B. DÉGAGER LES MOYENS FINANCIERS NÉCESSAIRES POUR ÉVITER QUE CES TRANSFERTS NE DEVIENNENT « DES BOMBES À RETARDEMENT »
Le rapport de l'Observatoire de la décentralisation de 2006 faisait état d'un « bilan financier incertain ». Désormais, les collectivités territoriales en sont sûres : les transferts de personnels représentent un coût très élevé.
A l'époque, le rapport identifiait au moins trois sources d'inquiétudes : les conditions incertaines d'application de certaines compensations, l'inadéquation des recettes transférées, l'existence de « coûts cachés » 11 ( * ) .
Le rapport de la Cour des comptes sur la conduite par l'État de la décentralisation est venu confirmer, souvent en pire, les craintes initiales étayant le constat d'un processus coûteux pour les finances publiques et absolument pas maîtrisé pour l'avenir.
1. Un bilan financier largement sous-évalué
Un bilan financier complet apparaît impossible. D'une part il a fait l'objet d'au moins six lois de finances avec des ajustements incessants. D'autre part, entre les dépenses mal compensées, celles qui n'ont pas été compensées du tout et les dépenses induites par les transferts, le décomptage est toujours contestable.
Officiellement, pour les TOS, on parvient à un montant de compensation globale de 2,66 Mds€, dont 1,397 Mds€ pour les régions et 1,263 Mds€ pour les départements. Pour les ex-DDE, ce montant s'élève à 961,651 M€. Le total, avec les autres transferts, avoisine donc 3,6 Mds€.
Mais fondamentalement les ministères ne sont pas en mesure de déterminer les charges réelles liées aux transferts puisque seules les collectivités peuvent identifier précisément les dépenses avant 2002 et celles constatées aujourd'hui.
Compensations versées au titre des compétences transférées depuis 2005 Selon le rapport de l'Observatoire des finances locales 2010, les transferts de compétences liés à la mise en oeuvre de la loi du 13 août 2004 étaient estimés lors de son adoption par le Parlement à 8,18 Md€, les principaux montants portant sur la voirie (1,1 Md€), l'enseignement (2 Md€), avec notamment les TOS (1,75 Md€). Après les importants transferts réalisés en 2007 et 2008, avec notamment la majeure partie des transferts des personnels techniciens, ouvriers et de service de l'Éducation nationale, l'année 2009 a été marquée par un ralentissement du rythme de décentralisation, les principaux transferts concernant la voirie et l'enseignement étant bien avancés. En 2010, la réduction des compensations additionnelles se confirme en lien avec le calendrier des transferts : les départements perçoivent 80 M€ supplémentaires au titre de la TIPP et de la TSCA et les régions 21M€ au titre de la TIPP. Source : Rapport de l'Observatoire des finances Locales 2010 |
a) Un dispositif de compensation financière insatisfaisant
Sur le plan financier, les collectivités territoriales bénéficiaient pourtant d'une garantie financière « forte » voulue par le législateur au terme de vifs échanges avec le Gouvernement.
(1) Malgré des garanties initiales fortes...
D'une part, en application de l'article 72-2 de la Constitution , « tout transfert de compétences entre l'État et les collectivités territoriales s'accompagne de l'attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice ».
On rappellera que les principes de cette garantie financière sont :
- l'intégralité : les ressources transférées doivent être équivalentes aux dépenses effectuées par l'État au titre des compétences transférées ;
- la concomitance : tout accroissement de charges résultant des transferts de compétences doit s'accompagner du transfert concomitant des ressources nécessaires à l'exercice de ces compétences ;
- le contrôle : le montant des accroissements de charges résultant des transferts de compétences est constaté par arrêté ministériel, après avis de la Commission consultative sur l'évaluation des charges (CCEC) ;
- la conformité à l'objectif d'autonomie financière inscrit dans la Constitution : l'article 119 de la loi du 13 août 2004 prévoit que la compensation financière s'opère, à titre principal, par l'attribution d'impositions de toute nature.
