Audition de Mmes Sophie KORNOWSKI-BONNET, présidente,
Monelle
MUNTLAK, directeur de l'unité de virologie,
et M.
Jean-François CHAMBON,
directeur de la communication et des affaires
publiques
du laboratoire Roche Pharma France
(mercredi 6 avril 2010)
M. François Autain, président - Nous accueillons Mmes Sophie Kornowski-Bonnet, présidente, Monelle Muntlak, directeur de l'unité de virologie, et M. Jean-François Chambon, directeur de la communication et des affaires publiques du laboratoire Roche Pharma France.
Conformément aux termes de l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, Mmes Sophie Kornowski-Bonnet, Monelle Muntlak et M. Jean-François Chambon prêtent serment.
Je vous remercie et je vous propose de commencer votre audition par un bref exposé liminaire. Vous répondrez ensuite aux questions que vous poseront le rapporteur, M. Alain Milon, et les commissaires ici présents.
Mme Sophie Kornowski-Bonnet - Roche a un engagement de plus de quarante ans en infectiologie. Nous avons travaillé dans la lutte contre la tuberculose, le paludisme, dans les antibiotiques, et maintenant la grippe. Nous avons eu un premier antiviral Roflual avant le Tamiflu. Puis est arrivé le Tamiflu.
La prise de conscience par les institutions d'un risque pandémique s'est développée en 2003 avec la grippe aviaire H5N1. Dès lors, l'émergence d'un risque pandémique dans l'esprit du grand public est apparue, et il y a eu une très forte médiatisation. A l'époque, l'OMS a demandé aux Etats du monde entier de se préparer à une éventuelle pandémie de grippe, d'établir des plans pandémiques, dont un point était la constitution de stocks d'antiviraux de Tamiflu.
On sait pourquoi on parle de pandémie. Il y a eu pas mal de débats dans la presse récemment. Il s'agissait d'un nouveau virus, la grippe A (H1N1) était la combinaison d'un virus porcin, aviaire et humain. Il se transmet d'homme à homme et il a envahi tout le globe. Le caractère de gravité n'était pas du tout présent dans la classification qui a été faite à l'époque. L'OMS a classé la grippe en phase 6, le 11 juin 2009. Dès avril, cela a commencé au Mexique où on s'est mis en état d'alerte, en se disant que la situation allait probablement évoluer.
Je vais vous parler plus précisément du Tamiflu. Il est commercialisé en France depuis 2002. C'est un antiviral spécifique de la grippe. Il agit en inhibant la neuraminidase, qui est un enzyme présent dans tous les virus de la grippe. Il inhibe la multiplication virale et la diffusion du virus dans l'organisme.
Il faut qu'il soit pris selon les modalités recommandées, c'est-à-dire au plus tard dans les quarante-huit heures. Le Tamiflu réduit d'un tiers les symptômes en durée et en intensité. Le patient gagne en moyenne un jour à un jour et demi sur les cinq jours de sa maladie. C'est une moyenne, mais certains patients bénéficient beaucoup plus de son action.
Il y a une réduction de 30 à 70 % des complications secondaires, telles pneumopathie et sinusites entre autres, selon le type de patients. Il y a une efficacité protectrice globale contre une grippe clinique qui peut aller jusqu'à 90 % chez les adultes et les adolescents ayant un étroit contact avec une personne infectée par le virus.
Pendant la pandémie, les patients ont été suivis très largement, et 90 % ont pu bénéficier des médicaments. Il y a eu très peu d'hospitalisations et aucun décès. Une vraie barrière antivirale s'est opposée au virus.
Le 23 octobre 2009, sur décision de la Commission européenne, Tamiflu a été aussi indiqué dans le traitement curatif et en prophylaxie post-exposition de la grippe du nourrisson âgé de moins de douze mois lors d'une pandémie grippale. L'EMA a aussi recommandé l'utilisation de Tamiflu chez la femme enceinte ou allaitante en cas de pandémie, le bénéfice pour la mère justifiant le risque théorique encouru par le nouveau-né.
Je vais revenir en arrière sur les relations entre Roche et les autorités françaises. Dès 2003, comme je vous le disais tout à l'heure, c'était le virus SARS. Puis, en 2005, avec la grippe H5N1, la menace d'une pandémie de grippe a mobilisé les autorités françaises qui ont pris la décision de doter la France d'un stock stratégique d'antiviraux. La quasi-totalité du stock français a été constituée entre les années 2004 et 2007.
A l'époque, le cabinet du ministre de la santé, M. Philippe Douste-Blazy, a été en contact avec Roche, par l'intermédiaire de la DGS, pour une première commande de Tamiflu. Le premier stock de gélules de 75 milligrammes a été conservé dans nos entrepôts de distribution jusqu'en 2009. Le stock a été progressivement augmenté, avec de la poudre de substance active. La dernière livraison de cette poudre a eu lieu en 2007. Le gouvernement français ayant décidé de constituer un stock à même de couvrir une population en cas de pandémie, avec un taux d'attaque estimé entre 30 et 50 %. Ce taux d'attaque est celui qu'on a entendu circuler au début de la pandémie. On a eu l'impression que la contagiosité du virus était vraiment similaire aux simulations qui avaient été faites à l'époque.
