TRAVAUX DE LA COMMISSION AUDITION POUR SUITE À DONNER
COMMISSION DES FINANCES
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Présidence de M. Jean Arthuis, président
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Mardi 28 septembre 2010
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Ordre du jour
• Audition pour suite à donner à l' enquête de la Cour des comptes , transmise en application de l'article 58-2° de la LOLF, sur les participations de la Caisse des dépôts et consignations dans l' économie mixte locale (ouverte aux membres de la commission des lois, de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, et à la presse).
M. le président - Mes chers collègues, nous allons procéder à une nouvelle « audition de suivi » d'une enquête réalisée par la Cour des comptes en application de l'article 58-2 de la LOLF. Celle-ci concerne les participations de la Caisse des dépôts et consignations dans l'économie mixte locale.
Nous avons invité à cette audition nos collègues de la commission des lois, qui ont récemment examiné la loi pour le développement des sociétés publiques locales, dont notre collègue Jacques Mézard était le rapporteur et nos collègues de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation.
Je vous rappelle que notre réunion est ouverte à la presse.
Cette audition a une double raison d'être, puisqu'elle fait également suite à la transmission, à notre commission des finances, d'un rapport particulier de la Cour des comptes.
Je vous rappelle que nous avions décidé, lors du séminaire de la commission qui s'est tenu en 2007 au Mans, en présence du Premier président, Philippe Séguin, de procéder à un suivi plus systématique des rapports particuliers et référés qui nous sont transmis par la Cour des comptes et qui ne font pas l'objet d'une publicité, sauf insertion ultérieure dans le rapport public annuel.
La demande d'enquête est venue compléter et actualiser le rapport particulier dont les travaux avaient débuté en 2008 et dont les conclusions, nous le verrons, avaient inspiré la Caisse des dépôts et consignations dans la réforme de certaines procédures.
Nous aurons ainsi le privilège de constater que certaines recommandations sont d'ores et déjà suivies d'effets.
Outre l'actualisation de l'étude sur le pilotage des sociétés d'économie mixte de la Caisse des dépôts et consignations, déjà engagée par la Cour des comptes, la demande d'enquête 58-2 visait principalement à apporter trois séries d'informations :
- établir une typologie des SEM concernées ainsi qu'un bilan de la diversité de leurs statuts et de leur évolution juridique ;
- mesurer la valeur ajoutée apportée par la Caisse des dépôts et consignations dans ce type d'activité au regard de la gouvernance ou des modes de financement et apprécier la sincérité de la traduction dans les comptes et les budgets des partenaires, notamment des collectivités territoriales, de l'appui de la Caisse des dépôts et consignations ;
- porter une appréciation sur la nouvelle doctrine d'intervention de la Caisse des dépôts et consignations, sur sa politique d'arbitrage sur le stock de participations et sur les problèmes liés à l'application du droit de la concurrence.
A cette fin, nous recevons, pour la Cour des comptes :
- le Président de la première chambre, M. Christian Babusiaux ;
- MM. Jean de Gaulle et Emmanuel Duret, conseillers maîtres, et Mme Martine Ullmann, rapporteur.
La Caisse des dépôts et consignations est représentée par :
- M. Michel Bouvard, président de la commission de surveillance.
- M. Augustin de Romanet, directeur général ;
Mme Bricq est également membre de la commission de surveillance mais elle siège ici en sa qualité de commissaire des finances.
La direction générale du Trésor, autorité de tutelle de la Caisse des dépôts et consignations, est représentée par M. Hervé de Villeroché, chef du service du financement de l'économie.
Il nous a également paru utile de solliciter la direction générale des collectivités locales, qui est représentée par M. Bruno Delsol, adjoint au Directeur général des collectivités locales.
J'ai pour ma part une double préoccupation concernant la question abordée par l'enquête de la Cour des comptes.
Je souhaite, en premier lieu, qu'elle permettre de fournir des informations fiables sur un secteur d'activité qui forge, depuis longtemps, des relations que j'aurais envie de qualifier de complices entre les collectivités territoriales et la Caisse des dépôts et consignations.
Il est important, me semble-t-il de prendre la mesure de l'importance - ou de la modestie - des sommes en jeu et d'appliquer à ce secteur un minimum de principes de gestion, en toute connaissance de cause.
Je suis conscient que la présence des représentants de la Caisse des dépôts et consignations dans les conseils d'administration des SEM est un apport considérable à la bonne gouvernance des dites sociétés.
Dans le rapport particulier qu'elle a transmis à la commission des finances, la Cour des comptes notait en particulier que pour 12 % du portefeuille, en volume, le taux de participation de la Caisse est inférieur à 5 % et le montant investi inférieur à 15.000 €. Elle mettait l'accent également sur un taux de rendement très faible, de l'ordre de 0,3 à 0,4 % pour les seules SEM qui distribuent des dividendes -toutes ne le font pas.
Elle faisait état enfin d'une caractérisation des risques peu satisfaisante qui plaçait 40 % des SEML sous statut de sensible.
Ces observations conduisent évidemment à souligner le caractère de quasi-subvention des participations de la Caisse des dépôts et consignations dans l'économie locale. Manifestement, une certaine évolution est en train de se faire jour, à l'initiative de la Caisse, stimulée par la Cour des comptes. Il est souhaitable d'en faire le point.
Ma seconde préoccupation porte sur la volatilité de l'environnement juridique qui a connu deux mouvements majeurs : d'une part le durcissement des contraintes de mise en concurrence, à la fois interne et européenne et d'autre part l'apparition de nouvelles structures qui s'ajoutent ou se substituent aux SEM.
La Caisse des dépôts et consignations pour sa part, intervient dans l'économie locale en usant d'autres formules juridiques - SA, SAS, SCI, sociétés de projet - tandis que les collectivités territoriales souhaitent plus d'autonomie et de simplicité dans les procédures en utilisant des sociétés publiques locales, sortes de quasi - régies. La question posée est donc bien celle de l'avenir de ce mode d'intervention qui n'est peut - être plus adapté à notre temps.
Afin de préserver une possibilité effective de dialogue et de débat, je demande que les interventions liminaires de chacun se limitent aux observations principales.
La parole sera successivement :
- aux magistrats de la Cour des comptes d'abord ;
- aux représentants de la Caisse des dépôts et consignations ensuite, pour leurs observations sur les analyses présentées par la Cour des comptes ;
- enfin aux représentants de la direction générale du Trésor et de la direction générale des collectivités locales.