Enfin, parmi les garanties prévues, il faut citer la clause de sauvegarde.
L'article 104 de la loi du 13 août 2004 a introduit une « clause de sauvegarde », apparemment protectrice, mais qui se révèle complexe dans son application.
La référence pour déterminer le nombre total d'emplois transférés est la « photographie » des emplois pourvus au 31 décembre de l'année précédant le transfert des compétences, sous réserve que leur nombre ne soit pas inférieur à celui constaté le 31 décembre 2002.
Au regard de cette clause de sauvegarde, l'effectif global de référence diffère donc selon les collectivités bénéficiaires : dans certains départements ou régions, la référence est le 31 décembre 2002 et dans d'autres, le 31 décembre de l'année précédant le transfert de compétence.
(2) ...une compensation très en-dessous des charges réelles
A l'issue de ces cinq années d'activité, la CCEC a incontestablement facilité la mise en oeuvre de la décentralisation en faisant de ce lieu un espace d'échanges , d'information, d'explication, voire de pédagogie , et en produisant des bilans complets actualisés, qui constituent autant de pièces essentielles de la mémoire des processus de décentralisation. Son Président n'hésite pas à parler de la CCEC comme « l'instance de référence en matière de compensation et de décentralisation ». La CCEC a notamment eu le mérite d'institutionnaliser une méthode de travail avec un traitement des dossiers, selon un mode d'évaluation des compensations renouvelé et concerté entre l'État et les représentants des collectivités.
En matière de compensation des transferts de personnel, à ce jour, 100 arrêtés interministériels ont été approuvés par la CCEC, à l'issue d'arbitrages parfois serrés et toujours très techniques :
Ainsi, les charges transférées depuis 2005 au titre de la loi du 13 août 2004 s'élèvent au total, en loi de finances pour 2010 pour les compétences transférées et les services partagés, à 5,968 Mds€, dont 3,195 Mds€ en faveur des régions sous forme de taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) et 2,773 Mds€ en faveur des départements sous forme de taxe spéciale sur les contrats d'assurance (TSCA) et de TIPP. 12 ( * )
Un grand nombre de questions ont pu être réglées au niveau de la CCEC sans trop de difficultés.
Au sein de cette instance, il convient aussi de souligner que la parité élus de la commission a réussi à « faire bouger les lignes » à maintes reprises, notamment sur la référence à la moyenne triennale des dépenses antérieures. Le Gouvernement a accepté de répondre parfois favorablement, comme par exemple sur les charges patronales, les dépenses dites sociales (médecine préventive, formation) et certaines dépenses annexes de fonctionnement (informatique).
Les points d'accord au sein de la CCEC - la rémunération des agents : la compensation s'effectue sur la base du coût exact des agents, la collectivité territoriale devant avoir précisément les moyens de payer l'agent transféré au même niveau que ce qu'il aurait coûté à l'État s'il n'avait pas opté ; - les charges patronales : la compensation des personnels se fait, s'agissant des cotisations « patronales », sur la base des dépenses supportées par les collectivités territoriales. Ainsi, la compensation est établie soit sur la base du coût correspondant aux cotisations CNRACL et assimilés (taux de 27,3 %) s'agissant des agents intégrés à la FPT, soit sur la base des cotisations effectivement supportées par les collectivités locales (taux de 62,14 % au 1 er janvier 2010) s'agissant des agents détachés ; - les dépenses sociales : les dépenses annexes liées au fonctionnement courant des structures, ainsi que la nouvelle bonification indiciaire NBI, sont également intégrées dans le calcul du droit à compensation. S'agissant des dépenses de médecine préventive , et notamment de la compensation de la visite médicale, le droit à compensation est calculé non sur la base des dépenses de l'État au cours des trois dernières années mais dans le souci de permettre aux collectivités territoriales d'appliquer les obligations de la FPT en la matière ; - les dépenses de formation : la compensation des ces dépenses est égale à 1 % de la masse salariale (hors cotisations patronales) s'agissant des