Le stock gouvernemental de 23 millions de doses a fait l'objet de discussions, puis de contrats sur la période 2004 à 2006. Les interlocuteurs de Roche ont été successivement le cabinet du ministre de la santé, M. Xavier Bertrand, la direction générale de la santé, l'Agence du médicament, et la Pharmacie centrale des armées, cette dernière particulièrement pour la présentation de la poudre dite ATI, destinée à être transformée en comprimés par la Pharmacie centrale des armées. L'intérêt de la poudre est qu'elle peut être gardée très longtemps. Elle peut être réanalysée. C'était une manière économique de faire un stock tout de suite disponible.
A cette époque, Roche avait, par contrat, autorisé la production de comprimés d'oseltamivir, et fourni les éléments techniques à cette production industrielle, en cas de pandémie. La France a été le premier pays à se doter de cette possibilité de fournir de la poudre au gouvernement. D'autres pays ont suivi, la Belgique me semble-t-il.
En 2009, les comprimés d'oseltamivir PG ont été fabriqués par la Pharmacie centrale des armées. Roche s'est mobilisé pour fournir toutes les aides techniques pour que l'AMM puisse être disponible très rapidement. Les réunions ont eu lieu au mois de septembre pour une AMM le plus vite possible. Après 2007, le stock est demeuré inchangé, à l'exception de 2009 où il y a eu un complément limité pour des dosages pédiatriques qui manquaient au tout début de l'alerte.
M. François Autain , président - Avez-vous eu une commande en 2010 ?
Mme Sophie Kornowski-Bonnet - Non.
M. François Autain , président - Il n'y a pas de projet.
Mme Sophie Kornowski-Bonnet - Dès le 21 décembre 2009, une fois que les comprimés ont été mis en circulation, nous sommes complètement hors du jeu. Il ne peut pas y avoir de double circulation.
M. François Autain , président - Le gouvernement n'a pas décidé de compléter le stock en 2010 ? En 2010, on ne touche à rien.
Mme Monelle Muntlak - Non.
Mme Sophie Kornowski-Bonnet - On ne touche à rien pour un bon moment.
M. François Autain , président - On attend la prochaine pandémie.
Mme Sophie Kornowski-Bonnet - Roche, dans sa mission au niveau mondial, a mis tout en oeuvre pour disposer de quantités suffisantes pour le monde entier. Dès 2003, il y avait eu le souci d'augmenter fortement la production. En quatre ans, Roche a multiplié par vingt sa capacité de production au niveau mondial. Elle a fait un don à l'OMS de 10 millions de traitements déblocables très rapidement pour les urgences. Quand cela démarre, cela démarre partout, et dans l'urgence la plus totale. On a mis en place beaucoup de contrôles pour maîtriser la qualité et la sécurité de la production.
Dans cette pandémie, nous avons eu le risque de contrefaçons circulant sur Internet. Tout ce qui est contrôle qualité doit être à un niveau encore plus fort en période de risque de pandémie. Il faut baser toutes les décisions sur l'information médicale et scientifique disponible, car il faut un monitoring permanent du virus pour savoir s'il est toujours sensible au traitement. C'est vraiment l'idée d'une cellule de crise quasiment au jour le jour.
En résumé, il s'agit de tout mettre en oeuvre pour répondre aux besoins en matière de production, d'information et de suivi. On parle de la pharmacovigilance, car il faut regarder de très près les effets secondaires.
Pour la France, la situation était très inquiétante depuis le mois d'avril, et elle l'est restée jusque tard dans l'année. Nous avions encore des discussions au mois de septembre dans la cellule de crise. A l'époque, il y avait énormément de patients dans les services d'urgence. On se disait que si la tendance se poursuivait, les prévisions étaient vraiment très inquiétantes. Maintenant, on dit que la grippe n'était pas si grave.
En interne, nous avions des discussions sur le patient de Saint-Etienne et son poumon. Nous en avions pour chaque patient, et nous traquions le risque d'une résistance. Il fallait que nous soyons au courant de ce qui se passait. C'est seulement en fin d'année que nous avons commencé à dire que ce n'était pas aussi grave que cela aurait pu l'être.
Au niveau de Roche France, en relation très étroite avec la maison-mère, nous nous sommes assurés que les professionnels de santé avaient la bonne information pour l'usage de Tamiflu. Nous nous sommes toujours mis en ligne avec les autorités de santé. Celles-ci ont plutôt limité les indications. Nous avons toujours voulu être en écho de ce qu'elles disaient de façon à ce que les médecins, en bout de chaîne, n'aient pas à se demander comment prescrire. Nous avons toujours été en écho des recommandations du ministère de la santé.
Nous avons organisé des commandes de produits en prévision d'une nécessité d'ajustement. C'est arrivé pour le produit pédiatrique. Nous avons mobilisé les ressources de notre maison mère pour être capables de répondre si nécessaire. Nous avons mis en place la pharmacovigilance et assuré la veille virologique. Nous étions vraiment au cas par cas. Si un patient était mort, il fallait savoir s'il avait été sous Tamiflu et dans quelles circonstances.