Chaque commissaire qui le souhaitera pourra enfin poser ses questions.
Je rappelle aux membres de la commission des finances que nous aurons, à l'issue du débat, à prendre une décision sur la publication de l'enquête de la Cour des comptes au sein d'un rapport d'information.
La parole, pour commencer, est donc au président Christian Babusiaux.
M. Christian Babusiaux - Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Sénateurs, les travaux menés par la Cour à la demande de votre Commission et qui font l'objet de cette séance s'inscrivent dans le prolongement de ceux qu'elle a menés il y a quelques mois de sa propre initiative sur le pilotage des participations de la Caisse des dépôts et consignations dans les sociétés d'économie mixtes locales.
Ces investigations ont donné lieu à un rapport particulier au sens de notre procédure de contrôle des entreprises publiques, dont la synthèse est jointe à la communication de la Cour.
Ce rapport particulier comporte dix-neuf recommandations. Il a d'ores et déjà permis que s'enclenche un processus d'améliorations en matière de contrôle interne et de pilotage du portefeuille, qu'il s'agisse du système d'information de gestion des métiers, du suivi des SEM sensibles et de la politique de provisionnement, des processus d'engagement ou encore de la prévention des risques. Ces améliorations ont déjà pu être constatées par la Cour à l'occasion de l'enquête que vous lui avez demandée.
En outre, dans le rapport rédigé à la demande de votre Commission, la Cour s'est efforcée d'approfondir d'autres points, notamment l'apport des sociétés d'économie mixte locales au développement local et la nouvelle doctrine d'intervention définie par la Caisse dans son plan stratégique « Elan 2020 ».
Notre rapport prend aussi en compte les évolutions juridiques récentes que vous avez rappelées et le point de vue des principales associations de collectivités territoriales.
Cette communication comporte quatre points saillants.
Tout d'abord, la présence de la CDC au capital des SEML résulte largement de l'histoire et son importance relative est désormais assez limitée
La CDC dispose aujourd'hui d'un portefeuille de 442 participations, d'une valeur de 222 millions d'euros en coût historique et de 590 millions d'euros en quote-part d'actif net comptable détenu. Elle est ainsi présente au capital de 42 % des SEML recensées par la fédération des entreprises publiques locales.
L'importance de ce portefeuille de SEML de la Caisse des Dépôts est toutefois à relativiser ; il ne représente en effet qu'un peu plus de 1 % de la valeur d'acquisition des participations de l'établissement public au 31 décembre 2009.
Ce portefeuille résulte de la sédimentation de plusieurs époques et porte fortement la marque de la période de reconstruction d'après-guerre et de la politique d'aménagement du territoire des années 1960.
Cet investissement est concentré dans le secteur de l'immobilier résidentiel - qui représente en valeur la moitié des participations de la Caisse - et dans quelques régions : Ile-de-France, Rhône-Alpes, Provence-Alpes-Côte-d'Azur et Pays de Loire, sans oublier l'Outre-mer.
En nombre de participations, c'est le secteur de l'aménagement qui domine, puisque la Caisse est présente au capital de plus de 60 % des SEML d'aménagement.
Ce portefeuille comprend par ailleurs près d'un tiers de SEML dites « faîtières » - 127 - qui détiennent elles-mêmes près de 320 participations aux statuts juridiques très variés dont la Caisse est souvent un actionnaire direct par ailleurs.
La structure du portefeuille traduit avant tout la volonté de la Caisse de répondre aux sollicitations des collectivités locales, sans avoir toujours su - du moins jusqu'à une période récente - faire prévaloir des axes stratégiques. Il en est résulté un portefeuille qui peut sembler hétérogène, du fait d'une forte dispersion des montants investis, des taux de détention et d'une grande diversité des SEML de gestion.
Pour autant, ce portefeuille n'est cependant pas un simple héritage historique. Il permet encore à la Caisse et à ses filiales d'entretenir un réseau local, essentiel dans le secteur de l'économie mixte. Elle s'est d'ailleurs attachée à mettre fin aux situations de conflit d'intérêt qui avaient parfois été dénoncées antérieurement par les chambres régionales des comptes. Plusieurs sociétés du groupe Caisse des Dépôts, prestataires des SEML, avaient adopté de très longue date un modèle de travail en réseau qui n'était pas dépourvu d'ambigüités. Il y a été largement remédié mais, ça et là, subsistent des risques de conflits d'intérêt.
Second point saillant : les risques financiers supportés par l'actionnaire Caisse des Dépôts restent limités
L'implication de la CDC dans l'économie mixte locale ne consiste pas seulement dans des prises de participation minoritaires mais également dans l'octroi de prêts sur fonds d'épargne pour 5,2 milliards d'euros en 2009 et de prêts de la direction bancaire pour 339 millions d'euros.
Cependant, ces activités d'investisseur, de prêteur sur fonds d'épargne et de banquier court terme, présentent des risques limités et globalement maîtrisés.
En effet, les processus d'engagement s'appuient sur des procédures et des délégations de compétence normées et bien rodées. Le dispositif de contrôle interne a beaucoup progressé depuis 2008. Les prêts sur fonds d'épargne sont, en outre, couverts par de larges garanties publiques. La limitation des risques de la Caisse au titre de son activité bancaire repose quant à elle sur la connaissance précise des SEML par le réseau, même si elle n'exclut pas tout risque de défaut.
Le réseau bancaire ne cherche pas, de surcroît, à conquérir des parts de marché au détriment de la maîtrise de ses risques. Le risque investisseur est également limité par le taux de détention du capital toujours minoritaire des SEML.
La contrepartie est évidemment que l'essentiel du risque éventuel demeure sur les collectivités et leurs groupements en leur qualité de garants.
Pour ce qui concerne la Caisse, un processus d'amélioration du contrôle interne et la mise en oeuvre des règles prudentielles dites de « Bâle II » conduisent également à limiter les risques liés à ce portefeuille.
Troisième point : l'environnement juridique et financier dans lequel s'inscrivent les SEML et leurs actionnaires est instable
Il s'agit en premier lieu du contexte juridique. Vient en effet d'intervenir la loi du 28 mai 2010 relative au développement des sociétés publiques locales. Son impact sur le portefeuille reste difficile à appréhender avec précision.
Nous avons auditionné beaucoup d'acteurs ; on voit bien que l'impact exact ne pourra se dégager que d'ici une bonne année.
