III. RECOMMANDATIONS POUR LA PROCHAINE PÉRIODE DE PROGRAMMATION
Les négociations pour la prochaine période de la politique européenne de cohésion sont amorcées, dans le cadre plus général des perspectives financières pour 2014-2020. Alors que les propositions de la Commission européennes sont désormais connues, et doivent être maintenant discutées entre le Conseil et le Parlement européens, votre commission a jugé utile de formuler de manière complémentaire un certain nombre de propositions pour perfectionner le dispositif national de mise en oeuvre des fonds structurels européens.
A. LES PERSPECTIVES DE L'APRÈS 2013
1. Une approche stratégique à trois niveaux
La Commission européenne, dans son cinquième rapport sur la cohésion de novembre 2010, propose de structurer la politique de cohésion sur la base d'une approche stratégique à trois niveaux :
- un cadre stratégique commun (CSC) adopté par la Commission, qui engloberait le Fonds de cohésion, le FEDER, le FSE, le FEADER et le FEP ;
- un contrat de partenariat pour le développement et l'investissement qui, sur la base du CSC, établirait les priorités en matière d'investissement, la répartition des ressources nationales et de l'Union entre les programmes et les domaines prioritaires, les conditions convenues et les objectifs à atteindre ;
- des programmes opérationnels (PO) qui, comme actuellement, seraient les principaux instruments de gestion et transposeraient le contenu des documents stratégiques en priorités concrètes d'investissement, assorties d'objectifs clairs et mesurables, en vue d'atteindre les objectifs nationaux fixés dans le cadre de la stratégie « Europe 2020 ».
Votre rapporteur estime important que tous les niveaux de collectivités territoriales soient impliqués dans l'élaboration des programmes opérationnels. Un « pacte territorial » permettrait d'établir les priorités sur le territoire de chaque région et de déterminer ce que feront ensemble de manière partenariale l'Europe, l'État, la région, les départements et les communautés de communes.
2. La création d'une nouvelle catégorie de régions intermédiaires
Dans son cinquième rapport sur la cohésion, la Commission européenne a proposé de créer une catégorie de régions intermédiaires entre celles relevant aujourd'hui de l'objectif « convergence » et celles relevant de l'objectif « compétitivité régionale et emploi ».
Actuellement, l'objectif «convergence » concerne les 84 régions dont le PIB par habitant est inférieur à 75 % de la moyenne communautaire, plus 16 autres régions disposant d'un PIB par habitant devenu très légèrement supérieur à ce seuil de 75 % en raison de l'effet statistique de l'élargissement de l'Union européenne, qui a abaissé cette moyenne (régime transitoire dégressif de phasing out ).
L'objectif « compétitivité régionale et emploi » concerne les 168 régions inéligibles à l'objectif « convergence », dont le PIB est supérieur à 75 % de la moyenne communautaire. En outre, 13 d'entres elles bénéficient de dotations complémentaires en raison de leur ancien statut de région de « l'objectif 1 », précurseur de l'objectif « convergence » durant la période 2000-2006. Ce régime transitoire de phasing in vise à amortir l'ampleur de la diminution du soutien apporté par les fonds structurels, lorsqu'une région s'enrichit jusqu'à passer d'une catégorie d'objectif à l'autre.
Il résulte de cette classification qu'une région dont le PIB est légèrement supérieur à 75 % de la moyenne communautaire peut relever de trois niveaux différents d'intensité des aides communautaires selon qu'elle relevait déjà de l'objectif « compétitivité » avant l'élargissement, qu'elle s'est trouvée exclue de l'objectif « convergence » par l'effet statistique de celui-ci, ou qu'elle en est sortie du fait de son enrichissement propre.
La Commission européenne propose de traiter de manière équivalente toutes les régions d'un même niveau de richesse, en créant une nouvelle catégorie de régions dont le PIB par habitant serait compris entre 75 % et 90 % de la moyenne communautaire. Toutes les régions de cette catégorie intermédiaire recevraient un même niveau d'aide, sans dégressivité, quel que soit l'historique de leur développement économique. Les régimes transitoires de phasing out et de phasing in seraient supprimés.
En ce qui concerne la France, cette nouvelle catégorie de régions intermédiaires pourrait bénéficier, outre à la Martinique qui sortira en 2013 de l'objectif « convergence », à dix régions métropolitaines : la Corse, le Languedoc-Roussillon, la Picardie, le Limousin, le Nord-Pas-de-Calais, la Basse-Normandie, la Lorraine, la Franche-Comté, le Poitou-Charentes et l'Auvergne. Au total, tout en réduisant les effets de seuil, l'aide supplémentaire apportée à ces régions pourrait s'élever à 3 milliards d'euros, sans que rien ne soit retiré aux autres régions françaises relevant de l'objectif « compétitivité ».
Le Sénat a pris clairement position en faveur de cette proposition faite par la Commission européenne, par une résolution devenue définitive le 3 juin 2011 9 ( * ) à la demande de sa commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire 10 ( * ) , sur une initiative de sa commission des affaires européennes 11 ( * ) . Néanmoins, cette proposition doit encore convaincre une majorité des États membres. Certains pays, comme l'Espagne ou l'Allemagne, préféreraient que l'on consacre plutôt les crédits prévus pour les régions intermédiaires à renforcer les mécanismes de transition dont bénéficient leurs régions tout juste sorties de l'objectif « convergence ».
* 9 Résolution européenne n° 130 (2010-2011) sur une politique européenne de cohésion ambitieuse après 2013.
* 10 Rapport n° 559 (2010-2011) de M. Rémy Pointereau.
* 11 Proposition de résolution n° 523 (2010-2011) de MM. Yann Gaillard et Simon Sutour.