Nous travaillons beaucoup avec les cancérologues et les néphrologues. Ces professionnels de santé avaient beaucoup de questions sur les populations les plus à risques : les patients immunodéprimés, les patients en chimiothérapie. Que faire s'ils contractent une grippe ou si leurs proches l'ont ?
On a mis en place une cellule d'information médicale pour répondre aux questions des médecins. Il me semblait nécessaire que nous, laboratoire, qui commercialisons le Tamiflu, nous soyons capables de dire ce qu'il faut faire si un patient est en insuffisance rénale ou autre. Il y a eu beaucoup de recherches et de discussions entre nous pour savoir la bonne recommandation.
Roche a des relations avec les experts qui sont régies par un guide de DMOS. On a une grille tarifaire et une grille d'organisation de nos relations avec les experts. Notre grille tarifaire est validée par le Conseil national de l'Ordre. Nous ne sommes pas obligés de le faire, mais nous avons souhaité le faire, car nous souhaitons être complètement transparents. Quand on travaille avec des experts, on suit exactement cette grille.
Personnellement, j'ai assisté à deux ou trois réunions pendant la pandémie pour discuter sur la manière dont cela pouvait se passer, sur la manière dont cela pouvait évoluer, de façon à pouvoir être mobilisé et répondre aux besoins.
Il faut avoir à l'esprit que les informations étaient multiples. Elles venaient de différents canaux. On n'avait pas de ligne directe avec les autorités de santé. Chacun essayait de gérer comme il le pouvait. Nous étions obligés de nous dire : il faut que nous soyons présents avec des médicaments, de l'information s'ils en ont besoin, de manière à gérer l'envoi en urgence de médicaments dans des endroits où il n'y en avait pas. Il faut savoir que ce n'était pas si évident pour un patient de se procurer un médicament à prendre dans les quarante-huit heures, en pleine panique. Nous répondions aux urgences, aux cas pédiatriques.
Nous avons eu, à un moment, une discussion sur la manière de reconstituer des solutions pour les enfants. Nous avions peu de formes pédiatriques ; nous avions surtout des formes en gélules. La suspension prend vingt-cinq étapes de fabrication de plus. Roche avait privilégié la gélule, plus facile à réaliser et de péremption plus longue. Tous les patients ne peuvent pas avaler des gélules. Nous avons été confrontés à beaucoup de questions techniques sur la manière de reconstituer, comment faire pour un enfant en bas âge, quelle dose, etc.
Je voulais vous parler de quelque chose qui a été assez controversé dans la presse : la publication du British Médical Journal . Roche a été approché non pas par le BMJ , mais par la télévision anglaise qui voulait des informations sur les dossiers de développement de Tamiflu pour la Cochrane. Nous voulons bien parler aux chercheurs mais parler à la télévision nous intéresse moins.
Nous sommes remontés de nous-mêmes vers la Cochrane en disant : « Nous voulons bien, mais il est nécessaire de signer un contrat de confidentialité, car ce sont des données patients individuelles et nominatives dans les essais cliniques. Nous nous engageons auprès des patients à ne pas diffuser ces informations partout, et en particulier sur Internet ou dans la presse. Vous, la Cochrane Review, vous devez signer que vous allez respecter cette confidentialité ». Ces gens-là ont refusé.
C'est la raison pour laquelle ils ont fait leur travail sans insérer des données qui sont toutes incluses dans les AMM, toutes prises en compte par l'EMA. Toutes les publications de Roche et tous les effets cliniques sont disponibles sur roche.tride.com depuis décembre. N'ayant rien à cacher, nous avons vraiment voulu que toutes ces informations soient vérifiables par tout le monde.
Toutes les données relatives au fait qu'il y a une diminution des syndromes bronchiques, des infections, de l'utilisation des antibiotiques, ont été intégrées dans les AMM européennes et sont bien présentes.
On a aussi beaucoup parlé des résistances. Nous avons entendu l'inquiétude au début de la pandémie, à savoir : si on utilise trop de Tamiflu, des patients vont développer une résistance. Quand un patient n'a pas de virus, il ne peut pas développer une résistance, puisque le virus n'est pas présent chez lui. Il y a effectivement des cas de résistance qui sont de 0,4 % pour les adultes, et de 5,4 % chez l'enfant. Il faut savoir qu'il n'y a pas plus de résistance dans les pays qui utilisent énormément de Tamiflu, comme au Japon, où jamais aucune souche résistante n'a été développée dans ce pays. Treize souches résistantes ont été identifiées pendant la pandémie. En général, les patients qui ont des résistances, c'est un virus qui ne peut pas se propager, et nous avons constaté que c'était bien le cas.
Nous avons été inquiets et nous nous sommes posé des questions pour chaque patient. La bonne nouvelle à laquelle nous pensions s'est confirmée : le virus clinique, qui n'est pas résistant au début de la pandémie, ne l'est pas devenu au cours de celle-ci. Le médicament a été utilisé pendant la pandémie, à pleine dose et en dose curative. L'Agence a recommandé une utilisation préemptive, c'est-à-dire à pleine dose dans un souci d'éviter des résistances. En revanche, il y a un risque pour un patient malade qui prendrait une dose insuffisante, mais cela ne s'est pas produit pendant cette pandémie.