Il semble cependant que les transformations de SEML en SPL ou en SPLA seront plus nombreuses pour les petites SEML municipales et dans le secteur de l'aménagement que pour les autres sociétés.
Le souci des collectivités de travailler avec des aménageurs qu'elles ont elles-mêmes créés et qui leur sont propres devrait en effet les conduire à utiliser les nouvelles possibilités ouvertes par la loi. Parallèlement, les communes pourraient transformer de petites SEML en SPL pour simplifier leur gouvernance.
Tout aussi important que l'environnement juridique est le contexte financier : les acteurs de l'économie mixte évoluent dans un contexte marqué par des contraintes financières fortes, aussi bien pour la Caisse que pour les collectivités.
La CDC attend désormais de ses investissements une rentabilité financière à long terme, alors que pour l'instant son portefeuille ne génère que très peu de dividendes. Elle prévoit même d'autofinancer à l'avenir une part importante de ses investissements dans le secteur de l'économie mixte. La Caisse souhaite donc accroître la rotation de son portefeuille par la mise en oeuvre d'une politique de rationalisation, visant à se recentrer sur les SEML à enjeux, ce qui constitue une rupture par rapport au passé.
Elle se heurte cependant au caractère très illiquide de ce portefeuille. La Cour a également constaté que ce secteur ne représente qu'une faible part des investissements d'intérêt général de la Caisse -entre 1 et 6 % de 2004 à 2009. Cette tendance semble appelée à se confirmer à l'avenir, la Caisse ne prévoyant d'y investir que 3 à 5 % du montant total des investissements d'intérêt général programmés pour 2010 à 2012.
Pour apprécier les évolutions en cours dans ce contexte juridique et économique évolutif mais contraint, il faut tenir compte de la stratégie désormais clarifiée par la Caisse.
L'effort de clarification a permis de rendre plus lisibles les doctrines d'action de la Caisse des Dépôts comme investisseur avisé d'intérêt général, pour reprendre l'expression utilisée par la Caisse. Cette clarification des principes d'intervention s'est accompagnée de la réorganisation, en 2008, de la direction compétente de la CDC, avec notamment la création d'un département dédié.
Grâce à la professionnalisation du métier d'investisseur et depuis l'instauration d'un corps de doctrines d'action, l'Etablissement public est en mesure de mieux affirmer ses principes d'intervention dans les projets structurants des collectivités territoriales et de rationaliser les différents segments de son portefeuille de SEML par une politique d'arbitrage des lignes non stratégiques.
Les investissements sont désormais concentrés sur les secteurs mis en avant dans le plan stratégique Elan 2020 -les universités, l'économie de la connaissance, le développement durable et les énergies renouvelables, le développement numérique du territoire, le logement et la politique de la ville - sans que la forme juridique utilisée soit nécessairement une SEML.
La nouvelle stratégie de la Caisse la conduira à restreindre sa participation à un nombre limité de projets, sélectionnés non seulement en fonction de leur rentabilité financière à long terme mais aussi sous l'angle de leur efficacité socioéconomique, que la Caisse cherche désormais à mesurer.
Pour ce faire, elle a développé une grille de cotation d'intérêt général des projets, qui mérite encore d'être affinée. Elle met également l'accent sur sa participation à la gouvernance des SEML, au travers d'une charte de l'administrateur et de pactes d'actionnaires. Ces derniers restent toutefois à ce jour peu nombreux.
Le succès de ces nouvelles orientations reste un objectif de long terme. Au plan local, la Caisse se trouve en effet sollicitée par les collectivités et doit aussi tenir compte des contingences locales. Elle doit dans le même temps gérer un stock de participations anciennes, faiblement rentables et peu liquides. Enfin, la démarche d'évaluation des investissements d'intérêt général doit être développée.
Tels sont, Monsieur le Président, les points saillants de cette communication. Globalement, elle me semble relativiser les risques encourus par la Caisse, constater que des efforts très réels ont été réalisés par celle-ci pour rationaliser ses participations, montrer que les évolutions juridiques, financières et stratégiques convergent vers une diminution de l'importance de ce réseau et dégager les directions dans lesquelles les améliorations doivent à notre sens être poursuivies.
M. le président - Merci.
Nous avions bien noté vos quatre observations principales.
Il ne s'agit donc pas d'un enjeu financier mais d'un ticket de partenariat local, d'une quasi subvention à l'animation économique locale.
La parole est au président de la commission de surveillance de la CDC.
M. Michel Bouvard - La commission de surveillance a la chance de bénéficier de la présence de magistrats de la Cour mais également de ses rapports au titre du contrôle des entreprises publiques de l'Etat.
Le rapport sur les SEM de 2008, comme tous les rapports de la Cour, donne lieu à un suivi par la commission de surveillance qui y consacre l'une de ses séquences chaque année. Dès nos premiers échanges, une partie des travaux ont été utilisés pour conforter la démarche engagée par la commission de surveillance en début de mandature, en parfaite harmonie avec le directeur général, afin d'améliorer la mesure des investissements de la Caisse ainsi que leur qualité.
Je m'interroge cependant sur la méthodologie de nos commandes de rapports respectives. Les rapports particuliers ayant vocation à être connus des commissions des finances et mieux exploités, nous avons souhaité que la commission de surveillance ait la capacité d'exprimer un certain nombre de souhaits sur des sujets utiles aux travaux de la commission de surveillance, le Parlement exerçant la tutelle de la CDC et la direction du trésor exerçant la surveillance pour le compte de l'Etat.
Après avoir salué le premier rapport de la Cour et les travaux menés en application de l'article 58-2, qui aboutissent à des conclusions concordantes, je voudrais souligner qu'une partie des observations ont d'ores et déjà été prises en compte avec une réactivité forte et une anticipation de la direction du développement territorial et du réseau, de la direction des fonds d'épargne et de la direction bancaire.
La commission de surveillance a depuis trois ans impulsé cette volonté d'évaluation des mesures quantitatives des investissements, le champ des SEM faisant partie de notre champ de préoccupation mais étant marginal par rapport à la totalité des investissements de la Caisse.
Un certain nombre de recommandations qu'il appartiendra au directeur général de détailler ont été prises en compte ; pour les autres, la nouvelle organisation devrait permettre de concrétiser ces progrès en 2011 et la commission de surveillance devrait bénéficier de davantage d'éléments.