personnels TOS de l'Éducation nationale et du ministère de l'Agriculture et des personnels des services régionaux de l'inventaire général du patrimoine et des services des affaires sanitaires et sociales, et se fait sous forme d'un transfert de personnels et de crédits s'agissant des personnels de l'Équipement ; - les comptes épargne temps : les CET acquis au moment du transfert de services sont compensés en une seule fois, au moment du transfert effectif aux collectivités territoriales des premiers agents ayant opté ; - les frais de fonctionnement des services : la méthode d'évaluation de la compensation s'effectue sur la base d'une évaluation des frais de fonctionnement des services (hors loyers) par ratios (€/agent), déterminés par chaque ministère décentralisateur, sur la base des frais réels du service calculés selon la moyenne des dépenses actualisées constatées sur une période triennale précédant le transfert de compétences. S'agissant des loyers, lorsque l'État est locataire de l'immeuble affecté aux services ou parties de services transférés, la collectivité bénéficiaire de ce transfert succède à tous ses droits et obligations et se voit compenser les montants des loyers sur la base de l'année précédant le transfert de service ; - les postes « disparus » : répondant à la clause de sauvegarde introduite par l'article 104 de la loi du 13 août 2004, ces postes sont compensés sur la base du coût d'un « pied de corps », en fin de processus à l'expiration de la période de droit d'option, soit le 1 er janvier 2009 s'agissant des postes relevant du ministère de l'Éducation nationale et le 1 er janvier 2010 s'agissant des postes relevant du ministère de l'Equipement. |
Certains sujets, en revanche, ont fait l'objet de désaccords durables et d'arbitrages défavorables aux collectivités . Il faut citer notamment le cas des postes vacants ou disparus, du treizième mois ou encore celui des contrats aidés. Ces exemples sont illustratifs des retards, des calculs « au rabais » et des contraintes juridiques et politiques qui ont empêché une compensation intégrale des transferts.
Les principaux sujets de désaccords au sein de la CCEC - Les postes vacants ou disparus En ce qui concerne, l a compensation des postes vacants, l'État compense les emplois vacants de TOS sur la base du nombre exact de postes vacants constatés au 15 septembre de l'année, en tenant compte de la durée moyenne constatée de vacance de ces postes. La compensation est calculée sur la base du coût « en pied de corps » et intègre les taux de cotisations sociales des collectivités territoriales. La CCEC s'est prononcée, à de nombreuses reprises, contre ces modalités de calcul, demandant la compensation de ces postes sur la base du coût moyen . L'arbitrage du Premier ministre a confirmé la position initiale du Gouvernement. S'agissant de la compensation des postes disparus, lors de la séance de la CCEC du 14 novembre 2006, la parité « élus » a accepté une compensation des postes « disparus » (issus de la clause de sauvegarde comparant les emplois transférés au 31 décembre 2002 et au 31 décembre de l'année précédant le transfert), en fin de période sur la base du coût « en pied de corps ». La compensation de ces postes n'est finalement intervenue qu'en loi de finances pour 2009 s'agissant des postes relevant du ministère de l'Éducation nationale, et est intervenue en loi de finances pour 2010 s'agissant des postes relevant du ministère de l'Équipement et du ministère de l'Agriculture (personnels TOS des lycées agricoles). De même, la compensation des emplois vacants intermédiaires et des postes disparus due au titre du transfert des personnels des affaires sociales n'a pu être réglée qu'en 2009. Après l'intervention d'une mission d'inspection IGA/IGF/IGAS en 2007, les modalités de mise en oeuvre et de compensation de ce transfert de services avaient fait l'objet d'un arbitrage par le cabinet du Premier ministre en novembre 2007. A la suite de cet arbitrage, le ministère des Affaires sociales a indiqué, lors de la CCEC du 13 novembre 2008, d'une part que la dette due au titre des emplois constatés vacants sur la période 2004-2008 serait échelonnée avec un premier versement en gestion en 2008. D'autre part, il a confirmé que