Il y a un élément important sur ce virus de la grippe par rapport à ceux auxquels on est familier. En général, la grippe vient plus violemment et dure assez peu longtemps. Nous avons eu le cas pour le patient de Saint-Etienne. Des patients ont été atteints au début, puis c'est devenu de plus en plus grave au cours du temps. C'était un vrai danger : les patients n'avaient pas forcément le réflexe d'aller voir tout de suite le médecin. On se demande si la contagiosité n'a pas duré plus longtemps que ce qui est traditionnel dans la grippe. Je vous parle d'un aspect scientifique dont nous discutions, car nous nous demandions ce qu'il allait se passer.
Au cours des mois de décembre et janvier, on s'est rendu compte que le pic était derrière nous. Nous sommes encore en phase pandémique. Je pense qu'à un moment ou à un autre, la prochaine étape sera déclarée.
M. François Autain , président - Je voulais vous indiquer à propos de la publication du Groupe Cochrane dirigée par M. Thomas Jefferson qu'il s'agit d'une méta-analyse. Vous avez expliqué les raisons pour lesquelles vous avez cru bon ne pas devoir communiquer les essais auxquels vous aviez procédé concernant ce médicament.
Je respecte tout à fait les raisons que vous avez invoquées. Vous avouerez, malgré tout, que cela porte peut-être un certain ombrage sur les résultats de cette étude parue dans le British Medical Journal . Cela pose tout de même un certain nombre de questions en ce qui nous concerne. Pourquoi le laboratoire Roche n'a-t-il pas voulu communiquer ces essais ? Vous avez tout à l'heure indiqué la volonté de préserver l'anonymat. A mon sens, on peut le préserver assez facilement. Cela ne me paraît pas être une cause valable.
Les plus malveillants pourront dire qu'ils n'ont pas voulu communiquer ces essais, parce que ces essais n'étaient pas favorables au médicament. Vous voyez ce que je veux dire. C'est peut-être faux, mais cela prête en tout cas à une telle interprétation.
Mme Sophie Kornowski-Bonnet - J'entends le point. Deux éléments me semblent importants. Les entreprises de médicaments sont là pour proposer des médicaments qui doivent être efficaces. A chaque fois qu'on a un soupçon et encore plus une évidence qu'un médicament n'est pas efficace, on doit être les premiers à signaler la situation, pandémie ou pas pandémie. Cela paraîtrait complètement non éthique, cela paraîtrait même remettre en jeu notre raison d'exister, que de défendre un médicament pour lequel les essais cliniques montreraient qu'il n'est pas efficace. Cela va contre la mission que nous avons. Nous prêtons serment quand nous travaillons dans l'industrie. Nous nous engageons pour l'efficacité et la tolérance de nos médicaments.
Un autre élément me paraît important : il y a eu d'autres discussions sur l'identité et l'anonymat des patients. Même en situation de crise, on doit faire en sorte de ne pas exposer des gens qui n'ont pas souhaité l'être. Quand nous faisons des essais cliniques, les patients nous font confiance. Ils signent un consentement. Nous nous engageons à préserver l'anonymat. Surtout que nous n'avons pas été contactés par Cochrane mais par la télévision. Je pense qu'il faut se réjouir qu'un laboratoire mette une barrière, surtout que nous avons donné et publié les informations. Nous avons nous-mêmes contacté Cochrane, ce n'est pas l'établissement qui nous a contactés.
M. François Autain , président - Ce n'est pas Cochrane qui vous a contactés. Cochrane n'a pas demandé ces essais.
Mme Sophie Kornowski-Bonnet - Roche est venu volontairement proposer la confidentialité pour que ces essais puissent être analysés.
M. François Autain , président - Roche n'a pas refusé de communiquer ces essais à Tom Jefferson.
Mme Sophie Kornowski-Bonnet - Face à un refus de confidentialité, Roche n'a pas souhaité communiquer.
M. François Autain , président - Nous allons auditionner M. Thomas Jefferson. Il est intéressant que nous sachions exactement comment cela s'est passé, pour que nous puissions l'interroger.
Mme Monelle Muntlak - Pour avoir des données, le groupe Cochrane avait à demander directement à Roche comment les obtenir pour les essais qui n'étaient pas publiés. La discussion porte sur ces essais qui font partie du dossier de l'AMM, mais qui ne sont pas publiés.
Il suffisait que le Groupe Cochrane demande directement à Roche comment les obtenir. M. Thomas Jefferson était, dans un temps un peu antérieur, investigateur pour Roche. Il connaissait très bien les gens avec qui il avait travaillé. Il aurait très bien pu le demander. Comme ils ne les ont pas eus facilement et directement, ils sont allés sur une chaîne télévisée anglaise. C'est à se demander pourquoi.
Au lieu de s'adresser à Roche directement, ils sont allés sur une chaîne de télévision pour dire que Roche ne voulait pas donner ces essais. En réalité, toutes les données sont accessibles aux groupes de recherche. On les a toujours données. Une autre donnée est intéressante. Dans le même BMJ , la réponse de Roche a été publiée et elle explique tout cela. Nous pouvons vous la communiquer.
