport. Nous en avons discuté avec les équipes d'EDF et avec l'ASN : il est frappant de constater que, alors qu'ils ne suivent pas forcément la même logique, ils arrivent à des conclusions analogues. Des appels d'offres en vue de réaliser des chiffrages détaillés sont lancés ; un délai de six mois a été prévu.
M. Ladislas Poniatowski , président . - Nous avons tous été surpris de constater que les estimations étaient analogues. Le fait que la moitié des dépenses soit déjà intégrée dans les travaux de maintenance, en revanche, ne fait pas l'objet d'un consensus.
Mme Michèle Pappalardo . - Nous avons vérifié qu'une partie de ces 10 milliards d'euros était bien prise en compte dans le programme de maintenance. Nous ne saurions préciser si elle s'élève à 4 milliards, à 5 milliards ou à 6 milliards d'euros, mais les ordres de grandeur présentés nous ont semblé tout à fait acceptables. Nous savons quelles sont les grandes masses issues de l'évaluation de l'ASN ; certaines d'entre elles figurent effectivement dans le programme de maintenance de 50 milliards d'euros.
Les conséquences de l'audit de l'ASN pour Areva et le CEA n'ont en revanche pas du tout été chiffrées.
M. Gilles-Pierre Lévy. - J'en arrive maintenant aux actifs dédiés.
L'article 20 de la loi du 28 juin 2006 impose la constitution de provisions financées indépendamment du cycle d'exploitation, afin que l'argent nécessaire soit disponible à l'issue de celui-ci.
Au 31 décembre 2010, sur un total de 27,8 milliards d'euros de provisions actualisées à couvrir, 65 % de cette somme l'étaient par des actifs dédiés, 18 milliards d'euros par des titres financiers cotés, 4,6 milliards d'euros par des créances entre opérateurs du nucléaire, et un peu plus de 2 milliards d'euros correspondaient à 50 % des titres de RTE. Enfin, le solde, soit 2,7 milliards d'euros, n'était pas couvert.
Ce chapitre appelle quelques commentaires.
Premièrement, la loi ayant été modifiée, les exploitants sont en règle aujourd'hui - sinon, ils ne l'auraient pas été.
Deuxièmement, ces actifs sont gérés, en France, par les exploitants eux-mêmes ; dans d'autres pays, leur gestion a été confiée à d'autres acteurs. Cela peut se discuter en termes d'indépendance ou de méthodologie, sachant que les exploitants se sont efforcés d'embaucher des spécialistes de ces sujets.
Troisièmement, ces actifs correspondent aux provisions actualisées. Pour qu'ils couvrent les dépenses finales, il faut donc que leur rentabilité soit au moins égale au taux d'actualisation, soit 5 %. Si l'on considère la rentabilité des actifs financiers au cours du dernier siècle, on constate que les actions ont rapporté en moyenne plus de 5 % par an. Cela étant posé, ce qui s'est produit une fois dans l'histoire ne se reproduira pas forcément une deuxième fois. Autrement dit, notamment en période de crise financière, on peut se demander si ces actifs rapporteront bien 5 % par an sur plusieurs décennies...
Quatrièmement, l'acceptation de créances croisées entre acteurs du nucléaire peut se discuter. En effet, ces créances, certes minoritaires au regard du total - 4,6 milliards d'euros -, seront incertaines en cas de crise systémique du nucléaire. Si, demain, plus personne ne veut de l'énergie nucléaire, tous les acteurs seront en difficulté et ils ne pourront pas se rembourser mutuellement. L'État a d'ailleurs estimé que financer le CEA pour qu'il constitue des actifs destinés à rembourser des dépenses payées par ce même établissement public n'avait pas de sens. Cela signifie qu'un certain nombre de dépenses risquent de retomber sur la puissance publique.
J'évoquerai à cet instant la décision d'EDF d'allouer 50 % du capital de RTE au portefeuille d'actifs dédiés. Cette solution est-elle raisonnable ou pas ? Sans trahir le secret des délibérations, j'indiquerai que c'est l'un des points qui ont été le plus discutés entre nous lors de la contradiction.