les emplois « disparus » (différentiel d'effectifs constaté entre les 31 décembre 2002 et 2004) seraient compensés en fin de période d'option (en 2012), à l'instar des autres transferts. La parité « élus » s'était unanimement déclarée opposée à ces deux mesures qui reportaient encore le versement de la compensation due, et avait demandé que ces questions soient à nouveau soumises à l'arbitrage du Premier ministre. Mais, s'agissant des emplois disparus, l'arbitrage initial a été confirmé et s'agissant de la dette des emplois vacants intermédiaires, un nouvel échéancier a été proposé sur deux ans (à hauteur de 6,54 M€ en 2010 et de 4,61 M€ en 2011). Et malgré les vives contestations des élus et leur demande répétée d'un remboursement immédiat de cette dette, c'est ce même échéancier qui a de nouveau été présenté en séance le 26 novembre 2009 13 ( * ) . - Le treizième mois Le débat porte sur la compensation du treizième mois qui est versée dans certaines collectivités mais qui n'existe pas dans la fonction publique d'État. La parité « élus » de la CCEC a souhaité que cette question soit tranchée par le Conseil d'État en sa qualité de conseil juridique du Gouvernement. Le Premier ministre a donc, en juin 2006, saisi le Conseil d'État. Celui ci a rendu son avis le 29 août 2006. Mais le Conseil d État a considéré que « la charge supplémentaire, supportée par celles des collectivités et ceux des établissements qui avaient mis en place, avant l'entrée en vigueur de la loi du 26 janvier 1984, des avantages ayant le caractère de complément de rémunération mentionnés à l'article 111 de cette dernière loi (le treizième mois) (...) n'est donc, en tout état de cause, pas au nombre de celles dont les dispositions précitées imposent la compensation financière par l'État ». A la demande de la parité « élus », un nouvel arbitrage du Premier ministre a été sollicité sur cette question mais la position donnée lors du premier arbitrage a été confirmée. - Les contrats aidés Les élus considèrent que l'État assurait l'exercice des compétences transférées en recourant à des contrats emploi solidarité (CES) - contrats emploi consolidé (CEC). Ceux-ci sont donc, selon la parité « élus », une composante à part entière des moyens que l'État consacrait à l'exercice des compétences transférées. L'État se doit donc, selon les élus, de transférer la totalité de ces moyens, y compris la part dite « politique de l'emploi ». Or, l'État considère que la politique de l'emploi, à laquelle l'Éducation nationale contribuait, n'a pas été décentralisée et qu'en transférant la seule part « employeur », l'État transfère bien la totalité des moyens qu'il consacrait. L'arbitrage du Premier ministre a confirmé la position initiale du Gouvernement même si des mesures ont été adoptées en faveur des contrats aidés dans le cadre du plan de relance (+ 260 000 contrats supplémentaires) pour permettre une baisse des coûts des contrats pour les employeurs du secteur non-marchand. - Le surcoût lié pour les collectivités territoriales à l'augmentation des cotisations retraite : En ce qui concerne enfin la question du surcoût lié pour les collectivités territoriales à l'augmentation des cotisations retraite pour les personnels détachés, les collectivités territoriales devront supporter le surcoût lié à l'augmentation du taux de cotisation, même si elles devraient être gagnantes à terme, au fur et à mesure des départs à la retraite et de leur remplacement par des agents qui se verront appliquer le taux de la CNRACL. Source rapport 2005-2009 CCEC |
On constate d'abord une lecture différente des dispositions de l'article 72-2 de la Constitution , comme l'illustre l'exemple récent de la mise en place du fonds national de protection de l'enfance (FNPE) et par une connaissance tardive, par les administrations d'État, de la situation budgétaire des collectivités territoriales en général, et des départements en particulier.
Une autre lacune du mécanisme de compensation financière réside dans la non-intégration des modifications législatives intervenues en matière de personnels. L'État a juste pris en compte ce que les personnels lui coûtaient sans considération des écarts entre gestion d'État et gestion par les collectivités territoriales.
