B. LES RÉPONSES APPORTÉES PAR LA CRPRATP

1. Dans l'ensemble, des recommandations suivies d'effets...

S'agissant des trois premières recommandations portant sur la gestion de la CRPRATP , votre rapporteur spécial a été informé de la mise en oeuvre des actions suivantes :

- une convention d'objectifs et de gestion entre l'Etat et la CRPRATP couvrant la période 2009-2012 a été signée le 9 octobre 2009 ;

- la suppression progressive de la version imprimée du bulletin de pension permettra une baisse substantielle des frais d'affranchissement ;

- par ailleurs, des services dématérialisés permettront dès 2010 à l'ensemble des affiliés actifs de procéder, en ligne, à la simulation de leurs droits au régime spécial et d'accéder à leurs données personnelles.

S'agissant du financement du régime spécial, votre rapporteur spécial constate que seules les recommandations 4 et 6 ont été mises en oeuvre par le Gouvernement et la CRPRATP :

- le versement des acomptes mensuels de la subvention de l'Etat est dorénavant effectué par le ministre chargé des transports dans les délais, permettant ainsi à la caisse de ne plus procéder à aucun emprunt depuis 2008 ;

- la CRPRATP a procédé à un chiffrage des économies escomptées de la réforme du régime spécial dès l'examen du projet annuel de performances pour 2010 de la mission « Régimes sociaux et de retraite » 37 ( * ) .

A la lumière des estimations fournies par la CRPRATP en octobre 2009, votre rapporteur spécial avait ainsi pu constater que la réforme du régime de retraite spécial de la RATP produirait également une économie, mais beaucoup plus mesurée que dans le cas du régime spécial de la SNCF , et à compter de 2015 seulement. En 2020, le gain ne serait que de 23 millions d'euros, qui ne représenteraient que 2,2 % du total des pensions servies.

Prestations de retraite à servir dans le cadre du régime de la RATP

(en millions d'euros)

Année

Avant réforme des droits

Après réforme des droits

Ecart

2010

899,3

900,3

0,9

2011

916,1

917,6

1,6

2012

954,3

956,8

2,5

2013

993,2

995,9

2,7

2014

999,8

1 002,0

2,2

2015

1 007,9

1 007,0

- 0,9

2016

1 020,1

1 013,9

- 6,2

2017

1 032,9

1 020,0

- 12,9

2018

1 044,8

1 026,6

- 18,1

2019

1 054,7

1 033,8

- 20,8

2020

1 061,6

1 038,6

- 23,0

Source : réponses au questionnaire budgétaire

De son côté, la RATP a procédé, en septembre 2010, à un chiffrage du surcoût induit par les mesures salariales d'accompagnement de la réforme . A l'instar de ce qui s'est déroulé pour la SNCF, et toutes choses égales par ailleurs, les négociations tripartites Gouvernement - RATP - organisations syndicales, menées en 2007, ont acté l'allongement de la durée d'activité et décidé d'assouplir les effets de la réforme pour les salariés.

Les mesures de reconnaissance de l'allongement de la durée d'activité se concrétisent :

- par la création de deux nouveaux échelons d'anciennetés en 2012, puis en 2014, acquis respectivement à 26 et 28 années d'ancienneté.

- et par l'attribution de points de rémunération dits « points retraites », qui, associés au bénéfice des deux nouveaux échelons, conduiront à majorer le taux de remplacement de la pension de 3,75 %. Cette mesure, attribuée sous réserve de justifier d'au moins 28,5 ans d'ancienneté sera mise en oeuvre progressivement sur trois ans, à compter de 2014, afin d'en étaler les coûts.

Par ailleurs, afin d'accompagner les salariés ayant construit un projet de vie et dont le départ est prévu entre juillet 2008 et juin 2012, l'entreprise a mis en oeuvre une « mesure transitoire 2008-2012 » visant à majorer la rémunération de fin de carrière de façon à compenser la baisse tendancielle de la valeur de l'annuité résultant de l'augmentation de la durée de cotisation.

Ces mesures devraient entraîner un surcoût de masse salariale pour la RATP de 10,5 millions d'euros dès 2012 , alors même que la réforme de 2008 n'aura à cette date produit aucune économie. A compter de 2015, cette charge supplémentaire devrait atteindre près de 14 millions d'euros. Le tableau comparatif ci-dessous montre que de 2015 à 2018, les économies issues de la réforme de 2008 seront inférieures aux surcoûts salariaux .