Dans un premier temps, nous étions très réservés. Même si les avis demeurent partagés - Michèle Pappalardo et moi en discutions encore tout à l'heure -, nous le sommes moins aujourd'hui, dans la mesure où si, en cas de crise systémique du nucléaire, les créances entre acteurs du secteur risquent de perdre de leur valeur, en revanche, tant qu'on aura de l'électricité, on aura a priori besoin de la transporter.
M. Ladislas Poniatowski , président . - Bien sûr.
M. Gilles-Pierre Lévy. - Les textes qui régissent RTE prévoient que la CRE garantisse une rentabilité du capital. Par conséquent, les 50 % du capital de RTE engendrent un flux de revenus normalement garanti par la CRE. On peut donc penser que l'option retenue par EDF n'est pas totalement aléatoire.
En conclusion, je ferai observer qu'il serait souhaitable de ne pas modifier la règle du jeu régulièrement.
M. Jean Desessard, rapporteur . - Vous évoquez des provisions à couvrir. Cela signifie-t-il que ce n'est pas encore fait ?
M. Gilles-Pierre Lévy. - Non, c'est la cible. Il est prévu que la totalité des provisions soit couverte en 2015 par des actifs dédiés.
M. Jean Desessard, rapporteur . - Les opérateurs ont déjà mis en place des actifs dédiés à cette fin.
M. Gilles-Pierre Lévy. - Absolument. Les provisions sont aujourd'hui couvertes à hauteur des deux tiers par des actifs dédiés, dont 75 % sans couverture croisée. Ces patrimoines financiers sont gérés par les opérateurs, mais séparément du reste de leur activité.
Cela étant précisé, plusieurs questions se posent.
Premièrement, ces actifs, qui sont essentiellement financiers - il s'agit d'actions -, se valoriseront-ils à hauteur de 5 % par an sur les vingt, trente ou cent prochaines années ?
Deuxièmement, les actifs représentant des créances entre exploitants - d'EDF sur Areva ou d'Areva sur EDF, par exemple -, qui représentent une part minoritaire du portefeuille d'actifs dédiés, présentent-ils la même sécurité que les autres ? Nous n'en sommes pas certains.
Troisièmement, affecter la moitié du capital de RTE à ce portefeuille d'actifs représente-t-il une solution raisonnable ? On peut, à la rigueur, considérer que oui.
M. Ronan Dantec. - S'il fallait réaliser le dernier des actifs que vous avez cités, il faudrait bien que quelqu'un le rachète. Or ce ne pourrait être qu'EDF ou l'État, car je ne pense pas que RTE sera mis sur le marché privé. En fait, affecter 50 % du capital de RTE au portefeuille d'actifs dédiés permet à EDF de faire une économie de trésorerie. J'imagine que c'est sur ce point que porte le débat au sein de la Cour des comptes.
M. Gilles-Pierre Lévy. - Pas seulement.
C'est un fait que, dans d'autres pays, des réseaux ont été privatisés, en tout ou en partie. En réalité, ceux qui achètent de tels actifs achètent un flux de revenus, théoriquement garanti par la CRE dans le cas de RTE. Certes, la loi pourrait changer sur ce point. Le réseau de transport d'électricité pourrait-il être privatisé en France, comme il l'a été dans d'autres pays ? Je ne sais pas.
M. Ladislas Poniatowski , président . - La loi dit que non.
M. Gilles-Pierre Lévy. - Pour le moment, la loi l'exclut formellement.
M. Ladislas Poniatowski , président . - Si RTE devait être privatisé demain, faites-moi confiance, il y aurait des candidats au rachat, car c'est une entreprise sacrément rentable !
EDF demandera vraisemblablement que la période de provisionnement soit prolongée, compte tenu des dépenses supplémentaires que risque d'entraîner la mise en oeuvre des préconisations de l'ASN à la suite de l'accident de Fukushima. Pour les 25 % restant à provisionner, la date butoir, qui est actuellement 2015, serait alors reportée de deux ou trois ans. Avez-vous eu le temps de prendre en compte cette hypothèse ?