M. François Autain , président - Vous comprenez que nous soyons assez curieux sur tous ces problèmes car l'efficacité de ce médicament fait l'objet d'une controverse, même chez les experts. Il est important que nous soyons informés sur tous ces éléments d'autant plus - c'est une autre question concernant le niveau de preuves qui est produit par votre laboratoire concernant l'efficacité du Tamiflu, non plus dans la grippe saisonnière mais dans la grippe H1N1 - qu'il semblerait que les preuves que nous avons ne sont pas d'un niveau très élevé, susceptibles en tout cas de satisfaire les plus exigeants. Qu'en est-il exactement ?
Mme Monelle Muntlak - Le dossier a été développé sur la grippe saisonnière, car pour faire des dossiers, il faut des essais cliniques. La grippe H1N1 ayant fait son apparition au mois de mai, il était hors de question d'avoir des preuves et des essais cliniques sur ceux de la grippe saisonnière.
L'éventualité de l'efficacité des produits est une extrapolation liée au fait que, comme le produit agit en inhibant la neuraminidase du virus, il est extrapolable qu'il va fonctionner sur tous les virus comme sur ceux qui ont été testés, c'est-à-dire ceux de la grippe saisonnière. Il n'y avait, au moment où la crise a commencé, aucun essai qui puisse permettre de le prouver formellement.
En revanche, des publications sont intervenues depuis, que ce soit sur la femme enceinte aux USA, au Mexique, en Argentine ou au Chili. L'InVS même a publié des essais montrant que, lorsque les patients sont traités suffisamment tôt par le Tamiflu, ils avaient plus de chance soit de ne pas être hospitalisés, soit d'avoir une mortalité inférieure.
M. Alain Milon , rapporteur - Vous avez parlé du Tamiflu en poudre acheté par la Pharmacie centrale des armées. Pourriez-vous nous dire ce que représentent les stocks de l'État dans le montant total des ventes de Tamiflu en France ? D'autres Etats ont-ils constitué des stocks de cette spécialité ? Y a-t-il eu un moment d'inquiétude chez vous sur la capacité de production et donc d'approvisionnement des antiviraux contre la grippe ?
Mme Sophie Kornowski-Bonnet - Les stocks de l'État étaient constitués dès 2003.
M. Alain Milon , rapporteur - Il ne les a pas gardés.
Mme Sophie Kornowski-Bonnet - Si, ils les ont gardés.
Mme Monelle Muntlak - Vous parlez de 2009 ?
M. Alain Milon , rapporteur - Oui.
Mme Monelle Muntlak - Ils ont envoyé une partie des quantités qu'ils avaient en stock au début de la crise au Mexique. Ils ont également fait partir certaines quantités de produits dans les ambassades des pays les premiers touchés par le virus H1N1. Ensuite, pendant la pandémie, en France, pour des raisons qu'il faudra peut-être discuter avec eux, ils ont considéré qu'il fallait donner plutôt la priorité à la vaccination, c'est-à-dire que la vaccination constituerait probablement une mesure barrière plus intéressante que de traiter tous les patients.
L'idée était de surveiller les patients à risques. Le produit n'était prescrit que chez les patients à risques. Au moment où le pic s'est développé, on s'est aperçu qu'il y avait un bénéfice populationnel en traitant les patients très précocement. A ce moment-là, ils ont eu leur AMM pour leurs comprimés, et ils ont libéré le stock sous forme de comprimé à 30 milligrammes PG, fabriqués à partir de la poudre en question.
M. Alain Milon , rapporteur - Le directeur général de la santé, lors d'une de ses auditions, a affirmé que les indications pour l'usage du Tamiflu sont plus réduites en France que dans d'autres pays. Est-ce exact, selon vous ? Quelles indications retenues dans d'autres pays ne l`ont pas été en France ? Pourquoi ?
Mme Monelle Muntlak - Je lis le compte rendu de l'audition de M. Didier Houssin. Je pense qu'il y a une erreur en termes d'indication. En France, le produit est indiqué en curatif dans la grippe saisonnière et en prophylaxie. Je pense qu'il s'agit d'un lapsus et qu'il a voulu parler de remboursement. Ce n'est pas remboursé dans toutes les indications mais, en revanche, les indications sont extrêmement larges sur des populations adultes et l'enfant à partir d'un an, en grippe saisonnière. L'enfant plus petit a été considéré uniquement pour la pandémie. Je ne pense pas qu'il y ait moins d'indications en France qu'ailleurs.
L'AMM du produit est pour tous les patients. En revanche, au début de la pandémie, il y avait de nombreuses discussions quant à l'opportunité et au bien-fondé de l'utiliser de manière extrêmement large. Effectivement, les experts avec qui nous étions en relation étaient hésitants. Au début, on ne connaissait ni la clinique exacte de cette forme de grippe ni le virus. Ils ne voulaient pas inonder le territoire avec le Tamiflu. Ils ont préféré le réserver au début aux sujets à risques. Par la suite, on s'est aperçu que la situation pouvait s'aggraver au cours du temps, que si on ne prévoyait pas de le prescrire dès le début des symptômes, il serait trop tard, et qu'il y avait un bénéfice probable.