Quant à la motivation des investissements, nous sommes dans le cadre des missions d'intérêt général, qui sont une obligation faite à la Caisse des Dépôts au travers de la LME. Il est somme toute naturel que la recherche de rentabilité soit différente de celle que nous pouvons rechercher sur des portefeuilles d'investissement totalement libres qui permettent à la CDC de dégager un résultat significatif chaque année, de conforter ses fonds propres, d'avoir une capacité d'investissements et de versement d'une contribution à l'Etat.
Pour ce qui est des investissements dans les SEM, il s'agit de permettre l'entrée d'une part de capital privé dans le capital des SEM ; la présence de la CDC est souvent un élément déterminant pour un certain nombre d'acteurs financiers locaux, à commencer par les établissements bancaires des régions concernées.
C'est aussi pour les élus la garantie d'une gouvernance équilibrée, avec des administrateurs qui peuvent apporter une vision extérieure et alerter les responsables des collectivités sur les prises de risques. Dans mon esprit et dans celui de la commission de surveillance, cela n'interdit pas les stratégies. C'est ce qui a été fait en s'efforçant de faire en sorte que les SEM s'inscrivent dans les démarches dès 2020, avec des priorités proposées par la direction générale, à propos desquelles la commission de surveillance a marqué son accord.
Cela n'interdit pas non plus une rotation du portefeuille, même si nous butons sur une certaine illiquidité des titres et qu'il existe aussi une rationalisation de la cartographie des SEM. Il est vrai qu'il est parfois difficile, comme en Languedoc-Roussillon, d'organiser les regroupements dans un délai court et que les prééminences de gouvernances entre collectivités peuvent jouer.
Les recommandations faites au travers du rapport de la Cour ont été soit prises en compte, soit devancées ou ont concordées avec les démarches engagées par la commission de surveillance.
Enfin, la loi de mars 2010 sur la création des SPL qui ne doit pas contaminer les actions de pilotage décidées par la Caisse.
Il existe des doctrines d'investisseurs avisées qui ont été rénovées et qui sont appliquées en région comme au siège, une charte de l'administrateur, une information des directions régionales sur les enjeux de cette nouvelle option, avec le risque d'une double peine pour la Caisse, la dégradation de ses intérêts patrimoniaux détenus dans les SEM au bénéfice de SPL et une décote de la valeur des cessions de SEM qui ne sont pas forcément faciles.
Ceci étant, il faut limiter l'appréhension que l'on peut avoir de cette affaire. Il existe plus de 400 SEM dans lesquelles la CDC est actionnaire avec, en face, 40 SPL ou SPLA. Au travers de nos contacts dans les directions régionales lors d'un certain nombre de déplacements, on s'est aperçu que l'intention des élus locaux était souvent une transformation de régie, un outil permettant de gérer avec plus de souplesse des services municipaux, plutôt qu'une inscription en concurrence par rapport à un certain nombre de SEM dont ils étaient eux-mêmes partenaires.
Ceci étant, le Parlement a adopté cette loi. Ce n'est pas la Caisse qui en est à l'origine ; elle a lancé une analyse sur ce thème pour étudier comment notre action peut s'inscrire dans ce cadre modifié.
La commission de surveillance en sera bien évidemment saisie comme elle l'est chaque année des actions de la direction du développement territorial et du réseau. La dernière séance remonte au 24 mars ; c'est à cette occasion que nous évoquons à présent le sujet des SEM. 1 % des actifs, c'est relativement peu. La prise de risques est limitée -même s'il faut être vigilant à propos de certains secteurs, notamment concernant les SEM d'aménagement, avec les problématiques de portage foncier et quelques modifications législatives et réglementaires qui peuvent avoir des incidences.
Néanmoins, nous sommes sur un sujet qui, tout en étant important dans le monde de l'économie mixte, est limité au regard des missions de la commission de surveillance, qui sont de veiller aux orientations stratégiques de l'établissement et aux risques pris par celui-ci.
M. le président - La transformation des SEM en SPL ne conduit elle pas au désinvestissement, la Caisse ne pouvant alors rester actionnaire ?
M. Michel Bouvard - Il existe deux phénomènes, des créations de SPL et de SPLA et des transformations. Elles portent un risque de « double peine », sachant qu'il y a, compte tenu de l'illiquidité des actions que l'on a dans les SEM, un risque de valorisation insuffisante.
La relation de la Caisse avec les collectivités territoriales, au travers de ses directions régionales, dont elle est un partenaire important en matière d'ingénierie, de co-investissement, limite ce risque. Bien d'autres aspects du partenariat avec les collectivités font que celles-ci ont la sagesse de trouver les bons équilibres.
M. Augustin de Romanet - Tout d'abord, le risque lié à l'importance des SEM dans le portefeuille d'actifs de la CDC est limité. La valeur d'achat était de 238 millions d'euros ; notre valeur d'actif net est estimée à 636 millions d'euros, l'actif à long terme excédant de mémoire 45 milliards d'euros.
Néanmoins, j'ai été frappé en arrivant à la CDC, en 2007, par le fait que la participation au sein des SEM apparaissait comme des biens de mainmorte dont il paraissait légitime de considérer qu'elle avait une valeur de revente aux collectivités locales égale à la valeur nominale des titres. J'ai craint que la connaissance des comptes liés aux SEM soit insuffisante. Ceci nous a conduits à décider de la création d'un infocentre, base informatique permettant de connaître à tout moment la valeur d'actif net des SEM et l'ensemble de leur vie sociale. Cette base permet de connaître les augmentations ou diminutions de capital, les distributions de dividendes, etc.
Ceci nous a permis, lorsqu'un certain nombre d'élus locaux nous ont demandé de vendre leurs parts, de faire valoir nos droits en accordant très peu d'exception. Dans certains cas, il a été nécessaire d'accepter de vendre nos titres en-dessous de la valeur réelle, le milieu local ayant pour coutume de vendre à des prix s'éloignant parfois de cette valeur réelle.
Il est bien entendu souhaitable de continuer à améliorer notre connaissance de la situation financière des SEM.
La Cour a par ailleurs recommandé l'amélioration des procédures de contrôle des risques dans le cadre de nos participations dans les SEM.
Le plan « Elan 2020 », en 2007, a eu pour but de faire en sorte de ne jamais imposer la CDC dans une logique de pouvoir mais de le faire seulement si un élu local nous le demande et si cela correspond à nos priorités stratégiques. C'est pourquoi nous avons établi une grille de cotation des dépenses d'intérêt général, que nous avons exportée auprès du Fonds stratégique d'investissement.