M. Gilles-Pierre Lévy. - Je me bornerai à observer qu'il serait préférable de ne pas changer la règle du jeu. Il n'appartient pas à la Cour des comptes de dire au Parlement ce qu'il doit décider, mais il est clair que si EDF obtient tous les trois ou cinq ans une prolongation, cela dénature quelque peu l'exercice, sachant que, aujourd'hui, la plus grande partie des provisions sont couvertes par des actifs dédiés, répondant pour la majeure partie, mais pas en totalité, à la définition de tels actifs.
M. Jean Desessard, rapporteur . - En dehors des incertitudes sur les actifs croisés, peut-on dire que la situation est globalement correcte au regard des provisions à couvrir ?
M. Gilles-Pierre Lévy. - Oui, mais pas totalement. Une part minoritaire des provisions n'est pas couverte du tout, mais c'est conforme à la loi, l'échéance ayant été reportée à 2015.
Par ailleurs, nous avons clairement un doute sur les actifs croisés, qui nous paraissent présenter un risque, outre la question, qui n'est pas totalement marginale, de la rentabilité.
M. Ronan Dantec. - Il manque au maximum 10 milliards d'euros, ce qui n'est pas négligeable.
M. Gilles-Pierre Lévy. - Je parlerai brièvement de l'assurance, cette question ayant été soulevée. Sommes-nous bien assurés en cas de catastrophe nucléaire ?
Sur le plan de la théorie, il est très difficile de calculer une prime d'assurance contre un phénomène pour lequel il n'existe pas de série statistique significative.
Trois catastrophes nucléaires ont eu lieu à ce jour.
L'accident de Three Miles Island s'est circonscrit à l'enceinte de confinement, sans provoquer de réels dégâts à l'extérieur. Son coût peut être estimé entre 1 milliard et 2 milliards de dollars.
Il y a eu ensuite la catastrophe de Tchernobyl. L'évaluation de son coût suscite des débats sur lesquels je suis incapable de me prononcer. Les dégâts se chiffrent en centaines de milliards de dollars, mais il est très difficile de préciser davantage.
Enfin, la catastrophe de Fukushima est due autant au tsunami et au tremblement de terre consécutif qu'à l'accident nucléaire lui-même. L'évaluation du coût de ce dernier n'est pas terminée. Le Japon remettra-t-il en route ses autres centrales ou pas ? S'il ne le fait pas, l'accident de Fukushima concernera l'ensemble des centrales et le coût sera totalement différent. L'incertitude est forte sur ce point.
On m'objectera naturellement que les situations ne sont pas comparables. En particulier, il est habituel de faire observer que Tchernobyl est un accident soviétique autant qu'un accident nucléaire : la centrale était dépourvue d'enceinte de confinement, les équipes n'étaient pas suffisamment formées, etc. C'est possible. Cela étant, le risque zéro n'existe pas.
En conclusion, ce que l'on peut simplement dire, c'est qu'il est techniquement difficile de calculer le montant d'une prime d'assurance contre un risque très important qui s'est réalisé très rarement dans le passé.
Les assurances ont joué pour d'autres types de catastrophes, notamment certains tremblements de terre, en particulier celui de Californie et, dans une moindre mesure, celui de Kobé, ainsi que certains cyclones, tel Katrina. L'ordre de grandeur est la centaine de milliards de dollars.
Sur le plan factuel, voici ce que couvrent aujourd'hui les assurances, aux termes des conventions en vigueur : en cas d'accident, les exploitants sont engagés à hauteur de 91 millions d'euros, l'État de l'exploitant à concurrence d'un peu moins de 110 millions d'euros et les autres États parties à la convention à hauteur de 143 millions d'euros, soit un montant total de 340 millions d'euros, qui pèse pour plus des deux tiers sur les États.
Le protocole de 2004, qui n'a pas encore été ratifié par tous les États et qui n'est donc pas encore juridiquement en vigueur, prévoit une augmentation significative des montants que j'ai cités : les exploitants seront engagés à hauteur de 700 millions d'euros, l'État de l'exploitant à concurrence de 500 millions d'euros et les autres États parties à hauteur de 300 millions d'euros, soit un total de 1,5 milliard d'euros.
