4. Évaluer les interventions
Jusqu'à présent, l'efficacité des politiques de prévention reste peu et mal évaluée.
Les raisons sont doubles.
D'une part, les coûts liés à l'évaluation sont élevés, entre 3 à 5 fois plus chers que le coût de l'intervention selon Henri Bergeron. Ils sont donc rarement intégrés dans le budget initial.
D'autre part, l'évaluation reste un secteur de recherche peu promu en France. Il existe donc peu d'outils méthodologiques performants.
Cette situation est d'autant plus regrettable que des sommes non négligeables sont engagées depuis des années dans des politiques de prévention aussi bien au niveau national qu'au niveau local sans qu'un bilan global de leur efficacité ne puisse être tiré, ce qui ne permet pas d'abandonner les interventions les moins intéressantes et de concentrer les moyens sur les mesures ayant fait leurs preuves.
5. Gérer des intérêts contradictoires
a) La gestion du temps
Le temps « politique » est court et rythmé par les élections.
Au contraire, la prévention est une action dont les résultats se mesurent à long terme, comme en témoignent les politiques de prévention routière ou encore les interventions pour réduire la prévalence du tabagisme.
Les politiques de prévention sont donc soumises à deux contraintes contradictoires et parfois difficiles à gérer.
b) Les enjeux économiques
Compte tenu de l'impact limité des politiques de prévention exclusivement incitatives sur les comportements, d'autres formes d'intervention plus volontaires peuvent être privilégiées
Les secteurs traditionnellement visés sont l'industrie agroalimentaire et le secteur de la publicité.
La demande des consommateurs est influencée par les prix. Certaines initiatives visent donc à diminuer le prix des aliments dont on souhaite augmenter la consommation (les fruits et légumes par exemple) ou au contraire à taxer les aliments jugés peu favorables à la santé. Ainsi, la ville de New-York a récemment instauré une taxe sur les boissons sucrées.
Par ailleurs, compte tenu de l'influence majeure de la publicité sur les comportements des individus en général et des enfants en particulier, de nombreux cliniciens et scientifiques demandent régulièrement la limitation, voire l'interdiction, des publicités portant sur des aliments de grignotage et les boissons sucrées dans les programmes destinés aux enfants. Certains pays ont déjà adopté ce genre de législation comme le Québec ou le Royaume-Uni.
Néanmoins, de telles politiques ont des conséquences économiques évidentes sur les secteurs d'activité concernés. Ainsi, une réduction de la publicité constitue non seulement un manque à gagner pour les chaînes de télévision, mais a également un effet négatif sur les agences de publicité dont le marché potentiel est diminué d'autant.
De la même façon, l'introduction d'une taxation peut réduire le bénéfice des entreprises fabricant le produit concerné et avoir des conséquences en termes d'emploi.
Il apparaît ainsi que les objectifs poursuivis par les politiques de santé publique, à savoir l'amélioration de l'état général de santé de la population, peuvent se heurter à des intérêts économiques puissants traditionnellement défendus par d'autres ministères.