Celle-ci nous permet de savoir si un investissement est utile au regard de deux critères, ceux de l'intérêt général et de l'investisseur avisé. Nous acceptons, pour nos investissements dans les SEM, des taux de rendements équivalents aux plus bas du marché, de 5 % à 6 % à long terme.
Nous partageons donc les recommandations de la Cour quant à l'amélioration des règles de cotation que nous poursuivons.
S'agissant des SPL, le risque est pour nous égal à zéro, n'étant pas dans une logique de pouvoir. Si, demain, l'on nous demandait de vendre nos participations dans les SEM, nous n'y verrions aucun inconvénient.
La structure juridique de la SEM est très utile en ce qu'elle permet à la collectivité locale de se confronter à la logique de marché. Je regrette d'ailleurs que la Fédération des entreprises locales n'ait pas plus de rayonnement national, certaines expériences de SEM étant remarquables en matière d'aménagement urbain ou de développement économique du territoire. La Caisse est fort désireuse de nouer un partenariat solide avec la Fédération.
S'agissant des inconvénients de la transformation d'une SEM en SPLA, la SPLA se prive de l'expertise d'un partenaire financier motivé, qui se doit d'être un investisseur avisé et prive l'investisseur public d'un apport de fonds propres, la CDC n'étant pas limitée pour ce faire.
Comme l'a dit le président Babusiaux, les investissements dans les SEM représentent 3 % à 5 % de nos dépenses d'intérêt général, qui s'élèvent à 500 millions d'euros par an, soit une quinzaine de millions d'euros par an. Si, demain, il y avait une forte demande des collectivités locales pour doubler ce montant, il serait probablement possible d'y accéder. La SPL se prive également de l'effet de levier de l'apport d'actionnaires privés. En outre, il n'existe plus de partage de risques entre actionnaires publics et privés. Elles ne peuvent non plus intervenir en dehors de leur champ de compétences défini par ses statuts, ayant le statut de société in house.
L'absence de mise en concurrence ne pousse pas l'entreprise à la performance. Enfin, il faut déplorer une perte de voix contradictoires entre actionnaires publics et privés au sein des conseils d'administration.
Je ne vois pas pourquoi on devrait se priver de l'outil que constitue la SEM qui, dans beaucoup de cas, est le seul moyen pour une collectivité d'affronter les rigueurs, mais aussi l'efficacité du marché. http://www.senat.fr/senfic/arthuis_jean83011j.html
M. le président - La gestion des SEM - déjà exemplaire - sous la pression de la Caisse, est allée vers l'excellence.
Quelle est la vision qu'a le trésor de l'évolution des SEM ? Vont-elles prendre corps ? La circulaire proposée par M. Marleix va-t-elle enfin être publiée ?
M. Hervé de Villeroché - Nous souscrivons aux conclusions du rapport de la Cour des comptes. Les interventions de la CDC dans les sociétés d'économie mixte locales sont logiques dans le cadre des interventions d'intérêt général de la CDC. Nous partageons l'avis selon lequel ces participations ont longtemps été peu pilotées et que l'attention portée à leur rentabilité a été insuffisante.
Nous estimons également que les risques sont globalement limités. Vous avez indiqué qu'elles étaient gérées comme des subventions : cela reflète bien la réalité historique. Tout l'enjeu est de sortir de cette logique.
De ce point de vue, la mission d'intérêt général n'est pas exclusive d'une recherche de rentabilité et de prise en compte de ses indicateurs. C'est un facteur de sélection des projets. Il n'est pas le seul mais il doit être essentiel. La grille de cotation est à cet égard intéressante. Peut-être les critères doivent-ils davantage inclure des préoccupations de rentabilité financière.
Il me paraît également très important de se fixer un horizon d'investissement. On ne peut entrer dans une SEM parce qu'elle est illiquide et y rester des décennies. Un meilleur taux de rotation du portefeuille me semble donc à rechercher pour ne pas geler des participations qui ont tendance à devenir passives. Or, l'objectif doit être d'amorcer un projet puis de s'en retirer quand la réalisation est mûre.
Ce qui a été entrepris nous semble cohérent avec les conclusions du rapport de la Cour. Nous insistons sur ce point dans le cadre de notre participation à la commission de surveillance, dans le cadre des questions relatives aux investissements de la CDC et plus largement au titre des investissements d'intérêt général. Ce qui a été entrepris va dans le bon sens.
M. Bruno Delsol - Premièrement, selon nous, il faut recommander aux collectivités qui envisagent de créer une SPL sur la base de la loi du 28 mai d'entourer cette création des garanties de conformité avec le droit européen. Les SPL se caractérisent par le fait que la collectivité peut contracter avec elles, sans mise en compétition, contrairement aux SEM, à la condition toutefois que la SPL entre dans le régime de la quasi régie, suivant deux critères : que la collectivité ait sur la SPL un contrôle analogue à celui qu'elle exerce sur ses propres services ; en second lieu, que la société exerce avec la collectivité qui la détient l'essentiel de son activité.
Le deuxième critère est garanti par la loi LMN elle-même; en effet, le législateur a voulu que la SPL réalise avec la collectivité actionnaire la totalité de son activité. En outre, l'action de la société sera limitée au territoire géographique de ses membres. La loi s'est donc donné une marge de sécurité en deçà de la zone d'incertitude éventuelle où se trouve le droit européen. Voilà pour ce que l'on pourrait appeler l'obligation d'exclusivité.
Quant au premier critère, il appelle davantage de développements. Le rapport de M. Mézard rappelle ce qu'est, pour la jurisprudence européenne, le contrôle analogue : la présence d'un actionnaire privé au capital est exclu, la jurisprudence européenne permet que le contrôle analogue soit assuré par plusieurs collectivités ; le contrôle analogue n'est pas obligatoirement un contrôle strictement identique à celui que la collectivité aurait sur ses services ; enfin, la jurisprudence européen raisonne in concreto et apprécie, à travers un faisceau d'indices, la mesure dans laquelle la collectivité contrôle suffisamment la société dont il s'agit.
Dans deux affaires, Parking Brixen et Carbotermo, le juge européen a estimé que le contrôle n'était pas suffisant ; dans une troisième affaire, République italienne, il a jugé qu'il l'était mais en examinant très concrètement la manière dont le contrôle était effectué.
A cet égard, la loi contient des garanties : en premier lieu, la loi interdit la présence de partenaires privés, seules les collectivités ou leurs groupements pouvant être actionnaires de la SPL ; le droit commun des sociétés commerciales garantit un contrôle dans une certaine mesure ; le droit des SEM donne des garanties aux collectivités en ceci qu'elles seront représentées au conseil d'administration.