C'est l'ordre de grandeur du coût de l'accident de Three Miles Island, mais sûrement pas celui du coût de l'accident de Fukushima ou, a fortiori , de la catastrophe de Tchernobyl.
Il faut être extrêmement prudent lorsque l'on avance une estimation d'une provision dans ce domaine, car il ne faudrait pas que le public y voit l'annonce d'une catastrophe à venir. L'IRSN a estimé, à titre purement indicatif - ce n'est que le résultat du travail de deux personnes -, le coût d'un accident nucléaire grave, mais pas totalement incontrôlé, à 70 milliards d'euros. Pour couvrir ce montant, la Cour des comptes a simplement calculé qu'il faudrait provisionner 1,75 milliard d'euros par an pendant quarante années - durée de vie théorique et comptable d'une centrale nucléaire aujourd'hui. Cela s'ajouterait aux quelque 10 milliards d'euros de dépenses d'exploitation et, selon la façon dont on compte, aux 2,5 milliards à 9 milliards d'euros pour la prise en compte du capital, soit un peu moins de 2 milliards d'euros de provision par an rapportés à un total d'une vingtaine de milliards d'euros : la prime d'assurance serait donc de l'ordre de 8 %. Bien entendu, on ne constitue pas une telle provision pour se prémunir contre les conséquences d'un tremblement de terre ou d'un cyclone, par exemple. Voilà ce que l'on peut dire sur ce sujet.
En conclusion, permettez-moi de faire quatre commentaires et trois remarques.
Schématiquement, la question posée à la Cour des comptes était : les coûts de la filière électronucléaire sont-ils à peu près tous connus ? La réponse est globalement positive, sauf en ce qui concerne la prime d'assurance, au sujet de laquelle nous n'avons pas de bonne réponse.
Deuxièmement, les dépenses financées par des crédits publics ne sont pas du premier ordre si on les rapporte aux coûts pris en charge par les exploitants. Ces dépenses ont atteint 644 millions d'euros en 2010, répartis entre dépenses de recherche et coûts liés à la sécurité, à la sûreté et à la transparence. Un tel montant n'est pas négligeable, mais il n'est pas de première grandeur au regard des coûts totaux, qui s'élèvent à une vingtaine de milliards d'euros.
Troisièmement, le nucléaire, à l'évidence, est un domaine dans lequel subsistent de nombreuses incertitudes industrielles et scientifiques, d'autant plus difficiles à gérer que l'on se projette à long terme.
Quatrièmement, nous avons déjà évoqué les investissements supplémentaires demandés par l'Autorité de sûreté nucléaire à la suite de l'accident de Fukushima. Ces investissements ne sont pas marginaux, mais ils ne sont pas non plus d'un ordre de grandeur radicalement différent de ceux qui étaient prévus. Leur coût s'élèverait à une dizaine de milliards d'euros, montant à comparer à la cinquantaine de milliards d'euros d'investissements envisagés sur les quinze prochaines années.
J'en viens maintenant aux trois remarques annoncées, qui vont au-delà du calcul des coûts.
En premier lieu, la durée de vie effective des centrales pose véritablement question. En tout état de cause, sauf à réduire de manière significative notre consommation d'électricité, compte tenu des délais de mise en oeuvre des solutions alternatives - économies d'énergie, construction d'EPR ou recours aux énergies renouvelables -, ne pas décider, c'est décider de prolonger la durée de vie des centrales.
En deuxième lieu, dans tous les cas, un volume considérable d'investissements sera nécessaire. Les seuls coûts de la maintenance, qui étaient inférieurs à 1 milliard d'euros par an, sont en voie de passer à quelque 4 milliards d'euros, soit 20 % des 20 milliards d'euros calculés sur la base du coût courant économique, le CCE. Cette évolution a une incidence plus significative que la prise en compte d'une incertitude forte sur le coût du démantèlement ou sur celui de la gestion des déchets.