M. Alain Milon , rapporteur - L'exemple de la pratique suivie au Chili a incité le Comité de lutte contre la grippe à recommander une extension de l'indication du Tamiflu à titre préventif, qui a été validée par l'AFSSAPS. Les Laboratoires Roche ont-ils été consultés sur l'exemple et ses conséquences en termes d'indications ?
La pratique suivie au Chili résulte-t-elle d'un dialogue entre les autorités chiliennes et Roche ?
Mme Monelle Muntlak - Plutôt que préventif, je dirai préemption. Le problème qui s'est posé avec les experts et dans les discussions est le suivant : on a une indication prophylactique. Cela signifie la prise de traitement dès que vous croisez quelqu'un qui a la grippe. Si vous le prenez, dans le dossier de l'AMM, en grippe saisonnière, vous êtes protégé à 95 %. Sur ce virus qu'on connaissait mal, les experts étaient hésitants sur cette question de demi-dose.
Il s'agit en fait de demi-dose dix jours, au lieu de pleine dose cinq jours. Pour les femmes enceintes, ils pensaient que l'enfant n'avait pas de défenses immunitaires suffisantes, et ils trouvaient que la demi-dose en prophylaxie n'était pas forcément une bonne idée. Ils ont émis la recommandation que vous avez vue. Chez le petit bébé, il fallait donner une dose préemptive, c'est-à-dire une pleine dose pendant cinq jours pour éviter d'avoir une résistance.
J'ai discuté par la suite avec les virologues. Ils vous diront qu'ils étaient étonnés de voir le temps pendant lequel le virus restait présent dans l'organisme, chez un certain nombre de malades même traités précocement. C'est un virus qui n'a pas encore tout dit.
M. François Autain , président - Toutes ces prescriptions préemptives devraient faire l'objet d'une extension de l'AMM. Dans ces cas-là, la démarche pour un laboratoire comme le vôtre est de déposer une demande d'extension d'AMM auprès de la Commission d'AMM. Or, il semble bien que cette procédure n'ait pas été respectée. Je voudrais savoir pour quelles raisons.
Mme Monelle Muntlak - Pas pendant la pandémie. Pour déposer une demande d'AMM, il faut des essais cliniques. En ce moment, une étude internationale est faite chez le nourrisson. La France a des investigateurs français, ce qui probablement amènera à une extension d'AMM. L'AMM a été considérée comme exceptionnelle dans la pandémie pour le bébé.
M. François Autain , président - Une extension d'AMM n'a pas été donnée par la Commission d'AMM, mais elle a été donnée par l'AFSSAPS. Elle a ensuite été transmise aux médecins par la direction générale de la Santé, comme s'il s'agissait d'une extension d'AMM, fondée sur des essais cliniques dignes de ce nom.
Mme Monelle Muntlak - L'AFSSAPS et la commission d'AMM, c'est la même chose.
M. François Autain , président - On ne peut pas réduire l'AFSSAPS à la commission d'AMM.
Mme Monelle Muntlak - Nous étions observateurs. Nous discutions avec les experts pour comprendre.
M. François Autain , président - Vous étiez acteurs, vous n'avez pas déposé de dossier.
Mme Monelle Muntlak - Ce n'était pas la discussion, en revanche on suivait les affaires, on discutait avec les experts pour comprendre notre produit, comprendre ce qui se passait et comprendre les recommandations. Nous avons des visiteurs médicaux qui vont voir les médecins. Il faut qu'ils soient capables d'expliquer le bon usage des produits en fonction des recommandations. Nous avions convenu avec l'AFSSAPS qu'on pouvait remettre la fiche de recommandation.
M. François Autain , président - De toute façon, vous n'aviez pas à communiquer. Le directeur général de la santé avait communiqué directement avec les médecins. Il avait fait votre travail. Vous n'aviez aucune inquiétude sur ce plan. Je voulais simplement avoir confirmation qu'il n'y avait pas eu de dépôt de dossier. C'est en cours, il faudra donc une extension d'AMM.
M. Alain Milon , rapporteur - Je voudrais revenir sur les liens d'intérêts. Quelle est la nature des relations entre Roche Pharma, les autorités publiques françaises, s'il y en a, et les différentes instances d'expertise publiques que vous avez, en particulier pour le Tamiflu ? Quels liens votre laboratoire entretient-il avec l'OMS ?
Mme Monelle Muntlak - Nous avons les relations habituelles avec l'Agence du médicament, l'EPRUS parce qu'on leur a vendu du produit. Nous avons des relations avec la DGS à partir de 2003.
Mme Sophie Kornowski-Bonnet - En période de pandémie, il n'y a pas beaucoup de contacts entre les laboratoires et les autorités de santé. Les réseaux de santé sont très mobilisés entre les ministères de la santé et de l'intérieur, etc. Il n'y avait donc pas de dialogue. Nous avons essayé de donner de l'information ou de connaître les questions sur le médicament. Nos interlocuteurs privilégiés étaient l'AFFSAPS, car cela passe par la pharmacovigilance. Les cellules de crises étaient internes.