Par ailleurs, l'intervention de la CCEC s'est trouvée circonscrite . L'essentiel des débats actuels en matière de compensation des transferts ou d'accompagnement financier des créations ou extensions de compétences porte aujourd'hui sur des domaines qui, en l'état, ne relèvent pas du champ de la CCEC ; il en va ainsi, notamment, du FNPE, des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) et de la prestation compensatoire du handicap (PCH).
Surtout la méthode au sein de la CCEC s'est révélée trop unilatérale. Toutes ces informations étant détenues par les administrations d'Etat, les collectivités territoriales ont eu beaucoup de mal à argumenter leurs désaccords puisque les sources d'information relevaient de l'Etat. Or toutes les collectivités constatent des écarts de plusieurs millions d'euros qui se cumulent chaque année.
Pour la compensation relative aux agents TOS, par exemple, on constate que la définition du montant de la compensation pour les agents TOS a été établie par le Ministère du Budget. Les collectivités territoriales n'ont pas eu accès au détail du calcul, ni même parfois le rectorat. Le flou concernant les agents s'explique aussi, comme l'a indiqué la Cour des comptes dans son rapport de 2009, par une réaffectation de certains agents qui concourt à une grande opacité.
b) Des transferts structurellement inflationnistes
Les caractéristiques d'une gestion de proximité sont naturellement sources de charges nouvelles.
(1) Les exigences du service public de proximité
Dans le rapport de l'Observatoire de la décentralisation fait en 2006, à la question « Estimez-vous que votre collectivité aura à supporter une charge nette due aux transferts de personnels TOS cette année (en 2006) ? », les collectivités interrogées répondaient déjà oui à plus de 92%. Pour les personnels DDE, les compensations financières étaient déjà jugées insuffisantes pour 60% des départements interrogés.
Pour l'avenir, 100 % des départements avaient répondu que leur charge nette serait accrue. Les principales causes avancées étaient : les créations de postes notamment d'encadrement; l'acquisition ou la rénovation des locaux; les frais informatiques et de fonctionnement divers; les frais d'assurances et de contentieux; les avantages sociaux (tickets restaurant, médecine préventive, formation, action sociale...) ; les travaux à entreprendre pour la mise à niveau et les investissements sur les routes transférées...
La simple question du réseau informatique , qui peut être citée en exemple, a un impact notable. Les collectivités ont mis en place des projets d'informatisation comprenant l'installation de postes informatiques spécifiquement dédiés aux agents TOS dans les établissements. Ces postes ont vocation à donner accès à l'intranet, à la messagerie personnalisée, à la bourse de l'emploi pour la mobilité, au catalogue de formation.
Par ailleurs la nécessité d'une mise à niveau des services avec la constatation de nombreuses disparités, notamment dans les ratios personnels/élèves a un impact immédiat.
Grâce aux bilans dressés spontanément par les collectivités 14 ( * ) , on sait aujourd'hui que les dépenses de suppléance, d'action sociale, de recrutement de personnels support, d'assurances, pour les TOS ne sont pas complètement couvertes.
Pour les autres agents (ex DDE), les postes d'assurances statutaire et de véhicules, la gestion du recrutement, le coût des fluides, habillement, téléphonie ainsi que les indemnités de service fait et de vacations sont insuffisantes.
Les bilans varient bien entendu selon les collectivités. Pour le département du Tarn par exemple (chiffre donné par M. Thierry CARCENAC, Président de la CCEC) le déficit entre les dépenses et les recettes de compensation pour les transferts de personnels pour le seul exercice 2010 dépasse 3 M€.
Mais ces bilans ne peuvent pas encore chiffrer, à l'heure actuelle, l'ensemble des effets sur les autres services départementaux ou régionaux qui sont ressentis quotidiennement par les élus locaux.
(2) L'exemple du forfait d'externat
L'exemple du forfait d'externat est révélateur de ces problèmes d'évaluation et de méthodologie.