En troisième lieu, je tiens à souligner que nous n'avons pas travaillé significativement sur la prise en compte des externalités, qu'elles soient positives ou négatives, c'est-à-dire sur les quotas de CO 2 économisés ou dépensés, sur les devises économisées ou dépensées, sur les emplois créés ou supprimés, etc. Ces sujets méritent d'être étudiés mais ne faisaient pas l'objet du présent rapport.
Voilà ce que je voulais vous dire pour résumer le travail de la Cour des comptes, madame, messieurs les sénateurs. Je vous remercie de votre attention.
M. Ladislas Poniatowski , président . - Nous vous remercions d'avoir orienté la présentation de votre rapport en fonction du thème de travail de notre mission d'enquête.
Monsieur le rapporteur, de nombreuses questions ont déjà reçu réponse. Souhaitez-vous néanmoins obtenir certaines précisions ?
M. Jean Desessard, rapporteur . - Je tiens tout d'abord à saluer à mon tour la qualité du travail de la Cour des comptes. Le sujet était difficile, car il existe de nombreuses incertitudes. Vous avez bien cerné l'ensemble des problèmes. Je salue également la qualité de votre exposé, au cours duquel vous avez répondu à presque toutes les questions que je souhaitais vous poser.
J'aimerais toutefois revenir sur la question de la sensibilité du coût de production de l'électricité nucléaire à la variation de certains paramètres. Il y a en effet une incertitude sur le coût du démantèlement. Vous avez indiqué que le doublement des charges de démantèlement entraînerait une hausse de 5 % au maximum du coût de production. Une révision à la hausse du devis de stockage profond des déchets aurait quant à elle une incidence de 1 %. Enfin, une révision du taux d'actualisation aurait pour effet une augmentation du coût moyen de production de 0,8 %.
Par ailleurs, en cas de prolongation de la durée de vie des centrales actuelles, l'augmentation des dépenses de maintenance aurait également une incidence sur le coût moyen de production, mais je ne vous ai pas entendu donner de pourcentage sur ce point.
M. Gilles-Pierre Lévy. - Il serait compris 15 % et 20 %, mais peut-être suis-je un peu excessif...
Mme Michèle Pappalardo . - Il serait plutôt compris entre 10 % et 15 %.
M. Gilles-Pierre Lévy. - Pourtant, avec 3,7 milliards d'euros rapportés à un total de 20 milliards, il me semble que l'on s'inscrit plutôt dans la fourchette comprise entre 15 % et 20 %.
Mme Michèle Pappalardo . - En fait, ce pourcentage s'établit à 9,5 % sur la base du CCE et à 15 % si l'on prend en compte le coût le plus faible, c'est-à-dire le coût comptable.
M. Gilles-Pierre Lévy. - Lorsque nous disons qu'un doublement des charges de démantèlement entraînerait une hausse de 5 % du coût de production de l'électricité, il ne s'agit là ni d'un minimum ni d'un maximum. Dans l'incertitude, nous avons simplement pris une marge, qui nous semblait cohérente avec ce que l'on peut observer dans d'autres pays. Une telle hypothèse de sensibilité nous paraissait en outre correspondre aux ordres de grandeur évoqués dans les débats actuellement en cours entre l'Autorité de sûreté nucléaire et les exploitants. Toutefois, il n'y a pas de certitude : si tout le monde s'est trompé, il est possible que le chiffre réel soit supérieur !
M. Ladislas Poniatowski , président . - Précisément : à part les Russes, personne n'a jamais encore totalement démantelé une centrale nucléaire et n'est donc en mesure aujourd'hui d'en préciser le coût. Tous les chiffres qui figurent sur le tableau que vous nous avez présenté correspondent à des estimations.
J'ai beaucoup apprécié la prudence dont vous avez fait preuve sur certains points, mais vous m'avez semblé assez affirmatif concernant le coût du démantèlement, alors que nous sommes aussi dans l'incertitude à ce sujet.
M. Gilles-Pierre Lévy. - Je me suis certainement mal exprimé ; vous avez entièrement raison. Des équipements, de petits réacteurs ont déjà été démantelés, mais jamais un parc homogène complet. Opérer sur une telle échelle permettrait sans doute de réaliser des économies industrielles, car normalement le démantèlement du cinquantième réacteur coûterait moins cher que celui du premier, à conditions de sécurité équivalentes.