Mais au-delà du respect formel de ces prescriptions légales, la collectivité, pour être sûre d'être dans le in house, aura avantage à définir précisément les modalités concrètes de son contrôle sur la société.
Deuxièmement, s'agissant de la sécurité juridique des SPL, le rapport de la Cour soulève la question de l'articulation entre la jurisprudence in house et les règles relatives aux aides d'État. S'il y a bien contrôle analogue, ne faut il pas en outre être en règle par rapport aux dispositions encadrent les aides aux entreprises ? Notre sentiment est que la question ne devrait pas se poser : dès lors qu'il y a contrôle analogue, on ne peut s'aider soi-même mais il n'existe toutefois pas de jurisprudence européenne sur ce point, comme le dit la Cour.
Enfin, la Cour conseille indirectement aux collectivités locales de veiller que l'action de la SPL n'ait pas pour conséquence de trop restreindre la concurrence sur le marché dont il va s'agir.
Troisièmement, la Cour consacre des développements à la gestion du risque par la Caisse en indiquant que, dès lors qu'il n'y a plus d'actionnaire privé, le risque pèsera davantage sur la collectivité territoriale. Sans porter d'appréciation sur ce pronostic, il faut rappeler que l'enjeu est bien la maîtrise du risque global, non pas seulement celui que la Caisse subit comme actionnaire ou comme prêteur mais également la maîtrise du risque total subi tant par la Caisse que par les collectivités. Aussi bien, les dispositions légales limitent les garanties d'emprunt que les collectivités ont le droit d'accorder.
Quatrièmement, la question des montages complexes mériterait une attention particulière, par rapport à la maîtrise des risques, notamment pour ce qui concerne les phénomènes de filialisation.
Enfin, la question a été posée de savoir si la SPL peut être une alternative à l'intercommunalité comme support de mutualisation des services pour les communes.
Mon sentiment est que telle n'est pas la vocation de la SPL. Il me semble que la législation actuelle et ses évolutions en cours donnent aux collectivités les moyens de mutualiser leurs services, tout en restant dans le cadre d'institutions de droit public. Le projet de loi de réforme des collectivités territoriales comporte des dispositions à égard. Il sécurise les mises à disposition de services communaux en direction des EPCI. Il leur permet de gérer des services fonctionnels communs aux communes membres. Il prévoit que les EPCI adopteront un schéma de mutualisation de leurs services, tendant à faciliter la mutualisation dans le cadre des EPCI à fiscalité propre. Ces évolutions s'inspirent du rapport de M. Richard, de celui de M. Dallier et de celui de M. Warsmann.
Ces trois dispositions auront été votées en termes identiques par les deux assemblées, lorsque l'Assemblée nationale aura procédé, cet après-midi, au vote solennel pour ce qui la concerne.
M. le président - Au fond, la SPL est une sorte de syndicat mixte...
M. Philippe Marini, rapporteur général - C'est un machin !
M. le président - C'est un instrument supplémentaire. Quoi qu'il en soit, nous n'avons plus de doutes : les participations de la Caisse ne sont en aucune façon des subventions à l'aménagement local mais des participations, gérées comme telles. La plupart gênèrent des plus-values et souvent des dividendes - même s'ils restent modestes.
Cela entretient les bonnes relations entre la Caisse et les collectivités territoriales, ce qui est précieux. Cela renforce le climat de confiance.
Mme Nicole Bricq - J'ai lu attentivement le rapport de la Cour ; j'ai écouté les explications des uns et des autres.
Cela m'amène à deux réflexions : j'ai quelque peu perdu le fil de la saisine de la commission des finances et j'avoue que je ne sais plus très bien ce que nous cherchions !
En second lieu, on s'est peut-être focalisé sur la notion de SPL, qui constitue un nouvel outil juridique. Je pense que nous aurions intérêt à nous pencher assez rapidement sur l'impact de la LME et de la notion d'investisseur avisé que l'on a inscrit dans notre explicitement dans notre législation sur les orientations de la Caisse...
M. le rapporteur général - C'est le droit européen !
Mme Nicole Bricq - Certes, mais il conviendrait d'évaluer concrètement ces dispositions législatives, par le biais d'une proposition de loi sur les SPL et réaliser un véritable contrôle commun de l'impact sur les activités de la Caisse afin de déterminer comment elle réoriente l'allocation de ces actifs.
Il est évident que depuis deux ans, compte tenu de la crise économique et de la création du FSI et ce qu'on va lui demander pour La Poste, elle est particulièrement exigeante sur l'allocation de ses actifs et la rentabilité qu'elle en attend.
Je considère en tout état de cause qu'il a été fort utile de faire le point par rapport aux évolutions du droit.
M. le président - On n'avait aucun doute sur la qualité de gestion de la Caisse puisqu'elle est placée sous la surveillance de la commission de surveillance mais nous faisions l'hypothèse que ces participations dans les SEM pouvait être la conséquence de considérations historiques, de l'influence de tel ou tel élu territorial qui, à un moment donné, avait souhaité l'accompagnement de la Caisse, sous forme d'apport au capital. Nous avions le souvenir de la grande période d'aménagement où la CDC était présente partout et nous nous demandions si ces SEML étaient vraiment toutes sous contrôle et nous souhaitions avoir connaissance du pilotage exercé par la Caisse.
Au fond, ce que nous souhaitions correspondait à des travaux déjà engagés par la Cour des Comptes. Pour ne pas surcharger la Cour, nous avons orienté l'un de nos droits de tirage sur ce thème qui rejoignait les préoccupations de la Cour.
Nos objectifs étaient d'établir une typologie des SEM concernées ainsi qu'un bilan de la diversité de leur statut et de mesurer la valeur ajoutée apportée par la CDC. Je pense que la présence d'un représentant de la Caisse parmi les administrateurs peut être facteur de bonne gouvernance afin de ne pas laisser les élus territoriaux entre eux - sans vouloir être en aucune façon malveillant à leur égard.
Enfin, nous voulions porter une appréciation sur la nouvelle doctrine d'intervention de la Caisse, exposée par Michel Bouvard et Augustin de Romanet. http://www.senat.fr/senfic/marini_philippe92035t.html
M. le rapporteur général - Je voudrais revenir aux bonnes veilles SEM de l'origine, qui remontent à l'époque de François Bloch-Lainé. Ce réseau a été en effet constitué il y a une cinquantaine d'années et était fédéré dans la SCET.
