E. LE SUCCÈS CONFIRMÉ DU SERVICE MILITAIRE ADAPTÉ

Après un tableau relativement sombre des conditions dans lesquelles se déploie l'action des services de l'État en matière de sécurité publique et de justice, vos rapporteurs se réjouissent d'avoir constaté que le succès du service militaire adapté ne se démentait pas en Guyane et dans les Antilles, contribuant à donner de l'espoir à la jeunesse. En effet, ce qui fait la valeur du service militaire adapté aux yeux des entreprises, sans doute davantage que l'indispensable savoir-faire professionnel délivré aux jeunes volontaires, c'est la formation comportementale, conséquence de l'état militaire, le savoir-être qui garantit à l'employeur la fiabilité, la rigueur et le sens des responsabilités du jeune qu'il embauche. Ce constat est largement partagé, considérant que les lacunes des jeunes, y compris diplômés, sont davantage comportementales que professionnelles. Un employeur préfèrera souvent un jeune du service militaire adapté, même s'il doit financer une formation professionnelle complémentaire, qu'un jeune simplement diplômé. De plus, le service militaire adapté peut donner, pour certains, la première expérience professionnelle qui permet de trouver plus facilement un premier emploi stable 47 ( * ) .

S'ils n'ont pu que brièvement passer au régiment du service militaire adapté de Guyane, à Saint-Jean (troisième régiment), sur le territoire de la commune de Saint-Laurent-du-Maroni, ils ont longuement visité les régiments de la Martinique, au Lamentin (premier régiment), puis de la Guadeloupe, à Baie-Mahault (deuxième régiment).

Alors que vos rapporteurs s'interrogeaient sur la faisabilité du projet de doublement d'ici 2014 des effectifs accueillis par le service militaire adapté outre-mer 48 ( * ) , décidé par le Président de la République en 2009, sans doublement des moyens budgétaires qui lui sont affectés, tout en conservant la qualité des formations et le taux d'insertion professionnelle des volontaires, ils ont pu mieux comprendre les modalités concrètes de cette montée en puissance.

Un nouveau type de contrat, d'une durée de six mois, vient compléter les contrats existants de dix à douze mois selon les filières de formation. Ce contrat de plus courte durée s'adresse, contrairement aux contrats de longue durée, à des jeunes diplômés sans emploi, sans nuire ainsi à l'efficacité globale du service militaire adapté en termes de qualité de la formation et donc d'insertion 49 ( * ) .

1. Le régiment de Guyane

Concernant le régiment de Guyane, vos rapporteurs s'interrogent sur sa localisation actuelle, au sud de Saint-Laurent. Il était auparavant basé pour l'essentiel au camp du Tigre, au coeur de l'agglomération de Cayenne, le site de Saint-Jean étant alors un second site secondaire. Compte tenu de la mission d'accompagnement vers l'insertion professionnelle, la localisation de Cayenne paraissait plus pertinente, au plus près des entreprises, dans le principal bassin d'emploi de la Guyane. Si la localisation à Saint-Jean peut contribuer à l'aménagement du territoire guyanais, il n'est pas assuré qu'elle garantisse l'insertion des jeunes volontaires dans les meilleures conditions, au regard de la situation économique et sociale dégradée de l'ouest guyanais. Par la route, le régiment se situe environ à trois heures de Cayenne.

Le colonel Frédéric Pichon, commandant du régiment, a indiqué à vos rapporteurs que le régiment accueillait 600 jeunes, principalement dans les métiers administratifs et du bâtiment.

2. Le régiment de Martinique

Le régiment du service militaire adapté de Martinique est le régiment historique, le premier régiment créé, en 1961, par le général Némo, le créateur du service militaire adapté outre-mer, commandant des forces armées dans les Antilles et en Guyane. A l'époque, le service militaire adapté avait pour mission de construire des routes, des ponts et des bâtiments publics, pour contribuer au désenclavement et au développement des départements d'outre-mer. Aujourd'hui, il intervient encore en matière de sécurité civile, en appui dans des situations d'urgence (lutte contre la dengue en 2010, séisme en Haïti en 2010, cyclone en Martinique en 2007...).

Le régiment a accueilli en 2010 près de 530 volontaires. L'objectif est de doubler les capacités d'ici 2014, dans le plan de montée en puissance.

La moitié du budget du régiment provient des fonds européens (Fonds social européen). Le régiment propose quatorze filières de formation et obtient un taux d'insertion professionnelle de 82 % (emploi ou formation durable 50 ( * ) ).