Dans l'incertitude où nous sommes effectivement sur le coût du démantèlement, nous avons considéré les estimations retenues par les pays comparables au nôtre afin d'essayer d'extrapoler au parc nucléaire français ce qui nous semblait être la moins mauvaise d'entre elles, rien de plus.
M. Ladislas Poniatowski , président . - J'ai la prétention d'être bien informé sur ces sujets, mais je dois dire que je ne connaissais pas ce tableau, que j'ai trouvé très intéressant.
Mme Michèle Pappalardo . - Vous ne pouviez pas l'avoir vu auparavant, car c'est nous qui l'avons fait ! (Sourires.)
Pour le réaliser, nous nous sommes appuyés sur des chiffres disponibles dans la littérature, puis nous avons tenté de les ramener le plus possible à notre situation en termes de parc de réacteurs et à notre définition de la notion de démantèlement, laquelle recouvre des réalités très différentes selon les pays. Ainsi, elle englobe souvent, chez nos voisins, la gestion des déchets.
Jusqu'à présent, personne ne nous a dit que nous avions commis des erreurs grossières. Nous avons tenté de préciser un certain nombre d'éléments, mais il est exact que, pour l'heure, aucun réacteur du type de ceux dont nous disposons n'a jamais été démantelé.
M. Ladislas Poniatowski , président . - La parole est à M. Ronan Dantec.
M. Ronan Dantec. - Compte tenu des coûts de maintenance, le CCE tendrait donc vers 60 euros dans les prochaines années ? Mais si la rentabilité des actifs dédiés n'atteignait pas 5 %, cela aurait-il également une incidence sur le CCE ? Tout a-t-il déjà été pris en compte dans vos calculs ?
Mme Michèle Pappalardo . - Je ne sais pas comment vous parvenez à 60 euros. En 2010, le CCE s'établissait à 49,5 euros, avec 1,7 milliard d'euros d'investissements de maintenance. Le doublement des investissements de maintenance portera le CCE à 54 ou à 55 euros.
On peut bien sûr ensuite faire l'hypothèse que le coût du démantèlement va lui aussi doubler, par exemple, et aller plus loin encore, mais la seule certitude, c'est que les investissements de maintenance vont augmenter.
Par ailleurs, le taux d'actualisation peut certes évoluer, mais c'est relativement peu probable à court terme. Toutefois, on sait évaluer l'impact d'une modification de ce taux : s'il diminuait de 1 %, cela entraînerait une hausse de près de 1 % du CCE.
M. Ronan Dantec. - Si l'État annonçait qu'il manque 10 milliards d'euros de provisions pour démantèlement, cela entraînerait-il une augmentation du CCE, par exemple si l'on excluait le recours à des actifs croisés ?
M. Gilles-Pierre Lévy. - La gestion des actifs est théoriquement séparée du fonctionnement. Si les actifs ne rapportaient pas 5 % par an sur une longue période, s'ils ne rapportaient que 3 %, par exemple, les exploitants devraient alors compenser le manque à gagner, ce qui pèserait sur leurs comptes.
Mme Michèle Pappalardo . - En trésorerie.
M. Ronan Dantec. - Cela ne jouerait pas sur le CCE ?
Mme Michèle Pappalardo . - On ne parle pas du tout de la même chose. Dans l'hypothèse que vous faites, le montant de la provision ne change pas : il est toujours calculé en fonction du coût de l'ANDRA, etc. Les provisions comptabilisées dans les comptes des exploitants doivent être utilisées, en partie en tout cas, pour acheter des actifs dédiés. Cela a un effet, mais pas sur le CCE.
M. Ladislas Poniatowski , président . - La parole est à M. Claude Léonard.
M. Claude Léonard. - J'ai une question un peu technique à poser, mais je maîtrise un peu moins bien ce sujet que celui de l'énergie solaire.