Mme Monelle Muntlak - Nous n'avions pas de ligne directe avec les autorités. Nous étions parfois même ennuyés de ne pas pouvoir leur demander leur avis.
Au niveau de l'OMS, pour répondre à votre dernière question, nous n'avons pas en France de liens d'intérêts quels qu'ils soient. En revanche, au niveau international, on a mentionné tout à l'heure les liens avec l'OMS qui sont liés à la production et à la fourniture du produit aux pays défavorisés. On a donné 10 millions de traitements à l'OMS pendant la pandémie. Sinon, nous sommes extrêmement proches d'eux pour essayer de surveiller, au niveau international, les résistances. Il y a un observatoire international des résistances.
M. François Autain , président - Une question se greffe sur celles du rapporteur. Vous avez montré que vous étiez en avance par rapport à d'autres laboratoires concernant les liens que vous pouviez avoir avec les experts. Je n'ai pas pris connaissance de ce document, mais je le ferai. Verriez-vous un inconvénient à ce qu'on prévoie que les laboratoires, comme ils le font pour les associations qu'ils subventionnent, soient dans l'obligation de publier la liste d'experts qu'ils rémunèrent et la hauteur de leur rémunération ? C'est une question d'actualité.
Dans une interview récente, le président du LEEM a indiqué qu'il était hostile à cette éventualité, au motif que cela pourrait nuire à la concurrence entre les laboratoires. Je n'ai pas l'interview sous les yeux. Celle-ci a été publiée dans le dernier numéro de L'Express . La question est simple : verriez-vous un inconvénient à une telle disposition qui apporterait plus de transparence dans les liens qui peuvent exister entre les laboratoires et les experts et qui permettrait aux citoyens d'interpréter les jugements qui peuvent être portés par ces experts quand ils sont sollicités par les pouvoirs publics ?
Mme Sophie Kornowski-Bonnet - Les experts sont supposés faire les déclarations de liens d'intérêts. C'est dans leur mission. Si nous avons des listes avec des barèmes officiels et que les CNO approuvent systématiquement les barèmes des entreprises, on peut arriver au même résultat.
Je rejoins la position du président du LEEM qui dit que si on dit tout ce qu'on fait, à un moment on fait tous la même chose, et les sociétés qui sont un peu plus créatives ne gagneront plus rien. Je crois qu'il faut préserver la compétitivité de l'industrie pharmaceutique.
La France en a besoin aussi en termes d'investissement et de développement de sa recherche et de sa science. Il ne faut pas « casser » une industrie dans un pays, au nom de la transparence. Faire que ce que nous faisons soit obligatoire pour tout le monde est vraiment la bonne méthode. Je pense d'ailleurs qu'on va de plus en plus dans cette direction, car la transparence est valorisée. Les experts préfèrent aussi travailler avec des sociétés qui mettent les choses sur la table et qui n'ont pas de liens à cacher.
Mme Marie-Christine Blandin - Les stocks gérés par l'EPRUS se sont empilés année après année. Nous avons plusieurs dizaines de tonnes arrivant à leur stade de péremption. L'AFSSAPS a diligenté une étude qui a reclassé la péremption. Le 2008 est devenu périmé en 2010, le 2010 en 2012, et ainsi de suite.
Quelle est la réaction du fabricant sur le fait que l'on remet deux ans de plus à quelque chose qui est périmé ? Par rapport à l'argent public, notre réaction est de dire que c'est bien, car cela évite de vous en recommander.
En revanche, cela ne peut qu'interroger par rapport à la sécurité des patients. Cela peut aussi interroger notre comportement individuel : nous jetons des médicaments que nous pourrions peut-être conserver deux ans de plus. Quelle est la réaction du fabricant ? Avez-vous été associés à cette expertise sur la pérennité supplémentaire ? Cela engage ou désengage-t-il votre responsabilité ?
Mme Monelle Muntlak - Je ne dirai pas qu'on a été associés. Nous sommes à l'origine de la prolongation de l'extension de la péremption. Vous savez bien comment se détermine la péremption des produits : on mesure la stabilité du premier comprimé qui existe. Au bout d'un an, il a un an. Au bout de deux ans, il a deux ans, etc.
En ce qui concerne les gélules de Tamiflu, il a été démontré grâce aux études relatives à la stabilité, qu'elles étaient toujours stables au bout de sept ans. C'est la raison pour laquelle il a été dit à tous les gens qui en avaient acheté que, dans la mesure où le produit a été conservé dans les conditions standardisées de conservation, la péremption pouvait être prolongée.
Concernant la poudre, il suffit de la réanalyser, cette dernière n'ayant pas les mêmes contraintes que les gélules. Ce qui rend la gélule périmée est la cohabitation de la poudre dans l'enveloppe. Alors que la poudre seule, l'API, comme elle est appelée par les techniciens, nécessite seulement d'être réanalysée et de la requalifier en termes de péremption. En théorie, il n'y a eu aucune décision qui n'ait pas été directement inspirée par le fabricant.