Entré en vigueur le 1 er janvier 2007, le transfert aux collectivités de la contribution de l'Etat au financement des dépenses de rémunérations des personnels de TOS afférentes au forfait d'externat n'est réellement devenu effectif qu'à compter de l'année 2008-2009.
Les arrêtés interministériels fixant le montant de la compensation ont donc été approuvés par la CCEC sous réserve d'un engagement de l'État de réexaminer ces montants, le cas échéant, sur la base des effectifs des établissements d'enseignement privés constatés à la fin de l'année scolaire 2006/2007, afin de comparer les éventuels écarts et de maintenir un principe de parité enseignement public/enseignement privé au niveau national pour le calcul des différents taux à l'issue de la période transitoire liée à l'exercice du droit d'option par les personnels TOS.
Conformément aux engagements pris, le ministère de l'Éducation nationale a réalisé une enquête dont il a présenté les résultats aux membres de la CCEC lors de la séance du 11 décembre 2007. Elle fait apparaître une adéquation « quasi parfaite », selon ce ministère, entre la compensation du transfert de la part « TOS » du forfait d'externat et les dépenses des collectivités territoriales.
Or, les élus ont constaté une augmentation du coût de ce forfait qui varie de 40 à 60%, à effectifs constants et sans relation apparente avec l'évolution de la masse salariale des TOS de l'enseignement public.
Les élus considèrent qu'ils subissent un changement de règles de calcul applicables, qui seraient passées d'un principe forfaitaire national à une évaluation locale au coût réel. Ils ont ainsi expressément demandé la réintroduction de taux nationaux uniformes identiques à ceux qui ont présidé au calcul de la compensation initiale ou, à défaut, la compensation des charges résultant des taux calculés localement.
Il leur a été rappelé que, avant comme après la décentralisation du calcul de la part « TOS » du forfait d'externat, le principe de parité entre enseignement public et enseignement privé s'applique.
Un groupe de travail technique s'est de nouveau réuni le 21 juin 2010 pour débattre des éléments de calcul, à savoir :
- la détermination de la quotité de travail dédié à l'externat par les personnels TOS dans le public (moyenne pondérée de 31,38%) ; elle soulève notamment la question de l'évaluation par l'État du temps de travail que consacre les personnels TOS à l'externat et celle des instruments objectifs de mesure de ce temps ;
- la prise en compte de la masse salariale de référence (2006) ainsi que des charges sociales fiscales et sociales des établissements d'enseignement privés;
- la pondération par effectifs d'élèves ;
- la répartition entre les départements et les régions.
Mais les élus maintiennent leurs objections, déplorant l'existence d'un différentiel important entre la compensation et le coût réel du forfait d'externat constaté localement, et ont saisi le ministre de l'Éducation nationale.
Du côté du ministère concerné, on admet que les collectivités sont doublement perdantes (au moment du transfert et aujourd'hui) du fait de l'application stricte du principe de parité enseignement public/enseignement privé, toute augmentation du coût de l'externat dans le public (régime indemnitaire, contrats aidés, charges sociales) se répercutant mécaniquement sur la « part TOS » du forfait d'externat à verser aux établissements d'enseignement privés.
* 11 Sans compter l'impact de la dégradation possible des comptes de la CNRACL en fonction de la nouvelle pyramide des âges des nouveaux entrants.
* 12
Source : La CCEC, Rapport d'activité 2005-2009 |
* 13 Les revendications des élus ont alors trouvé un écho direct au Parlement, dans la mesure où le président de la CCEC, député du Tarn, a fait adopter avec l'avis favorable de la commission des finances de l'Assemblée nationale deux amendements au projet de loi de finances rectificative (PLFR) pour 2009 prévoyant le règlement immédiat de la dette des emplois vacants (11,06 M€) et disparus (2,6 M€) du ministère des Affaires sociales, à l'égard des départements (13,15 M€) et des régions (0,53 M€).
* 14 Dans le département du Tarn, un bilan détaillé est disponible des charges résultant du transfert des compétences