L'un des tableaux que vous nous avez présentés indique que les dépenses annuelles d'investissement de maintenance passeraient de 3,4 milliards d'euros à 3,7 milliards d'euros, du fait des préconisations de l'ASN après l'accident de Fukushima. Quelles sont les préconisations dont la mise en oeuvre entraînera cette augmentation de 300 millions d'euros par an ? Le nucléaire français s'inscrit déjà dans une démarche de sécurisation maximale.
M. Gilles-Pierre Lévy. - L'ASN a ajouté des contraintes, dont certaines étaient déjà prévues, par exemple la création d'une salle de crise protégée dans chacune des centrales ou le rajout d'un générateur d'électricité autonome et protégé pour chaque réacteur. Ce sont là les deux principaux postes de dépenses. Chacun d'entre eux a été évalué « à la louche » à 2 milliards d'euros pour l'ensemble du parc. Le coût de la création d'une salle de crise est évalué à une centaine de millions d'euros, soit une dépense de 2 milliards d'euros au total pour vingt centrales.
Mme Michèle Pappalardo . - Pour parvenir aux 300 millions d'euros que vous avez évoqués, nous avons simplement divisé 5 milliards d'euros par quinze ans.
M. Ladislas Poniatowski , président . - La parole est à M. le rapporteur, pour poser une question qui, je le crains, risque de s'écarter du sujet qui nous occupe...
M. Jean Desessard, rapporteur . - Le secteur du nucléaire fait beaucoup appel à la sous-traitance, or les salariés des sous-traitants ne travaillent pas dans les mêmes conditions que les autres. Ce fait a-t-il été pris en considération par la Cour des comptes ? Avez-vous évalué le coût que représente, pour la collectivité, la prise en charge des maladies professionnelles qui peuvent résulter de cette situation ? Ce sujet est un peu difficile, mais il y a un véritable problème.
M. Gilles-Pierre Lévy. - Nous n'avons pas évalué ce que représenterait un changement de pratiques en matière de sous-traitance.
Mme Michèle Pappalardo . - Nous n'avons pas chiffré un tel coût, d'une part parce que ce n'est pas à nous de le faire, d'autre part parce que nous ne saurions pas comment le faire.
Cela étant, sur le sujet des maladies professionnelles, de très importants progrès ont été accomplis ces derniers temps. Les maladies professionnelles ont effectivement un coût, mais il est déjà pris en compte dans les coûts d'exploitation. Nous n'avons pas insisté sur le fait que l'évolution des dépenses d'exploitation d'EDF a été relativement forte ces dernières années, puisqu'elles ont augmenté de 11 % entre 2008 et 2010. Cette tendance va se poursuivre et même s'accentuer, en raison notamment de l'évolution des modalités de recours à la sous-traitance et du renouvellement des compétences du personnel. Nous avons souligné de manière qualitative l'augmentation potentielle des coûts de personnel liée à la mise en oeuvre des préconisations de l'ASN.
M. Jean Desessard, rapporteur . - Je comprends qu'il soit très difficile d'établir un tel chiffrage. Vous avez tout de même souligné que ces coûts étaient pris en compte dans les charges d'exploitation.
Mme Michèle Pappalardo . - Absolument.
M. Ladislas Poniatowski , président . - La parole est à M. Ronan Dantec.
M. Ronan Dantec. - Le coût de la construction de l'EPR suscite beaucoup d'interrogations ! Vous avez indiqué une fourchette, mais on sent bien que des incertitudes subsistent. Pourriez-vous nous indiquer comment vous avez calculé ce coût ?
Mme Michèle Pappalardo . - Comme nous l'avons écrit dans le rapport, nous n'avons rien calculé, rien validé, et ce volontairement. La Cour des comptes ne peut pas aujourd'hui valider le coût de construction alors que celle-ci n'est pas encore achevée, et encore moins le coût de production, puisque si des hypothèses sont faites sur l'évolution des coûts d'exploitation par comparaison avec ceux des centrales actuelles, la Cour des comptes ne peut rien constater.