On a pu critiquer certains comportements en matière de frais de gestion, et plus précisément de niveau de rémunération de dirigeants de ces sociétés. Il faut reconnaître qu'il peut être pratique, pour une collectivité territoriale, d'utiliser des organismes bénéficiant d'une beaucoup plus grande liberté de gestion pour latéraliser un vieux secrétaire général ou recruter des compétences difficiles à rémunérer avec la grille de la fonction publique territoriale.
J'espère que tout ceci relève du passé.
Mme Nicole Bricq - Et à Compiègne ? http://www.senat.fr/senfic/marini_philippe92035t.html
M. le rapporteur général - Compiègne n'a jamais eu ni SEM ni office d'HLM ! C'est un article de foi ! Rien de périphérique, rien de parallèle, que la collectivité locale pure et dure pour des raisons de simplicité de gestion et pour savoir ce qui se passe.
M. le président - Peut-être aussi parce qu'il existe une SEM départementale...
M. le rapporteur général - Il existait en effet une SEM départementale que je n'ai jamais fait travailler à Compiègne. J'étais vice-président du conseil de surveillance et j'y allais volontiers car c'était un lieu convivial et sympathique.
J'en reviens à ces facilités de gestion que l'on s'est parfois donné par l'utilisation d'outils comme les SEM. Ma question s'adresse à la Caisse des Dépôts, à la tutelle et à la Cour des Comptes : s'agit-il de sujets sur lesquels vous êtes vigilants ?
M. Augustin de Romanet - Absolument. Nous demandons aux représentants de la Caisse dans les conseils d'administration des SEM d'appliquer les mêmes règles éthiques et déontologiques que dans les fonds d'investissement financés par France Investissement ou dans tout autre organe de gouvernance.
Puis-je répondre définitivement par l'affirmative à votre question ? Dans les instructions que je donne, il n'y a aucun doute. Depuis mon arrivée à la tête de la Caisse, je n'ai jamais fait l'objet d'une sollicitation de la part d'un collaborateur ou d'un élu local pouvant donner à penser qu'il existe des abus. Si d'aventure cette situation existe, elle est rare. Les motivations industrielles de latéralisation auxquelles vous faites référence ont trouvé des substituts depuis -me semble-t-il.
M. Michel Bouvard - Mon département compte beaucoup de SEM. La présence de la CDC est une garantie, notamment en matière de rémunérations.
L'intérêt vient en partie de l'héritage historique qu'évoquait Philippe Marini : c'est un vivier pour la gestion des ressources humaines, de l'encadrement et une référence en matière de rémunérations en fonction de la taille de la SEM et du déroulement de carrière.
Le président de la commission des finances du Sénat se demande si, lorsque la CDC investit dans une SEM, il ne s'agit pas d'une subvention déguisée. Ne fait-on pas de la débudgétisation en quelque sorte ?
Tout d'abord, la commission de surveillance, depuis trois ans, fait la chasse à la débudgétisation. C'est pourquoi nous avons voulu supprimer les bonifications d'intérêt sur fonds d'épargne et que nous avons souhaité que toutes les conventions avec l'Etat passent devant la commission de surveillance. Cette logique existe également pour ce qui est de l'entrée au capital d'une SEM. Si elle existe, c'est parce qu'il y a un projet, des investissements qui correspondent à une logique de rentabilité. Les projets sont passés au crible par les équipes des directions régionales, de façon à nous assurer de la rentabilité des projets et du fait que nous ne sommes pas dans une logique d'investissement à fonds perdus ou de subvention. http://www.senat.fr/senfic/arthuis_jean83011j.html
M. le président - Les emplois sont-ils réels ?
M. Christian Babusiaux - Désormais, les rémunérations soient prises en charge par les SEM elles-mêmes, ce qui est sans doute plus sain qu'autrefois.
En second lieu, nous avons constaté que, dans certaines -ce n'est bien entendu pas le cas général - des comités de rémunérations examinent désormais la rémunération du directeur général de la société. Il va de soi que la pratique n'est pas généralisée. http://www.senat.fr/senfic/mezard_jacques08051v.html
M. le président - La parole est au rapporteur.
M. Jacques Mézard , rapporteur - Ce projet de loi, voté à l'unanimité par les deux chambres. Il ne s'agit pas de créer un instrument pour détruire les SEM mais d'un instrument complémentaire. Je ne voudrais pas que ce nouveau véhicule législatif soit dès l'origine criblé d'un certain nombre de projectile !
Nous avons en effet pris toute une série de précautions pour être en conformité avec la jurisprudence européenne et l'arrêt de 2008. Nous avons pris la précaution, en commission, de proposer toute une série de sécurisations : société anonyme, minimum de deux actionnaires, objet social par référence aux compétences des collectivités territoriales et des SPL qui ne pourront travailler que sur le territoire ce ces collectivités. Le potentiel d'action des SPLA a également été élargi.
La CDC déplore qu'avec les SPL, on va se priver de conseils avisés. Lorsqu'on se réfère à la page 25 du rapport de la Cour des comptes, on voit bien que ces conseils n'ont pas toujours été avisés ! Avec trois SEM sur ma communauté d'agglomération, j'ai pu constater que ce n'est pas toujours le cas !
On prétend également qu'on se priverait d'apporteurs de fonds propres, qu'on perdrait l'effet de levier du privé, que nous n'aurions pas de performances avec les SPL. Finalement, on nous indique que les collectivités locales pourraient conserver les SEM et les participations de la CDC. Je trouve que cette pression n'est pas pertinente.
Je crois que les SPL et les SPLA vont se développer davantage qu'on peut le penser à la lecture du rapport. En effet, il existe une facilité de mettre la concurrence à l'écart dans un certain nombre de dossiers lorsqu'elle amène des difficultés juridiques et techniques dans les petites et moyennes agglomérations. En outre, la vente de la moitié de Transdev à Veolia va amener un certain nombre de nos collectivités à changer les perspectives en matière de transport : il faudra assumer ces choix ! Je suis donc convaincu que les SPL vont apporter un plus.
Il existait un certain nombre d' imbrications de filiales autour de la SCET. Dans une SEM que je présidais, l'expert comptable était une filiale de la CDC -ce que l'on m'a caché durant plusieurs années - que le cabinet d'avocats avait des liens étroits avec la CDC -et j'en passe. Certes, il s'agissait de conseils très avisés mais au-delà des dividendes, cela apportait surtout une certaine rémunération !