Le colonel Pierre Heinzelmeier, commandant du régiment, a insisté sur le fait que la principale valeur ajoutée du service militaire adapté, pour les volontaires, était le savoir-être que l'état militaire leur permettait d'acquérir. Selon lui, outre-mer, le service militaire adapté est le « chaînon manquant » entre la formation initiale, l'école obligatoire jusqu'à seize ans, et la formation professionnelle, une fois entré dans la vie active.

3. Le régiment de Guadeloupe

La localisation actuelle du régiment, à Baie-Mahault, au centre de la Guadeloupe, est très favorable. Auparavant il était situé à Saint-Claude, près de Basse-Terre, avec plusieurs compagnies dispersées dans le département.

Le régiment propose onze filières, avec de nombreux métiers. Une formation d'ouvrier polyvalent de la banane, organisée en partenariat avec les professionnels du secteur, doit ouvrir à l'été 2011. Des filières nouvelles de carrossier-peintre et soudeur doivent également ouvrir en 2011.

Les effectifs prévus pour 2011 s'élèvent à 555 volontaires. En 2010, ce sont 430 jeunes qui sont passés au régiment. En 2010, le taux d'insertion s'est maintenu à 82 %, malgré la hausse du chômage en Guadeloupe, étant entendu qu'une partie des jeunes part ensuite en métropole pour poursuivre une formation et souvent y trouve un emploi.

Il faut signaler que le régiment accueille plusieurs jeunes originaires de Saint-Martin. A la demande de la collectivité de Saint-Martin, le régiment a pour but d'y créer un détachement de 75 places d'ici 2013 51 ( * ) , qui s'ajouteront aux 850 prévues en 2014 dans le cadre du plan de montée en puissance du service militaire adapté, soit un total de 925 places 52 ( * ) .

Le colonel Claude Peloux, commandant du régiment, a exposé à vos rapporteurs les projets d'investissement en cours de réalisation, destinés à permettre le doublement des capacités en 2014. Il a également indiqué que, pour une place au régiment, six candidats se présentent, trois étant ensuite éliminés sur critères physiques. L'accès au régiment est ainsi très sélectif. Le taux d'illettrisme des recrues est de 40 %. Bon nombre de candidats son motivés par la possibilité de préparer gratuitement le permis de conduire.

Les fonds européens contribuent grandement au budget du régiment, qui s'élève à 18 millions d'euros (fonds social européen, pour 4 millions, et fonds européen de développement régional). Les investissements représentent une proportion très importante du budget, avec 8 millions d'euros.

Alors que tous les services de l'État rencontrés ont témoigné auprès de vos rapporteurs de l'insuffisance des moyens de fonctionnement dont ils disposent, force est de constater que le service militaire adapté bénéficie d'un accroissement substantiel de ses crédits, afin de remplir l'objectif de 2014.


* 47 Le service militaire adapté reçoit trois types de volontaires :

- les volontaires stagiaires (VS), la majorité, pour une durée de six à douze mois, qui permet de rejoindre les dispositifs conventionnels de formation, d'insertion professionnelle ou d'emploi ;

- les volontaires techniciens (VT), pour une durée d'un an à cinq ans, qui permet d'acquérir une première expérience professionnelle ;

- les engagés volontaires (EV), pour une durée de deux à cinq ans, qui exercent la responsabilité d'instructeur après une formation de six mois en métropole.

* 48 Plan « SMA 6 000 ».

* 49 Initialement, il était envisagé pour doubler les capacités de proposer des contrats de six mois pour la moitié des volontaires. Cette formule n'était ni réaliste ni crédible auprès des employeurs car un contrat de six mois peut être profitable pour un jeune déjà titulaire au moins d'un CAP, mais pas pour des jeunes sans qualification. Aussi le plan a-t-il été arbitré en 2010 sur la base de 80 % de volontaires en cursus long et 20 % en cursus court de six mois, de façon à maintenir la qualité de la formation et l'efficacité de l'insertion professionnelle. Avec cette répartition, il ne sera pas possible de doubler entièrement les effectifs pour atteindre 6 000 en 2014.

* 50 Sur ce total, 15 % restent dans l'armée (les deux tiers au sein du régiment en Martinique), 50 % trouvent un emploi en Martinique, 19 % poursuivent une formation en métropole (puis souvent trouvent un emploi en métropole) et 16 % poursuivent une formation en Martinique.

* 51 Un terrain a d'ores et déjà été trouvé.

* 52 Au lieu des 1 000 places envisagées initialement dans le cadre du plan « SMA 6 000 ».

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