Nous n'avons donc nullement validé les chiffres qui nous ont été donnés et qui figurent dans le rapport : 6 milliards d'euros pour le coût de construction et entre 70 et 90 euros pour le coût de production, ce qui est d'ailleurs peut-être un peu optimiste. Ces chiffres ont été obtenus en prenant comme hypothèses un taux d'utilisation de l'EPR de 90 % - cela me paraît là aussi un peu optimiste -, une durée de vie de l'EPR de soixante ans et des coûts de production moins importants que ceux des centrales actuelles.
Les chiffres qui nous ont été donnés semblent cohérents avec ces hypothèses, mais nous ne pouvons pas les valider aujourd'hui. Nous les avons fait apparaître dans notre rapport parce qu'ils sont cités dans le débat et qu'il peut être intéressant de les connaître, mais, je le répète, nous n'avons pas calculé le coût de production de l'EPR en développement. Nous avons simplement dit et écrit clairement que, a priori , les EPR suivants devraient coûter moins chers que le premier, sans toutefois pouvoir davantage préciser les choses. Nous sommes restés extrêmement prudents sur ce point.
M. Ladislas Poniatowski , président . - Je crains, monsieur Dantec, que vous ne restiez sur votre faim ! Je ne vois pas comment la Cour des comptes pouvait répondre sur ce point.
Cette question n'a rien à voir avec le sujet de notre commission, mais, en tant que président du groupe énergie, je peux vous indiquer que nous la suivrons de près. Le coût de l'EPR présente une grande importance pour les parlementaires que nous sommes. Pour commencer à l'appréhender, nous devrons nous intéresser aux quatre seuls réacteurs en construction aujourd'hui, à savoir le finlandais, qui est le plus ancien et aussi celui dont le chantier a le plus dérapé, celui de Flamanville et les deux chinois, dont l'un sera d'ailleurs terminé avant le nôtre.
Nous nous pencherons sur ce sujet, mais nous n'aurons malheureusement pas de réponses à nos questions au cours des travaux de cette commission d'enquête. Je comprends tout à fait l'argumentation de Mme Pappalardo : il était très difficile, pour la Cour des comptes, d'aller plus loin.
M. Ronan Dantec. - Je ne m'attendais pas à apprendre aujourd'hui le prix au centime près du mégawattheure produit à Flamanville ! Je note toutefois que vous considérez que les coûts annoncés sont un peu optimistes.
Cela étant, ces estimations « à la louche » prennent-elles en compte le coût du démantèlement de l'EPR, ainsi que le coût du stockage ? En effet, le coût de 35 milliards d'euros avancé par l'ANDRA ne concerne que le parc actuel ; il ne prend pas en compte l'EPR.
Mme Michèle Pappalardo . - La méthode de calcul de ces coûts est comparable à celle qui est utilisée pour le CCE. La logique est la même. Utiliser une même méthode permet de faire des comparaisons.
Les charges futures - nous parlons d'un futur très éloigné, bien sûr - sont intégrées. Si vous souhaitez faire des comparaisons de coûts de construction, j'attire votre attention sur le fait que le coût de 6 milliards d'euros prévu aujourd'hui inclut l'ingénierie, mais pas les intérêts intercalaires. Or la durée de la construction étant longue, ces derniers auront un poids important.
M. Ladislas Poniatowski , président . - Je vous remercie vivement de vos prestations, madame Pappalardo, monsieur Lévy.
J'indique que le rapport annuel de 2011 de la Cour des comptes comporte un volet très intéressant sur la contribution au service public de l'électricité, sujet d'actualité qui entre dans le champ des préoccupations de notre commission d'enquête. Ce document datant du mois de février 2011, nous nous permettrons probablement de demander à la Cour des comptes de bien vouloir l'actualiser. Ses magistrats sont indépendants et libres de déterminer leur programme de travail, mais nous serions ravis que vous acceptiez d'accéder à cette requête. C'est la qualité de votre rapport sur les coûts de la filière électronucléaire qui nous incite à entreprendre cette démarche. Vous nous avez mis en appétit avec ce travail très important pour nous parlementaires, par conséquent ne soyez pas surpris si nous saisissons officiellement le Premier président dans les prochains jours !
Je vous renouvelle nos remerciements de vous être pliés à cet exercice et de nous avoir présenté votre rapport en tenant compte de l'objet de notre commission d'enquête.