Tableau comparatif des économies issues de la réforme de 2008
et du coût des mesures salariales d'accompagnement de 2015 à 2020

(en millions d'euros)

Année

Economies pour le régime spécial

Coût des mesures salariales d'accompagnement pour la RATP

2015

0,9

13,9

2016

6,2

13,3

2017

12,9

13,9

2018

18,1

14,3

2019

20,8

14,6

2020

23,0

15,0

Source : commission des finances d'après les données transmises par la RATP
et la CRPRATP

2. ...mais un objectif majeur de la création de la CRPRATP qui n'a toujours pas abouti : l'adossement au régime général

La recommandation n°5 « Relancer d'urgence la procédure d'adossement au régime général et aux régimes complémentaires » est restée lettre morte.

Les décrets du 26 décembre 2005 relatifs à la réforme du financement du régime spécial de retraite de la RATP ont prévu un adossement de ce régime spécial sur le régime général et sur les régimes complémentaires ARRCO et AGIRC.

C'est en application de ce changement de système que les taux de cotisations vieillesse ont été modifiés dès la création de la CRPRATP en 2006, quittant notamment le niveau de cotisation salariale de la fonction publique (7,85 %) pour s'établir à 12 % 38 ( * ) .

La réforme du financement et l'adossement sur les régimes de droit commun avait pour but d' améliorer l'assise financière du régime spécial , du fait de la mutualisation avec des régimes de retraite à base démographique plus large, et de prévoir des taux de cotisation salariale et patronale en phase avec les autres entreprises de droit privé du secteur.

Le schéma de principe de l'adossement de la CRPRATP au régime général

L'adossement a pour conséquence de limiter le financement par le budget de l'Etat d'une part aux seules prestations spécifiques du régime - les prestations de retraite « de droit commun » étant alors payées par la CNAV, l'AGIRC et l'ARRCO à la caisse - et, d'autre part, au versement de la soulte due à la CNAV pour compenser l'écart entre les prestations et les cotisations des régimes CNAV et RATP.

La définition de ces flux financiers doit ainsi conduire à contenir l'intervention de l'Etat au seul financement du « régime chapeau » correspondant aux droits spécifiques des retraités de la RATP selon le schéma de principe présenté ci-dessous.

Source : CRPRATP

La neutralité financière de l'opération devait être assurée par une soulte dont le montant avait été estimé entre 500 et 700 millions d'euros . Les conditions de l'adossement devaient faire l'objet de négociations avec la CNAV en vue d'un aboutissement de la procédure en 2007. Or, celle-ci demeure interrompue depuis cette date.

Si le principe de l'adossement n'a pas été remis en cause, Eric Woerth, alors ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, avait fait valoir en 2008 que ce dossier nécessitait un accord de la Commission européenne et que le montant de la soulte à octroyer au régime général d'assurance vieillesse n'était toujours pas fixé 39 ( * ) . Tout en reconnaissant qu'aucune date ne pouvait être avancée pour la réalisation de l'adossement, il avait indiqué que l' économie qui en résulterait s'élèverait à environ 30 millions d'euros par an.

Cette opération était alors suspendue à une décision de la commission de Bruxelles sur la question de savoir si la création de la caisse présentait ou non le caractère d'une aide illicite à la RATP. Par ailleurs, la caisse nationale d'assurance vieillesse avait suspendu les négociations d'adossement dans l'attente de la décision européenne.

Or, cet obstacle a été levé en 2009, la Commission européenne ne posant pas d'obstacle à la création de la Caisse de Retraite du Personnel de la RATP 40 ( * ) . Depuis, votre rapporteur spécial ne cesse de réitérer sa recommandation tendant à la reprise du projet d'adossement et du processus de détermination du montant actualisé de la soulte qu'aura à verser l'Etat.

Au final, votre rapporteur spécial observe que le dossier n'a guère progressé depuis l'enquête effectuée auprès de la caisse de retraite du personnel de la RATP en juin 2008 et que, de ce fait, le financement des charges de retraites repose toujours sur les seules cotisations sociales vieillesse et la dotation d'équilibre de l'Etat .


* 37 Rapport spécial n° 101 - tome III - annexe 24 (2009-2010) « Régimes sociaux et de retraite, Compte spécial pensions ».

* 38 Le taux de cotisation vieillesse employeur est dans le même temps passé de 15,34 % à 18 %.

* 39 Audition par votre commission des finances le 3 juillet 2008 dans le cadre de l'examen du projet de loi de règlement des comptes pour 2007.

* 40 La Commission européenne a notifié le 13 juillet 2009 cette décision aux autorités françaises : la création de la Caisse de Retraite du Personnel de la RATP (CRPRATP) constitue une aide compatible avec les règles communautaires sous condition que la réforme du régime spécial de retraite de la RATP soit entièrement mise en oeuvre.

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