2. Le financement des organisations syndicales
Étant donné, d'une part, le rôle institutionnel croissant des syndicats, et, d'autre part, le contexte économique, social et juridique décrit précédemment qui est plutôt défavorable à la syndicalisation, la question d'un financement public des syndicats se pose.
En l'absence de données officielles sur le financement des syndicats, la part des cotisations dans l'ensemble de leurs ressources est estimée entre 20 % (CFTC) et 57 % (FO) 331 ( * ) . Les autres ressources des syndicats proviennent de leurs activités propres, notamment la rémunération des activités d'intérêt général qu'ils effectuent (participation à la gestion des organismes paritaires : organismes collecteurs des fonds de la formation professionnelle et organismes de sécurité sociale). Cette rémunération ne prend que faiblement en compte le critère de l'audience. L'État et les collectivités locales leur versent enfin des subventions ou les font bénéficier d'avantages, fiscaux notamment. Ces ressources viennent bien sûr s'ajouter aux facilités diverses accordées par les entreprises.
Le modèle français de financement des organisations syndicales est singulier au sein de l'Union européenne, comme l'a démontré un rapport de l'IGAS 332 ( * ) . En dépit des différences entre pays européens, de fortes similarités existent s'agissant du financement des syndicats, en dehors du cas de la France.
Le financement des syndicats dans les pays considérés obéit en effet à 4 principes :
- les adhérents et l'autonomie financière qu'ils garantissent sont le fondement de la légitimité des syndicats (les cotisations représentent en moyenne 80 % du financement des syndicats) ;
- les employeurs ne donnent aux syndicats que les moyens nécessaires à la représentation des salariés dans l'entreprise ;
- les missions d'intérêt général, définies strictement, font l'objet d'un financement cloisonné ;
- les contrôles peuvent être conçus de manière à respecter l'autonomie des syndicats.
En France, au contraire, le financement des syndicats est largement déconnecté du nombre d'adhérents. La plupart des organisations syndicales réclament une réforme de ce financement, mais elles divergent entre elles sur le lien qu'il convient d'établir entre financement public et représentativité. Le rapport précité de Raphaël Hadas-Lebel envisage deux scénarios d'évolution :
- Un scénario d'adaptation : amélioration de la transparence des comptes par leur publication annuelle, extension du mécanisme du chèque syndical, confirmation par la loi du statut fiscal propre aux organisations syndicales, encadrement de la mise à disposition de salariés du secteur privé... ;
- Un scénario de transformation , où serait renforcée la place de l'adhérent et de l'audience dans le système de financement des syndicats : augmentation de l'avantage fiscal actuel 333 ( * ) , remplacement par un crédit d'impôt (chèque syndical financé sur le budget de l'État), réexamen de la répartition des financements entre organisations syndicales en fonction de leur audience, mise en place d'une contribution spécifique des entreprises destinée au financement du dialogue social.
* 331 Cf. rapport précité de Raphaël Hadas-Lebel.
* 332 Étude d'administration comparée sur le financement des syndicats (Allemagne, Belgique, Grande-Bretagne, Italie, Suède), IGAS, n° 160 (2004).
* 333 Les cotisations syndicales peuvent être déduites de l'impôt sur le revenu à hauteur de 66 % de leur montant.