Les SPL sont complémentaires est constituent un bon instrument ; elles ne remplaceront pas la totalité des SEM, ni les conseils avisés de la CDC mais permettra à nos collectivités de disposer d'un outil performant.
M. le président - Quel est l'avis de la Caisse ?
M. Philippe Braidy - Ce que vous dites va dans le sens de ce qu'a dit Augustin de Romanet. Les SPL ne sont pas les ennemies des SEM ; elles constituent un nouvel outil mais ne remplissent pas la même fonction. Elles sont détenues à 100 % par les collectivités territoriales, elles sont in house et doivent respecter un certain nombre de règles assez strictes.
On a dit qu'il n'existait pas d'effet de levier ; cela vaut pour la Caisse mais également pour les fonds privés. Il n'y a aucune raison de mettre la Caisse plus en avant que les autres sur ce point.
Il est vrai que l'introduction de ce dispositif va obliger les collectivités territoriales à s'interroger sur leur intervention dans l'économie mixte. Les SEM sont mises en concurrence, ce qui constitue en soi une sécurité par rapport aux comportements qui pourraient existe. Peut-être ces comportements sont-ils facilités lorsqu'il s'agit de sociétés détenues par les collectivités locales et in house que dans le cadre de sociétés mises en concurrence et avec actionnariat privé.
Il va donc y avoir deux catégories de sociétés ; certaines seront mises en concurrence avec l'actionnariat privé, par définition sur des marchés différents ; d'autres devront veiller à rester dédiées à des besoins spécifiques de leur actionnaire majoritaire.
Cela va obliger à repenser le paysage des SEM et à des rationalisations futures et à mieux discerner ce qui est du ressort de la SEM et du ressort de la SPL, ce qui va dans le sens de la stratégie que nous essayons d'avoir, en partenariat avec les collectivités territoriales.
Quant aux relations avec des filiales ou des prestataires de services de la Caisse ou la SCET, il y a maintenant dissociation entre actionnariat et filiales qui remplissent des prestataires de services qui, dans le groupe CDC, ont le droit d'exercer des activités concurrentielles et qui le font dans le cadre des règles de la concurrence vis-à-vis des SEM.
M. Michel Bouvard - Je ne veux pas qu'il y ait d'équivoques : il n'y a pas de vente par la Caisse d'une partie de Transdev à Veolia mais une fusion à parité entre deux sociétés, avec une présidence assurée par Veolia et une direction générale assurée par Transdev, un plan d'affaires commun, dans le respect des orientations prises par Transdev vis-à-vis des collectivités territoriales qui ont fait confiance à la CDC pour leur réseau de transport. Bien entendu, les collectivités sont libres, au terme de leur concession, de faire d'autre choix.
http://www.senat.fr/senfic/arthuis_jean83011j.html M. le président - C'est une opération de concentration probablement de nature à renforcer la concurrence.
M. Michel Bouvard - Elle ne renforça pas la concurrence mais elle prend en compte une concurrence qui devient beaucoup plus large dans le secteur des transports publics, à l'exception de l'Ile-de-France. De grands opérateurs étrangers arrivent maintenant dans le secteur du transport public dans notre pays -Chinois de Hong-Kong, Espagnols...
M. le président - Néanmoins, lorsqu'on fait des appels d'offres, les acteurs se raréfient. Nous avons quelques convictions libérales et nous nous interrogeons sur la logique de ces concentrations. Too big to fail ! Jusqu'où doit-on aller ? N'y a-t-il pas à un moment donné une logique financière qui tend à se substituer à la logique de service public ?
M. Jean-Paul Alduy - Je suis totalement convaincu que les SPLA vont se développer et vont prendre une grande part du marché aujourd'hui occupé par les SEM.
Pourquoi ? Les SEM, historiquement, représentaient une puissance financière et technique sans mise en concurrence. En contrepartie, les collectivités ne prenaient pas tous les risques.
Peu à peu, la puissance financière est partie, la mise en concurrence est arrivée, le réseau technique s'est étiolé et il n'y a plus de prise de risques ! Les collectivités garantissent tout et les opérations en compte propre d'une SEM sont rarissimes !
Pourquoi s'embarrasser d'appels d'offre compliqués alors qu'une SPLA permet d'agir plus vite ? De plus en plus, c'est la maîtrise d'un calendrier qui fait la réussite d'une opération, la plupart des collectivités locales préférant gérer de manière précise les calendriers.
Ne va-t-il donc pas falloir que les deux systèmes coexistent ? Les SEM prendront à nouveau des risques et les SPLA deviendront une émanation des collectivités pour faire fonctionner les services publics de façon plus active et surtout plus transparente pour mesurer les dépenses et les coûts ou mettre en place des mécanismes de comptabilité analytique, etc.
C'est une modernisation des services publics, avec mutualisation et extension des EPCI et de l'intercommunalité. Il faudra donc que les SEM recouvrent leurs fonctions de sociétés à risques, qui font des opérations en compte propre.
Il faut que cette orientation soit prise rapidement. Si l'on supprimer les SEM les unes après les autres, il n'y aura pas de complémentarité. On aura un système privé d'un côté et celui des SPLA de l'autre, sans économie mixte entre les deux !
Je suis un adepte de l'économie mixte à condition que le partenariat en question ne repose pas sur le fait que la collectivité prenne tous les risques avec, de temps à autres, des conseils avisés.
J'ai apprécié que le directeur général affirme que la CDC n'avait pas de logique de pouvoir. J'aimerais que ce message soit entendu à tous les niveaux de la CDC et qu'il n'y ait pas de pression qui laisse entendre que la Caisse ne sera pas là si les collectivités font des SPLA. Ce type de chantage peut en agacer plus d'un -dont je fais partie ! http://www.senat.fr/senfic/arthuis_jean83011j.html
M. le président - Nous arrivons au terme de cette audition. Elle a été extrêmement riche et interactive et est allée au-delà de nos espérances. Merci à chacun.
Au fond, puisqu'on n'est pas capable de réformer le code des marchés publics, il faut bien inventer des instruments. C'est ce qui est fantastique ! La prochaine fois, on demandera à la Cour une enquête sur le code des marchés publics !
Je dois maintenant vous interroger sur le point de savoir si ce rapport peut faire l'objet d'une publication... Vous êtes unanimes à donner votre accord et à souhaiter ardemment que cette enquête soit publiée. Merci.