Une fois emballées, les boîtes ont une date de péremption. Commercialement parlant, on ne va pas désétiqueter et réétiqueter sur la péremption, puisqu'on calcule nos stocks, de façon à pouvoir les renouveler régulièrement sans avoir à changer d'étiquettes. Nos blisters indiquent eux-mêmes la date de péremption. Il serait très compliqué de changer. En revanche pour les stocks gouvernementaux, il me semble que s'ils ont été conservés dans les conditions... Je n'ai pas regardé exactement ce qui a été réévalué par l'AFSSAPS, mais il y a de quoi, à mon avis, rallonger la péremption.
M. Bruno Gilles - Je voudrais revenir d'un mot sur le cas du Chili. Il paraît intéressant de constater, comme vous l'avez dit, Madame, dans votre introduction, qu'il n'y ait eu aucun décès. Pourrait-on savoir combien de personnes ont été traitées et ce qu'elles représentent en termes de pourcentage par rapport à la population globale du Chili ?
Mme Sophie Kornowski-Bonnet - Je n'ai pas le taux d'attaque au Chili, mais j'ai la publication, je pourrai vous la laisser.
Mme Monelle Muntlak - Voici des chiffres : 27 308 patients ont consulté ; 10 048 cas de grippe ; 67 % des patients ont consulté aux urgences. Le délai d'apparition entre les symptômes et le diagnostic était de un jour ; 99,7 % des personnes ont reçu un traitement antiviral ; 2 % des cas ont été hospitalisés, 32 % des patients avaient des facteurs de risques ; 11 patients ont été en soins intensifs ; aucun décès.
M. Claude Domeizel - Le président a ouvert une parenthèse, et je ne savais pas quand elle allait être fermée. Vous avez répondu que vous ne vouliez pas donner de renseignements, car il s'agissait de données personnelles. Les données personnelles ne devraient pas exister, si vous avez l'autorisation de la CNIL.
Mme Sophie Kornowski-Bonnet - Ce n'est pas une autorisation en France. Ce n'est pas la filiale France. Ce ne sont pas les gens qui sont ici qui ont été impliqués dans le dialogue sur le BMJ . La CNIL relève du droit français.
Mme Monelle Muntlak - Dans les données qui sont nécessaires à l'établissement du dossier, certaines ont été publiées et d'autres pas. Ce qui a servi de base est une méta-analyse d'une dizaine d'études. Chaque étude, prise séparément, n'a pas été publiée de façon séparée. En revanche, pour avoir accès à cette base de données, il faut avoir une autorisation. Aujourd'hui, il y a un mot de passe. Quand on demande le mot de passe à Roche, on l'a. Pourquoi n'ont-ils pas eu accès aux données ? Les données ne sont pas anonymisées.
M. Claude Domeizel - Pourquoi ?
Mme Monelle Muntlak - Elles ne sont pas exploitées. Au niveau international, vous avez toutes les données dans une base de données. Elles ne sont pas retraitées pour être publiées. Au départ, quand ils viennent chercher des données pour retravailler sur cette base, il faut une autorisation spéciale. Celle-ci est facile à obtenir quand on est un groupe de recherche comme le groupe Cochrane.
M. François Autain , président - Le danger de refuser de communiquer des essais est que les esprits malveillants, dont je ne fais pas partie, vous reprocheront de ne pas les fournir, parce qu'ils ne sont pas favorables à votre médicament. C'est arrivé par le passé, dans d'autres firmes.
Mme Monelle Muntlak - Il y a beaucoup de produits pour lesquels vous avez dans le dossier d'AMM des données référencées dossiers d'AMM. Elles ne sont pas publiées. Un dossier d'AMM, quand il arrive, ne serait-ce qu'à l'Agence française, représente des tonnes de données. Une partie des essais est publiée. Une autre n'est pas publiée. C'est le cas de tous les produits.
M. François Autain , président - Je parle des essais qui ne sont pas dans le dossier AMM.
Mme Sophie Kornowski-Bonnet - Ce ne sont pas ceux dont on parle. Ceux qu'il n'a pas réussi à avoir sont ceux qui ont contribué aux dossiers, mais qui n'ont pas fait l'objet de publication.
M. François Autain , président - Ils étaient dans le dossier.
Mme Sophie Kornowski-Bonnet - L'EMA a pris la décision d'enregistrer le produit sur la base de l'ensemble des données.
Mme Monelle Muntlak - C'est pourquoi j'étais revenue sur le fait que toutes les données avaient été intégrées.
M. François Autain , président - Ce sont des dossiers auxquels on peut avoir accès. Nous essaierons d'y voir plus clair.
Mme Monelle Muntlak - Je vous recommande de lire la réponse de Roche dans le BMJ , car cela permet de clarifier ce point.
M. Claude Domeizel - Ces données ont été utilisées par des institutions françaises.
Mme Monelle Muntlak - Non, nous sommes sur le dossier international. Ce n'était pas en France.
Mme Sophie Kornowski-Bonnet - Nous parlons d'un dossier international, nous ne parlons pas d'un dossier français. C'est l'Europe qui donne l'AMM et la France applique l'AMM.
Mme Monelle Muntlak - La France n'exploite pas ses données.
M. François Autain , président - N'ayant plus de question, il nous reste à vous remercier beaucoup d'avoir répondu aux questions que nous vous avons posées.